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ser l'épreuve du feu, à laquelle les individus veulent rarement se soumettre lorsqu'ils ne sont pas malades: On a de la peine à imaginer jusqu'à quel point les imposteurs peuvent pousser l'audace; le fait suivant est propre à en donner une idée. « On amena un jour à la visite, sur une charrette, un jeune homme ayant la tête enveloppée de linges, comme Agnelet, se disant paralytique du côté gauche. On le descendit avec peine, et on le conduisit à la salle de visite, soutenu par ses parens. Il avait la figure décomposée, la bouche tournée à droite, et la salive s'échappait par la commissure droite des lèvres ; il bégayait, avait l'air hébété, tenait ses bras appuyés contre la poitrine, la main fléchie et le pouce en dedans; il marchait en traçant un demicercle. Ses camarades le plaignaient, et tout le monde parut touché de son sort. On racontait qu'il avait fait une chute de plus de trente pieds de haut sur le côté droit de la tête, et qu'on avait été sur le point de le trépaner: des chirurgiens attestaient cette circonstance, et ajoutaient qu'il avait été saigné cinq fois. Il fut réformé. Nous l'avions examiné attentivement, suivi tous ses mouvemens, et nous avions remarqué qu'il y avait peu d'accord entre ses yeux et le reste de la face. Nous le vìmes sourire malignement à sa mère, lorsqu'on lui eut dit de passer au bureau pour avoir une expédition de sa réforme.» (Art. SIMULATION du Dictionnaire des sciences médicales.)

Paralysie des paupières. (Voyez Maladies simulées par provocation, page 36.)

Claudication. Il est ordinairement aisé de reconnaître si la claudication est simulée, en comparant atten

tivement les deux membres, ainsi que les articulations, et en faisant quelques tentatives pour allonger celui qui a été raccourci ; car alors l'individu avoue son imposture pour éviter la douleur. Il est arrivé pourtant que les chirurgiens les plus habiles ont été dupés par des hommes qui, à la suite d'une chute, se sont dits boiteux, et ont simulé la claudication pendant plusieurs années, quoiqu'on eût employé vis-à-vis d'eux les moyens que nous avons conseillés.

Contracture. Il n'est pas rare de voir les personnes qui veulent s'exempter du service militaire simuler la contracture des doigts, de la jambe et du rachis.-Contracture des doigts. On peut parvenir à recourber un ou plusieurs doigts, en les tenant pendant long-temps dans un état continuel de flexion, au moyen d'un bandage approprié; quelquefois même, pour mieux faire prendre le change, on brûle une portion de la peau sur le trajet des tendons des muscles fléchisseurs. On peut soupçonner la ruse, si on trouve les muscles de l'avant-bras tendus et contractés, et si le membre est bien nourri. Alors on peut avoir recours au moyen proposé par MM. Percy et Laurent, qui leur a parfaitement réussi dans deux circonstances. Après avoir appliqué un bandage roulé et très-serré autour de l'avant-bras, on fit passer le membre par l'un des trous d'une guérite, et, à l'aide d'une sonde à séton, on passa sous les doigts contractés un ruban auquel on suspendit un poids de six livres : la main et le bras ne tardèrent pas plus de six minutes à trembler; et au bout de quatre autres le poids tomba, et les doigts furent redressés. Il y aurait de l'inhumanité à faire de pareilles tentatives

dans le cas où la contracture serait évidemment l'effet d'une brûlure: les suites de cet accident seraient facilement reconnues à la maigreur de la main et des doigts, aux cicatrices, au soulèvement et à la tension des tendons, etc. - Contracture de la jambe. On a vu des hommes faire usage pendant long-temps d'un talon très-élevé, pour que le genou fût porté en avant, exercer ensuite une compression prolongée sur la jambe, pour en déterminer l'amaigrissement, et simuler ainsi une maladie dont ils attribuaient la cause à une fracture ancienne, à un rhumatisme, etc. Souvent on a découvert la supercherie, en mesurant comparativement les deux membres, depuis l'os des îles jusqu'au gros orteil, et en redressant celui qui paraissait courbé, au moyen d'une forte pression exercée sur le genou; d'autres fois il a suffi de dire aux assistans qu'il était facile d'étendre la jambe, mais que rien ne la pouvait empêcher de se contracter de nouveau, pour que le fourbe qui avait été dupe de ce propos étendît sa jambe aussitôt qu'on pressait sur le genou. Il est des circonstances où l'individu contractait les muscles avec une telle force, qu'il a fallu appliquer sur la cuisse un bandage roulé bien serré et mouillé, pour empêcher les fléchisseurs de la jambe de se contracter; enfin, il a été souvent possible de démasquer l'imposture en plaçant l'individu sur un piquet un peu élevé, et en le forçant de se tenir en équilibre sur la bonne jambe; le membre contracté ne tardait pas alors à trembler et à s'allonger. « Douze hommes soumis à cette dernière épreuve, disent MM. Percy et Laurent, n'ont pu y résister. Contracture du rachis. Les chirurgiens militaires ont été souvent trompés

