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arriva à Aix le 17 janvier 1660, avec la reine mère, son frère le duc d'ANJOU et mademoiselle, fille aînée de GASTON duc d'ORLEANS. Le Roi habita le palais de l'archevêque, auquel on avait réuni les maisons et les hôtels qui entourent la place, au moyen de ponts de bois jetés sur les rues qui les séparent. Ces ponts carrelés et couverts, avaient été entourés de cloisons auxquelles on avait appliqué des tentures. Ils formaient à tous les étages de beaux appartements qui communiquaient aux maisons attenantes par des ouvertures pratiquées aux maisons, à la place des fenêtres. Disposées de la sorte, ces diverses habitations formaient un vaste palais qui servait de logement au Roi. Ce fut là que dix jours après son arrivée, c'est-à-dire le 27 janvier, arriva le prince de CONDÉ que des mécontentements avaient jeté dans le parti des Espagnols. Il implora la clémence du Roi. La reconciliation qui suivit ce rapprochement répandit la joie dans la famille royale, et la nouvelle dela ratification de la paix des Pyrénées, mit le comble à celle des habitants.

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Rue Beauveret ou de la Pureté. Eodem die (3 id. septembre 1245) Berardus canonicus Si saluatoris et Ricenda, • ejus uxor, in pace quieverunt, qui propriis sumptibus ecclesiam beatoe marice de belvezer et hospitale quod » est ante edificaverunt et se omnia bona sua eccl. Si salvatoris donnaverunt anno 1231. >

Le même jour (3 des ides de septembre de l'an 1245.) BERARDUS chanoine de St Sauveur et RICENDA SON épouse reposèrent en paix; lesquels firent bâtir à leurs propres frais, l'église de la béate marie de Belvezer et l'hopital qui est devant et qui donnèrent tous levrs biens à l'église St Sauveur.

Il faut convenir qu'une pareille annotation qui se trouve dans les registres capitulaires d'Aix, serait faite pour jeter la confusion dans les documents recueillis sur les usages

et les mœurs de ce siècle, si l'on ne savait que BERARDUS qui était un riche habitant d'Aix, après avoir perdu R1CENDA sa femme, de laquelle il n'avait point eu d'enfants, embrassa l'état ecclésiastique et devint chanoine de Saint Sauveur.

L'église de Notre-Dame de Belvezer ou de Beauvezet et l'hôpital de la Caritat ne firent plus qu'un même corps qu'on appela indistinctement Ecclesia Berardi, ou Nostra domina de Bellovisu, à cause de sa belle situation. L'hôpital dont les revenus étaient considérables, continua aussi d'être appelé La Caritat. Les consuls en étaient recteurs et il servait de local aux assemblées publiques. Cet hopital était aussi nommé Domus elecmosino, parce qu'on y faisait une aumône générale, aux fêtes de la Pentecôte et une autre aux pauvres passants, pendant toute l'année (1).

L'église de N. D. de Beauvezet devint une propriété du Chapitre de St Sauveur, par le don que BERARDUS lui avait fait de ses biens. Les délibérations capitulaires font mention, en effet, que dans le dénombrement des églises, figure comme une propriété du Chapitre, ecclesiam de bello visu, et que le 7 octobre 1526, le Chapitre passe un arrentement de cette Eglise.

La rue Beauvezet prit aussi le nom de rue de la Pureté, à cause de la maison hospitalière qui y fut fondée pour les jeunes filles qui manquaient de direction. Cette institution reçut, en 1680, l'approbation de M. de GRIMALDI, archevêque d'Aix. On la transféra ensuite à la rue longue St Jean, puis on lui rendit son premier local. L'église fut construite

en 1713.

Rue Bouono carriero.

C'est un reste de rue étroite et fort ancienne, à l'extrémité couchant de la rue des Gan

(1) J.–S. PirzON, ann. de VEglise ’Aic, pag. 146.

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tiers et près du palais de justice. Elle avoisinait autrefois l'Eglise Ste Catherine du Temple, propriété des Templiers. On l'appelait rue du Prostibule, du mot latin prostibulum, (lieu de débauche) (1) à cause des maisons publiques qu'il y avait. On substitua ensuite à cette dénomination, celle de Bouono carriero (bonne rue) par allusion ironique à ces maisons de prostitution.

Les syndics d'Aix désignèrent une seule maison dans celle rue, pour cel objet, en exécution des lettres patentes données en 1411, par Louis II, Comte de Provence, relativement à la répression du luxe et du libertinage. Plus, d'un siècle auparavant et le 18 janvier 1324, le conseil de la ville d'Aix avait délibéré de faire injonction aux femmes publiques de paraitre voilées en public, sous peine d'une amende de 30 florins pour la première fois et d'une peine corporelle, pour la seconde (2). Il existait des peines sévéres contre ceux qui débauchaient les jeunes filles. On les bannissait des terres de Provence, et leurs biens étaient confisqués (3).

