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Saint Hugues joignait à une rare capacité pour les affaires toutes les vertus d'un parfait religieux. Il était doux, humble, charitable et mortifié; il veillait avec soin à la manutention de la discipline dans toutes les maisons de son ordre. Le monastère de Cluni sur-tout ne fut jamais plus florissant que sous son gouvernement; on venait s'y rendre de toutes parts, comme dans un lieu où régnait l'esprit des anciens moines. Hugues, duc de Bourgogne, s'y retira, et y fit profession. Le saint abbé mourut le 29 Avril 1109, à l'âge de quatre-vingt-cinq ans. Le Pape Calixte II le mit au nombre des Saints en 1121 (1).

Voyez sa vie écrite par un auteur contemporain. C'est Hildebert, évêque du Mans, puis archevêque de Tours, dont les ouvrages ont été publiés par D. Beaugendre, en 1705. Voyez le P. Papebroch, ad 29 Ap. p. 528 et 658; D. Mabillon, 1. 71, Annal. et t. 9, Act. ; D. Ceillier, t. 21, p. 353.

(1) Nous avons plusieurs lettres de saint Hugues, abbé de Cluni : l'une est adressée à Guillaume le Conquérant. Ce prince avait demandé des religieux au saint abbé, et offrait de payer cent livres d'argent à l'abbaye de Cluni pour chacun de ceux qu'on lui enverrait. Hugues lui répondit qu'il donnerait volontiers une pareille somme pour chaque bon religieux qu'on lui procurerait, si l'on pouvait en acheter. Le vrai motif de son refus était que n'y ayant pas encore de monastère de son institut en Angleterre, il y avait lieu de craindre que les religieux qu'il y enverrait ne se relâchassent de l'observance établie à Cluni.

Nous avons encore de saint Hugues des statuts pleins de sagesse pour ses moines, et pour les religieuses de Marcigni qu'il avait fondées. Toutes ces pièces ont été publiées par D. Marrier et par Duchesne, Bibliol. Cluniac, p. 500.

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ROBERT tirait sa naissance de la ville de Bruges, et appartenait à la noble et illustre famille de Gruthuse qui s'était signalée dans la guerre et dans la paix par une conduite sage et courageuse. Saint Bernard ayant fait un voyage en Flandre l'an 1131 pour les affaires de l'Eglise, Robert fut tellement touché de ses paroles, qu'il prit la résolution de renoncer au monde et de le suivre à Clairvaux avec les autres gentilshommes qu'il avait gagnés à Jésus-Christ et qui se consacrèrent à Dieu sous sa conduite. Il y fit en peu de temps de si grands progrès dans la vertu, que le Saint le fit en 1138 abbé de Notre-Dameaux-Dunes en Flandre (1).

Si cette séparation fut sensible à Robert, qui avait pour saint Bernard une estime toute particulière et qui lui était attaché par une affection intime, elle ne le fut pas moins à saint Bernard. Ils se conservèrent toujours l'un pour l'autre les mêmes sentimens par le commerce des lettres, et ils se consolaient de leur éloignement par l'assurance qu'ils se donnaient de l'union parfaite de leurs cœurs et de la continuation de leur amitié (2). Robert s'appliqua avec une vigilance si infatigable à l'instruction de ceux qui

(1) Voyez ci-dessus tome V, p. 346; c'est par erreur que l'année 1128 y a été imprimée au lieu de 1138.1

(2) Dans les OEuvres de saint Bernard, édit. de Mabillon, tom. I, p. 301, on trouve deux lettres (324 et 325) adressées vers l'an 1139 à Robert. Voici le commencement de la première : « Et tarde notus, et » cito es mihi sublatus, Roberte carissime sed consolor, quod solo de » corpore patiar hoc : nam spiritu semper es mecum etc. >>

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étaient sous sa conduite, et il prit un si grand soin de les former à toute la discipline qui s'observait à Clairvaux, et de les élever à cette haute perfection à laquelle saint Bernard tâchait de porter ses enfans, que les auteurs n'ont point fait de difficulté de dire que Robert avait transporté Clairvaux en Flandre. La réputation de la sainteté du monastère de Notre-Dame-aux-Dunes se répandit aussitôt dans tout le pays, et y attira de divers côtés les premières personnes soit du monde soit de l'Eglise; chacun voulait avoir le bonheur d'être sous une si sage direction.

