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1830 (30 juillet). Quelques ouvriers pressiers et quelques ouvriers mécaniciens employés à la construction des mécaniques, les uns par égarement ou enivrement, les autres par un calcul plus personnel et plus coupable, s'introduisirent violemment dans les imprimeries de MM. Lachevardière, Tillard, Huzard, etc., et à l'Imprimerie Royale, où, par un abus odieux de la force brutale, ils brisèrent les machines à imprimer. On ne saurait trop déplorer qu'en France, dans un siècle de lumières, un pareil acte de barbarie ait été commis et soit resté impuni, et on devait croire qu'il ne se reproduirait plus; mais malheureusement le 26 février 1848 il s'est renouvelé dans des circonstances entièrement analogues. Il n'est pas moins regrettable que le parti conservateur, autrement dit de l'ordre, se laissant emporter par la passion du moment, ait commis en juin 1849 des excès, moins graves dans le fait, mais non moins condamnables en principe, lorsque, pénétrant en vertu d'un mandat dans les imprimeries de MM. Boulé et Proux, les casses remplies de caractères furent bouleversées ainsi que les formes qui avaient servi à composer des journaux de l'opposition la plus avancée : tant la passion peut aveugler même des hommes éclairés et les porter à des excès aussi irréflé. chis contre des caractères, qui ne sauraient être responsables des opinions des hommes, puisque dans les mêmes lieux ils servaient à l'im pression d'écrits conformes à celles des assaillants.

Espérons que cette persécution contre les presses et les caractères, objets matériels par lesquels les idées s'expriment, ne se reproduiront jamais en France. A des époques d'ignorance et de fanatisme on pendait et on brûlait les auteurs, les imprimeurs et les libraires; dans la première moitié de ce siècle on a brisé les presses, puis détruit les caractères; la seconde moitié doit se borner à combattre les idées par les idées, l'erreur par la vérité; mais, hélas! L'homme est de glace aux vérités, Il est de feu pour le mensonge.

1830 (31 juillet). Les ouvriers de diverses imprimeries de Paris placardèrent cet avis, qui les honore :

PROTESTATION DES OUVRIERS DE PARIS CONTRE LES FOMENTATEURS DE TROUBLES.

« Nous, soussignés, ouvriers des divers ateliers et manufactures de Paris,

« Reconnaissant que la destruction des machines et des mécaniques entraînerait infailliblement la ruine du commerce, source de notre gloire nationale; qu'il n'y a que des traitres à la patrie capables de nous insinuer de si perfides conseils :

« Déclarons protester hautement contre toute action dont le but serait d'attenter à la propriété de qui que ce soit, voulant conserver intact

l'honneur que nous avons acquis en repoussant par la force l'odieux despotisme, etc. »

Suivent les signatures.

Quelques jours après de nouvelles agitations parmi les ouvriers imprimeurs ayant troublé Paris et inspiré des inquiétudes, ainsi que le constate le Moniteur, M. Firmin Didot publia l'avis suivant :

FIRMIN DIDOT, ancien typographe, aux anciens compagnons de ses travaux.

<< Mes amis,

« Vous m'avez vu, chez mon père, faire l'apprentissage dans toutes les parties de la typographie, soit comme graveur et fondeur en caractères, soit comme compositeur et pressier, soit comme libraire. Ouvrier ou chef d'établissement, je vous ai estimés; et je puis dire que vous-mêmes estimez et aimez mes tils, qui ont suivi mon exemple. J'ai donc le droit de vous parler librement en cette circonstance.

« Quelques ouvriers ont, dans des jours de gloire pour leurs camarades, brisé ou détérioré des presses mécaniques, soit dans l'établissement de l'Imprimerie Royale, soit dans des maisons particulières. Ils n'ont eu, sans doute, d'autre intention que de s'assurer du travail. Nous allons voir s'ils ont bien calculé, et s'ils calculent bien en vous détournant vous-mêmes de vos travaux et en vous faisant participer à des rassemblements qui ne sont pas coupables, mais qui troublent le repos public:

«jo Vos rassemblements excitent de l'inquiétude parmi les citoyens. Les libraires, dont le commerce a surtout besoin de calme, d'ordre et de confiance, suspendent les travaux dont ils avaient chargé les imprimeurs.

