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la terre, sa mère' prie le radieux Titan de prêter son secours à son fils Typhée : déjà le géant couvre la poussière de son immense corps, vomissant la flamme de son sein foudroyé1. Jupiter insulte à sa défaite par un rire moqueur, et plaisante le prétendu vengeur de Saturne et des Titans', en lui rappelant ses projets insensés contre les Dieux dont il voulait faire autant d'esclaves de sa nouvelle cour. Après un discours rempli de sarcasmes amers" que Jupiter adresse au géant terrassé et expirant, le poète nous peint les suites de cette victoire, qu'annoncent les échos du Taurus ", tandis que d'un autre côté on voit la terre, plongée dans la douleur, pleurer la mort de son fils'. L'effet de ce triomphe fut de rendre la sérénité aux cieux, l'ordre et la paix à l'Olympe, et de rétablir l'harmonie de la Nature". Jupiter alors s'occupe de récompenser les services de Cadmus ', et lui' promet de le faire gendre de Mars et de Vénus, et d'aller manger lui-même à sa table, où il aura l'honneur de recevoir le maître des Dieux 10. Comme ta lyre, lui dit-il, Cadmus, a orné les portes de l'Olympe, je veux aussi moi-même accompagner les chants de ton hyménée, par les accords de la lyre céleste 11.

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Il lui donne en même temps un avis important pour le munir contre les revers du destin, et pour

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4 V. 590.

1 V. 545.-2 V. 563.— 3 V. 565.
6 V. 633.—7 V. 640.-3 V. 653. — 9 V. 660.
11 V. 668.

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10 V. 663.

TOME IV.

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écarter les malheurs qui pourraient interrompre la félicité de sa vie (h); c'est d'éviter de déplaire à Mars Dircéen', et de conjurer sa colère en faisant pendant la nuit certains sacrifices dont il lui trace le cérémonial. Une des conditions principales est de tenir pendant sa prière les yeux tournés sur le dragon céleste, c'est-à-dire sur celui que Théon 2 appelle dragon de Cadmus, et d'invoquer spécialement Ophiucus, c'est-à-dire la constellation dụ serpentaire dans lequel fut placé Cadmus après sa métamorphose. Il lui conseille d'oublier Agénor son père, et ses menaces, ajoutant qu'il peut être tranquille sur le sort d'Europe et sur celui de ses frères; que sa sœur a épousé Astérion, roi de Crète *; que Céphée règne sur le midi, et fait goûter les douceurs de son empire aux Ethiopiens Céphéniens; que Thasus règne sur l'ile de Thase Cilix sur les Ciliciens, Phinée sur les Thraces; et que lui-même va bientôt régner à Thèbes sur les Cadméens, à qui il donnera son nom. L'oracle d'Apollon, lui dit Jupiter en finissant, t'apprendra le reste. Après avoir achevé ces mots, le maître du tonnerre retourne au ciel, porté sur son char", la victoire guide ses coursiers, les heures lui ouvrent les portes de l'Olympe, et Thémis, pour effrayer la terre, qui a donné naissance à Typhon, suspend aux voûtes du ciel les armes du géant foudroyé. Tel est le précis des deux premiers chants du poème de Nonnus (i).

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2 Theon ad Arat., p. 5 V. 691.6 V. 696.

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113.

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7 V. 703.— 8 V. 710.

