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Archaïsme, comme ne plus, ne moins. On voit que Thomas Diafoirus est issu de vieille bourgeoisie. On a dit, en ôtant l's d'ore, dorenavant, et l'on met aujourd'hui un accent sur l'é, dorénavant; en sorte que les racines de ce mot sembleraient être doré et navant. C'est d'ora in avanti, d'ore en avant.

Il est fâcheux que l'Académie consacre l'orthographe et la prononciation vicieuses.

DORMIR SA RÉFECTION, ce qu'il faut pour se refaire.

Le sommeil est nécessaire à l'homme; et lorsqu'on ne dort pas sa réfection, il arrive que............. (Prol. de la Pr. d'Él., 2.) DOS; TOMBER SUR LE DOS A QUELQU'UN, en parlant d'un événement fàcheux :

Il faut que tout le mal tombe sur notre dos.
DOT, substantif masculin, archaïsme :

L'ordre est que le futur doit doter la future
Du tiers du dot qu'il a.

(Sgan. 17.)

(Éc. des fem. IV. 2.)

Les éditeurs modernes ont substitué « du tiers de dot. » — Il faudrait au moins du tiers de la dot.

C'est une raillerie que de vouloir me constituer son dot de toutes les dépenses qu'elle ne fera point. (L'Av. II. 6.) Montaigne fait toujours dot masculin. Ménage : « Il faut dire la dot et non pas le dot, comme dit M. de Vaugelas dans sa traduction de Quinte-Curce, et M. d'Ablancourt dans tous ses livres. Nicot dit le dost, qui est encore plus mauvais que le dot.» (Obs. sur la lang. fr. p. 126.)

L'Avare est de 1668, et Ménage écrivait ses observations en 1672, un an avant la mort de Molière. C'est donc vers cette seconde date que le genre du mot dot a été fixé au féminin. M. Auger cite ce vers du Riche vilain :

Le

« Un grand dot est suivi d'une grande arrogance. »

moyen âge disait dos fém., et dotum, neutre. (Voyez DU CANGE, au mot dotum.)

DOUBLE, substantif, pièce de monnaie :
Vous ne les auriez pas, s'il s'en falloit un double.

(Méd. m. lui. I. 6.)

Il n'y a point de monsieur maître Jacques pour un double ! (L'Av. III.6.)

C'est-à-dire qu'il se tient plus cher, à plus haut prix. Le double était une petite monnaie de billon. Il n'y en a point pour un double, espèce d'adage pour exprimer un refus formel, une dénégation.

DOUBLE FILS DE PUTAIN:

(Amph. III. 7.)

Double fils de putain, de trop d'orgueil enflé. Put, pute, du latin putidus, par apocope, ancien adjectif qui signifiait à peu près vilain, vilaine. Il est encore d'usage dans les Vosges et la Franche-Comté. Un vieux noël en patois lorrain, sur l'Épiphanie, dit, en parlant du roi d'Ethiopie :

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Qui ot ce put chabrouillé ?» Qui est ce vilain barbouillé ?

La terminaison uin s'ajoutait volontiers, dans les premiers temps de la langue, aux noms de femme ou de femelle. Eve, Èvain; Berte, Bertain. Dans le roman de Renard, la poule s'appelle Pinte et Pintain. M. Ampère pense que c'est un vestige d'anciennes déclinaisons, et la marque du cas oblique ; je suis plus porté à y voir simplement une forme de diminutif. DOUCEUR DE COEUR, tendresse, amour :

Il se rend complaisant à tout ce qu'elle dit,

Et pourroit bien avoir douceur de cœur pour elle. (Tart. III. 1.) DOUTER, verbe actif. DOUTER QUELQUE CHOSE, c'est-à-dire, le redouter, le tenir suspect :

Sous couleur de changer de l'or que l'on doutoit.

De l'or que l'on craignait qui ne fût faux.

(L'Et. II. 7.)

Douter, se disait jadis en la forme simple; redouter marquait la répétition, l'augmentation de la crainte. Nicot dit:

« DOUBTER, hesitare, dubitare, vereri, timere. »

« Il n'y a homme tant hardi qui ne doubte trop d'en aller cueillir. ›

CLOVIS à saint Remi.

«

Corps et ame dedans ces fons,

"Sire arcevesque, nous lavez

(Amadis. livre II.)

« Pour nous garder d'aller à fons

« D'enfer, qui tant fait à doubter.» (Mystère de Ste Clotilde.)

Froissart ne connaît que le verbe douter ou se douter, pour signifier redouter:

« Le clerc se doubta du chevalier, car Il estoit crueux.......... il vint en « presence du sire de Corasse, et luy dit:.... Je ne suis pas si fort en ce pays comme vous estes; mais sachez que, au plustost que je pourrai, je « vous envoierai tel champion que vous doubterez plus que vous ne faictes « moi. Le sire de Corasse..... luy dict: Va à Dieu, va; fais ce que tu peux: je te doubte autant mort que vif. »

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(FROISSART. Chron. III. ch. 22.)

Se douter avait le même sens. Pathelin confie à sa femme son plan pour duper le drapier: Bon, dit Guillemette:

«

Mais se vous renchéez arriere,

« Que justice vous en repreigne,

« Je me doute qu'il ne vous preigne

« Pis la moitié qu'à l'autre fois. »

(Pathelin.)