«go Si la France n'avait pas de presses mécaniques, tandis que les peuples voisins et la Belgique conserveraient les leurs, nos voisins et la Belgique s'empareraient de presque tout le commerce de la librairie française, et leurs ouvriers seuls travailleraient.

«3° Ce ne serait pas seulement à eux-mêmes que les ouvriers pressiers auraient fait du tort, ils auraient ruiné les ouvriers compositeurs, les graveurs et les fondeurs en caractères, les assembleurs, les brocheurs et les relieurs. Ils auraient ruiné dans toute la France les fabricants de papier.

4o En empêchant les journaux de paraître, vous jetez l'alarme dans les départements. Les journaux ne doivent s'imprimer que tard dans la nuit, et se distribuer à la pointe du jour par conséquent les presses mécaniques sont indispensables à ceux qui sont tirés en grand nombre. Je sais tout ce que vous pouvez dire sur les triples et quadruples compositions de ces journaux ; mais généralement les presses mécaniques ont plutôt accru que diminué les travaux des ouvriers compositeurs. Ce n'est que par elles seules que nos journaux vont atteindre bientôt l'énorme dimension des journaux de l'Angleterre.

« Les ouvriers pressiers, dont le nombre d'ailleurs est triple de celui qui existait dans ma jeunesse, et le double de ce qu'il était du temps de Napoléon (si toutefois quelques-uns d'entre eux ont contribué à la destruction des presses mécaniques ), ont commis, j'ose le dire, une mauvaise action; ils n'ont pas réfléchi qu'en détruisant les presses mécaniques ils détruisaient les instruments qui doivent servir à propager, pour un prix très-modique, l'instruction du peuple français.

« Restez donc, mes amis, dans vos ateliers : c'est le seul moyen de faire renaître la confiance si nécessaire aux entreprises de la librairie et

aux travaux de l'imprimerie; songez que si chacun est libre de travailler quand bon lui semble, nul n'a le droit d'empêcher les autres de travailler.

Au reste, confiez-vous à la sagesse du roi, et à son amour pour le peuple français.

« FIRMIN DIDOT, député d'Eure-et-Loir. « 4 septembre 1830. »>

1830 (14 août). La Charte constitutionnelle porte, art. 7 : « Les Français ont le droit de publier et de faire imprimer leurs opinions en se conformant aux lois. La censure ne pourra jamais être rétablie. »

1830. La place de directeur de l'Imprimerie Royale ayant été proposée à M. Firmin Didot père, membre de la chambre des députés, par M. Dupont de l'Eure, alors ministre de la justice, M. Firmin Didot répondit à cette offre par la lettre suivante :

<< Mon honorable collègue,

« J'accepterai la place de directeur de l'Impri. merie Royale aux conditions suivantes :

« I° Qu'il sera rendu par degrés, et le plus tôt possible, aux imprimeurs de Paris et des départements toutes les impressions qui, sans nuire à la sécurité du gouvernement, doivent appartenir au commerce, et lui ont appartenu;

« 2° Que je puisse m'adjoindre quatre commissaires de mon choix pour cette opération, qui doit être faite avec justice sous tous les rapports;

« 3° Qu'il sera livré à un prix modéré, à tous les imprimeurs de France qui en feront la demande, des fontes de caractères orientaux et étrangers;

«< 4° Que je ne recevrai point de traitement. « Je vous salue avec la plus haute estime et la considération que vous méritez.

<< FIRMIN DIDOT, député d'Eure-et-Loir. a 9 août 1830. »

1833. Une commission est nommée au ministère de l'intérieur pour aviser aux moyens de supprimer les succursales d'imprimerie, nuisibles à l'ordre public aussi bien qu'à la propriété privée.

