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Art. 1er. Les employés diplomatiques sont partagés en trois classes :
Celle des ambassadeurs, légals ou nonces;

Celle des envoyés, ministres ou autres accrédités auprès des souverains. Celle des chargés d'affaires accrédités auprès des ministres chargés des affaires étrangères.

Art. 2. Les ambassadeurs, légats ou nonces ont seuls le caractère représentatif.

Art. 3. Les employés diplomatiques en mission extraordinaire n'ont à ce titre aucune supériorité de rang.

Art. 4. Les employés diplomatiques prendront rang entre eux, dans chaque classe, d'après la date de la notification officielle de leur arrivée.

Le présent règlement n'apportera aucune innovation relativement aux représentants du Pape (*).

Art. 5. Il sera déterminé dans chaque État un mode uniforme pour la réception des employés diplomatiques de chaque classe.

Art. 6. Les liens de parenté ou d'alliance de famille entre les Cours, ne donnent aucun rang à leurs employés diplomatiques.

Il en est de même des alliances politiques.

Art. 7. Dans les actes ou traités entre plusieurs Puissances qui admettent l'alternat, le sort décidera, entre les ministres, de l'ordre qui devra être suivi dans les signatures.

Le présent règlement est inséré au protocole des plénipotentiaires des huit Puissances signataires du traité de Paris, dans leur séance du 19 mars 1815. (Suivent, dans l'ordre alphabétique, les signatures des plénipotentiaires d'Autriche, d'Espagne, de France, de la Grande-Bretagne, de Portugal, Prusse, de Russie et de Suède.)

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II. D'après ce règlement, il existe trois classes d'agents diplomatiques; 1° les ambassadeurs, les légats et nonces du Pape; 2o les envoyés, ministres plénipotentiaires et internonces ou autres, accrédités auprès des souverains 1; 3° les chargés d'affaires.

III. Les ministres résidents sont placés dans la seconde catégorie, puisqu'ils sont accrédités près des souverains : la nature de leurs lettres de créance fait d'eux, les derniers parmi les ministres et non les premiers parmi les chargés d'affaires 2.

1 On ne peut pas fonder de prétention sur le titre d'envoyé extraordinaire. Les ministres plénipotentiaires qui ne sont pas en même temps envoyés extraordinaires, prennent rang avant les envoyés extraordinaires et ministres plénipotentiaires, s'il sont plus anciens.

2 Autrefois, tous les États, à l'exception des cours de Versailles et de Vienne, assimilaient les ministres résidents aux envoyés. Le règlement du 19 mars 1815 n'a donc fait que confirmer une règle presque généralement adoptée.

() Les nonces avaient le pas sur les ambassadeurs.

Au congrès d'Aix-la Chapelle il fut question, d'une manière spéciale, des ministres résidents. Le protocole de la séance du 21 novembre 1818, signé par les plénipotentiaires des Cours d'Autriche, de France, de la Grande-Bretagne, de Prusse et de Russie porte :

Pour éviter les discussions désagréables qui pourraient avoir lieu dans l'avenir sur un point d'étiquette diplomatique que l'annexe du recez de Vienne, par laquelle les questions de rang ont été réglées, ne paraît pas avoir prévu, il est arrêté entre les cinq Cours, que les ministres résidents accrédités auprès d'elles formeront, par rapport à leur rang, une classe intermédiaire entre les ministres du second ordre et les chargés d'affaires. »

Il ne suit nullement de cette décision qu'il faille envisager aujourd'hui les ministres résidents, plutôt comme chargés d'affaires que comme envoyés. Leur position est intermédiaire, il est vrai; mais l'acte qui leur attribue leur titre les fait participer au caractère des ministres bien plus qu'au caractère des chargés d'affaires. La disposition adoptée en 1818 n'anéantit pas le principe posé en 1815. Elle se borne à le réglementer.

IV. Dans chaque catégorie, le rang des agents entre eux se détermine par leur ancienneté respective, c'est-à-dire par la date de la remise officielle de leurs lettres de créance, abstraction faite du degré d'importance de l'État qu'ils représentent 1. Cette règle admet une

