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de leur présence les sociétés popuJaires?

Le pouvoir lui-même, ramené dans de meilleures voies, comprendra-t-il enfin que le temps des déceptions et des mensonges est passé? comprendra-t-il qu'il ne peut désormais être digne d'un grand peuple qu'à la condition d'obéir toujours à la loyauté et à la justice?

L'audience du 18 est remplie par le court plaidoyer de Me Moulin, défenseur de Benoît, à l'égard du quel l'accusation a été en quelque sorte abandonnée; par les répliques successives de M. le procureur général et de Me Joly, et enfin par un discours dans lequel Bergeron soutient qu'il est homme d'honneur, et qu'un homme d'honneur ne peut pas être un assassin.

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A quatre heures, M. le président commence son résumé, qu'il ne termine qu'à six heures et demie.

Les deux questions soumises au jury sont ainsi conçues: Bergeron est-il coupable de l'attentat commis le 19 novembre sur la personne du roi?

Benoit a-t-il assisté sciemment l'accusé principal dans les faits qui ont précédé, accompagné ou suivi ledit attentat?

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Les accusés étaient placés dans l'ordre suivant :

Complot du Carlo Alberto : MM. le vicomte de Saint-Priest, prenant le titre de duc d'Almazan; de Bourmont fils, ex-sous-lieutenant; Adolphe Sala, officier de l'ex-garde royale; de Kergorlay fils; Mathilde Lebeschu, ancienne femme des atours de la duchesse de Berry; comte de Kergorlay père, ex-pair de France; comte de Mesnard, ex-premier écuyer de la duchesse de Berry; Antoine Ferrari, génois, subrécargue du Carlo-Alberto.

Conspiration de Marseille: MM. de Bermont-Legrine, ancien oficier de l'ex-garde royale; Benoît, chevalier de Candolle, ancien consul de France à Nice; de Lachau, colonel en réforme, né à Saint-Auban (Drôme); Laget de Podio, né à Marseille; François Esig, confiseur, et Ganail.

Les accusés se sont renfermés dans un système complet de dénégation, ou ont refusé de répondre aux questions du président, en protestant contre l'illégalité de leur arrestation. Plusieurs d'entre eux déclarèrent qu'ils ne récusaient pas les jurés pour juges; mais en même temps qu'ils ne reconnaissaient pas le gouvernement au nom duquel on voulait les juger. A cet égard, voici les paroles de M. de Kergorlay père :

Toute la France sait que je ne reconnais pas le gouvernement qui nous régit, et que j'ai refusé de lui prêter un serment que je regardais comme contraire à ma conscience. Répondre à un interrogatoire adressé par un président de cour d'assises, est un acte de libre arbitre, et j'ai pour principe que l'on peut s'affranchir de tout acte de soumission envers un gouvernement que l'on regarde comme illégitime. Arrêté à

Marseille, et détenu contrairement à toutes les lois, je fis quelques réponses à titre de renseignemens, et espérant obtenir ma mise en liberté. Quand le secret qui pesait sur moi fut levé, j'appris que mon fils, arrêté aussi, avait refusé de répondre. Je reconnus qu'il avait été plus exact observateur que moi des règles et des principes qui nous lient tous deux, et je résolus dès-lors de suivre son exemple. Aujourd'hui donc, je refuse toute espèce de réponse. Une autre circonstance récente m'impose aussi cette résolution. La plaidoirie de Me Journel, un des avocats de la cause, m'a démontré l'illégalité de la cour devant laquelle nous sommes traduits; que ce n'est point une cour, mais une commission. (Mouvement.) Oui, messieurs, les magistrats qui siégent ici ne remplissent pas les fonctions de juges, mais bien de commissaires.

chau, Laget de Podio, Esig, Ganail. 1ls nient toute espèce de participation aux événemens de la journée du 30 avril, et prétendent qu'il n'a existé aucun complot.

L'audition des témoins a démontré que des tentatives de corruption avaient été faites dans l'intérêt des accusés. Un témoin qui avait déposé contre eux devant le juge d'instruction de Marseille, est venu rétracter sa première déposition en avouant publiquement qu'il s'était parjuré.

Dans l'audience du 15 mars, toutes les questions au nombre de vingt ont été résolues négativement par le jury, après deux heures et demie de délibération, et tous les préve nus acquittés.