1834. Paraît le premier volume du Trésor de Numismatique et de Glyptique, ou Recueil général des médailles, monnaies, pierres gravées et bas-reliefs, etc., gravé d'après le procédé de M. Ach. Collas. Par ce procédé, qui est un perfectionnement du tour à guillocher ou tour à portrait, les objets sont reproduits identiquement par des lignes plus ou moins profondément accidentées gravées sur une plaque en cuivre par la pointe du burin, qui s'y enfonce plus ou moins d'après la saillie plus ou moins grande qu'offre les objets avec lesquels elle est mise en rapport; d'où résulte des effets d'ombre tellement identiques à l'objet même, qu'à une certaine distance on croit le voir lui-même reproduit sur le papier par l'impression.

1834. M. Marcellin Legrand expose ses

premiers essais d'un caractère chinois, dont it a le courage d'entrependre la gravure à lui seul. « Et d'abord, afin d'éviter la gravure de 30,000 caractères chinois il s'inspire du système proposé par Marsham, et décompose les 30,000 caractères chinois, qui forment le Dictionnaire Impérial, pour ne trouver que 9,000 poinçons nécessaires. Ensuite, pour faciliter aux compositeurs la recherche de ces 9,000 caractères, il introduit dans le moule de la lettre, et sur la tige de la lettre, au moment de sa fonte, un numérotage qui permet de composer du chinois avec des chiffres, sans même connaître les lettres de cette langue.» Rapport du Jury.

1834. M. Antoine-Augustin Renouard, libraire instruit, éditeur habile et bibliographe non moins consciencieux que persévérant, donne la troisième édition de ses Annales de l'imprimerie des Aldes, ou Histoire des trois Manuces et de leurs éditions (1), 1 vol. grand in-8°, dont M. Paul Renouard, son deuxième fils, est l'imprimeur, et M. Jules Renouard, son fils aîné, est le libraire.

Pour exécuter un pareil ouvrage, il fallait lo concours de conditions qui se sont heureusement rencontrées en M. Antoine Renouard. La date des éditions prouve que trente et un ans se sont écoulés entre la première et la dernière. Or la première édition était le résultat d'un long travail exécuté par M. Renouard sur les éditions mêmes des Aldes, qu'il possédait toutes dans sa riche bibliothèque, avantage aussi rare qu'indispensable pour obtenir l'exactitude rigoureuse qui rend cet ouvrage un livre aussi précieux qu'exceptionnel. Il fallait à sa passion pour les Aldes unir la passion de la bibliographie et cette longue persévérance durant une carrière non moins longue qu'honorable (2).

Cette édition a été tirée seulement à trois cent cinquante exemplaires.

1834. M. Duverger, imprimeur à Paris, expose les résultats de son nouveau système pour exécuter typographiquement la musique. Le procédé consiste à mouler dans le plâtre les pages composées en caractères mobiles qui ne contiennent que les notes et les portées. Le tracé des lignes est fait ensuite dans ce moule en plâtre par un procédé mécanique, en sorte que le cliché que l'on retire du moule ainsi complété donne à la fois réunies les notes, les portées et les lignes exemptes de la brisure qui se fait toujours remarquer dans la musique exécutée par les anciens procédés.

(1) La première édition parut en 1803, 2 vol. in-8°, et un volume supplémentaire fut publié en 1812. La seconde édition parut en 1828, en 3 vol. in-8°, avec portraits et fac-similės.

(2) M. A. A. Renouard, né en 1766, retiré à Abbcville, où il a transporté sa belle et nombreuse bibliothèque, a maintenant atteint sa quatre-vingt-sixième année.

1836. M. Brévière, habile graveur sur bois, est chargé par l'Imprimerie Nationale de l'illustration de l'Histoire des Mongols et d'autres ouvrages, dont les planches sont fort bien exécutées.

1834. M. Éverat, qui avait succédé à son père, imprimeur instruit, présente à l'Exposition de beaux ouvrages, où les gravures en bois sont tirées avec un soin remarquable. Paul et Virginie, qu'il imprima pour M. Curmer, est le premier livre qui ouvre avec éclat la nouvelle industrie des livres dits illustrés.

