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fédérés. Mais il n'est pas d'usage d'accorder l'extradition des étran-
gers accusés ou condamnés qui cherchent un asile aux
États-Unis.
Cependant, une loi de l'état de New-Yorck, en date du 5 avril 1822,
a autorisé le gouvernement à livrer aux gouvernements étrangers
les réfugiés accusés de meurtre, de faux, de vol ou d'autres crimes
que les lois de cet État punissent de mort ou d'emprisonnement.

VIII. Les actes d'extradition énonçant le fait qui donne lieu à l'extradition, l'individu qu'on a livré ne peut être jugé que sur ce fait. Si donc, pendant qu'on procède à l'instruction du crime pour lequel il est livré, il surgit des preuves d'un nouveau crime pour lequel l'extradition pourrait être également accordée, l'extradé ne peutêtre jugé de ce dernier chef que du consentement du gouvernement qui l'a livré. Le cas s'est présenté en Belgique : le 28 octobre 1852, le gouvernement français accorda l'extradition des époux K. du chef de faux en écriture de commerce. L'instruction instituée contre les époux K. aboutit à leur renvoi devant la cour d'assises de Liége sous l'accusation du crime de vol qualifié. Le gouvernement belge dût demander au gouvernement français son consentement à ce que l'on appliquât au dernier chef d'accusation l'extradition qui avait été autorisée et effectuée par lui.

La marche suivie en Belgique est également adoptée en France (circul. du garde des sceaux du 5 avril 1841, rapportée par Dalloz, année 1841, 3° partie, p. 439). S'il résulte de l'instruction que l'extradé ne doit pas être poursuivi pour le fait qui a donné lieu à l'extradition mais qu'il est coupable d'un fait non prévu par la loi sur les extraditions, il ne peut être poursuivi et doit être mis en liberté. Il n'est justiciable de nos tribunaux que dans les limites d'une loi d'exception. Les exceptions sont de stricte interprétation. IX. L'extradition d'un individu étant accordée à la France, par exemple, par la Prusse; les autorités belges pourraient-elles d'office prêter leur concours aux autorités françaises pour assurer la translation de l'extradé à travers le territoire belge? Des agents de la force publique belge pourraient-ils accompagner, un directeur de prison pourrait-il recevoir l'extradé? Evidemment non. La loi règle les cas où la privation de la liberté peut être ordonnée et consacre des formes protectrices. Il faudrait, dans le cas indiqué, qu'une demande d'extradition régulière fût présentée par le gouvernement français au gouvernement belge. Cette demande faite, le consentement du prisonnier suffirait pour sa translation immédiate; à défaut de ce con

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sentement, le gouvernement disposerait comme il le fait d'ordinaire en matière d'extradition. Pour que la translation soit possible, il faut donc qu'il existe une convention d'extradition.

CHAPITRE III.

CONVENTIONS RÈGLANT LE Mode de succéder et d'acquéRIR.

I. Le droit d'aubaine est le droit en vertu duquel le fisc s'empare, au préjudice des héritiers naturels, des biens qu'un étranger laisse à sa mort dans le royaume.

L'origine de ce droit est incertaine; on sait qu'il était inconnu des Romains.

Suivant quelques auteurs, il aurait été introduit en Belgique par Charlemagne.

Ce prince, après avoir plusieurs fois vaincu les Saxons, qui toujours recommençaient la guerre, résolut pour les soumettre d'une manière décisive de disperser leur armée dans ses différents États. Non content d'avoir ainsi dépaysé ses ennemis, il leur dta tout moyen d'action en les déclarant incapables de succéder ab intestat, de laisser leurs biens à leurs héritiers naturels ou d'en disposer par

testament.

Ces anciens habitants des bords de l'Elbe prirent, du lieu de leur origine, le nom d'Albini, dont on aurait fait le nom d'Aubains, et le droit qui s'exerçait sur leurs biens aurait été appelé droit des

aubains ou d'aubaine.