18. Paris. Institut. Election. L'académie des sciences a élu aujourd'hui un membre pour la section de géométrie, en remplacement de M. Legendre. Les concurrens étaient M. Libri, l'un des géomètres les plus célèbres de l'Italie, et M. Duhamel, à qui l'on doit un grand nombre de travaux distingués. Au

M. le président : Je vous préviens que les expressions dont vous vous servez sont d'une haute inconvenance. Vous êtes ici comme accusé; mais les délits que vous pourriez commettre en dehors de l'accusation seraient poursuivis et punis indé-premier scrutin, sur 54 votans, pendamment du fait pour lequel Vous êtes traduit devant la cour. Exprimez-vous donc avec le respect dû à la justice. Elle ne souffrira point un seul mot de la nature de ceux qui viennent de sortir de votre bouche. C'est dans votre intérêt seul que je vous donne cet avis.

M. Nadaud, avocat-général : Nous allons nous-même requérir à l'instant contre l'accusé, s'il persiste.

M. de Kergorlay. Convaincu de la haute indépendance de MM. les jurés, je me réserve de leur donner et de leur faire donner par mon défenseur toutes les explications nécessaires à ma défense.

M. le président adresse ensuite à M. de Kergorlay une série de questions, à chacune desquelles l'accusé dit d'une voix très-ferme : « Je refuse de répondre. »

On passe ensuite à l'interrogatoire des accusés de Marseille, MM. de Bermont-Legrine, de La

M. Libri a réuni 37 suffrages; son concurrent en a obtenu 16. Une voix a été donnée à M. Liouville. M. Libri sera présenté à l'acceptation du roi. On se rappelle que ce savant s'est fait naturaliser français, il y a quelques jours.

27. Paris. Théâtre-Français. Ire représentation de CLARISSE HARLOWE, drame en cinq actes et en prose de M. Dinaux. Les raisons qui font que jamais un homme, même de beaucoup de talent, ne composera une bonne pièce de théâtre avec un bon roman, sont si connues, si évidentes, que nous ne nous arrêterons pas à les développer ici. L'idée de mettre l'ouvrage de Richardson en drame ne pouvait d'ailleurs que produire un squelette aussi desséché que possible; et pourtant quelles situations ont plus besoin d'être préparées que celles de Clarisse Harlowe! Il faut

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18: Cour d'assises. Associations illégales MM. Desjardins, président de la société des Amis du Peuple, et Denoux, comparaissaient aujourd'hui devant la cour d'assises comme prévenus, le premier de contravention à l'art. 291 du Code pénal; le second d'avoir, sans permission préalable de l'autorité municipale, reçu cette société dans sa maison. M. Desjardins a reconnu sa qualité de président de la société des Amis du Peuple, et M. Denoux” a également avoué qu'il avait fourni un local pour la réunion. Néanmoins, après une demi heure de délibération, le jury a déclaré les deux accusés non-coupables sur toutes les questions.

A cette affaire a succédé celle de MM. Enfantin et Michel Chevalier, prévenus du même délit d'association illicite, association dont ils avaient été les chefs. Interrogé par M. le président sur son état, M. Enfantin a répondu « Je ne veux prendre maintenant aucun titre, et je ne le pourrais. » M. Michel Chevalier a déclaré qu'il n'avait aucune profession. Les deux prévenus se sont reconnus les chefs de l'association

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saint-simonienne. Cependant ils ont été déclarés non-coupables et acquittés.

12. Cour d'assises. Affaire de la société des Droits de l'homme. Les sieurs Petit Jean et Guyot, hommes de lettres, Milon, cocher de cabriolet, Hullin, imprimeur, Guernon, vérificateur en bâtimens, Martinault, employé dans une maison de commerce, et Beaudeloup, propriétaire, comparaissaient ce matin devant la cour d'assises de la Seive, comme prévenus d'avoir fait partie de l'association politique non autorisée, dite des Droits de l'homme, en qualité de chefs de section dans cette société ; et le sieur PetitJean, comme prévenu, par suite de la publication d'un pamphlet ayant pour titre A la France de juillet, d'avoir, de complicité avec le sieur Hullin, imprimeur, commis les délits d'outrage envers la personne du roi, de provocation, non suivie d'effet," au renversement du gouvernement, et d'excitation à la haine et au mépris du gouvernement du roi. Aux débats, les prévenus ont avoué leur participation, comme chefs de section, à la société des Droits de l'homme; quant au pamphlet, Petit-Jean et Hullin ont nié toute participation audit pamphlet, soit comme auteurs, soit comme complices de cet écrit, qui ne serait qu'une machination de la police pratiquée pour les perdre.

