geois fut diffipée en Languedoc, & celle du Saint Pere reprit fon autorité.

La Religion des Albigeois finit au decès de Jeanne leur derniere Comteffe, & d'Alphonfe Comte de Poitiers fon mari, environ l'an 1270; ce qui fut cause que le Languedoc fut alors réuni à la Couronne de France. En 1417 Nifmes fut pris par le Prince d'Orange, qui étoit à la tête des Anglois, Nifmes étant alors à Charles VI. Roi de France; de forte que le Château des Arénes fut ruiné & abattu en l'état qu'on le voit aujourd'hui.

Depuis ce temps-là, jufqu'en 1560, la Religion Catholique ne fouffrit aucun trouble dans Nifimes. Il ne resta dans la Ville que quelques miferables Juifs, qui avoient été chalés du Royaume par l'Edit de Philippe le Bel en 130S.

Cependant longtemps auparavant l'an 1560, plufieurs perfonnes fuivoient à Nifmes la Réforme qu'on difoit être de Calvin: car dès l'an 1554, Pierre de Lavau fut brûlé à Nifmes à la Place de la Salamandre, comme Heretique Lutherien. Dominique Deyron Prieur de l'Ordre des Dominiquains au Couvent de Nifmes, qui avoit été choisi pour convertir Lavau, le fortifia en fa croyance; & pour éviter le feu, il fe fauva à Geneve, où il prêcha la Reformation. Plufieurs Miniftres étant venus enfuite de Geneve, prêcherent fecrettement la Réforme. En 1560 la Réforme fut prêchée publiquement. Quelque temps après il y eut plufieurs troubles & maffacres au fujet de la Religion, qui furent enfuite appaifés; de maniere qu'alors la plus grande partie des Magiftrats Royaux & Politiques, le Peuple, les Regens du College, fuivirent la Réforme, & en firent profeffion, abattirent les Images & les Croix, & firent bâtir un grand Temple en 1565, qui fut brûlé en 1568, & rétabli en 1569. Enfin, la Religion Pretendue Reformée ayant été exercée à Nifines par plufieurs de

fes Habitans jufqu'environ l'an 1684 ou 1685, fon Temple fut encore abattu pour la derniere fois par ordre du feu Roi Louis XIV. & du depuis Nifmes, ou fes Citoyens ont fuivi la Religion Romaine. Ce fut enfin encore quelque temps après que le Temple fut, abattu, que le Roi y fit bâtir le Château à quatre Baftions que l'on y voit aujourd'hui. Voyez Planche premiere, Figure 3.

On prétend que Saint Sernin Difciple des Apôtres, fut le premier qui apporta le Chriftianifme en Languedoc, & par confequent à Nifmes: car il convertit au Chriftianifme Honeftus natif de Nifmes. Saint Fermin natif de Pampelune s'y convertit avec fon pere & fa mere. Saint Bauzile y fouffrit le martyre. Saint Caftor nâquit dans les Arénes; on y voit encore fa maifon: il fut premier Evêque de Nifmes, à qui l'on dédia la Cathedrale.

Si l'on fait un fommaire des temps que je viens de rapporter dans cette Hiftoire de Nifmes, on verra que cette Ville a refté fous l'obéiffance de Nemaufùs, ou de fes Succeffeurs, environ 1105 ans ; fous les Colonies Grecques des Phocéens, ou de Marseille, 440 ans; fous celle des Romains, 536 ans ; fçavoir, dans le Paganisme 126 ans, & fous le Chriftianifme 410 ans; 326 ans fous les Goths & Sarrafins; 534 ans fous les Comtes; & 450 ans fous nos Rois, jufqu'à cette année 1719, regnant Louis XV. Roi de France. Tout fommé,, on trouvera un espace de temps de 3391 ans depuis la fondation de Nimes par Nemaufus,jufqu'à ce jourd'hui 1719 de JESUS-CHRIST.

B. iij.

L'HISTOIRE

DES ANTIQUITEZ

DE LA VILLE DE NISMES.

P

SECONDE PARTI E.

OUR traiter avec quelque ordre des Monumens antiques de la Ville de Nifimes, j'ai eftimé qu'il falloit commencer par ceux qui en font les plus éloignez, & me réduire enfuite à ceux qui approchent le

plus du centre de cette Ville,

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CHAPITRE

PREMIER.

