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des planètes, ne puisse être vérifiée, dans les meilleures conditions, qu'à une unité près, si l'on ignore de quel siddhūnta elle relève. Elle devient au contraire certaine, même dans le cas d'une vérification légèrement imparfaite, quand à ces indications vient s'ajouter le jour de la semaine, qui, lui, est une donnée relativement fixe, la même pour nous et pour tous les siddhantas, qui se bornent, le cas échéant, à y asssocier un autre quantième.

Mes calculs ont été faits, pour les positions du soleil et de la lune, à l'aide des tables de M. Jacobi (Indian Antiquary, juin 1888), qui reposent elles-mêmes sur le Sūryasiddhānta, et pour les longitudes des autres planètes, directement d'après le Suryasiddhänta. Les données fondamentales des autres siddhāntas ne m'étant pas accessibles d'une façon complète et suffisamment garantie, je n'aurais pas pu pousser la vérification plus loin, eussé-je même été tenté de le faire. Comme pour les inscriptions de Campā, MM. E. Senart et Sylvain Lévi n'ont pas épargné leur peine pour assurer la correction des épreuves.

Mai 1891.

A. BARTH.

XXXVI (65-70).

TEMPLE DE BAKOU.

Deux inscriptions, dont l'une fragmentaire, sur les frontons des

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C'est la première qui ne nous a été conservée qu'en partie. Dans son entier, elle devait atteindre à peu près les dimensions de la seconde en hauteur, et les dépasser en largeur. Il est facile d'en juger, les deux textes étant identiques.

Le monument de Bakou fait partie d'un groupe de trois temples, à peu près contigus par leurs enceintes extérieures, et s'étendant sur un front de 3 kilomètres, du sud au nord, à 15 ou 18 kilomètres au sud-est d'Angkor Vat, dans la province, aujourd'hui siamoise, d'Angkor ou Siem Reap. Les deux autres temples sont ceux de Bakong et de Loléy, auxquels appartiennent nos nos XXXVII, XXXIX-XLII et LV.

Bakou a été décrit, sous le nom de Preakon (plus exactement Prea Kou), par Doudart de Lagrée, dans des notes qui ont été mises à profit par Francis Garnier1, et, sous le nom que nous adoptons, par M. Aymonier 2. Il est situé au milieu du groupe entre Loléy et Bakong,

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et comprend six tours en briques, disposées sur deux rangs. Les trois tours du second rang sont plus petites que celles du premier, et plus

ruinées.

D'après le témoignage de M. Aymonier', le texte gravé sur les frontons des portes de la tour centrale et de la tour du Nord du premier rang, l'avait été aussi sur les portes des quatre autres tours, où il en reste encore des fragments. Ces fragments n'ont pas été estampés. L'inscription de la tour du Nord du premier rang (no 70), dont nous donnons le fac-similé planche 27, tient d'ailleurs lieu de toutes les autres: elle est en effet parfaitement conservée dans son entier.

Elle a sept lignes, et il devait en être de même des autres, au moins de celle de la tour centrale du premier rang, à en juger par l'estampage n° 65. Les six lignes dont celui-ci offre des traces correspondent, une à une, aux six dernières lignes de notre fac-similé, c'est-à-dire l'estampage no 70.

Les sept lignes comprennent, outre les mots çrī siddhi, dix stances, savoir : deux anushṭubh ou çlokas épiques sur la première ligne, à la suite des mots de bon augure; deux çardulavikriḍita, occupant chacune une des deux lignes suivantes; une anushṭubh et une upajāti sur la quatrième ligne; deux anushṭubh sur la cinquième; une çārdālavikrīḍita sur la sixième; une anushṭubh sur la septième. La séparation des pādas est régulièrement marquée par des intervalles en blanc, qui sont considérablement agrandis dans la septième ligne, occupée par une seule anushṭubh. La fin des stances n'est marquée par un signe de ponctuation qu'à la fin des lignes entre deux stances occupant la même ligne il n'y a qu'un intervalle égal à ceux des pādas. Enfin ces intervalles étaient plus grands dans le n° 65, l'inscription de la porte de la tour centrale dépassant les autres en largeur, apparemment comme la porte elle-même.