D'autres s'appuyant sur un diplôme de Louis le Débonnaire, portant immunité au profit d'une église, prétendent qu'on entendait par aubains, les individus habitant un domaine, mais ne faisant pas partie de la famille du propriétaire.

Ut nullus comes neque ulla judiciaria potestas ullum censum accipiat, nec de familia ipsius ecclesiæ, neque de aliis liberis hominibus vel incolis qui rusticè Albani appellantur in ipsâ terrâ sanctæ Mariæ manentibus.

D'autres enfin, prétendent qu'on entendait par aubain ou albain tous les étrangers. Ils tirent la preuve de leur opinion de l'étymologie du mot aubain ou albin, qui dérive, disent-ils, de alibi natus.

Quoi qu'il en soit, ce droit s'établit chez tous les peuples d'origine

germanique, et on donna le nom d'aubains à tous les étrangers, quelque pays qu'ils fussent originaires. Cet usage devint le principe d'une législation qui varia beaucoup. Tantôt le droit d'aubaine s'exerçait dans toute sa sévérité, tantôt il se réduisait à une petite part de la succession, et prenait alors le nom de droit de détraction (jus detractus); on l'appelait aussi droit de gabelle héréditaire.

A cette époque, non-seulement l'étranger était traité avec rigueur, mais le régnicole qui quittait le sol natal perdait une partie de sa fortune. On appelait gabelle ou cens d'émigration le droit qui était levé sur les biens meubles et immeubles des personnes qui quittaient le pays ou elles étaient nées ou dans lequel elles avaient été longtemps établies. Ce droit consistait à prélever une certaine quotité sur les biens de ceux qui émigraient ou à les confisquer intégralement.

Telle était la législation qui régissait l'étranger, quant à ses biens; relativement à sa personne, il recevait la même protection que l'habitant de la cité; il avait droit à la justice publique, et les Capitulaires défendent que, sous aucun prétexte, on expulse ceux qui sont mariés dans le lieu de leur séjour.

Les aubains ou albains, quoique tributaires, étaient donc rangés dans la classe des hommes libres.

Au XIIIe siècle le nombre des étrangers augmentait considérablement par suite des expéditions des barbares; les seigneurs justiciers, non contents de s'emparer des débris de la fortune de ces malheureux exilés, commencèrent à les priver de la liberté.

L'asservissement de l'étranger ne fut toutefois pas, dans le droit coutumier, un principe général; cette règle s'établit seulement là où la violation par les seigneurs justiciers des défenses législatives fut plus habituelle. Les souverains se constituaient défenseurs des étrangers.

Il n'en fut pas longtemps ainsi : le privilége infâme de réduire l'étranger à l'esclavage, abus odieux de la force, que combattaient les rois barbares et que cherchaient à proscrire les conseillers de Charles-le-Chauve 1, fut disputé aux seigneurs par les rois de la troisième race; le malheureux échappé à la main seigneuriale vint retomber sous la serre des officiers royaux.

Le pouvoir royal n'intervint pas d'abord directement; il com

Voir un capitulaire rapporté par Baluze, t. II, p. 66. 9.

mença par se substituer aux justiciers qui omettaient d'exercer leur droit. «Quand aucuns albins, dit Beaumanoir, Coutume de Champagne, vient demeurer dans la justice d'aucuns seigneurs et li sire dessous qui il vient, ne prend le terrien dans l'an et jour, si les gens du roi le savent, ils en prennent le service, et est acquis

au roi. »

Lorsque l'esclavage fut aboli, les aubains continuèrent à rester incapables de disposer par testament et leur succession fut appréhendée par les seigneurs justiciers. Les agents du domaine royal revendiquèrent alors sur les biens le droit de substitution qu'ils s'étaient attribué sur la personne.

