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An. 876. chez eux deux évêques, à qui leurs gens dirent, qu'ils ne favoient où ils étoient allez. On remit leur jugement à un autre jour; & aprés les avoir encore fait chercher juridiquement, le pape affembla fon concile dans l'église de nôtre-dame des martyrs, aujourd'hui la Rotonde, où aprés les procedures regulieres, Sup.li.i.n.54. il prononça cette fentence contre Formofe:

Formofe évêque de Porto ayant été envoyé en Bulgarie, par nôtre predeceffeur Nicolas d'heureuse memoire : fût tellement gagner, pares artifices, l'efprit du roi nouveau baptifé, qu'il l'engagea fous de terribles fermens, à ne demander jamais au faint fiége d'autre évêque, lui vivant: & de fon côté, il promit par des fermens femblables, de retourner au plutôt trouver ce roy, & obtint de nous la permiflion, les lettres & les fecours neceffaires pour ce voyage. Depuis long-tems il s'eft efforcé par brigue de paffer d'un moindre fiége à un plus grand, c'est-àdire au fiége de Rome; & maintenant il a abandonné fon diocéfe fans nôtre permiffion, eft forti de Rome & a confpiré avec fes fauteurs contre le falut de l'état & de nôtre cher fils Charles, que nous avons élu & ordonné empereur. C'eft pourquoi, fi dans dix jours, c'est-à-dire le vingt-neuviéme d'Avril de cette indiction neuvième, il ne se represente pour nous satisfaire, nous ordonnons qu'il sera privé de toute communion ecclesiastique. L'ordonnez-vous auffi ? Tous répondirent: Nous l'ordonnons. Et si dans quinze jours, c'est-à-dire le quatriéme de Mai prochain, il ne fe prefente, pour nous fatisfaire, nous le jugeons dépoüillé de tout ministere sacer

dotal. Le jugez-vous auffi? Tous répondirent: Nous jugeons. Et s'il ne fe reprefente dans vingt jours, c'eft-à-dire le neuviéme de Mai, ou s'il caufe du trouble dans l'églife, & pretend revenir contre nôtre prefente fentence: qu'il foit anathematisé, fans efperance d'abfolution.

Le lecteur prudent doit fufpendre fon jugement fur les crimes dont Formofe eft chargé dans ce jugement prononcé par défaut : la suite fera voir qu'il paffoit pour un évêque de grande vertu, & on peut croire que fon plus grand crime étoit de ne pas approuver l'élection de Charles le Chauve pour l'em pire.

de

Le pape prononça une pareille fentence contre Gregoire nomenclateur: comme ayant deshonoré l'églife pendant prés de huit ans par Les parjures, fes fraudes, fon avarice, fes rapines: ayant brigué le fouverain pontificat, s'étant rendu.coupable, tant contre l'empereur Charles que contre le pape, plufieurs chefs qui furent lûs publiquement: ayant promis de fe reprefenter & de reftituer ce qu'il avoit pris aux églifes & à d'autres : & s'étant enfui de Rome en fraude pour éviter le jugement, & confpirer contre l'état & l'empereur. La même sentence comprenoit Eftienne Secondicier frere de Gregoire, comme coupable d'avoir pillé & dépouillé plufieurs églifes: George gendre de Gregoire, accufé d'adulteres, d'homicides ; & particulierement d'avoir pillé le tréfor du palais de Latran: Sergius maître de la milice, & Constantine fille de Gregoire, accusés auffi de divers crimes: qui font voir la corruption Ccc iij

An. 876.

An. 876. qui regnoit à Rome, même dans les familles des papes; car George avoit époufé la niéce du pape Benoist, qu'on l'accufoit d'avoir tuée; Sergius avoit époufé la niéce du pape Nicolas, & l'une & l'autre avoit enrichi fon mari. Tous ces accufez étoient excommuniez aprés les dix jours, & aprés les quinze anathematisés à jamais.

XXXII

Concile de Pon

tion.

Mabill. Acta Ss..
Ben. to.6 p.490.