En 1846, le ministre d'Autriche à La Haye (comte Esterhazy) contesta le principe en vertu duquel les agents diplomatiques se rangent entre eux, dans chaque classe, d'après la date de la remise de leurs lettres de créance; il ne voulut pas consentir à céder le pas au ministre du duc de Nassau, accrédité avant lui. Cette prétention n'était pas soutenable. Le ministre qui arrive le dernier à une Cour n'a pas à s'occuper de la qualité des Puissances représentées, mais uniquement de la date à laquelle ses collègues ont été accrédités. Les cabinets eux-mêmes se bornent à prendre acte de cette date, et ont permis à leurs envoyés de prendre rang après les ministres des gouvernements qu'eux-mêmes ne reconnaissaient pas officiellement. Ce cas s'est souvent présenté entre les ministres espagnols et les envoyés des républiques américaines avant la reconnaissance de ces États à Madrid, et, plus récemment, entre les envoyés d'Espagne et de Portugal, que les Cours du Nord n'avaient pas reconnus, et les ministres de ces Cours. Agir comme l'avait fait le ministre d'Autriche, c'était contester au gouvernement des Pays-Bas le droit de recevoir le ministre plénipotentiaire d'une Cour ducale. Ce n'est plus là une question de préséance; c'est une question qui touche aux droits de la souveraineté.

exception en faveur des représentants de la cour de Rome. Le nonce, parmi les ambassadeurs, l'internonce 1, parmi les agents de la seconde classe, jouissent, en général, de la préséance sur leurs collègues 2. Le privilège de l'internonce est pourtant contesté.

A Vienne, il se présente un cas fort curieux du respect pour les principes tracés par le Congrès.

L'ordre de St-Jean-de-Jérusalem, que l'on ne reconnait plus nulle part comme une Puissance, a accrédité près de Sa Majesté Impériale un ministre plénipotentiaire auquel, à cause de son ancienneté, la plupart des ministres étrangers cèdent le pas. Le locum tenens de la grande maîtrise de Malte n'a pourtant pas, certainement, les honneurs royaux. Le centre de l'Ordre n'est qu'un couvent à Rome.

Il est incontestable que le duc régnant de Nassau avait pour lui le texte de la déclaration des huit puissances. A-t-il fait un usage indiscret de son droit? Évidemment non : la mission de Nassau à La Haye est une mission de famille; c'est la branche aînée de la Maison qui est représentée près de la branche cadette devenue royale.

Le roi des Pays-Bas, en recevant cet agent en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire, lui avait reconnu toutes les prérogatives de ce titre; contester ces prérogatives, c'était manquer à la Cour des Pays-Bas. Si la chose offusquait certains gouvernements, ils devaient exposer leurs raisons à Sa Majesté Néerlandaise.

On suppose toujours que de grands abus sont à craindre un prince de Reuss, dit-on, va accréditer des envoyés extraordinaires et ministres plénipotentiaires. Mais l'on perd de vue que, pour accréditer un agent, il ne suffit pas de la vanité de celui qui envoie, il faut encore la volonté de celui qui reçoit (*).

1 L'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire d'Autriche à Constantinople reçoit aussi le titre d'internonce, ce titre ne lui donne aucun privilége autre que ceux attachés au grade d'envoyé extraordinaire. Quand dans cet ouvrage, on parlera des nonces ou internonces, on aura seulement en vue les agents du St Siége.

2 L'internonce à la Haye, en 1849, se fondant sur la décision du congrès de Vienne, a réclamé la préséance sur les envoyés extraordinaires et ministres plénipotentiaires. Le doyen du corps diplomatique, sir Edward CromwellDisbrowe, ministre d'Angleterre, ne crut pas devoir céder le pas sans y être autorisé par sa cour.

Les instructions de lord Palmerston lui prescrirent de maintenir sa préséance. Les motifs de Sa Seigneurie étaient ceux-ci : 1o l'exception du congrès de Vienne ne s'applique qu'aux nonces; or, les exceptions sont toujours entendues dans le sens restreint et ne peuvent être étendues au delà de la lettre ; 2o l'ex

(*) A Paris, sous la monarchie de juillet, on n'acceptait que des ministres résidents ou des chargés d'affaires pour représentants des Cours grand'ducales ou ducales, Un ministre plénipotentiaire de ces Cours n'aurait pas été reçu.

V. Comment se règle la préséance, lorsque, à l'occasion d'un même évènement, par exemple, à la mort d'un souverain ou lors du changement de forme d'un gouvernement, des diplomates déjà en fonctions ont remis des nouvelles lettres de créance? Est-ce la date de la remise des anciennes lettres ou bien la date de la remise des nouvelles lettres qui fixe la préséance?

