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DU CAMBodge.

lignes chacun, avec séparation des pādas, et suivis d'une sixième strophe atidhṛiti de l'espèce Çārdūlavikrīḍita, dont les quatre pādas occupent une ligne chacun.

Ang Pou ou Vat Pou, comme le nom est écrit ailleurs1 par M. Aymonier, fait partie de la province de Trêang2. Le site, sur lequel je n'ai pas d'autres renseignements, correspond à l'emplacement d'un ancien temple qui paraît avoir été construit en bois. Il n'en reste plus rien que la trace du fossé qui l'entourait. Trois statues qui étaient dans l'enceinte, ainsi que la stèle en grès qui porte l'inscription, ont disparu à leur tour : elles ont été envoyées en France et se trouvent actuellement au musée cambodgien du Trocadéro.

L'inscription n'est pas datée; mais, comme les deux précédentes, elle est du règne d'Içānavarman. Elle relate l'érection d'une image et d'un linga de Çiva-Vishnu et la donation d'un açrama consacré à Bhagavat par un certain Īçānadatta, qui est qualifié de muni,

d'homme retiré du monde.

Le document est écrit en caractères un peu lourds, mais hardiment et nettement tracés, du moins dans la partie sanscrite et dans les seize premières lignes du texte khmer. A partir de là, le travail s'altère et devient bientôt détestable. Dans la partie soignée, l'écriture reproduit exactement celle de I et II. Mais à côté de cette facture archaïque, l'orthographe présente des innovations remarquables. Nous voyons disparaître des distinctions soigneusement faites jusqu'ici le visarga tend à se substituer au jihvāmūlīya et à l'upadhmānīya (sur cinq occasions qui se présentaient pour l'un ou pour l'autre, le vieux signe n'est employé qu'une fois), et le th n'est plus distingué du th; la consonne souscrite des groupes sth et shth est exactement la même, et, dans les deux cas, elle est représentée par th. Ce sont là des habitudes qui deviendront constantes dans les inscriptions postérieures.

1

:

2

Journal asiatique, avril-juin 1883, p. 452. — Pour cette province de Trêang, voir plus haut, p. 22.

Le texte khmer1 renferme un bon nombre d'expressions sanscrites, dont plusieurs paraissent être des noms propres : ācāryyarāmadeva, bhadraviçesha (deux fois), içvaradatta Içanadalla? c'en est du moins le synonyme), kumāraçakti, rudraçambhu, rāmapāla (deux fois),

rudrakirtti, nagavindu.

1. Jayato jagatām bhūtyai
parvvatiçrīpatitvena

2. khyātaviryyaviçeshena
ratnojvalitabhogena 2
3. yah 3 pratitatapaç çila—“

içanadatta ity akhyā-
4. çañkarācyutayor arddha-

ekasamsthāsukṛitaye

5. vishnucandecvareçāna

ekabhoganivaddhāstu

3

kritasandhi harãcyutau
bhinnamürttidharāv api
çesheneva mahībhṛitā
jitam çricanavarmmaṇā
vrittaçrutaparo muniḥ
khyātaḥ3 khyātakulodgataḥ
çarirapratimām imām
yo guruņām atishthipat
lingam tena pratishthitam 7
tatpūjety asya niçcayaḥ

6. dāsakshetragavādikam bhagavate dattam dhanam3 yajvanā trishṇākampitamānasaḥ 3 khalajano yas samharaty uddhataḥ nānādu+khasamanviteshu narakeshv akshīṇapāpātmako9 tishthatv 10 eva sakopajihmitamukhair abhyahataḥ3 kinkarai(h)

6

TRADUCTION.

1. Victorieux sont Hara et Acyuta 11, devenus un pour le bien des êtres, quoique, en tant qu'époux de Părvatī et de Çrī, ils portent des corps distincts. 2. Victorieux (aussi) est l'illustre et très héroïque cri-Īçānavarman, qui porte la terre comme Çesha, dont la magnificence (dont la crête) resplendit de joyaux 12

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3. Célèbre par ses austérités, uniquement adonné à la vie d'aumônes1 et à l'étude, le muni connu sous le nom d'Içanadatta, issu d'une famille illustre,

4. A érigé cette image dans laquelle sont unis par moitiés les corps de Çankara et d'Acyuta, pour le bénéfice de ses parents 2.

3

5. Il a (aussi) érigé un linga de Vishnu et d'Īçana Candeçvara : « que leur culte soit lié par la participation aux mêmes offrandes, telle est sa décision. 6. Les biens en serviteurs, terres, bétail et autres donnés à Bhagavat par son adorateur, l'impie qui, plein d'insolence, l'âme frémissante d'avidité, oserait les ravir, que, sans pouvoir expier son forfait, il soit sans cesse, dans les enfers aux supplices variés, frappé par les valets (de Yama) 5, à la bouche grimaçante

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2

La traduction suppose un annsvāra tombé ou oublié au-dessus de samsthā. Si on ne veut pas faire cette correction au texte, il faut traduire, en faisant de guru un pluriel de majesté et en le rapportant aux deux divinités (ce mot est un des noms de Çiva): «cette image des demicorps de Çankara et d'Acyuta, pour la réalisation excellente de l'union des (divins) gurus ». Par ardhaçarīrapratimā, il ne faut pas se figurer une image à mi-corps, quelque chose comme un hermès bicéphale, mais une image entière, où les deux divinités étaient probablement, comme dans les monuments analogues de l'Inde propre, associées de face, la moitié de gauche appartenant à l'une, celle de droite à l'autre.

