Mayotte Capécia, ou, L'aliénation selon Fanon

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KARTHALA Editions, 1 janv. 1999 - 230 pages
Mayotte Capécia, victime d'une " exécution sommaire " de la part de Frantz Fanon, est restée jusqu'à nos jours une sorte de pestiférée de la littérature antillaise. Christiane Makward ne se contente pas de retracer le portrait de cette mal-aimée ; plus que de la réhabiliter comme auteur, elle en révèle les exceptionnelles qualités de femme. En effet, ce n'est pas le moindre paradoxe de cette étude que de déposséder en grande partie M. Capécia de ses qualités d'écrivain, notamment en soulignant son analphabétisme initial, pour, finalement, découvrir une métisse martiniquaise issue d'un milieu populaire, qui, comme tant d'autres, et mieux que d'autres, a été capable de défier sa condition. A l'image d'une femme séduisante, mais " aliénée ", soumise à la fois au mâle et au Blanc, cette étude, fondée sur des documents jusqu'à présent tenus secrets, substitue celle d'une femme courageuse, soucieuse avant tout de dignité et d'indépendance. L'insignifiante Mayotte, née de l'ignorance et des préjugés fanoniens, cède la place à une véritable héroïne, pendant du " Ti-Jean " créole, a la fois rusée, pragmatique et obstinée, dotée d'une ambition que seule la mort parvint à anéantir.

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Table des matières

Section 1
7
Section 2
13
Section 3
15
Section 4
53
Section 5
93
Section 6
131
Section 7
157
Section 8
181
Section 9
209
Section 10
221
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Fréquemment cités

Page 75 - Tu lui parleras de moi. Tu lui diras : c'était un homme supérieur. Il faut que tu travailles, pour être digne de lui. Un jour, il est parti sur son bateau et, depuis, il est comme mort. Mais tu es là, toi, mon grand bonhomme. Tu deviendras comme lui et, plus tard, tu rendras, à ton tour, une femme heureuse ! » J'eus un mouvement de révolte.
Page 77 - J'aurais tant voulu devenir une femme respectable. J'aurais voulu me marier, mais avec un blanc. Seulement une femme de couleur n'est jamais tout à fait respectable aux yeux d'un blanc. Même s'il l'aime, je le savais.
Page 21 - Le Blanc étant le maître, et plus simplement le mâle, peut se payer le luxe de coucher avec beaucoup de femmes. Cela est vrai dans tous les pays et davantage aux colonies.
Page 20 - J'aurais dû m'en douter en voyant son teint pâle. Je la trouvai plus jolie que jamais, et plus fine, plus distinguée. Si elle avait épousé un blanc, peut-être aurais-je été tout à fait blanche ?... Et que la vie aurait été moins difficile pour moi...
Page 17 - J'aurais voulu me marier, mais avec un Blanc. Seulement une femme de couleur n'est jamais tout à fait respectable aux yeux d'un Blanc. Même s'il l'aime. Je le savais» [JSM 202], nous sommes en droit d'être inquiet.
Page 61 - La vie est difficile pou' une femme. que je me découvrais une grand'mère blanche ! Je m'en trouvais fière. Certes, je n'étais pas la seule à avoir du sang blanc mais une grand'mère blanche, c'était moins banal qu'un grand-père blanc. Et ma mère était donc une métisse ? J'aurais dû m'en douter en voyant son teint pâle. Je la trouvai plus jolie que jamais, et plus fine, plus distinguée.
Page 61 - Je songeais aussi à cette grand'mère que je n'avais pas connue et qui était morte parce qu'elle avait aimé un homme de couleur, martiniquais ". Comment une Canadienne pouvait-elle aimer un Martiniquais ? Moi qui pensais toujours à Monsieur le Curé, je décidai que je ne pourrais aimer qu'un blanc, un blond avec des yeux bleus, un Français.
Page 17 - Un jour, une femme du nom de Mayotte Capécia, obéissant à un motif dont nous apercevons mal les tenants, a écrit deux cent deux pages — sa vie — où se multipliaient, à loisir, les propositions les plus absurdes. L'accueil enthousiaste qui a été réservé à cet ouvrage dans certains milieux nous fait un devoir de l'analyser. Pour nous, aucune équivoque n'est possible : Je suis Martiniquaise est un ouvrage au rabais prônant un comportement malsain 4.
Page 62 - J'ai vu, depuis au cinéma, le film des Verts Pâturages dans lequel les anges et Dieu luimême sont noirs, et cela m'a terriblement choquée. Comment imaginer Dieu sous les traits d'un nègre ? Non, ce n'est pas ainsi que je me représente le Paradis.
Page 138 - Didier, se ruinent en lotions défrisantes, sont plus blancs que les blancs de blanc. Ma stupeur, adolescent, quand une amie, et qui me connaissait, se leva, outragée de m'entendre lui dire, en une circonstance où c'était le mot propre et le seul qui convînt : «toi qui es une négresse... - Moi ? négresse ? Ne vois-tu pas que je suis presque blanche ? Je déteste les nègres. Ils puent, les nègres. Ils sont sales. Paresseux. Ne me parle jamais de nègres.

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