Images de page
PDF
ePub
[ocr errors]

qu'elle n'avait point été épouse; mais elle est en même temps Vierge et Mère; immaculée comme une Vierge, mais ten»dre comme une Mère. Elle appelle ses enfants auprès d'elle » et les nourrit d'un lait sacré, du Verbe devenu enfant. » C'est pour cela qu'elle n'eut point de lait; car son lait était » cet enfant de son cœur; le corps de Jésus-Christ, qui par » le Verbe élève la jeune génération (veoλatav), que le Seigneur >> lui-même a enfanté dans la douleur, qu'il a lui-même enveloppé de langes, avec son précieux sang. O sainte naissance! » ô saintes langes, le Verbe est tout pour cet enfant; père, » mère, précepteur et nourricier. Mangez, a-t-il dit, ma » chair et buvez mon sang; c'est là la nourriture toute parti» culière qu'offre le Seigneur; il nous présente sa chair, il » verse son sang, et rien ne manque plus à la croissance de » l'enfant. O mystère incompréhensible! il ordonne à l'an» cienne corruptibilité de quitter la chair à laquelle elle de» meurait attachée, ainsi que les mêmes aliments, et il veut que la chair se nourrisse d'un nouvel aliment, de celle de » Jésus-Christ, afin, s'il est possible, de l'accueillir en nous, de l'y déposer, d'enfoncer le Sauveur dans notre poitrine, » et par là de corriger les défauts de la chair 125.»

[ocr errors]

Il désigne donc, comme la nourriture des chrétiens, le Verbe de Dieu, véritablement fait homme, de sorte que nous sommes par là doublement unis et apparentés avec lui; d'abord, parce que nous avons été engendrés de son sang, par lequel nous avons été rachetés, comme par une sémence spirituelle, et puis parce que nous sommes nourris du même aliment, c'est-à-dire de son sang, de sorte qu'il nous arrive, dans un sens spirituel, ce qui a lieu matériellement avec tous les enfants. Clément considère donc l'Eglise comme le pro

125 Pædag., I, 6, p. 123.

116 Padag. 1, 6, p. 124. Η κρασις δε άμφοιν (σαρκος και Λογου) ὁ κύριος, ή τροφή των παντων· ὁ κυριος πνευμα και λογος· ἡ τροφη, τουτ' ἐστιν ὁ κυριος Ιησους, τουτ' ἐστιν ὁ λόγος του Θεου, πνευμα σάρκουμενον· αγιαζόμενη σαρξ οὐρανιος· ἡ τροφη το γαλα του πατρός, ο μονῳ τεθευόμεθα οἱ νηπιοι. Ρ. 127, παντῃ τοινυν ήμεις τα παντα Χριστῳ προς σηκειώμεθα, και εἰς συγγένειαν, δια το αίμα αύτου, ο λυτρουμηθα

duit et le fruit de l'Incarnation; car le Verbe s'est versé, par le Baptême et l'Eucharistie, dans l'Eglise, qui est par conséquent son corps dans le vrai sens du mot, et par la même raison l'union entre elle et Jésus-Christ est aussi immuable que l'Incarnation même. Elle subsiste par le sang; elle respire dans son esprit, elle sent dans ce cœur. C'est pourquoi elle est impérissable, indestructible dans toute l'éternité117. L'Eglise est vierge, car elle est pure de toute hérésie, qui souille le corps de Jésus-Christ par une semence humaine; elle est mère, car ce n'est que par son intervention et en elle que naissent et sont nourris tous les enfants spirituels; mais ce n'est point avec des aliments terrestres qu'ils sont nourris, c'est avec la chair et le sang de Jésus-Christ; c'est pourquoi on peut bien l'appeler la médiatrice de notre salut. « JésusChrist, ressuscité de la mort, se réjouit avec son épouse, » qui est l'aide qui nous conduit à notre salut, avec l'Eglise, » à qui pour cette raison on a donné le nom 'Yoμovy soit parce » qu'elle demeure et se réjouit dans toute l'éternité, ou bien » parce qu'elle existe par la constance de nous autres fidèles

[ocr errors]

qui sommes les membres de Jésus-Christ'. » L'expression la plus simple qui renfermait toutes les idées que nous venons de voir réunies, est l'image dont Clément se sert si souvent, et qui dans cette occasion est plus qu'une image, savoir que l'Eglise est l'épouse de Jésus-Christ et Jésus-Christ l'époux de son Eglise. Cette formule si courte est néanmoins si riche d'idées, que le langage des hommes est trop pauvre pour pouvoir en exprimer toute la plénitude.

