Images de page
PDF
ePub

particulièrement sur ceux du Piémont. Nous avons déjà mentionné en partie les termes valsoanins borc, sou (argot broque), branci, âne (argot branque), brugi, forgeron (argot bruge), lingher, couteau (argot lingre), etc. Voici maintenant les mots d'argot qu'on rencontre dans le jargon piémontais (d'après les matériaux publiés dans le 8° volume de l'Archivio di Psichiatria, 1887):

AMBROCAMENT (un), guardare qualche cosa mentre comette un furto ;

argot rembroquer,

reconnaître (Vidocq; v. p. 125).

CALVINHA, croce;

pour le sens, p. 130).

[blocks in formation]

argot calvine, vigne (cf.

argot chourin, couteau.

argot (dé)fourailler, s'enfuir

argot frangin, frère (Id.). argot lègre, foire (Id.).

argot roulant, fiacre (Id.).

RUPIN, signore;

(1628), à côté du

argot rupin, gentilhomme piémontais rupinant (« ben

messo ») qui répond au moderne rupin, élégant.

[merged small][ocr errors][merged small][merged small][merged small][merged small][merged small]

TRAFOUIET, tabac ; argot treffoin, id. (Id.).

VADO, foule; — argot vade, id. (Id.).

[blocks in formation]

C'est le plus récent des argots romans. Il a tiré de la germania une bonne partie de son vocabulaire et une autre du gitano. Les emprunts qu'il a faits à l'argot sont assez nombreux et tous modernes. En voici le relevé1 :

CAMELOTE, dépouille (« espolio »); camelote, marchandise.

DABO, père, et darona, mère ;

daronne, id.

GAIO, cheval; argot gaille, id.

[ocr errors]

argot

argot, dabot,

GRIS, froid; argot gris, id. (cf. p. 74).

GUIBONA, jambe, et guibo, orteil; - argot guibe,

guibone, id.

LOFO, fou; argot louf, id.

MARRAO, découvert ; argot marron, id.

[blocks in formation]

2. Coelho (p. 158) dérive meneza, ainsi que maneza, femme (manes, homme), du gitano manou, homme.

3. Coelho (p. 113) tire ponis, femme, de l'anglais pony, cheval,

RUIVA, police;

archers).

argot rouve, id. (cf. rouveaux,

Ainsi que les suivants tirés du français : Chena, chaîne ; labita, casaque (= l'habit), piston (« guardasol »), trompar, tromper. Ou du provençal : gamar, voler (« furtar com subtileza »), d'où gamo, vol, du provençal gama, escamoter, tromper, propr. gober1.

Le calâo, vu sa formation moderne, n'a exercé aucune action sur l'argot.

Quant à l'argot roumain, il reste, à cause de sa position géographique, complètement en dehors des influences linguistiques qui ont agi sur les autres argots romans.

III. Eléments non-romans.

Tandis que le calò et le calâo accusent une influence gitane assez importante, principalement le dernier qui en porte même le nom (calò 2 signifie bohémien), l'ancienne germania, le four

en s'appuyant sur la prétendue analogie de marca, qu'il dérive du celtique marka, cavale (v. l'index).

1. Coelho (p. 156) rapproche gamar du gitano jamar, jalar, manger.

2. Le même terme bohémien désigne, en roumain, le bourreau (calâu), les Bohémiens ayant longtemps été en Roumanie les exé. cuteurs des hautes œuvres.

besque et l'ancien argot ignorent entièrement toute trace de la langue des Bohémiens ou Tsiganes. L'argot compte, il est vrai, une demi-douzaine de termes de cette provenance, mais tous appartiennent exclusivement à l'argot moderne, et Vidocq est le premier qui les ait enregistrés.

La chose est d'autant plus surprenante que la première apparition des Bohémiens en France eut lieu au commencement du xve siècle (on les vit à Paris en 1427), c'est-à-dire à l'époque même où l'Argot s'est constitué. Cette constatation n'est pas sans intérêt pour l'interprétation des anciens documents de l'argot. En voici un exemple: Vitu avait interprété le terme Can d'une des ballades jargonesques de Villon par « soleil » (sens du bohémien kan) et M. Longnon a admis cette explication, dans le glossaire de son édition de Villon. Une chose pareille est pourtant inadmissible, si l'on tient compte de l'absence de tout élément bohémien dans l'argot antérieur à Vidocq1. Pas une des éditions modernes du Jargon, celle même de 1836 qui est contemporaine des Voleurs de Vidocq, n'en porte de trace 2.

1. Les termes chique, église, et grè, cheval (v. ci-dessous) remontent au vocabulaire des brigands Chauffeurs (1800), dans les bandes desquels se trouvaient probablement des bohémiens.

2. L'influence du bohémien sur le rotwelsch et le cant a été relativement peu importante, mais on en trouve des traces déjà au XVI° siècle (cf. dans l'ancien cant, rom, bon, magnifique). En re

Ce n'était pas l'avis de Fr.-Michel : « Si le grec, dit-il (Introd., XXVII), a fourni un certain nombre de mots à l'argot de tous les pays, il est une autre langue à laquelle il a emprunté bien davantage : nous voulons parler du romany ou langue des Bohémiens». Et tout récemment, Salillas affirme encore (p. 212): « En el argot existen abundantes zingarismos ».

La vérité est qu'on a tout à fait exagéré la portée du bohémien ou tsigane, et que la plupart des rapprochements correspondants (en dehors du calò et du calâo) faits par Pott, Miklosich et Coelho, sont sujets à caution. On a d'ailleurs oublié ce que le gitano a emprunté à la germania (cf. lima, sornar, etc.), sans lui rien fournir en échange, et ce que le bohémien a pris à l'argot. Une note de l'Introduction de Fr.-Michel (LII) est particulièrement intéressante sous ce rapport; il s'agit des Romanitchels du centre et du nord de la France : « Ces maraudeurs parlent entre eux une langue particulière dont eux seuls ont la clef, et qu'ils emploient même en présence des autres voleurs; mais comme ils fréquentent ces

vanche, l'action du cant sur le romani est considérable. Voir la préface de Hotten, Slang Dictionary, Londres, 1874. L'argot sicilien possède une dizaine de mots bohémiens, qui sont encore vivaces parmi les manœuvres de Palerme. Tels: mannettu, pain (du bohémien manro, id.), masa, viande (du bohémien mas, id.), etc. V. Pitre, ouvrage cité, p. 335.

« PrécédentContinuer »