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ALCANTOR.

Voyez-vous? j'ai une estime et une amitié pour vous toute particulière; et je refuserois ma fille à un prince pour vous la donner.

SGANARELLE.

Seigneur Alcantor, je vous suis obligé de l'honneur que vous me faites; mais je vous déclare que je ne veux point me marier.

ALCANTOR:

Qui? vous?

SGANARELLE.

Oui, moi.

ALCANTOR.

Et la raison?

SGANARELLE.

La raison? c'est que je ne me sens point propre pour le mariage, et que je veux imiter mon père et tous ceux de ma race, qui ne se sont jamais voulu

marier.

ALCANTOR.

Écoutez. Les volontés sont libres; et je suis homme à ne contraindre jamais personne. Vous vous êtes engagé avec moi pour épouser ma fille, et tout est préparé pour cela : mais, puisque vous voulez retirer votre parole, je vais voir ce qu'il y a à faire; et vous aurez bientôt de mes nouvelles.

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SCÈNE XV.

SGANARELLE.

Encore est-il plus raisonnable que je ne pensois,

et je croyois avoir bien plus de peine à m'en dégager. Ma foi, quand j'y songe, j'ai fait fort sagement de me tirer de cette affaire; et j'allois faire un pas dont je me serois peut-être long-temps repenti. Mais voici le fils qui me vient rendre réponse.

SCÈNE XVI.

ALCIDAS, SGANARELLE.

ALCIDAS, d'un ton doucereux.
Monsieur, je suis votre serviteur très humble.

SGANARELLE.

Monsieur, je suis le vôtre de tout mon cœur.
ALCIDAS, toujours avec le même ton.

Mon père m'a dit, monsieur, que vous vous étiez venu dégager de la parole que vous aviez donnée.

SGANARELLE.

Oui, monsieur. C'est avec regret; mais...

ALCIDAS.

Oh! monsieur, il n'y a pas de mal à cela.

SGANARELLE.

J'en suis fâché, je vous assure; et je souhaiterois...

ALCIDAS.

Cela n'est rien, vous dis-je.

(Alcidas présente à Sganarelle deux épées.)

Monsieur, prenez la peine de choisir de ces deux épées laquelle vous voulez.

SGANARELLE.

De ces deux épées?

ALCIDAS.

Oui, s'il vous plaît.

SGANARELLE.

À quoi bon?

ALCIDAS.

Monsieur, comme vous refusez d'épouser ma sœur après la parole donnée, je crois que vous ne trouverez pas mauvais le petit compliment que je viens vous faire.

Comment?

SGANARELLE.

ALCIDAS.

D'autres gens feroient plus de bruit, et s'emporteroient contre vous: mais nous sommes personnes à traiter les choses dans la douceur; et je viens vous dire civilement qu'il faut, si vous le trouvez bon, que nous nous coupions la gorge ensemble.

SGANARELLE.

Voilà un compliment fort mal tourné.

ALCIDAS.

Allons, monsieur, choisissez, je vous prie.

SGANARELLE.

Je suis votre valet, je n'ai point de gorge à me couper. (à part.) La vilaine façon de parler que voilà!

Monsieur, il faut

ALCIDAS.

que cela soit, s'il vous plaît.

SGANARELLE.

Hé! monsieur, rengaînez ce compliment, je vous

prie.

ALCIDAS.

Dépêchons vite, monsieur. J'ai une petite affaire

qui m'attend.

SCANARELLE.

Je ne veux point de cela, vous dis-je.

ALCIDAS.

Vous ne voulez pas vous battre?

SGANARELLE.

Nenni, ma foi.

ALCIDAS.

Tout de bon?

SGANARELLE.

Tout de bon.

ALCIDAS, après lui avoir donné des coups

de baton.

Au moins, monsieur, vous n'avez pas lieu de vous plaindre; et vous voyez que je fais les choses dans l'ordre. Vous nous manquez de parole, je me veux battre contre vous; vous refusez de vous battre, je vous donne des coups de bâton: tout cela est dans

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les formes; et vous êtes trop honnête homme pour

ne pas approuver mon procédé.

SGANARELLE, à part.

Quel diable d'homme est-ce ci?

ALCIDAS lui présente encore les deux épées. Allons, monsieur, faites les choses galamment, et sans vous faire tirer l'oreille.

Encore?

SGANARELLE.

ALCIDAS.

Monsieur, je ne contrains personne; mais il faut que vous vous battiez, ou que vous épousiez ma sœur.

SGANARELLE.

Monsieur, je ne puis faire ni l'un ni l'autre, je vous

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Avec votre permission donc...

(Alcidas lui donne encore des coups de baton.)

Ah! ah! ah!

SGANARELLE.

ALCIDAS.

Monsieur, j'ai tous les regrets du monde d'être. obligé d'en user ainsi avec vous; mais je ne cesserai point, s'il vous plaît, que vous n'ayez promis de vous

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