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Cette locution n'a de remarquable que la façon dont Molière l'a placée. Clitandre agit en homme qui vous aime ; c'est la manière de parler toute naturelle en homme se rapporte au sujet Clitandre. Le sens et la grammaire sont d'accord.

:

Mais ma fille, considérez monsieur en homme dont....., en homme ne se rapporte plus du tout au sujet, et semble prêter à une équivoque, comme si l'on disait : Madame, considérez ce malheur en homme courageux, c'est-à-dire, comme si vous étiez un homme courageux.

Cette équivoque est ici impossible, et le sens saute aux yeux; mais enfin j'ai cru qu'il y avait matière à une observation, par rapport à la rigueur de l'exactitude grammaticale.

EN, à la manière de : EN DIABLE. Voyez DIABLE.

EN surabondant; EN ÊTRE DE MÊME :

Il est très-naturel, et j'en suis bien de méme. Hé oui, la qualité! la raison en est belle!

Ah! ah! tu t'en avises,

Traître, de l'approcher de nous!

(Dép. am. I. 3.)

(D. Juan. I. 1.)

(Amph. II. 2.)

Mais de vous, cher compère, il en est autrement. (Éc. des fem. I. 1.)

De vous, dans ce dernier exemple, est pour quant à vous, de te quant à vous, il en est autrement. On ne peut donc pas dire que en y fasse un double emploi réel.

Quels inconvénients auroient pu s'en ensuivre!

(Amph. II. 3.)

Molière suivait ici la règle et l'usage de son temps.

Le grammairien la Touche, dans son Art de bien parler français, dit, à l'article du verbe s'ensuivre : « Dans les temps composés, on met toujours la particule en devant l'auxiliaire étre:-Ce qui s'en est ensuivi; les procédures qui s'en étaient ensuivies. » (T. II, p. 204.)

Nos pères composaient avec en tous les verbes qui expriment une idée de mouvement, soit progrès, dérangement, métamorphose: - S'ensauver, s'enpartir, s'endormir, s'entourner, s'enaller, s'enrepentir, etc., etc. On disait de même activement, enoindre, enamer, enappeler, ensuivre, etc., dont les simples sont aujourd'hui seuls usités :

<< Je n'ignore pas les lois de la nostre (politesse); j'aime à les << ensuivre. » (MONTAIGNE.)

Ces verbes se construisaient encore avec la préposition en, même au commencement du 18° siècle. Fontenelle, dans l'Histoire des oracles : « Voyons ce qui s'en est ensuivi ; » et l'abbé d'Olivet, dans sa Prosodie: « De là il s'ensuit...; » ce que M. Landais, avec sa confiance intrépide et accoutumée, ne manque pas d'appeler un solécisme, à cause, dit-il, de la répétition vicieuse des deux en.

Il n'y a pas là de répétition vicieuse, ni de solécisme, non plus que lorsque nous disons d'un homme épris d'une femme : il en est enflammé; il en est ensorcelé ;

cage

-Vous avez ouvert la

de ces oiseaux; il s'en est envolé deux.

Ensuivre, traduction d'insequi, comme poursuivre de persequi, est dans Nicot et dans Trévoux. Le dimanche ensuivant, pour le dimanche suivant, est du style de procédure.

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Qu'on n'est pas où l'on croit, en me faisant injure. (Tart. IV. 7.) Sosie croit être dans le palais d'Amphitryon, Orgon croit être chez soi; et ni l'un ni l'autre ne s'abuse par cette croyance. Mais il s'agit ici d'un point moral, et non du lieu physique : c'est pourquoi je pense qu'il n'est pas permis de supprimer cet en, qui marque la différence des deux locutions étre quelque part et en étre à.....

EN, relatif à un nom de personne :

C'est pourquoi dépêchons, et cherche dans ta tête

Les moyens les plus prompts d'en faire ma conquête. (L'Ét. I. 2.) De faire

que Célie soit ma conquête.

Le plus parfait objet dont je serois charmé

N'auroit pas mon amour, n'en étant point aimé.

C'est-à-dire, si je n'en étais pas aimé.

(Dép, am. I. 3.)

(Voyez PARTICIPE PRÉSENT, pour si suivi d'un conditionnel.) Arnolphe dit d'Agnès:

Je l'aurai fait passer chez moi dès son enfance,

Et j'en aurai chéri la plus tendre espérance. (Éc. des fem. IV. 1.) L'espérance d'Agnès, c'est-à-dire que donnait Agnès.

Ce n'est là qu'une ébauche du personnage; et, pour en achever le portrait, il faudroit bien d'autres coups de pinceau.... (D. Juan. I. 1.)

Mes justes soupçons chaque jour avoient beau me parler, j'en rejetois la voix qui vous rendoit criminel.

Allons, cédons au sort dans mon affliction ;
Suivons-en aujourd'hui l'aveugle fantaisie.

(Ibid. I. 3.)