Tel est le système de Clément d'Alexandrie dont nous n'avons pas prétendu indiquer tous les détails, mais dont nous croyons avoir fait connaître les traits principaux. D'ailleurs

και εἰς συμπάθειαν, δια την ανατροφην την ἐκ του λογου· και εἰς ἀφθαρσίαν δια την αναγωγην την αύτου.

127

7 Strom., IV, 26, 642.—113 Pædag, I, 5, p. 111.

129 Strom. III, 11, p. 544. Il remarque, en citant, II, Cor., 12, 2, 3. Εκκλησια δε άλλον οὐ γαμει, τον νυμφίον κεκτημένη, - et, d'un autre côté, il donne la raison suivante pour laquelle Jésus-Christ ne s'est pas marié : την ίδιαν νύμφην είχεν, την ἐκελησίαν· ἐπκιτα δε, ούδε άνθρωπος ἦν κοινος κι τι λο

les écrits de ce Père de l'Eglise renferment aussi bien des singularités, mais que l'espace ne nous permet pas de développer ici.

Editions. Nous possédons des éditions des ouvrages de Clément d'Alexandrie, dont les unes ne contiennent que le texte grec seul, les autres la version latine seule, et d'autres encore, les deux réunis. Dans la première se range celle de Petrus Victorius, publiée en 1550, in-fol., d'après un manuscrit de la bibliothèque de Médicis à Florence, et celle de Ferd. Sylburg, Heidelberg, 1592. L'une et l'autre ne contiennent que le Logus protrepticus, le Pædagogus, les huit livres des Stromata, les Epitomæ ex scriptis Theodoti et les Ecloga ex prophetis. Mais la seconde se distingue avantageusement de la première par le recueil de variantes et par les améliorations du texte.

:

Une traduction latine, sans le texte grec, des trois principaux ouvrages de Clément, savoir le Logus protrepticus, le Pædagogus et le Stromata, parut à Florence, en 1551, chez Laurent Torretin. Les deux premiers ouvrages avaient été traduits par Gentien Hervet, chanoine de Reims, et le troisième, par Cyriaque Strozza. Les extraits de Théodote et les prophéties ne s'y trouvent point; cependant Hervet traduisit aussi les Stromata, et cette version, faite par lui seul, fut publiée à Bâle en 1556, in-fol., en 1560 et 1566. Thomas Guarin, de Paris, la publia in-8° en 1566, puis in-fol. en 1572, 1590, 1592 et 1612. Ces éditions sont enrichies de notes nombreuses et excellentes. Les mêmes trois ouvrages, ainsi que le livre : Quis dives salvetur, les extraits des prophètes et les prétendues Adumbrationes de Clément furent recueillis dans la Bibliothèque des Pères, Lyon 1677, t. III. Quant à la traduction d'Hervet, elle est dure, obscure, et ne rend pas toujours le sens de l'auteur. Toutefois, ceux qui essayèrent de la corriger ne furent pas beaucoup plus heureux et commirent peut-être de plus grandes erreurs encore.

La première édition grecque-latine fut publiée par Dan. Heinsius. Il corrigea bien des choses dans la traduction d'Hervet, y joignit ses propres remarques et celles de Sylburg, et la fit paraître à Leyde, en 1616, in-fol. Cette édition fut réim

primée à Paris en 1621 et 1629, avec des notes de Fronton Duché, et aussi en 1641. Cette dernière édition, qui fut suivie de celle de Cologne, 1688, est moins exacte et moins correcte que les précédentes. Aucune de toutes celles que nous venons d'énumérer ne satisfaisait les exigences de la critique. Le texte demandait une plus grande correction, et plusieurs passages obscurs exigeaient des éclaircissements. L'évêque anglican Potter s'en chargea: il traduisit de nouveau la Cohortatio ad gentes, corrigea pour le reste la version d'Hervet, rassembla les fragments épars et les réunit, dans son édition, aux autres ouvrages même apocryphes de Clément. Cette édition la meilleure qui eût paru jusqu'alors, fut publiée à Oxford en 1715, et réimprimée avec plus d'exactitude encore à Venise, en 1757, puis, en trois vol. in-8°, à Wurtzbourg en 1778 et 1779.