D'après les ordres des syndics, sans doute on avait placé sur la porte de la maison dont nous avons parlé, une inscription indicative, au haut de laquelle était le millesime 1413. Le champ de l'inscription portait des caractères que le savant P. PAGI croyait être le nom de Jésus (4). Il faut avouer, si le P. PAGI n'a pas erré, que ce nom était singulièrement accolé dans cette circonstance.

(1) D. HAITZE, la topographie de la ville d'Aix, manusc.

(2) J.-S. PITTON, histoire de la ville d'Aix, pag. 146.

(3) J. MOURGUES, les statuts et coutumes du pays de Provence, pag. 281.

(4) FAURIS ST VINCENT, mém. et notices relatifs à la Province, etc. pag. 75.

Place des Carmelites. - La provence fut violemment agitée pendant le seizième siècle. La réforme éprouva de grands obstacles, lors de son introduction, et fut cause de beaucoup de meurtres. Comme capitale de la province, la ville d'Aix devint le théâtre des plus grands désordres. Les protestants avaient dans Aix huit officiers au Parlement qui les soutenaient secrètement, parce qu'ils avaient la mème croyance. Ces officiers étaient François de GENAZ, sieur d'AGUILLES, Honoré SAUMATI, André ARDISSON', Jean SOLOMON, André PENA, Jean FERRIER et Jean PUGET, avocat général. PÉNA était un des plus savants hommes de son temps et frère de Jean et Pierre PENA, autres savants.

Avec un pareil appui, les protestants se livrèrent sans contrainte à l'exercice de leur culte, dans le jardin du conseiller de GENAZ, situé hors de la porte St Jean, à l'endroit où est maintenant l'église des carmelites. Ils chantaient des pseaumes traduits par le poëte MARROT, et s'assemblaient sous l'ombrage d'un pin énorme qui embellissait ces lieux. Mais poussé par le fanatisme, le peuple ne put être témoin de ce nouveau culte. Il tourmenta les protestants par toutes les vexations possibles et finit par vouloir les exterminer. A cet effet, on pendait journellement au pin, un grand nombre de religionnaires. Les exécutions étaient présidées par un paysan d'Aix, appelé TAROUN, qui s'était mis à la tête du peuple dont il excitait la haine contre la nouvelle secte (1). Il existe un portrait de cet homme peint d'après nature; il est représenté les yeux fixés en haut et présidant à une pendaison; il porte au tour du col uue corde qui descend sur sa poitrine, et passe le pouce de la main droite dans un noeud coulant.

Ce funeste pin fut abattu par l'ordre du Roi, en 1564. BELLEFORETS a conservé la représentation de cet arbre avec le plan de la ville d'Aix, dans sa cosmographie.

(1) PITTON, histoire de la ville ́d'Aix.

de HAITZE, id, manusc.

La haine contre les protestants animait les ecclésiastiques plus fortement encore que les autres classes. On voyait à St Sauveur, dans la chapelle des Rois, une peinture qui représentait le pin chargé de religionnaires pendus, et dans le fond le rocher de Mornas dans le Comtat duquel le Baron des adrets fesait jeter les catholiques dans le Rhone (1).

On voit dans les délibérations capitulaires de la même église, ce qui suit: « anno salut, 1545, processio seu supplicatio quotidiana pro prosperitate et victoriâ obtinendâ per deûm de Aulpedo, 1um præesid. provinc. euntem ⚫ contra valdenses pereticos ut eos expelleret à provincià » vel occideret,

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L'an du salut 1545, procession ou supplication pour la prospérité et la victoire à obtenir par le seigneur d'OPPEDE, premier président de Provence, allant contre les Vaudois hérétiques, pour qu'il les chasse de la provence ou qu'il les tue.

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Postérieurement on trouve dans les mêmes délibérations, ce qui suit: Die Sa, maii 1590, ordinaverunt (les capitulans.) quod sacrum christi corpus poneretur super major altare, et populus provocaretur ad orandum deum, • pro unitate fidei et pro exterminatione hereticorum.» (Le 5 mai 1590, ils ont ordonné que le sacre' corps du Christ, serait placé sur le grand autel et que le peuple serait engagé à prier Dieu pour l'unité de la foi et pour l'extermination des hérétiques.)

Les religieuses carmelites desquelles cette place a reçu son nom, furent reçues à Aix, en 1625, à la prière de la dame AYNARD DE CASTELLANNE, baronne d'OPPEDE (2).

(1) De HAITZE, hist. de la ville d'Aix, manusc.

(2) J.-S. PITTON, hist. de la ville d'Aix.

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