Du Pont du Gard.

§. I. FIGURE 19.

E Pont antique eft d'ordre Tofcan; il fervoit d'Aqueduc pour conduire les eaux de la Fontaine d'Eure, depuis Ufez jufqu'à Nifmes, qui eft un espace de fept lieuës, en les faifant paffer fur la Riviere du

Gardon d'une montagne à l'autre, à la hauteur d'environ vingt-cinq toifes. Ce Pont-Aqueduc eft une des plus belles Antiquités du monde, & le chef-d'œuvre de l'art des Romains dans cette forte d'ouvrage, le plus hardi qu'on ait pû jamais imaginer, & qui ravit d'étonnement tous ceux qui le voyent.

Ce monument eft compofé de trois rangs d'Arcades plein-cintre, les unes fur les autres. La Figure 19 qui le reprefente, que j'ai levée fur les lieux, eft de vingt-cinq toifes, cinq pieds de haut, fçavoir dix toi. fes, quatre pieds, x pouces pour le premier Pont, depuis le haut de la Cymaife qui le couronne, jufqu'à la fuperficie des eaux du Gardon. Le fecond Pont a de hauteur dix toifes, deux pieds, depuis le deffus de la Cymaife qui le termine, jufqu'au deffus de celle du premier Pont. Et enfin, le troifiéme Pont a trois toifes quatre pieds de hauteur, depuis le deffus des dales qui couvrent l'Aqueduc, jufqu'au deffus de la Cymaise du fecond Pont.

Il n'eft pas neceffaire de citer ici le nombre des Arcades & Arceaux de ce Pont, la Figure 19 les reprefente tels que je les ai trouvés.

Les Arcades font de differentes grandeurs, qui plus, qui moins, d'environ dix toifes de large. Quand elles font plus grandes, leur naiffance qui eft terminée par des impoftes, commence audeffous de celles qui font moins grandes, comme on le voit à celle où paffe la ' Riviere du Gardon, qui eft la plus grande; & pour les plus petites du troifiéme rang, elles font de quaterze pieds d'ouverture.

Toutes ces Arcades font faites avec des Vouffoirs differemment rangés; ceux du premier Pont font rangés fuivant quatre Arcs doubleaux, & ont de large dixhuit pieds; ceux du fecond Pont par trois. Arcs doubleaux, & ont de large quatorze pieds; & ceux du troifiéme par deux, & tantôt par un, pour faire

liaison, & ont de large neuf pieds d'une tête du Pont à l'autre.

Les Piles ont les mêmes largeurs des Arcades; & leurs épaiffeurs en façade font de treize pieds & demi aux piles du premier & du fecond rang, & de fix pieds à celles du dernier étage.

Les pierres faifant face aux piles du premier & du fecond rang, ont treize pieds & demi de long, font de toute la largeur de la pile, fur deux pieds, deux pouces de large, & vingt-un pouces de haut; toutes avec boffages à leurs paremens, & une cizelure à leurs joints. Par deffus cette aflife, toute en carreaux, eft pofée une autre affife toute en boutiffe,qui ont pareille hauteur & femblable largeur, toutes pofées fans mortier ni ciment, mais à fec; enforte qu'il n'eft pas pof fible de faire paffer un cheveu dans leur joint, pour fi groffes que foient ces pierres de taille, dont tout le Pont eft conftruit dans fes Piles.

Ces pierres fe tiroient d'une carriere qui eft environ à la portée du moufquet loin du Pont, à main gauche en defcendant la Riviere, ou du côté d'aval.

La naiffance des cintres des Arcades commence toujours fur une impofte en forme de cymaise d'environ feize à dixhuit pouces de haut,& qui a autant ou environ de faillie.

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Toutes les retombées des Arcades font garnies de deux affifes de pierre de taille en faillie, qui portent la hauteur des vouffoirs en forme de corbeaux, laiffées ainfi pour fupporter lès cintres lors de la construction de l'ouvrage en guife d'encorbeillement. Leur faillie eft d'environ quinze pouces. Les corbeaux portent fur toute la longueur des vouffoirs, qui ont quatre pieds de queue & extradoffés. Les vouffoirs des petites Arcacades du troifiéme Pont ont deux pieds de queue.

Les Rochers fur lefquels les Piles font fondées, font piqués de niveau, & l'a maçonnerie encaftrée de