Je crois qu'il s'agit ici d'une représentation différente, bien que linga puisse, à la rigueur, se dire d'une image. Je suppose en outre que Candeçvara « le seigneur de la lune » qualifie Īçana et que ce der

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Cette note m'avait été surtout suggérée par le soupçon d'un rapport possible entre les divinités mentionnées dans le texte et les trois statues trouvées auprès de la stèle. Je puis ajouter maintenant que ce rapport n'existe pas. Les objets déposés au Trocadéro ne sont pas encore classés et les étiquettes sont tombées en route: il n'est donc pas possible, pour le moment, d'en reconnaitre la provenance. Mais il résulte d'une note additionnelle de M. Aymonier que, des trois figures trouvées à Ang Pou, une seule est mâle. «Elles étaient plantées et alignées sur une large pierre plate, légèrement creusée en bassin, avec gargouille d'écoulement à gauche, c'est-à-dire au nord, la divinité mâle au milieu. »

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A contient, en dix-neuf lignes : une strophe trishtubh d'une des variétés dites Upajati (premier et quatrième pādas Indravajra, deuxième et troisième Upendravajra), lignes 1, 2; deux çlokas anushṭubh, 4-6; un texte en langue khmer, 7-18; un çloka anushṭubh, 19. B contient, en vingt lignes quatre çlokas anushṭubh, 1-8; une strophe prakṛiti de l'espèce Sragdhara, 9-12; une strophe atiçakkari de l'espèce Malini, 13, 14; six çlokas anushṭubh, 15-20. Toutes les strophes sont divisées en leurs pādas.

Ang Chumnik, ou plus exactement Vat Kedey Ang 2, d'où provient l'inscription, fait partie du territoire du village de Ta Tron, dans le district de Koh, une des subdivisions de la province de Ba Phnom3. Le district de Koh (l'île), ainsi appelé parce qu'il forme en quelque sorte une île entre le bras oriental du grand fleuve et l'arroyo qui, de Banam, va rejoindre les arroyos de Cochinchine, est une vaste plaine, dominée au nord par le mont Ba Phnom, inondée dans presque toute son étendue à l'époque des grandes crues et occupée par de fertiles rizières. Au-dessus du niveau de la plaine

'Sur cette hauteur, o" 29 reviennent au texte sanscrit.

M. Aymonier écrit ces noms de diverses manières : Ang Chumnik, Chum

nik, Vat Kedey Ang, Kedey Ang, Vat
Keday.

p. 38.

Pour cette province, voir plus haut,

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s'élèvent çà et là des tertres de peu de relief, couronnés d'élégants palmiers à sucre et de maigres bouquets d'arbres d'autres essences. Parmi ces tertres, que M. Aymonier tient pour artificiels, un des plus considérables est Vat Kedey Ang, à peu près au centre de la partie la plus fertile de la plaine, à 12 kilomètres à l'ouest de Kompong Trebek et à 10 kilomètres au sud du mont Ba Phnom, en inclinant un peu vers l'est1. Il consiste en une enceinte rectangulaire, entourée d'un fossé de 20 mètres de largeur, et interrompue par de larges chaussées d'avenue à l'est et à l'ouest. Au centre du rectangle, il y a un léger remblai. A 200 ou 300 mètres de là, vers l'est, se trouve Ang Chumnik ou Chumnik, c'est-à-dire «la mare», bassin artificiel entouré d'une levée ayant une vingtaine de mètres d'épaisseur. C'est à Vat Kedey qu'a été trouvée l'inscription. Elle est gravée sur deux stèles plates en pierre noire, qui, de l'avis de M. Aymonier, ont dû faire partie d'une de ces cellules cubiques, ayant tout au plus la hauteur d'un homme et entièrement formées de grandes plaques de pierre, comme il en existe une près de la tour de Han Chey2.

Sauf quelques lacunes regrettables, l'inscription est assez bien conservée. Elle commence par relater la restauration et la dotation, par un certain Ācāryavidyāvinaya, d'un Çivalinga, auquel le donateur, conjointement avec sa femme, fait abandon de tout son bien, A, 1-3. La donation est de l'an 5513 çaka = 629 A. D. Cette partie de l'inscription est donc très probablement du règne d'Īçānavarman; mais le roi n'y est pas nommé. Le texte khmer qui suit pourra seul établir avec une entière certitude si la mention qui vient plus loin (A, 4) de la fondation d'un sanctuaire appelé le Rudrāçrama1 doit être rapportée, comme je le crois, au même donateur. Toute cette

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