L'empereur Charles étant de retour en France fit tenir un concile à Pontion, au mois de Juin indiction tom. 9. p. 281. neuvième, qui eft la même année 876. Il y avoit deux legats du pape, Jean évêque de Tofcanelle, & Jean évêque d'Arezze avec cinquante évêques de France, à la tête defquels étoient fept archevêques : Hincmar de Reims, Anfgife de Sens, Aurelien de Lion, Frotaire de Bourdeaux, Otram de Vienne, Jean de Rouen, Bermond d'Embrun. Remi archevêque de Lion étoit mort au plûtôt en 874. & Aurelien lui avoit fuccedé. Il étoit né dans la même province, de parens nobles : étant entré jeune dans le clergé il fut archidiacre d'Auftun, & on lui donna l'abbaïc d'Aifnay en benefice, qui étoit à peu-prés comme aujourd'hui en commande. Ce monaftere étoit abandonné & défert, mais Aurelien entreprit de le retablir fuivant fon ancien état ; & pour cet effet il fit venir des moines de Bonneval au diocese de Chartres. Il fonda enfuite un nouveau monaftere dans le Bugey, au lieu nommé à lors Saxiac, aujourd'hui Seffieu; & tel étoit l'archevêque Aurelien. Mabill.eod.to.6. Otram archevêque de Vienne avoit fuccedé à faint Adon mort l'année precedente 875. à l'âge de foi

p. 271.

xante & feize ans, aprés avoir rempli feize ans ce

An. 876.

Mart. R.16

fiége. L'églife honore fa memoire le jour de fa mort
feizième de Décembre. Outre fon martyrologe, il a
laiffé une cronique qui commence à la création du Dec.
monde, & finit au regne de l'empereur Lothaire & de
fes fils; mais quelque autre l'a continuée jusques à

l'an 879.

An. Bertin. 376.

A la premiere feffion du concile de Pontion qui fut le vingt-uniéme de Juin, les évêques & tout le clergé étant en habits ecclefiaftiques, l'église tapiffée, le livre des évangiles pofé fur un pupitre au milieu du concile, devant le fiége imperial : l'empereur entra vêtu à la françoise, d'un habit orné d'or. On fait quel étoit l'habit françois dans ce tems-là, vita car. M. par la defcription qu'en fait Éginhard, & encore . 7. n. 28. mieux par une ancienne bible manufcrite tirée de l'églife des Mets, où Charles le Chauve eft repre- to.z. Cap.p.1276 fenté dans fon trone accompagné de deux comtes, & devant lui plufieurs ecclefiaftiques. En cette minature, qui eft du tems même ; l'empereur Charles eft vêtu de long à la Romaine, mais les deux comtes font en habits françois : & les ecclefiaftiques en chafubles, comme pour aller à l'autel. L'empereur entra dans le concile accompagné des deux legats du faint fiége, & aprés que les chantres eurent entonné l'antienne Exaudi nos Domine, que l'on chante encore en commençant les fynodes, Jean évêque de Tofcanelle prononça l'oraison, & l'empereur s'aflit.

Alors le même Jean premier des legats lut les lettres du pape, entre autres une du fecond de Janvier de cette année 876. par laquelle il établiffoit

XXXIII. Primatie de

l'archevêque an epift. 313.

de Sens.

:

An. 876. Ansegise archevêque de Sens, primat des Gaules & de Germanie, comme vicaire du pape en ces provinces, foit pour la convocation des conciles, foit pour les autres affaires ecclefiaftiques: ordonnant qu'il notifieroit aux évêques les decrets du faint fiége, lui feroit le raport de ce qui auroit été fait en exécution; & le confulteroit fur les caufes majeures. Les évêques du concile demanderent la permiffion de lire eux-mêmes la lettre qui leur étoit adreffée mais l'empereur n'y confentit pas, voulant toutefois les obliger à y repondre. Ils dirent qu'ils obeïroient aux ordres du pape, fans prejudice des métropolitains, & fuivant les canons & les decrets du faint fiége conformes aux canons. L'empereur & les legâts prefferent les archevêques de répondre abfolument touchant la primauté d'Ansegise, mais ils n'en purent tirer d'autre réponse. Il n'y eut que l'ar chevêque Frotaire, qui parla conformément à l'intention de l'empereur ce que les autres regarderent. comme une flaterie pour faire autorifer fa tranfladun. Bertin, tion. Car Frotaire avoit paffé de Bourdeaux à Poitiers, & pretendoit encore paffer à Bourges. L'empereur irrité dit que le pape lui avoit donné commiffion de le reprefenter en ce concile, & qu'il vouloit exécuter ses ordres. Il prit donc la lettre du pape fermée comme elle étoit, & avec les deux legats, la donna à Ansegise. Il fit mettre un fiege pliant avant tous les évêques de fon royaume d'audeça des Alpes, prés de Jean de Tofcanelle, qui étoit aflis à fa droite; & ordonna à Ansegise de pasfer devant tous les évêques plus anciens que lui d'or

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