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Je nagerai vers toi sur les flots ténébreux.

Fais briller un fanal sur ta tour solitaire;
Qu'il me serve d'étoile au milieu de la nuit ;
Et moi, comme un vaisseau par cet astre conduit,
Vers tes bords désirés je suivrai sa lumière.
Il dit: Héro vaincue et combattant encore,
Voile son front ému, que la honte colore.
Le cou penché, muette, et marchant doucement,
Elle fuit à regret l'étranger qu'elle adore,
Et son sein, qui palpite, enfle son vêtement.
Léandre, sur les bords de la mer déchaînée,
Attendait le signal du nocturne hyménée;
Héro fait luire enfin le flambeau de l'amour:
A peine il a brillé du sommet de la tour,
Son amant sur les flots impétueux s'élance;
Il arrive, et l'hymen le reçoit en silence.
Des ombres de la nuit ses plaisirs sont couverts,
Et quand l'aube se lève, il repasse

les mers

Héro trompe les yeux d'une ville jalouse,

Prêtresse dans le jour, et la nuit tendre épouse.
Mais leur bonheur fat court. Un destin si charmant
Dépendait trop, hélas! d'un perfide élément.
L'hiver vint ramener la saison des orages.

Les vagues à grand bruit tombaient sur les rivages.
La malheureuse Héro, pendant les noirs frimats,
Aurait dû... Mais l'amour connaît-il la prudence?
Elle attendait Léandre, et ne pressentait pas
Qu'elle allait l'immoler à son impatience.

Il voit paraître encor le sinistre fanal,
Qui, pour lui, des plaisirs n'était plus le signal.
Il part: la vague écume et monte sur sa tête ;

Les flots heurtent les flots; tous les tyrans des airs
Grondent, fondent ensemble et roulent la tempête:
Neptune, avec fureur, a soulevé les mers.
Léandre enfin, brisé par l'onde qui l'accable,
S'abandonne au torrrent d'une mer indomptable;
Sa bouche boit les eaux; ses pieds n'agissent plus;
Ses bras sans mouvement demeurent étendus.
Il perd au même instant le flambeau qui le guide,
Et tombe enseveli dans l'abîme liquide.

L'Aurore avait montré son visage éclatant.
L'œil fixé sur les flots, la prêtresse éperdue,
De cette vaste mer parcourait l'étendue ;
Elle cherche Léandre, et voit son corps flottant!
O dieux! que devient-elle à cette horrible vue!
S'écrier, s'élancer fut pour elle un instant.
Ainsi du tendre amour périrent les modèles,
Et le même trépas unit ces cœurs fidèles.

LÉONARD.

(Voyez, au Tome XIV, Héro et Léandre, romance; au

Tome V, Héro et Léandré, héroïde. )

POËMES

PHILOSOPHIQUES.

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SUR LE POËME PHILOSOPHIQUE.

Les premiers philosophes furent égyptiens :

ils durent leurs connaissances à l'observation. Le soleil, la lune, les astres, la vegétation, les saisons, l'ordre des jours et des nuits, le tonnerre, les tempêtes, etc., furent les objets de leur méditation; et ils parvinrent à prédire ce qui devait arriver. Ces sages se réunirent en collége, captivèrent la confiance, déifièrent la nature entière, dirigèrent l'ordre social ; créèrent des allégories, des symboles; produisirent l'admiration, l'effroi; firent naître le respect, et par suite l'obéissance.

Dans un temps où le nom de philosophe paraît être donné indifféremment et sans réflexion, qu'il nous soit permis de l'appliquer à. son vrai sens.

Le vrai philosophe n'est pas
Ce qu'un vain peuple s'imagine,
Un misanthrope dont l'humeur,
Poëmes philosoph.

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