<< Mais si vous ne réussissez pas, et que la justice s'en mèle, j'ai peur qu'il ne vous en arrive la moitié pis que la dernière fois. >>

DOUZE, dans une espèce de rébus ou de calembour trivial :

JACQUELINE. Je vous dis et vous douze (10 et 12) que tous ces médecins n'y feront rian que de l'iau claire. (Méd. m. lui. II. 2.)

DRAPS BLANCS; METTRE QUELQU'UN DANS DE BEAUX DRAPS BLANCS, par ironie :

Ah! coquines, vous nous mettez dans de beaux draps blancs !

DRESSER; DRESSER UN ARTIFICE:

Et s'il faut par hasard qu'un ami vous trahisse,
Que pour avoir vos biens on dresse un artifice?

(Préc. rid. 18.)

(Mis. I. 1.) Mais pour lequel des deux princes au moins dressez-vous tout cet artifice?

DRESSER SA PROMENADE VERS.

(Am. magn. IV. 4.)

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la diriger:

Dressons notre promenade, ma fille, vers cette belle grotte où j'ai pro

mis d'aller.

(Ibid. III. 1.)

« Elle dressa donc ses pas vers le lieu où elle avoit vu cette fumée. (LA FONT. Psyché. II.)

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"

DU, pour que le :

(Ec. des mar. I. 1.)

C'est un étrange fait du soin que vous prenez
A me venir toujours jeter mon âge au nez,
C'est dommage du gentilhomme, quand il est ainsi mort. »

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(FROISSART. Chron. II. ch. 30.)

Voyez que c'est du monde et des choses humaines! »

(Voyez DE remplaçant que le.)

(REGNIER, le mauvais Giste.)

DULCIFIÉ, au sens métaphorique :

....

GROS-RENÉ.

Voilà tout mon courroux

Déjà dulcifié; qu'en dis-tu, romprons-nous?

DULCIFIANT, adjectif:

SGANARELLE. Quelque petit clystère dulcifiant.

(Dép, am. IV. 4)

Méd. m, lui. II. 7.

DU MATIN, dès le matin :

Mais demain, du matin, il vous faut être habile

A vider de céans jusqu'au moindre ustensile.

DU GRAND MATIN, dès le grand matin :

(Tart. V. 4.)

Aujourd'hui il est trop tard; mais demain, du grand matin, je l'enverrai querir.

DU MIEUX QUE:

(Mal, im. I. 10.)

Allez; si elle meurt, ne manquez pas de la faire enterrer du mieux que vous pourrez.

(Med, m. lui. III. 2.)

(Voyez DE exprimant la cause, la manière.)

DU MOINS, pour au moins:

Je vais gager qu'en perruques et rubans il y a du moins vingt pistoles.

C'est pour éviter l'hiatus a au.

DUPE A (un infinitif) :

(L'Av. I. 5.)

Et moi, la bonne dupe à trop croire un vaurien.... (L'Et. II. 5.) Et moi, qui en croyant un tel vaurien suis une trop bonne

dupe.

(Voyez a (un infinitif), capable de, de nature à.)

DURANT QUE:

Je vous dirai..... que, durant qu'il dormoit, je me suis dérobée d'auprès de lui....

(G. D. III. 12.)

C'est le participe ablatif absolu des Latins : durante quod, comme pendant que, pendente quod.

DURER CONTRE Quelqu'un, durer A QUELQUE CHOSE: CLAUDINE. Il a tant bu, que je ne pense pas qu'on puisse durer contre lui. G. D. III. 12.)

Il faut observer que ce durer est devenu du style de servante, mais que cette servante parle comme Tite-Live : « Nec poterat durari extra tecta. » On ne pouvait durer hors des maisons; et comme Plaute : « Nequeo durare in ædibus.» Je ne puis durer chez nous.

durate, atque exspectate cicadas.» (JUVEN. IX. 69.)

Au surplus, Molière a relevé cette expression, en la mettant dans la bouche de l'aimable et spirituelle Élise :

Pensez-vous que je puisse durer à ses turlupinades perpétuelles ?

DU TOUT :

(Crit. de l'Ec. des fem. 1.)

Mon fils, je ne puis du tout croire

Qu'il ait voulu commettre une action si noire.

(Tart. V. 3.)

Je relève ces vers, uniquement pour avoir occasion d'observer que du tout ne s'emploie plus aujourd'hui qu'en des formules négatives, mais qu'il entrait aussi originairement dans des phrases affirmatives. Par exemple :

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«Nostre Seignur Deu del tut siwez et de tui vostre quer servez. »

(Rois. p. 41.)

Suivez du tout, c'est-à-dire, absolument, sans restriction , Notre Seigneur Dieu. — Nous sommes appauvris de la moitié de cette locution.

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Quand je me confie entièrement en vous, quand je vous livre ma mort et ma vie.

E muet étouffé pour la mesure:

Les flots contre les flots font un remue-ménage. (Dép. am. IV. 2.) L'édition de P. Didot écrit remú-ménage; l'édition faite sous les yeux de Molière, remue-ménage.

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