Voici quelques détails, que rapporte l'acte d'accusation sur l'organisation et le but de la société :

« Il s'est formé à Paris, sans l'agrément du gouvernement, une association qui prend le nom de Societé des Droits de l'homme et du citoyen; son existence et ses actes ont été l'objet d'une plainte du ministère public, par suite de laquette.. plusieurs de ses membres ont été poursuivis devant le tribunal de première instance de la Seine, sous la prévention d'avoir formé un complot tendant à détruire ou à changer le gouvernement. La cour, par son arrêt rendu, toutes les chambres assemblées, le 22 novembre 1832, a

évoqué l'instruction commencée sur cette plainte.

« L'association dont il s'agit a pour but, de l'aveu de tous les prévenus, le triomphe des principes contenus dans la déclaration des droits de l'homme et du citoyen, promulguée le 24 juin 1793 par la Convention nationale, c'est-à-dire l'établissement de la république; mais ils soutiennent que, pour obtenir ce résultat, leur société ne veut employer d'autres moyens que l'instruction politique du peuple et la propagation des idées républi caines.

<< Divers faits seraient de nature à faire penser que les membres de cette association, ou du moins plusieurs d'entre eux, avaient aussi la pensée d'aider au triomphe de leur opinion par un appel à la force.

« Le premier et le plus remarquable de ces faits, est l'organisation même qui a été donnée à la Société : elle se divise, d'après son réglement, dont plusieurs exemplaires sont au dossier, en sections et en séries ; une section ne peut jamais être composée de plus de vingt personnes. Si par de nouvelles affiliations elle arrive à dépasser ce nombre, elle se divise aussitôt en deux; chaque section se réunit séparément une ou plusieurs fois par semaine, à des jours et dans des lieux indiqués chaque fois : les séances sont principalement destinées à des lectures d'écrits politiques. Il y a dans chaque section un chef qui préside aux séances, un souschef et trois quinturions, dont chacun est à la tête de cinq sectionnai res cinq sections réunies forment une série, et lorsque, par leur redoublement, leur nombre s'élève au dessus de huit, il se forme aussitôt deux séries. Chaque série a un chef, chargé de visiter et de diriger les sections, qui n'est connu que d'elles, et qui donne l'impulsion à la Société entière. Les chefs de séries reçoivent ses directions, soit verbales, soit sous forme d'ordres du jour, et les transmettent soit aux chefs de sections, soit aux sections dont ils visitent les réunions. Le

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réglement imprimé ne dit rien de ce comité central, dont l'existence a été niée par la plupart des préve nus; mais elle est prouvée par la déclaration de quelques uns d'entre eux, par celle d'un grand nombre de sectionnaires entendus comme témoins, et en outre par certains faits que les prévenus, qui l'ont nié, ont été hors d'état d'expliquer, et qui prouvent clairement une autorité centrale et unique, telle, pár exemple, que la nomination d'un trésorier pour toute l'association, et des publications faites par la voie de la presse au nom de la So ciété.

« Une telle organisation ne paraît point avoir été formée dans un simple but d'instruction de propagande, mais bien plutôt dans un but d'action, et un ordre du jour adressé à la Société lorsque cette organisation a été définitivement arrêtée, ordre du jour dont deux copies ont été saisies au domicile de Petit-Jean, doit, par les termes dans lesquels il est conçu, faire porter le même jugement sur le caractère de l'associa tion.