que

Quelque abrégée que soit cette analyse, elle est encore très-longue relativement au petit nombre d'élémens astronomiques et théologiques qui forment le fond de ce roman sacré. Nous avons observé dans notre second livre, chapitre cinquième, en parlant des deux principes Ormusd, Ahriman; Osiris, Typhon; Jupiter et Typhée et des Titans, leurs combats dans la Nature faisaient la matière de toutes les fictions sacrées des anciens théologiens; que les deux équinoxes étaient les limites des empires des deux chefs rivaux, qui combinent leur action opposée dans le système universel du monde; qu'au printemps le principelumière reprend l'empire que lui avait ravi en automne le principe des ténèbres et du mal, sous quelque nom qu'il fût connu, mais toujours figuré par les formes du serpent de l'équinoxe d'automne. C'est donc cette dernière crise de la Nature avant son renouvellement périodique au printemps, et le dernier choc que le principe du mal livre au principe du bien, au moment où celui-ci va reprendre sa force désignée par la foudre (k), que le poète théologien a eu intention de peindre dans la description de ce long combat entre Jupiter et Typhée qui lui avait ravi cette foudre et qui avait voulu usurper l'empire de l'Olympe. Toutes les circonstances du combat, quelque nombreuses qu'elles soient, ne sont que la broderie de ce simple canevas, à l'exception de l'intervention de Cadmus, habillé sous la figure de Pan qui sert Jupiter si utilement

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dans son entreprise, et qui se trouve si à propos à la rencontre du Dieu, au moment où celui-ci vient de ravir Europe que cherche Cadmus, et de placer aux cieux le taureau, dont il avait pris la forme pour cet enlèvement (7). Voilà des points donnés par l'astronomie, ainsi que l'emploi heureux que l'on fait de la lyre que Typhon promet à Cadmus de placer un jour, s'il le veut, sur la lyre céleste, comme ses chevreaux et sa chèvre dans les bras du cocher'. Ces circonstances ne sont point arbitraires, et tiennent à la position qu'a le ciel le matin et le soir du jour où le soleil, principe de bien et de lumière, arrivé au taureau céleste, vient terminer l'hiver et le règne du prince des ténèbres, et rendre la lumière et l'ordre à toute la Nature, à l'équinoxe de printemps. Il en est de même de l'avis énigmatique donné par Jupiter à Cadmus, lorsqu'il lui dit de regarder le dragon céleste, et d'invoquer la nuit Ophiucus, ou le serpentaire, c'est-à-dire la constellation qui ouvre la marche de la première nuit du printemps et celle du premier jour d'automne, lorsque Typhon ravit la foudre de Jupiter, occupé de donner naissance à Tantale, autre nom du même serpentaire. Si Cadmus, ou le serpentaire, rend à Jupiter sa foudre, c'est lorsqu'il est revêtu des attributs de Pan, ou du cocher céleste, qui, dans le planisphère de Kirker ", est peint sous la forme de Pan, et qui, dans toutes les traditions astronomiques, est censé porter Aiga, ou la fameuse chè

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2 OEdipe, t. 2. part. 1, p. 206.

vre (m), qu'on dit être la femme de Pan; de ce cocher qui précède le char du soleil printanier, et monte le matin à l'orient avec le jour, comme Cadmus, ou le serpentaire, y monte avec la nuit. Nous avons projeté ces différens paranatellons sous la case du taureau, dans notre planisphère des Dionysiaques; c'est au lecteur à le consulter et à apprécier les rapports des tableaux principaux du poème avec ceux que présente le ciel à l'époque de l'équinoxe de printemps. Quant à la théologie, elle est la même que nous retrouvons partout, et qui nous est peinte dans l'oeuf d'Oromaze et dans le fameux monument de Mithra, dont nous parlerons ailleurs.

Ainsi le poète suppose que, pendant l'hiver, le Dieu de la lumière n'avait plus de foudres; qu'elles étaient entre les mains du prince des ténèbres, qui n'en pouvait faire usage. Mais durant tout le temps où Jupiter en est privé, son ennemi bouleverse et désorganise toute la Nature, confond les élémens, répand sur la face de la terre le deuil, les ténèbres et la mort, jusqu'au lever héliaque du cocher et de sa chèvre, et au lever du soir du serpentaire. Ces phénomènes ont lieu au moment où le soleil arrive au taureau céleste dont Jupiter, suivant la fable, prit la forme pour enlever Europe, sœur de Cadmus, ou du serpentaire, et que celui-ci cherche lorsqu'il rencontre Jupiter. C'est alors que le Dieu du jour rentre dans tous ses droits et rétablit l'ordre que le génie des ténèbres avait troublé et détruit. Jupiter reprend sa foudre, sous l'habit de

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