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tin, qui n'a droit par lui-même à aucune consonne finale. Aussi n'en voit-on pas dans détromper, dédire, défaire, démentir, etc., où elle n'était point nécessaire. On écrivait à la vérité desdire, desfaire; mais c'était pour donner à l'e suivi d'une double consonne le son aigu, que nous obtenons aujourd'hui par l'accent.

DÉSESPÉRER, verbe neutre, se désespérer :

GEORGES DANDİN. Je désespère !

(G. D. III. 12.)

Les Anglais ont gardé cet emploi du même verbe :

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Palsgrave (1530), dans sa table des verbes, le donne comme verbe neutre et verbe réfléchi. Voici son article :

«

I Despayre, I am in wan hope. Je despère (sic) primæ conjugat. — Dispayre nat man: God is there he was wonte to be: ne te déspère « pas; Dieu est là où il souloyt estre. »

Par où l'on voit que désespérer est une forme moderne et allongée. On fit d'abord de desperare, despérer; puis, par l'insertion de l's euphonique (voy. DÉSENAMOURER), désespérer. La première forme est calquée sur le mot latin;

La seconde est ajustée sur le latin, d'après les habitudes françaises.

DÉSESPÉRÉ CONTRE QUELQU'UN :

J'étois aigri, fâché, désespéré contre elle !

DES MIEUX, comme ceux qui (ici le

..... Enfermez-vous des mieux.

Soyez des mieux enfermés.

(Ec. des fem. IV. 1.)

verbe) le mieux:

(Ec. des fem. V. 4.)

Voilà qui va des mieux.

Mais parlons du sujet qui m'amène en ces lieux. (Fem. sav. II. 1.)

DE SOI, en soi, par soi-même:

Cet accident, de soi, doit être indifférent.

Le choix du fils d'Oronte est glorieux, de soi.

La noblesse, de soi, est bonne.

(Ec. des fem. IV. 8.)

(Ibid. V. 7.)

(G. D. I. 1.)

De, dans cette locution, se rapporte au sens du latin de, c'est-à-dire, par rapport à soi, en ce qui la touche.

Il faut observer que ce mot moi est entré dans la langue pour traduire meus, et qu'à l'origine on ne le rencontre pas comme pronom de la première personne; c'est l'adjectif moi, moie; meus, mea. Par conséquent, de moi correspond exactement à la locution latine de meo, employée par Plaute, Térence et Cicéron, dans un sens à la vérité un peu différent, puisqu'il signifie à mes frais; mais mon observation porte surtout sur la forme matérielle.

Les Latins disaient aussi, de me, de te, pour de meo, de tuo : De te largitor (TER.): donne de toi. Sois généreux à tes propres dépens.

DÉSOSIER et DÉSAMPHITRYONNER. Voyez dé, particule inséparable en composition.

DESSALÉE; UNE DESSALÉE, une matoise, une rusée : Vous faites la sournoise; mais je vous connois il y a longtemps, et vous ètes une dessalée. (G. D. I. 6.) DESSOUS, substantivement; AVOIR DU DESSOUS :

Est-il possible que toujours j'aurai du dessous avec elle ? (G. D. II. 13.) Nous avons toujours du dessus et du dessous, de plus habiles et de

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« moins habiles, de plus élevés et de plus misérables, pour abaisser notre (PASCAL. Pensées. p. 229.)

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orgueil et relever notre abjection. »

Il est fâcheux qu'on ait laissé perdre cette expression utile, car on peut avoir du dessous sans avoir complétement le desC'est pour avoir eu trop souvent du dessous dans ses querelles de ménage, que Georges Dandin finit par avoir le dessous.

sous.

-DESSOUS, préposition avec un complément :

Je sais qu'il est rangé dessous les lois d'une autre. (Dép. am. II. 3.) Voyez DEDANS, DESSUS, DEVANT, DEVERS.

DESSUISSER (SE), quitter le rôle de Suisse :

Si vous êtes d'accord, par un bonheur extrême,
Je me dessuisse donc, et redeviens moi-même,

DESSUS, préposition:

Le bonhomme tout vieux chérit fort la lumière,
Et ne veut point de jeu dessus cette matière.

(L'Et. V. 7.)

(L'Et. III. 5.)

Vous étendiez la patte
Plus brusquement qu'un chat dessus une souris.

(Ibid. IV. 5.)

Attaché dessus vous comme un joueur de boule
Après le mouvement de la sienne qui roule.
Je veux, quoi qu'il en soit, le servir malgré lui,
Et dessus son lutin obtenir la victoire.
Faites parler les droits qu'on a dessus mon cœur.

(L'Et. IV. 5.)

(Ibid. V. 11.) (Dép. am. I. 2.)

Il pourroit bien, mettant affront dessus affront,
Charger de bois mon dos comme il a fait mon front.
Dessus ses grands chevaux est monté mon courage.
Dessus quel fondement venez-vous donc, mon frère....

(Sgan. 17.) (Ibid. 21.)

(Ec. des mar. III. 9.)

Si j'avois dessus moi ces paroles nouvelles,
Nous les lirions ensemble, et verrions les plus belles. (Fách. I. 5.)
Pour moi, venant dessus le lieu,

J'ai trouvé l'action tellement hors d'usage....

Dessus et dessous étaient originairement

comme leurs formes plus simples, sur et sous.