«<L'instrution fait connaître qu'à l'époque du pourvoi qu'avaient formé les sieurs Cuny et Lepage contre les arrêts de la cour d'assises de la Seine, qui les condamnaient à la peine de mort pour avoir pris part à l'insurrection du mois de juin dernier, plusieurs membres de la Société des Droits de l'homme ont formé le projet d'empêcher de vive force l'exécution de ces arrêts en détruisant l'échaufaud, et se sont réunis à cet effet, pendant la nuit, près la place où ils pensaient que cette exécution aurait lieu. »

A ces détails, nous joindrons les passages suivans du réquisitoire prononcé à l'audience par M. Franck Carré, avocat général :

<< Les principes démocratiques proclamés par la Convention, le 24 juin 1793, ne suffisent plus à l'esprit avancé de l'association que nous poursuivons; et cette Déclaration des Droits de l'homme et du ci

toyen, qui répondait aux exigences.

révolutionnaires des meneurs de cette triste époque, ne répond pas encore aux pacifiques intentions de la Société des Droits de l'homme. «Par une petite supercherie historique, dont il nous sera permis peut-être de nous étonner, lorsqu'elle émane de ces républicains qui parlent sans cesse de leur austère franchise, la déclaration qu'on nous présente comme l'œuvre de la Convention a, au contraire, été repoussée par elle, parce qu'elle dépassait les principes de cette assemblée. Ce n'est pas la déclaration votée par la Convention, et placée en tête de la constitution de 1793, que nos modernes républicains réimpriment jusqu'à vingt-deux fois; c'est le projet qui fut présenté par Robespierre, et dont la Convention ellemême ne voulut point.

« Quant à nous, messieurs, il nous suffira de quelques mots et d'un petit nombre de rapprochemens pour vous faire apprécier dans quel esprit a été rédigée la déclaration nouvelle, qui, comme nous l'avons dit, est le symbole politique de la Société des Droits de l'homme.

« Il est un principe fondamental sur lequel repose toute société bien organisée, et que la Convention ellemême a reconnu et proclamé : c'est le droit sacré de la propriété. Nous lisons dans la déclaration des droits de l'homme du 24 juin 1793: « Le << gouvernement est institué pour «< garantir à l'homme la jouissance a de ses droits naturels et impres «criptibles; ces droits sont : l'éga«lité, la liberté, la sûreté, la pro« priété. »

«L'association des Droits de l'homme ne veut pas que la propriété soit un droit naturel et imprescriptible. Elle dira donc, et aura soin de souligner pour le faire mieux comprendre, que les principaux droits de l'homme sont ceux de pourvoir à la conservation de l'existence et à la liberté, principę évidemment destructif du droit de propriété; aussi, lorsque la Convention déclare que le droit de propriété est celui qui appartient à tout

citoyen de jouir et de disposer à son gré de ses biens, de ses revenus, du fruit de son travail et de son industrie, l'association des Droits de l'Homme déclare au contraire que la propriété est le droit qu'a chaque citoyen de jouir et de disposer à son gré de la portion de bien qui lui est garantie par la loi; et les derniers mots, bien significatifs en effet, sont encore écrits en caractères italiques dans la pièce que nous avons sous les yeux.

« La Convention déclare que nul ne peut être privé de la moindre portion de sa propriété sans son consentement, si ce n'est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l'exige, et sous la condition d'une juste et préalable indemnité. « Aussi, ajoute-t-elle, les secours publics sont une dette sacrée : la société doit la subsistance aux citoyens malheureux, soit en leur procurant du travail, soit en assurant les moyens d'exister à ceux qui sont hors d'état de travailler. >> Mais ce dont la Convention avait fait une dette de la société tout entière, l'association des Droits de l'homme, qui veut quelque chose de plus positif encore, en fait une dette de l'homme riche; elle déclare donc que les secours indispensables à celui qui manque du nécessaire sont une dette de celui qui possède le superflu, et elle ajoute : « Il appartient à la loi de déterminer la manière dont cette dette doit être acquittée. »

« Un dernier mot, messieurs, achèvera de vous bien faire connaître l'esprit de l'association que nous poursuivons ce mot, ou plutot cette maxime qui serait incroyable si nous ne l'eussions'vue réalisée à cette époque sinistre que tant et de si coupables efforts tendent à nous ramener, nous la trouvons écrite dans un ouvrage publié par un des membres de la Société des Droits de l'homme, sous le titre de Petit Catéchisme républicain, et dont de nombreux exemplaires ont été saisis chez les prévenus.

« Cette association, qui se dit,

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