(Amph. III. 7.)

Le sort est personnifié dans cet exemple, comme les soup

çons dans le précédent.

Et tandis qu'au milieu des boétiques plaines

Amphitryon son époux

Commande aux troupes thébaines,

Il en a pris la forme.

Jupiter a pris la forme d'Amphitryon.

(Ibid. prol.)

EN, construit avec un verbe, avec ALLER:

Il faut que ce soit elle, avec une parole

Qui trouve le moyen de les faire en aller. (D. Garcie. IV. 6.) Vous ne voulez pas faire en aller cet homme-là? (Impromptu. 2.) L'usage est fort ancien de supprimer le pronom réfléchi : (Voyez ARRÊTER et PRONOM RÉFLÉCHI.)

Ne devrait-on pas écrire tout d'un mot enaller, comme enflammer, s'envoler, s'enfuir, et tous les composés avec en?

Pourquoi la tmèse est-elle prescrite au participe passé de ce verbe, tandis qu'elle est défendue dans les analogues? Pourquoi faut-il absolument dire il s'en est allé, et ne peut-on dire il s'en est volé, il s'en est flammé ?

Le peuple dit toujours il s'est enallé.

Le livre des Rois tantôt fait la tmèse, et tantôt non.

Ce qui a placé ce verbe dans une catégorie particulière, c'est peut-être l'irrégularité de ses formes à certains temps.

On trouve, dès l'origine de la langue, en aller avec ou sans le pronom réfléchi :

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« A tant Samuel s'enturnad, e en Gabaa Benjamin s'enalad, e li altre «enalerent od Saul. »

(Rois. p. 44.)

On rencontre, à l'impératif, en va, sans le pronom, et va-t-en, avec le pronom :

« Pur co, enva e oci e destrui Amalech. »

(Ibid. p. 53.)

« Truvad Cisnee, ki cusins fu Moysi, e bonement li dist: Vat en d'ici.

(Ibidem.)

-EN (S') ALLER, pour aller simplement. Molière affectionne la première forme :

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Le commissaire viendra bientôt, et l'on s'en va vous mettre en lieu où

l'on me répondra de vous.

(Méd. m. lui. III. 10.)

Mais son valet m'a dit qu'il s'en alloit descendre.

(Tart, III. 1.)

-Avec devoir; EN DEVOIR A QUELQU'UN :

Il ne vous en doit rien, madame, en dureté de cœur. (Princ, dÉl. III. 5.)

- Avec donner et jouer; EN DONNER D'une, et en JOUER D'UNE AUTRE :

Bon, bon! tu voudrois bien ici m'en donner d'une. (Dép, am. III. 7.)
Pour toi premièrement, puis pour ce bon apôtre,

Qui veut m'en donner d'une, et m'en jouer d'une autre.

(L'Ét. IV. 7.)

Le mot de l'ellipse paraît être le substantif bourde ou plutôt bourle.

(Voyez BOURLE.)

- Avec être; EN ÊTRE JUSQU'A (un infinitif):

Pour moi, j'en suis souvent jusqu'à verser des larmes.

(Psyché, I. 1.)

Avec payer:

Non, en conscience, vous en payerez cela,

(Méd. m. lui. I. 6.)

-Avec planter, EN PLANTER A QUELQU'UN :

Je sais les tours rusés et les subtiles trames

Dont, pour nous en planter, savent user les femmes.

(Éc. des fem. I. 1.) En figure ici le mot cornes, qu'on laisse de côté par bien

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Est-ce que j'en puis mais ? Lui seul en est la cause. (Ibid. V.4.) Mais est le latin magis, qu'on prononçait, dans l'origine, en deux syllabes: ma-his, l'aspiration remplaçant le g du latin. Mais signifie donc plus, davantage; et je n'en puis mais, non possum magis, c'est-à-dire, je n'en puis rien, pas plus que vous ne voyez.

EN POUVOIR QUE DIRE, locution elliptique :
Beaucoup d'honnêtes gens en pourroient bien que dire.

(Ec. des fem. III. 3.)

Pourraient bien avoir ou savoir que dire de cela.

Que représente ici quod,

que sage; c'est faire ce que

-EN,

comme dans cette locution: faire fait le sage.

construit avec un substantif ou un adverbe;

EN ALGER:

Il va vous emmener votre fils en Alger. — On t'emmène esclave en Alger! (Scapin. II. 11.) Cette façon de parler est née de l'horreur de nos pères pour l'hiatus, même en prose. A Alger, leur paraissait intolérable. En pareil cas, ils appelaient à leur secours les consonnes euphoniques, dont l'n était une des principales, et disaient : aller A(n) Alger. L'identité de prononciation a fait écrire par e, en Alger.

« Je serai marié, si l'on veut, en Alger.» (CORNEILLE. Le Ment.) Aujourd'hui, que l'euphonie de notre langue a été détruite par l'intrusion des habitudes étrangères, tous les journaux.

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