Notre texte contient des données importantes. C'est le premier mo

1 Journal asiatique, avril-juin 1883. Pour cette répétition de textes identiques, voir plus loin, p. 343. A. B.

nument daté de ce qu'il serait peut-être permis d'appeler la seconde période de l'histoire épigraphique du Cambodge, la première comprenant les no I-XIII, publiés par M. Barth, et quelques autres qui seront publiés plus tard. On pourrait prendre pour point de départ de cette seconde période l'avènement, en 724 çaka, d'un roi Jayavarman, que j'appelle Jayavarman II1, et qui paraît avoir été l'un des plus grands rois du Cambodge, en tout cas le chef d'une dynastie nouvelle. Mais les règnes de Jayavarman II et de ses premiers successeurs ne nous sont connus que par des inscriptions postérieures, principalement par la généalogie commune aux nos XLIV-LX ci-après, celle du roi Yaçovarman.

C'est, comme on le verra par la même généalogie, le père de Yaçovarman qui est l'auteur des inscriptions du temple de Bakou. Nous trouvons mème déjà ici, avec son nom, Indravarman, une généalogie, mais qui remonte moins haut que celle de son fils.

Notre texte donne en une seule stance, la troisième, avec le nom d'Indravarman, celui de son aïeul maternel, Rudravarman, et de l'aïeul maternel de sa mère, le roi Nripatindravarman, sans nous apprendre le nom de sa mère elle-même, appelée seulement la reine épouse du roi Prithivindravarman. Ce dernier, père d'Indravarman, appartenait à une famille de kshatriyas: c'est-à-dire qu'il n'était pas lui-même d'origine royale. Aussi Indravarman se réclame-t-il, non de son père, mais de sa mère, en se disant, non pas le fils de Prithivīndravarman, mais le fils de la reine épouse de Prithivīndravarman. Nous verrons dans la généalogie de Yaçovarman quelle était la parenté de cette reine avec Jayavarman II.

La date de l'avènement d'Indravarman, que nous appellerons Indravarman Ier, le même nom ayant été porté par un roi postérieur au xre siècle çaka, est donné dans la stance v : 779 (de l'ère çaka). Celle de l'inscription elle-même, qui se trouve dans la stance IX, est 801

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Voir ma Chronologie de l'ancien royaume khmer, dans le Journal asiatique, janvier 1884, p. 58-60.

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çaka, le 2o jour de la quinzaine claire du mois de Māgha1 (décembre-
janvier): la même stance donne les noms des constellations où se
trouvaient alors les différentes planètes.

A cette date, Indravarman avait érigé « trois statues du Seigneur
et de la Déesse ». Il faut entendre par là trois statues de Çiva et trois
statues de son épouse, renfermées chacune dans un sanctuaire parti-
culier. Ces six sanctuaires sont les six tours dont se compose encore
aujourd'hui le monument de Bakou.

La dernière stance mentionne les donations faites à Çiva par Indravarman. Le détail des donations fait l'objet de nombreuses inscriptions khmères relevées, non plus sur les frontons, mais sur les encadrements des portes des tours, et sur ceux de diverses fausses portes. Ces inscriptions ont été analysées par M. Aymonier2. Il y a trouvé principalement des énumérations d'esclaves sacrés; mais il y a relevé aussi d'autres noms, que nous ne pouvons passer sous silence.

Ces noms sont les vocables particuliers des statues érigées dans chacune des tours, donnés dans des formules identiques qui comprennent en outre le nom du roi Indravarman et les dates en chiffres de son avènement, 799, et de la fondation dont il s'agit, 8013. On trouve ainsi sur les faces de droite de l'encadrement des portes, dans les tours du premier rang, les noms de Prithivindreçvara pour la tour du Sud, de Rudreçvara pour la tour du Nord, de Parameçvara pour la tour centrale.

La comparaison des vocables analogues que nous relèverons, sous les nos XXXIX-XLII, dans les inscriptions des portes de Loléy, ne laisse aucun doute sur la signification des uns et des autres. On verra que Yaçovarman avait érigé une statue à Çiva, en lui donnant le nom d'Indravarmeçvara, pour rappeler celui de son père. Il n'avait fait que suivre l'exemple de celui-ci, érigeant à Bakou une statue de Çiva sous le vocable de Prithivindreçvara, emprunté au nom de son propre

1

2

Cf. p. 304, note 3. A. B. Journal asiatique, avril-juin 1883, p. 464 et sui-
Voir l'une de ces formules, ibid., p. 465.

vantes.

3

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