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Elle est de couleur . . . là, d'une certaine couleur . Ne sauriez-vous m'aider à dire?

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Eh! oui, gris-rouge: c'est ce que je voulais dire.

...

HARPAGON.

Il n'y a point de doute: c'est elle assurément. ÉcriIo vez, Monsieur, écrivez sa déposition. Ciel! à qui désormais se fier? Il ne faut plus jurer de rien;1 et je crois après cela que je suis homme à me voler moimême.

MAÎTRE JACQUES.

Monsieur, le voici qui revient. Ne lui allez pas dire 15 au moins que c'est moi qui vous ai découvert cela,

SCÈNE III

VALÈRE, HARPAGON, LE COMMISSAIRE, SON CLERC,
MAÎTRE JACQUES

1

HARPAGON.

Approche: viens confesser l'action la plus noire, l'attentat le plus horrible qui jamais ait été commis.

VALÈRE.

Que voulez-vous, Monsieur?

HARPAGON.

Comment, traître, tu ne rougis pas de ton crime?

VALÈRE.

De quel crime voulez-vous donc parler?

5

HARPAGON.

De quel crime je veux parler, infâme? comme si tu ne savais pas ce que je veux dire. C'est en vain que tu prétendrais de le déguiser: l'affaire est découverte, et l'on vient de m'apprendre tout. Comment abuser ainsi de ma bonté, et s'introduire exprès chez moi pour me 10 trahir? pour me jouer un tour de cette nature?

VALÈRE.

Monsieur, puisqu'on vous a découvert tout, je ne veux point chercher de détours et vous nier la chose,

MAÎTRE JACQUES.

Oh, oh! aurais-je deviné1 sans y penser?

VALÈRE.

C'était mon dessein de vous en parler, et je voulais attendre pour cela des conjonctures favorables; mais puisqu'il est ainsi, je vous conjure de ne vous point 5 fâcher, et de vouloir entendre mes raisons.

HARPAGON.

Et quelles belles raisons peux-tu me donner, voleur infâme?

VALÈRE.

Ah! Monsieur, je n'ai pas mérité ces noms. Il est vrai que j'ai commis une offense envers vous; mais, To après tout, ma faute est pardonnable.

HARPAGON.

Comment, pardonnable? Un guet-apens? un assas sinat de la sorte?

VALÈRE.

De grâce, ne vous mettez point en colèrc. Quand vous m'aurez oui, vous verrez que le mal n'est pas si 15 grand que vous le faites.

HARPAGON.

Le mal n'est pas si grand que je le fais! Quoi? mon sang, mes entrailles, pendard?

3

VALÈRE.

Votre sang, Monsieur, n'est pas tombé dans de mauvaises mains. Je suis d'une condition à ne lui point faire de tort, et il n'y a rien en tout ceci que je ne puisse bien réparer.

HARPAGON.

C'est bien mon intention, et que tu me restitues ce que tu m'as ravi.

VALÈRE.

Votre honneur, Monsieur, sera pleinement satisfait.

HARPAGON.

Il n'est pas question d'honneur là dedans. Mais, dismoi, qui1 t'a porté à cette action?

VALÈRE.

Hélas! me le demandez-vous?

HARPAGON.

Oui, vraiment, je te le demande.

VALÈRE.

Un dieu qui porte les excuses2 de tout ce qu'il fait faire: l'Amour.

HARPAGON.

5

10

L'Amour?

VALÈRE.

Oui.

15

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Bel amour, bel amour, ma foi! l'amour de mes louis d'or.

VALÈRE.

Non, Monsieur, ce ne sont point vos richesses qui m'ont tenté; ce n'est pas cela qui m'a ébloui, et je pro5 teste de ne prétendre rien à tous vos biens, pourvu que vous me laissiez celui que j'ai.

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HARPAGON.

Non ferai,' de par tous les diables!2 je ne te le laisserai pas. Mais voyez quelle insolence de vouloir retenir le vol qu'il m'a fait.

VALÈRE.

Appelez-vous cela un vol?

HARPAGON.

Si je l'appelle un vol? Un trésor comme celui-là!

VALÈRE.

C'est un trésor, il est vrai, et le plus précieux que vous ayez sans doute; mais ce ne sera pas le perdre que de me le laisser. Je vous le demande à genoux, ce 15 trésor plein de charmes; et pour bien faire, il faut que vous me l'accordiez.

HARPAGON.

Je n'en ferai rien. Qu'est-ce à dire cela ?*

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