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et l'art de gouverner. Historiographes de l'empire, leur devoir est d'écrire les événemens les plus remarquables, et qui méritent le mieux d'être transmis à la postérité. Leur profession consiste à étudier sans cesse, et à composer des livres utiles à leur pays; pays; ils sont, à proprement parler, les gens de lettres de l'empereur. Il s'entretient avec eux des sciences et des arts, et souvent il choisit parmi eux des ministres d'état, et les présidens des cours souveraines. Les membres de cette académie sont en général très-respectés.

Tous les mandarins sont pris parmi les lettrés. Il y a en Chine trois degrés de littérature, savoir : celui des bacheliers, celui des licenciés, et celui des docteurs. Pour être élevé aux moindres charges du mandarinat civil, un lettre doit avoir passé les deux premiers. Le nombre de ces mandarins de lettres, répandus dans tout l'empire, s'élève à près de quinze mille.

CHAPITRE II.

Autorité, devoir, costume, et cortège d'un grand - mandarin. Mandarins d'armes. Forces de la Chine.

LA facilité avec laquelle le mandarin d'une ville du premier ordre en gouverne la nombreuse population, excite l'admiration. Il lui suffit, pour se faire obéir avec la plus grande promptitude, de publier ses ordres sur un simple carré de papier, scellé de son sceau, et affiché aux carrefours des villes et des villages. Le peuple, qui le regarde comme le représentant de l'empereur, ne lui parle qu'à genoux lorsqu'il rend la justice dans son tribunal. C'est lui qui juge tous les procès. Il fait punir, de la bastonnade, celui des plaideurs qu'il croit coupable, et prononce la peine de mort contre les criminels qui la méritent. Mais, quelque

redoutable que soit son autorité, il ne peut guère se maintenir dans son emploi qu'en se faisant la réputation de père du peuple; aussi est ce à rendre heureux ses administrés qu'un bon mandarin doit mettre tous ses soins et toute sa gloire. On en a vu qui ont fait venir, de leur pays, des ouvriers, pour leur apprendre à élever des vers à soie, ou à fabriquer des étoffes. Un autre, dans un temps d'orage, ne se contenta pas de défendre qu'on traversât

une rivière dont les flots étaient soulevés par les vents, mais il se transporta sur le rivage, et y demeura un jour entier, pour empêcher, par sa présence, que quelque téméraire, emporté par la passion du gain, ne s'exposât au danger de périr.

Si un prisonnier vient à mourir dans sa prison, il faut une multitude d'attestations qui prouvent que le mandarin n'a pas été gagné pour lui procurer la mort; qu'il est venu lui-même le visiter; qu'il a mandé le médecin, et qu'il a fait fournir à ce malheureux les remèdes convenables; car il faut

que l'empereur soit averti de tous

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ceux qui meurent dans les prisons, et de la manière dont ils sont morts.

Comme le mandarin n'est établi que pour protéger le peuple, il doit être toujours prêt à recevoir les plaintes qu'on lui porte, non-seulement quand il est assis sur son tribunal, mais encore à toutes les heures du jour. Si l'affaire est pressée, on frappe à grands coups sur une espèce de timballe, placée en dehors de la porte de son hôtel. A ce signal, il doit tout quitter pour accorder l'audience qu'on lui demande. Mais la plus importante de ses fonctions est d'instruire le peuple, parce qu'il tient sa place de l'empereur qui, comme disent les Chinois, n'est pas seulement empereur pour gouverner et pontife pour sacrifier, mais qui, de plus, est docteur pour enseigner. Le premier et le quinze de chaque mois, chaque gouverneur de ville assemble le peuple dans un endroit assez vaste pour le contenir, et lui adresse une longue instruction sur ses devoirs. Cette pratique est ordonnée par un statut de l'empire. C'est un empereur qui a déterminé lui-même les matières qu'on doit

traiter dans ces sortes de discours. Elles sont comprises dans seize ordonnances de ce prince, et sont toutes relatives aux devoirs que la loi naturelle prescrit aux hommes, les uns envers les autres, et dont les premiers sont ceux que leur impose la piété filiale.

Tous les mandarins ont des marques de dignité qui les distinguent, non-seulement du commun, mais encore des lettrés et de tous ceux d'un rang inférieur. La principale consiste dans un carré d'étoffe qu'ils portent sur la poitrine. Cette étoffe, qui est richement travaillée, présente dans le milieu l'emblême de leur emploi : ou c'est un dragon à quatre griffes, ou un aigle, ou un soleil, etc. La ceinture que portent ces officiers est encore une marque distinctive de leur rang. Elle est de soie, et ne change jamais.

Un mandarin, gouverneur d'une ville du premier ordre, ne paraît jamais en public qu'avec un grand appareil, et son train est majestueux. Il est magnifiquement vêtu. Son air est grave et sévèré. Quatre hommes le portent assis sur une

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