1834-39. MM. Gaume frères, libraires à Paris, font paraître une édition des Œuvres complètes de saint Jean Chrysostome, format grand in-8°, à deux colonnes, grec et latin, MM. Dubner, Fix et Sinner ont donné des soins à cette belle et correcte édition, dont les premiers volumes ont été détruits dans l'incendie des vastes magasins de la rue du Pot-de-Fer, où fut consumée une masse énorme de livres imprimés, que plusieurs libraires y avaient mis en dépôt.

1835. Loi du 9 septembre. Pour la répression des crimes, délits et contraventions de la presse :

Art. 1. Toute provocation tendant à compromettre la sûreté de l'État sera punie de la détention et d'une amende de 10,000 à 50,000 francs.

Art. 2. L'offense au roi est punissable des mêmes peines. Dans l'un et l'autre cas les coupables pourront être déférés à la chambre des pairs.

Art. 13. Le cautionnement d'un journal quotidien sera de 100,000 francs, de 75,000 s'il ne paraît que deux fois la semaine, et de 50,000 francs s'il ne paraît qu'une fois la semaine.

Art. 15. Chaque gérant responsable d'un journal ou écrit périodique devra posséder en son propre et privé nom le tiers du cautionnement.

Art. 18. Tout gérant sera tenu d'insérer en téle du journal les documents officiels, renseignements et rectifications qui lui seront adressés par tout dépositaire de l'autorité publique, sous la seule condition du payement des frais d'insertion.

1835. M. Terzuolo ( F.- Paulin), imprimeur instruit et passionné pour son art, est invenleur d'une presse mécanique à platine d'un système ingénieux, pour lequel il est breveté, ainsi que pour un moule mécanique fondant vingt-cinq lettres à la fois. Sa presse à tiroir, fonctionnant avec un seul ouvrier, est en activité depuis neuf ans.

1836 (4 avril). Mort de M. Firmin Didot, à la papeterie du Mesnil. M. HyacintheFirmin Didol, son second fils, est nommé titulaire de l'intéressante imprimerie du Mesnil, où de jeunes filles composent les ouvrages grecs et latins de la librairie de MM. Firmin Didot frères (1).

(1) En 1831 M. Rignoux, l'un de nos plus habiles imprimeurs de Paris, avait tenté d'établir à Montbar une imprimerie composée de jeunes filles; mais, malgré le talent et le zèle de M. Théotiste Lefèvre, à qui la direction de cet établissement fut confiée, il ne put réussir. Par sa persévérance et ses connaissances pratiques M. Lefèvre parvint à surmonter plus tard dans.

1836. M. Delalain (Jules) succède à son père comme imprimeur-libraire. En 1850 il réimprime le traité de Henri Estienne intitulé : De la Précellence du Langage Français, publié par M. Léon Feugère, avec des notes et une étude sur Henri Estienne.

1838 (25 juin). Rapport de la commission nommée par l'assemblée des imprimeurs pour l'établissement d'une chambre des imprimeurs (1).

1838. M. Alkan aîné, zélé typographe et prote chez M. Vinchon, commence la publication de ses Annales de la Typographie, recueil contenant des renseignements utiles. Cette publication fut interrompue en 1840, malgré le courage de l'auteur. « Pour l'empêcher de succomber, dit-il, je m'étais proposé de me mettre à une casse et de le composer moi-même. » Il est regrettable que M. Alkan n'ait pu trouver les encouragements que méritait cette entreprise.

1839. M. Silbermann, à Strasbourg, présente à l'Exposition des impressions polychrômes exécutées typographiquement, et avec succès. Les efforts de M. Silbermann furent récompensés à l'Exposition de 1849, où la médaille d'or lui fut décernée.

1839. MM. Lacrampe et compagnie s'établissent en association, composée de dix-neuf ouvriers. Ces imprimeurs habiles, laborieux et probes, mirent en commun leurs économies, et élurent l'un d'eux pour chef. Les travaux furent considérables, et ils les exécutèrent parfaitement. Mais, malgré tous les efforts, même désintéressés des associés, le résultat commercial fut désastreux.

Vers la même époque une autre société d'ouvriers typographes, sous la raison sociale François et compagnie, se forma pour exploiter une imprimerie alors connue sous le nom des Dix. Au bout de trois ans ils furent obligés de vendre leur matériel et de liquider.