En 1830, après la révolution de juillet, il fut convenu entre les chefs de mission que malgré la date de la remise de leurs nouvelles lettres de créance, ils continueraient à occuper entre eux le rang que chacun avait avant cette époque. En 1848 et en 1852, cet arrangement ne fut pas maintenu; les agents diplomatiques accrédités à Paris ont pris rang d'après la date de la remise de leurs nouveaux titres. Le gouvernement n'a, du reste, rien à voir dans ces arrangements; c'est aux chefs de mission à décider ce qu'il leur convient de faire. VI. En Belgique, les nonces et internonces, les ambassadeurs et envoyés extraordinaires reçoivent le titre d'excellence.

VII. En fait, la différence qui existe à Bruxelles entre les agents diplomatiques du premier et ceux de second rang est, sauf le cérémonial relatif à la réception, plutôt nominal que réel. Notre Roi est d'un abord extrêmement facile pour le corps diplomatique étranger et, en présence de notre organisation politique, l'influence d'un agent est due à sa personne bien plus qu'à son titre. Une mission de premier ordre indique seulement une déférence plus grande de la part de la Cour qui accrédite. Les écrivains de droit international disent que les ambassadeurs représentent la personne du souverain que les ministres plénipotentiaires n'en représentent que la parole, c'est là une distinction puérile chez nous.

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Mais dans les cours qui ont conservé les usages primitifs, il existe une différence marquée entre les prérogatives des agents diplomatiques du premier rang et ceux du second. A Rome, par exemple, les ambassadeurs jouissent encore de quelques uns de leurs anciens priviléges ; ce n'est que depuis la célèbre affaire de M. de Créquy, qu'ils y ont perdu le droit d'asile : cette prérogative maintenue de droit pendant quelque temps, a été abandonnée de fait et est tombée en désuétude. L'ambassadeur voit plus souvent la personne du

ception ne fait que confirmer le statu quo antérieur; c'est-à-dire qu'elle maintient la préséance aux nonces qui seuls en étaient en possession. L'internonce, de son côté, n'abandonna pas ses prétentions, et il s'abstint d'assister aux cérémonies auxquelles le corps diplomatique était invité.

Saint Père; il est reçu immédiatement, même lorsqu'il n'a pas, comme c'est la règle ordinaire, fait demander, d'avance et par écrit, une audience. Or, ces audiences particulières sont très recherchées parcequ'elles servent souvent à aplanir les difficultés et à écarter les lenteurs que les habitudes des vieilles chancelleries suscitent souvent. Les chefs de mission, qui n'ont ni le rang ni le titre d'ambassadeur n'ont point droit, en général, à ces réceptions particulières, ils ne les obtiennent que rarement du Saint-Père. Ajoutons que l'ambassadeur de France jouit dans les Conclaves, du droit d'exclusion, au nom de la France. Une ouverture pratiquée à l'une des portes fermées du Conclave lui permet d'entretenir durant toute la durée de cette assemblée des rapports avec l'intérieur.

Il y a donc pour un pays, un intérêt très-sérieux à avoir à Rome un agent investi des prérogatives d'ambassadeur. Mais cet intérêt n'étant pas réciproque, le Gouvernement pontifical a restreint autant que possible le droit d'ambassade, et, depuis un temps immémorial, les quatre Couronnes dites catholiques, l'Autriche, la France, l'Espagne et le Portugal, ont seules le droit d'accréditer des agents diplomatiques ayant les prérogatives d'ambassadeurs. (La République de Venise jouissait autrefois du même privilége). Aucune autre Cour catholique et bien moins encore une Cour protestante ou schismatique n'a été admise jusqu'aujourd'hui à accréditer un ambassadeur près le S' Siége. Le cas s'est présenté pour la Belgique.

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Le prince de Chimay fut chargé, en 1846, d'une mission près les Cours d'Italie le Prince désira être revêtu du titre d'ambassadeur : le gouvernement Pontifical refusa de le recevoir en cette qualité ; il remit donc des lettres qui l'accréditaient en qualité d'envoyé extraordinaire et ministre plénipotentiaire; mais peu de jours après, par suite de la bienveillance toute exceptionnelle du Saint-Père pour la Belgique, le Prince fut admis comme ambassadeur, en mission spéciale et temporaire, à féliciter Pie IX sur son avènement au souverain Pontificat.

La question en faisant abstraction des prérogatives, était plus importante qu'elle ne parait : les représentants des Cours protestantes, schismatiques ou secondaires auraient dit : en recevant une ambassade permanente de Belgique, on nous force à en établir une et vous nous enverrez des nonces; or, les nonces accrédités comme ambassadeurs, sans être revêtus d'un caractère exceptionnel, comme celui de Bruxelles, ont droit au chapeau de Cardinal et c'est là une charge assez lourde pour le S'-Siége.

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