Dès le règne de Philippe-le-Bel, ce droit secondaire parût insuffisant au domaine royal. On voit les seigneurs se plaindre de toute part de ce que les agents du roi s'emparent de leurs aubains. Une ordonnance de 1301 fait droit à leurs plaintes; mais, en même temps, elle consacre l'introduction légale du domaine royal dans le droit d'aubaine.

Aubenarum, in terris baronum et aliorum subditorum nostrorum..., decedentium, bona nostri collectores non explectent, nisi priùs, per aliquem indoneum virum quem ad hoc specialiter deputaverimus, vocatis partibus et dictis collectoribus et domino loci, constiterit quod nos simus in bonâ sæsiná percipiendi et habendi bona talium aubenarum in terris prædictis 1.

Le droit des seigneurs, désormais soumis à l'appréciation de l'homme idoine nommé par le roi, était à son déclin.

En effet, dès le XVIe siècle, époque de la grande extension du pouvoir royal, le droit des justiciers commença à être contesté. Un arrêt de 1506 le maintint, mais avec des restrictions: salvâ quæstione proprietatis. La réserve démasquait une intention que les progrès de la royauté permirent de réaliser plus tard.

Aussi, à dater de cette époque, les avocats du trésor ne cessent plus de battre régulièrement en brèche le privilége des justiciers. Lors de la rédaction des coutumes, les droits du roi furent diversement établis, suivant le degré d'influence de ses officiers sur les débats; le plus grand nombre, néanmoins, reconnurent le droit des seigneurs 2.

1 Baluze, t. II, p. 1418.

› Dissertations féodales: Henrion de Pansey, vo Batardise. Dumoulin, Loyseau.

La lutte se prolongea encore quelque temps avec des chances diverses, jusqu'à ce que Louis XIV dépouillåt complétement les seigneurs justiciers de leurs droits d'aubaine.

Les progrès de la civilisation, les communications fréquentes et régulières finirent par faire perdre au titre d'étranger sa signification barbare : le droit d'aubaine fut exercé avec moins de rigueur; il n'était plus suivi dans les Flandres dès le commencement du XVIIIe siècle, même à l'égard des héritiers appartenant à un pays où les étrangers n'héritaient point. (De Ghewiet, Droit Belgique.)

Dans les Pays-Bas autrichiens, le souverain n'exerçait pas le droit d'aubaine à l'égard des Français et des Prussiens; mais avant de permettre aux héritiers de recueillir la succession, le gouvernement exigeait une déclaration portant que la France ou la Prusse accorderaient la même faveur aux sujets des Pays-Bas.

L'Assemblée constituante, par son décret du 6 août 1790, porta un premier coup au droit d'aubaine et de détraction.

Ce décret levait la prohibition qui pesait sur un étranger de succéder à un étranger; il laissait subsister l'incapacité pour l'étranger de succéder au régnicole. Un décret du 8 avril 1791 la fit disparaître : il déclare les étrangers, même ceux qui habitent hors du royaume, capables de recueillir en France, comme les régnicoles, la succession de leurs parents même français.

Aucune nation n'ayant suivi le bel exemple donné par l'Assemblée constituante, le code Napoléon substitua le principe de la réciprocité à celui de l'abolition générale. On crut qu'un moyen suffisant de provoquer la suppression du droit d'aubaine était de n'admettre l'étranger à succéder en France, que dans les cas et de la manière dont un Français succédait, en vertu des traités, à son parent possédant des biens dans le pays de cet étranger. (Articles 11 et 726, C. c.)

Cet appel fut entendu, et bientôt le droit d'aubaine se trouva aboli de fait.

La Belgique, par suite de sa réunion à la France, fut soumise à la législation française. Lors de la formation des Pays-Bas, l'abolition des droits d'aubaine, de détraction et autres entre la France et le nouvel État, fut maintenue par l'art. 28 du traité de Paris, du

30 mai 1814.

Il en fut de même lors du traité de 1889 entre la Belgique et la Néerlande.

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