1839. Mayence élève un monument à Gutenberg. La statue, chef-d'œuvre du sculpteur Thorwaldsen, auquel Mayence accorda le droit de bourgeoisie, fut coulée à Paris, chez Crozatier. Un des bas-reliefs représente le moment de l'invention Gutenberg est assis devant une table couverte de types et de caractères ;

l'établissement de MM. Didot des difficultés qui auraient découragé le zèle de tout autre. M. Crété dans son imprimerie à Corbeil a obtenu quelque succès de l'emploi des femmes pour la composition. Voyez Études pratiques sur la Typographie, par Crapelet, p. 256.

(1) Sont nommés: Ambroise-Firmin Didot président; G. A. Crapelet vice-president; H. Fournier secretaire.

Schoeffer, son collaborateur, reçoit de ses mains une matrice, emblème de l'art d'imprimer avec des lettres mobiles.

Une inscription porte ces mots :

"C En l'année 1837 les habitants de Mayence ont érigé ce monument à J. G. Gutenberg, leur compatriote, avec l'argent recueilli dans toute l'Europe.

Une autre inscription porte:

« Cet art, inconnu aux Grecs et aux Romains, l'esprit inventif d'un Allemand l'a trouvé. Maintenant, grâce à lui, les travaux du génie des anciens et des modernes sont devenus l'héritage de tous les peuples. »

De nombreuses députations envoyées des diverses villes de l'Europe assistèrent à cette fête, animée par les chants et les fanfares.

1840. M. E. Duverger fait paraître son Album typographique, ou Histoire de l'Imprimerie par les monuments, exécuté à l'occasion du jubilé européen de l'invention de l'imprimerie. Cet ouvrage contient les fac-similés de premières éditions, des gravures, camaïeux et un aperçu donnant des idées nouvelles sur l'origine de l'imprimerie.

1840. Publication d'une NOTE (1) pour une imprimerie composée de quatre presses et d'une mécanique, dont la conclusion porte :

« Un imprimeur qui travaille à 50 pour 100 et à terme est sûr d'une ruine inévitable; elle sera plus ou moins prompte, en raison des capitaux qu'il peut avoir à perdre ou des faillites qu'il aura à essuyer. »

Cette note fut réimprimée en 1841 par M. Paul Renouard. Deux commissions nommées pour examiner les calculs sur lesquels cette assertion est fondée ne purent ni l'une ni l'autre en contester l'exactitude (2).

(1) Par M. Ambroise-Firmin Didot, président de la chambre des imprimeurs.

(2) Jusqu'à la chute de l'empire l'imprimerie avait maintenu l'usage, fondé sur une longue expérience, de prendre pour base du prix d'impression la somme payée aux ouvriers compositeurs et pressiers par le patron, ou maître imprimeur, en ajoutant: 1o une somme egale à la moitié de ce prix (soit so pour 100) comme l'équivalent des déboursés, consistant en usure de caractères, encre, lectures d'épreuves, travail d'ouvriers dits en conscience, chargés de maintenir en ordre les nombreux caractères d'une imprimerie, revision des tierces, loyer, etc., etc., enfin cette multitude de faux frais, parmi lesquels figurent la soie, le parchemin et les blanchets en drap, dont l'ensemble est désigné en imprimerie par le nom d'étoffes; 2° une somme égale au quart du prix payé aux ouvriers compositeurs et pressiers (soit 25 pour 100) à titre de bénéfice.

C'était sur cette somme dite benefice que le maître imprimeur prélevait l'escompte des règlements à long terme que lui faisaient les libraires pour les étoffes seulement; car aucune somme n'était alors déboursée par le maître imprimeur pour la paye des ouvriers, puisque chaque samedi c'était le libraire qui fournissait à l'imprimeur les fonds nécessaires pour solder le travail hebdomadaire.

1840. Le quatrième anniversaire séculaire de l'invention de l'imprimerie est célébré à Strasbourg avec grande solennité. La statue de Gutenberg y est inaugurée. Il est réprésenté debout, auprès d'une presse et tenant dans ses mains la première épreuve qu'il vient de tirer; on y lit ces mots : Et la lumière fut.

