Ah! du moins, son orgueil n'était pas hypocrite. Oui! gloire au grand artiste, à l'homme de génie, Qui sait à son talent unir la modestie. D'un chef-d'œuvre proscrit, mais peint par Mélanthus, Néalque obtient la grâce aux genoux d'Aratus; L'image d'un tyran seule en dut disparaître; Mais, saisi de respect pour l'œuvre et pour le maître, Néalque se défend d'ajouter un seul trait, Tant un noble talent prise un talent parfait !(8) Tant la gloire est sacrée aux regards de la gloire! Plutarque a raconté, je crois, cette autre histoire: Callimaque admirait l'Hélène de Zeuxis, Et, de sa tendre extase, un froid lourdaut surpris, Osait tout critiquer dans ce divin modèle: << Prends mes yeux, dit le peintre, et tu la verras belle. » Qu'entends-je? et quels objets ont frappé mes regards? Où volent, si pressés, ces coursiers et ces chars? Où court ce peuple ardent? Quel intérêt l'anime? C'est dans l'Elide entière un concert unanime. Tendre et jeune Ætion, de tes brillans essais Un triomphe éclatant couronne le succès. Quels furent les transports de la Grèce ravie, En contemplant ces traits pleins de grâce et de vie Où tu sus exprimer le vainqueur de Porus Ce chef-d'œuvre élégant dans le stade olympique A peine est exposé: soudain la voix publique Et tous les concurrens ont nommé le vainqueur; Mais l'hymen à son peintre offre un prix plus flatteur: Au milieu du concours de la foule étonnée, Qui du héros d'Arbelle admire l'hyménée, L'illustre Proxénis a proclamé son nom. Il ajoute ces mots : « Digne fils d'Apollon, « J'ai lu dans tes regards que tu la trouves belle; Expriment ce qu'alors sa bouche n'osait dire. (9) Oui! s'il est ennobli par la célébrité, L'heureux enfant des arts sait plaire à la beauté. On la voit préférer, dans le mortel qu'elle aime, Le bandeau d'Apollon au plus beau diadème, Les lauriers de l'artiste aux palmes du héros. Interrompant le cours de ses exploits nouveaux, Le héros sommeillait au sein des doux loisirs. Aux genoux de Campaspe il oubliait sa gloire: « Que ton tableau, comme elle, excite mon délire. << Si ton art peut atteindre à rendre sa beauté, Tu peux, tu dois compter sur l'immortalité. » Le héros dit, s'éloigne, et Campaspe s'avance; Trois fois il veut tracer son image adorée, Sous les traits de Campaspe, en ce tableau charmant, Elle exprime en ses mains les blanchissantes ondes Dont l'écume argentait l'or de ses tresses blondes: Le flot qui, gémissant d'abandonner son sein, De ses genoux de rose effleure le satin, De volupté murmure et frémit autour d'elle; |