Tirésias de douleur en mourut; Et ses enfans, dont sa douce sagesse Ces cœurs ingrats, loin de donner des pleurs Qu'on a nommés coquettes, petits-maîtres, Qui que tu sois, amant de ton image, Toi qui, pour elle animé d'un beau feu, La suis de l'œil, et la vois en tout lieu, Caresse en paix cette image chérie, Passe à ses pieds ta glorieuse vie ; Dans les miroirs, dans le plus fin cristal Nous croyons servir nos lecteurs en ajoutant quelques détails sur le personnage de Narcisse, auxquels le traducteur ne pouvait se livrer que par le moyen des notes. Narcisse, né à Thespies, ville de Béotie, était d'une grande beauté ; il passait pour le fils du fleuve Céphise. Selon Pausanias, Narcisse avait une sœur qui lui ressemblait parfaitement; souvent même ils s'habillaient l'un comme l'autre, et chassaient ensemble. Narcisse devint amoureux de sa sœur ; mais, il eut le malheur de la perdre. Après s'être livré à la douleur, il venait sur le bord d'une fontaine ; il prenait plaisir à s'y contempler. En se voyant, il croyait voir sa sœur, et c'était une consolation pour lui Si cette version était vraie, le motif sur lequel Ovide a bâti sa fable, deviendrait nul, puisque, au lieu de se laisser consumer d'amour et de désirs pour lui-même, Narcisse serait mort victime de l'amour fraternel. La version employée par Ovide, paraît être la plus accréditée; et, en la traduisant, Malfilâtre a prouvé qu'il était digne de faire passer dans notre langue les beautés de la langue latine. Ce poème, et son ode intitulée le Soleil fixe au milieu des planètes, que nous avons placée au tome IX, sont ce que Malfilâtre a produit de mieux. Il fût devenu, sans doute, l'un de nos meilleurs poëtes, si la mort l'eût ar rêté moins jeune dans sa carrière, et si la fortune l'eût un peu plus favorisé. Il était né à Caën le 8 octobre 1732, et mourut à Paris le 6 mars 1767, dans un état voisin de la misère. Gilbert, qui ne mourut guère plus heureux, a dit, en parlant de ce poëte : La faim mit au tombeau Malfilâtre ignoré |