1840. M. Silbermann publie à l'occasion de l'inauguration de la statue de Gutenberg un Album typographique présentant l'ensemble des progrès de l'art depuis quatre cents

ans.

1842. M. J. Charles Brunet donne la quatrième édition du Manuel du Libraire et de l'Amateur de Livres. Le mérite de cette nouvelle édition, considérablement accrue, est attesté par l'estime dont les éditions précédentes ont joui. Le dernier volume contient une table considérable, présentant dans un or· dre méthodique le titre des trente-deux mille ouvrages décrits pour la plupart dans le dictionnaire. L'exactitude scrupuleuse de M. Bru net, l'ordre qu'il a adopté pour sa Table méthodique, ses notes descriptives et l'indication du prix des livres recommandent cet ouvrage, dont l'impression, exécutée chez MM. Maulde et Renou, est belle et correcte.

1843 (28 août). Convention entre la France et la Sardaigne pour la reconnaissance réciproque du droit de propriété littéraire :

« La reproduction où la contrefaçon, dans l'un

En s'écartant de ces sages principes les ruines ont succédé rapidement aux ruines, et l'imprimerie a vu disparaitre successivement les anciennes familles qui tenaient autrefois à honneur de transmettre de père en fils l'exercice de leur profession. Sans vouloir inscrire ici le nombreux martyrologe des imprimeurs victimes de l'abandon d'un usage séculaire, il me suffira de citerce passage du rapport du Jury de l'Exposition de 1849:

<< Sur quatre-vingts imprimeurs, il n'en existe plus aujourd'hui que huit qui alent succédé à leur père, La pétition adressée en janvier 1847 à M. le ministre de l'intérieur, par la chambre des imprimeurs, signale cet autre fait, non moins remarquable: - «De 1810 à 1850 une seule faillite d'imprimeur; de 1850 à la fin de 1843 quarante-sept faillites,, avec un passif de sept millions, figurent au greffe du tribunal de commerce; un nombre au moins égal d'autres établissements d'imprimerie ont liquidé sans l'intervention de la justice consulaire et d'une façon plus ou moins honorable, plus ou moins funeste à leurs intérêts et à ceux de leurs créanciers. >>

Lorsqu'on voit les brevets de diverses industries qui ne se rattachent en rien aux spéculations intellectuelles, tels que ceux des facteurs de la balle aux grains ou à la volaille, ceux du marché aux poissons, au beurre et aux œufs, s'approcher, les uns du prix de cent mille francs, et les autres le dépasser du double, et que les charges de notaire et d'agent de change ont quelquefois atteint un demi-million, on s'étonne que les brevets d'imprimeur, dont la valeur était encore en 1820 de vingt à trente mille francs, soient maintenant tombée à huit et à dix mille francs, ce qui est l'équivalent de l'indemnité payée aux imprimeurs supprimés par le décret du 10 février 1810 (4,000 fr. en espèces, et une perte au moins égale sur la valeur du matériel acquis forcément ).

des deux États, d'ouvrages publiés dans l'autre Etat, est assimilée à celle des ouvrages qui auraient été originairement publiés dans l'État même,

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Quant à la traduction, l'auteur devra notitier au public qu'il entend le traduire lui-même. Cette traduction devra être publiée dans le délai d'un an, à partir de la publication du texte original.

« Les traductions d'ouvrages publiés hors du territoire des deux États sont assimilées aux productions originales, excepté si ces traductions sont faites dans une langue qui ne serait pas celle de l'un des deux États.

« Les contrefaçons seront punies conformément à la législation en vigueur dans chaque État.

<< La présente convention est faite pour six ans, et restera en vigueur d'année en année après ce terme, si l'une ou l'autre des parties ne les a pas simultanément dénoncées. »

La convention supplémentaire du 22 avril 1846 porte :

« Le droit de propriété littéraire est fixé respectivement pour les auteurs à leur vie entière, et pour les héritiers à vingt années à dater du décès des auteurs. Le droit de propriété est constaté par la date du dépôt officiel.