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(Ibid. II. 7.) prépositions,

(Rois. p. 209.)

Abaissez as dessuz mei ces ki esturent (steterunt) encuntre mei. » (Ibid.)

C'est la subtilité des grammairiens modernes qui a inventé de partager la puissance entre sur, sous, et dessus, dessous, et de réduire les seconds au rôle exclusif d'adverbes.

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Malherbe et Racan disaient sans scrupule: dessus mes volontés; dedans la misère; ce sera dessous cette égide, et Port-Royal s'y accorde; mais l'oracle Vaugelas n'avait pas encore parlé ! Il parle, et Ménage déclare, d'après lui, que ces mots, comme prépositions, « ne sont plus du bel usage. » Toutefois Vaugelas veut bien, par grâce, excepter de sa règle trois façons de parler :

1° « Quand on met de suite les deux contraires. Exemple : Il n'y a pas assez d'or ni dessus ni dessous la terre.

2° « Quand il y a deux prépositions de suite, quoique non contraires : - Elle n'est ni dedans ni dessus le coffre. 3o « Lorsqu'il y a une autre préposition devant : :---- -Pardessus la tête, par-dessous le bras, par dehors la ville, » etc. L'usage, en rejetant les deux premiers articles de cette loi, a confirmé le dernier, qui n'est pas plus justifié que les deux autres. Que de caprice et d'arbitraire dans tout cela ! En vé

rité, quand on examine les actes de ces tyrans de notre langue, on est honteux d'être soumis à leur autorité.

J'oubliais de dire que Vaugelas reçoit comme légitime dans les vers ce qu'il condamne comme solécisme dans la prose. (Voyez dedans, dessous, devant, devers.)

DÉTACHER (SE) CONTRE QUELQU'UN, se déchaîner :

Et son jaloux dépit, qu'avec peine elle cache,
En tous endroits sous main contre moi se détache.

(Mis. III. 3.)

DÉTERMINER A, dans le sens d'ordonner de :

Et cet homme est monsieur, que je vous détermine

A voir comme l'époux que mon choix vous destine. (Fem. sav. III. 6.) DÉTOUR, angle formé par une rue ou quelque saillie de maison; COIN D'UN DÉTOUR :

Un de mes gens la garde au coin de ce détour. (Ec. des fem. V. 2.)

DÉTOURNEMENT DE TÈTE:

Leurs détournements de tête et leurs cachements de visage firent dire cent sottises de leur conduite. (Crit. de l'Ec. des fem. 3.)

DÉTRUIRE QUELQU'UN, ruiner son crédit :

Quel mal vous ai-je fait, madame, et quelle offense,
Pour armer contre moi toute votre éloquence,

Pour me vouloir détruire, et prendre tant de soin

De me rendre odieux aux gens dont j'ai besoin? (Fem. sav. IV. 2.)

DEVANT, préposition, pour avant :

Je crie toujours, Voilà qui est beau! devant que les chandelles soient allumées.

Et, devant qu'il vous pût ôter à mon ardeur,

(Préc. rid. 10.)

Mon bras de mille coups lui perceroit le cœur. (Ec. des mar. III. 3.)

« Celle-ci prévoyoit jusqu'aux moindres orages,

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a

« A vous parler franchement, l'intérêt du directeur va presque tonjours « devant le salut de celui qui est sous la direction.

(ST.-ÉVREMONT. Conv. du P. Canaye.)

>>

Il lui demanda, devant que de l'acheter, à quoi il lui seroit propre. (LA FONTAINE, Vie d'Esope.)

Les grammairiens n'ont pas manqué d'exercer sur avant et devant la sagacité de leur esprit subtil. Ils signalent entre avant et devant une différence essentielle, et dont il importe de se bien pénétrer : c'est que « avant est plus abstrait, et devant « plus concret (1). » C'est la raison qui fait que, suivant le même auteur, « on n'emploie plus devant par rapport au « temps. » L'argument ne paraît pas concluant.

Un autre assure que « le génie de notre langue établit une << différence entre les déterminatifs avant et devant (2). » Ce que je puis à mon tour assurer, c'est que devant se trouve comme synonyme d'avant, dans le berceau de notre langue. La traduction des Rois, faite au x1° siècle, s'en sert sans scrupule : <«< E pis que nuls qui devant lui out ested envers « N. S. uverad (p. 30g), » Asa ouvra envers N. S. pis que nul qui eût été devant lui.

M. Nap. Landais peut-il se flatter de connaître le génie de la langue française mieux que ceux qui l'ont créée; mieux que Bossuet, Pascal, Corneille, Molière, et la Fontaine ?

Avant, devant, sont deux formes du même mot inventées pour les besoins de l'euphonie et de la versification, comme dans et dedans, sur et dessus, sous et dessous. La perte de ces doubles formes a été préjudiciable surtout à la poésie, et la suppression de ces petites ressources a contribué, plus qu'on ne pense, à la décadence de l'art.

Comme en certains cas donnés l'on employait indifféremment à et de (voyez DE remplaçant à devant un verbe), de même on substituait l'un à l'autre avant et devant.

Dedans, dessus, dessous, devers, sont dans le même cas. (Voyez ces mots.)

(1) Des Synonymes français, par M. B. Lafaye.

(2) Résumé de toutes les grammaires, par N. Landais.

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