par des personnes qui simulaient un lumbago avec courbure du rachis, et qui avaient enduré des vésicatoires, des moxas, etc., sans avouer leur stratagème. On est parvenu quelquefois à redresser ces fourbes, en les piquant par derrière avec une longue aiguille, au moment où ils s'y attendaient le moins.

Obstipation, c'est-à-dire tête penchée d'un côté. Si elle est simulée, le muscle sterno-cléido-mastoïdien du côté opposé à celui qui est penché est tendu; il ne l'est pas, au contraire, dans l'obstipation réelle; d'ailleurs il est difficile que l'imposteur puisse tourner les yeux du côté opposé à la courbure, ce qui n'a pas lieu lorsque la maladie n'est pas simulée. Il suffit de faire quelques légers efforts pour ramener la tête à sa position naturelle, dans les cas de stratagème.

Convulsions. On distingue facilement les convulsions simulées de celles qui sont réelles, parce que dans les premières les muscles ne se raidissent pas, et qu'ils sont loin de se contracter avec la même énergie et la même promptitude que dans les autres; il suffira donc, pour découvrir la fraude, d'agir avec force sur les muscles antagonistes.

Tremblement. Il est extrêmement aisé d'imiter cette affection, mais il est facile de découvrir la ruse en surveillant attentivement les individus au moment où ils croient être seuls..

Douleurs nerveuses, rhumatismales, etc. Il est dif ficile d'en imposer à un observateur attentif, lorsqu'on dit éprouver des douleurs dans les poumons, dans la plèvre, dans l'estomac ou dans tout autre viscère important, parce que les prétendus malades ne simulent

aucun des autres symptômes dont les lésions de ces organes s'accompagnent presque constamment, tels que la toux, la difficulté de respirer, l'expectoration, les nausées, la fièvre, etc. Il n'en est pas de même des douleurs rhumatismales, de la sciatique, etc., qui peuvent ne pas déterminer de changement sensible dans les fonctions de l'économie animale: aussi combien de fois la sagacité des gens de l'art n'a-t-elle pas été mise en défaut par les imposteurs! Un homme simule une douleur fixe et profonde au genou gauche ; il supporte à plusieurs reprises le vésicatoire et le moxa; la jambe se contracte peu à peu, on l'envoie aux eaux, et il n'obtient sa réforme qu'après avoir été infructueusement secouru dans les hôpitaux pendant quatre ans; à peine voit-il que son but est rempli, qu'il jette au feu la jambe de bois dont il avait fait usage pendant trois ans, et il se vante d'avoir trompé ceux qui l'avaient soigné. (Percy et Laurent.) On ne saurait donc être trop sur ses gardes ; c'est ici le cas de ne négliger aucun des moyens propres à intimider le plaignant lorsqu'on a des motifs de le soupçonner d'imposture.

Nostalgie. Cette maladie n'est point considérée comme un cas de réforme, quoiqu'il soit avéré que ceux qui en sont profondément atteints périssent si on ne les renvoie près des personnes et des lieux qu'ils regrettent: elle est pourtant simulée assez souvent par les militaires qui espèrent sans doute obtenir un congé. Le faux nostalgique affecte toujours de demander à revoir son pays, et il ne parvient jamais à feindre l'ensemble des phénomènes que l'on observe dans la vraie nostalgie; savoir, une tristesse profonde, à laquelle succède

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