« Les articles extraits des journaux pourront être réciproquement reproduits, pourvu que l'origine en soit indiquée, excepté toutefois les articles dont les auteurs auront déclaré qu'ils en interdisent la reproduction. >>

1844. MM. Young et Delcambre présentent à l'Exposition un clavier mécanique destiné à remplacer le travail manuel de l'ouvrier com. positeur. Cette ingénieuse machine offre de telles difficultés dans l'application, qu'elle n'a eu jusqu'à ce jour aucun résultat pratique. La médaille d'argent est accordée aux inventeurs.

1844. MM. Andrew, Best et Leloir, graveurs sur bois, reçoivent la médaille d'or comme récompense de leurs nombreux travaux et des progrès dont cet art leur est redevable.

1844. M. Tissier expose des gravures exécutées sur pierre au moyen d'un procédé qui a beaucoup d'analogie avec celui que Sénéfelder avait indiqué et que MM. Duplat et Girardet avaient mis à exécution avant M. Tissier. Il consiste à obtenir sur pierre en relief les tailles que la gravure en taille-douce donne en creux. En sorte que ce sont les parties qui dans la taille-douce étaient préservées par le vernis, qui sont au contraire dépourvues de vernis, afin qu'étant mordues par les acides, le trail fait au vernis soit préservé contre leur action. Le relief devient d'autant plus saillant qu'on a fait mordre la pierre plus profondément par l'acide.

1844. M. Marcellin Legrand obtient la médaille d'or à l'Exposition, comme récompense du grand travail exécuté à lui seul et par son procédé, au moyen duquel sont imprimés,

même à Macao et à Ning-Po, des livres chinois avec les caractères qu'il a gravés.

1844. M. E. Duverger obtient la médaille d'or à l'Exposition : 1o pour la réussite de ses procédés d'impression de la musique par la typographie; 2° pour de nouvelles cartes géographiques d'après un procédé de son invention, qui consiste à incruster dans une table de plomb des filets très-minces en cuivre, avec lesquels il dessine les contours des rivages et des fleuves, puis il applique là où il. convient de petites pièces clichées et découpées portant le nom des villes et des pays; ces mots, qu'on peut ployer, ne tiennent pas plus de place qu'ils n'en occuperaient sur les planches en taille-douce. On les soude ensuite sur ces tables de plomb, qui peuvent s'imprimer à la presse mécanique.

1845. L'Imprimerie Royale publie son Specimen Typographique, véritable chef-d'œuvre, où brille sa richesse en types orientaux. Il offre cent dix caractères en langues di

verses.

1847. M. Paul Dupont reproduit par son procédé de la litho-typographie un volume in fo de 966 pages, qui est le fac-similé exact et identique du tome 13 de la collection Rerum Gallicarum et Franciscarum Scriptores, publiée par les bénédictins et continuée par l'Institut. Ce treizième volume, détruit pendant la révolution, rendait incomplet un grand nombre d'exemplaires de cette collection, aussi rare que précieuse. M. Dupont a appliqué son procédé à beaucoup d'ouvrages qu'il a ainsi complétés.

1847. Fondation de la Société fraternelle des Protes des imprimeries typographiques de Paris, autorisée par une décision de M. le ministre de l'intérieur en date du 17 mai 1847.

1848 (1er mars). M. Pagnerre, libraire, est nommé secrétaire général du gouvernement provisoire.

1848 (6 mars). Abrogation de la loi du 9 septembre 1835, relative aux crimes et délits commis par la voie de la presse, et décret de l'Assemblée Nationale qui fixe le cautionnement des journaux politiques quotidiens à 24,000 fr. (1).

1848. A la suite des événements politiques de février, 1848, l'émission d'un grand nombre de billets de cent francs fut jugée indispensable. La Banque en confia l'exécution à MM. Firmin Didot frères, qui durent les exécuter en toute hâte, jour et nuit, en y affectant toutes leurs presses. Ils appliquèrent avec succès la galvanoplastie pour reproduire promptement en cuivre certaines parties des anciens billets dont la gravure aurait exigé plusieurs mois. M. Hulot, habile artiste, à la fois mécanicien

(1) Cette disposition est encore en vigueur.

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