[ocr errors]

L'ouvrage de Clément intitulé: Quis dives salvetur, fut d'abord découvert dans un manuscrit du Vatican, parmi les homélies d'Origène, et annoncé comme l'œuvre de ce dernier par M. Ghisler. Matth. Cariophyle le traduisit et le fit paraître à Lyon en 1633, dans le tome III du Commentaire sur Jérémie. Cependant Fr. Combefis en publia une nouvelle version accompagnée de notes, et sous le nom de Clément, dans Auctuar. noviss. PP., t. I, Paris, 1672; d'où elle passa dans la bibliothèque des Pères de Lyon. D'autres éditions enrichies de notes furent publiées par J. Fell, Oxford 1683, et Ittig, Leipzick 1700.

Quant aux Excerpta ex Scriptis Theodoti, Hervet ne voulut point les traduire, parce que leur contenu le scandalisait. Combefis les traduisit, à la vérité, mais, par la même raison, ne publia point son travail. Alb. Fabricius fut le premier qui les admît dans sa Bibl. græc. La version publiée par Potter avait été faite par Rob. Pearse, qui y a joint de bonnes notes. Ils ont aussi été traduits en allemand, d'abord par G. Arnold, puis par un anonyme, Ulm 1700. Fred. Roesler a donné dans sa Bibliothèque des Pères, Leipzick 1776, des extraits, en langue allemande, des ouvrages authentiques de Clément.

69

ORIGÈNE.

ORIGENE, surnommé Adamantius, naquit à Alexandrie en 185; il était, d'après ce que nous assure Eusèbe, le fils de parents chrétiens et d'une famille distinguée'. Aux dons qu'il avait reçus de la nature, vinrent se joindre une excellente éducation et une instruction variée; aussi cet homme remarquable devint-il l'objet de l'admiration de toute la chrétienté. Son père, Léonides, qui était selon toute apparence un rhéteur, regarda comme un devoir de travailler lui-même à la culture de l'esprit et des sentiments religieux de son fils; afin de donner une base profonde à sa piété, il ne laissait pas passer un jour sans lui faire lire et méditer quelques passages de l'Ecriture-Sainte. Cette habitude influa puissamment sur la direction de son esprit. Dès lors, son regard pénétrant ne se contenta plus du sens littéral qu'on lui présentait; il cherchait, il demandait le sens mystérieux de ce qu'il lisait, et ses questions jetaient souvent son père dans l'embarras. Celui-ci reprochait à la vérité à son fils, une curiosité qu'il traitait d'intempestive, mais il se réjouissait en secret du bonheur de posséder un fils qui promettait tant; il lui arrivait fréquemment de découvrir et d'embrasser, pendant qu'il dormait, la poitrine de l'enfant qu'il regardait comme le temple du Saint-Esprit. Du reste, Origène étudiait aussi, sous les yeux de son père, les sciences grecques, dans lesquelles il faisait les plus brillants progrès. Cependant il ne puisa pas toute son instruction dans les leçons de son père : jeune encore il fréquenta l'école catéchétique de sa ville natale, sous le célèbre professeur Clément3, et ses écrits témoignent de l'influence que Clément exerça sur la direction de son esprit.

Origène fut dès son enfance un homme*. On s'en aperçut

'Euseb., h. e., VI, 19. Le néoplatonicien Porphyre prétendait le contraire, mais Eusèbe l'accuse nettement de mensonge.

2

Ibid., VI, 2.- Ibid., VI, 6. Phot. cod., 118.

Hieron. ep. 84, ad Pammach. : Magnus vir ab infantia Origenes et vere martyris filius.

« PrécédentContinuer »