Ne pensant qu'à travailler à la sanctification de ses frères, et à finir ses jours avec eux dans une profonde paix, il se vit obligé de se séparer de ceux avec lesquels il voulait vivre et mourir. Car saint Bernard étant sur le point d'aller à Dieu, avait déclaré que Robert était le plus capable de lui succéder. Il n'en fallut pas davantage pour les électeurs à jeter les yeux sur lui, et ils le choisirent tous d'un commun accord pour leur père et leur supérieur.

Lorsque Robert eut appris son élection, il ne put se résoudre d'y consentir : toutefois quelque résistance qu'il y apportât, il se vit obligé de céder aux prières des religieux de Clairvaux et aux instances de plusieurs évêques et abbés. Il prit donc possession de l'abbaye le 29 Octobre 1153. Il s'y conduisit avec d'autant plus d'humilité, qu'il se reconnaissait plus inférieur à saint Bernard. Quelque bien qu'il fit, il se considérait comme un serviteur inutile chaque fois qu'il jetait les yeux sur celui dont il était le successeur. Il mettait d'un côté ses œuvres et d'un autre les vertus éminentes de son prédécesseur, et dans cette comparaison il se confondait en tout; il se méprisait en tout; il ne voyait rien en lui que de vil et de misérable, et sa vie, quoique toute sainte et pure, ne lui semblait qu'une vie monstrueuse. C'est ainsi qu'il se rendait petit à ses propres yeux, mais grands à ceux de Jésus-Christ.

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A peine avait-il pris la conduite de l'abbaye de Clairvaux, qu'il eut la consolation de recevoir au nombre de ses disciples plusieurs personnes d'une grande considération, entre lesquelles on remarque Serlon qui avait été le quatrième abbé de l'ordre de Savigny (1), et l'archidiacre de Verdun nommé André qui était un homme de naissance, mais d'une complexion fort délicate (2).

Après que Robert eut gouverné son monastère avec beaucoup de zèle, d'humilité et de prudence durant l'espace de trois ans et demi, le temps déterminé pour finir ses travaux arriva. Ayant passé le Vendredi-Saint nu-pieds selon la coutume de l'ordre, il fut saisi d'un très-grand froid, et la nuit suivante lorsqu'il était à matines, il lui vint une fièvre si violente, que ses religieux eurent de la peine à le porter à l'infirmerie : ce fut là qu'il rendit l'esprit le 28 Avril 1157. Son gouvernement ne fut pas de longue durée, mais il fut très-heureux; Clairvaux et tous les monastères de sa filiation jouirent sous lui d'une paix, d'une charité et d'une concorde tout à-fait extraordinaires. Le nombre de ses religieux s'accrût même plus qu'il n'avait fait sous saint Bernard. Son corps qui avait été enterré d'abord dans le chapitre, fut depuis transféré dans le cloître proche de la porte de l'église, où reposaient plusieurs saints corps, au milieu desquels était celui du B. Robert, dont la tombe était élevée au-dessus de celles des autres.

Tiré de Dom Le Nain, Essai de l'hist. de l'ordre de Citeaux, tom. V, p. 152-167; voyez aussi Raissii auct. ad Nat. SS. Belgii, p. 70; et Sanderi, Flandria illustr. tom. II. p. 95.

(1) Voyez Annales Cisterc., tom. II, p. 246, n. 6.

(2) Ibid. p. 268, n. 1

2 2 et 3.

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+ S. TYCHIQUE, DISCIPLE DE S. PAUL.

Premier siècle.

CE Saint, d'après le témoignage de S. Luc, était de la province d'Asie (1); mais on ne sait pas s'il était païen ou juif lorsqu'il se convertit. Il s'attacha sur-tout à S. Paul, à qui, selon toute apparence, il était redevable de sa conversion, et il résulte du témoignage que nous venons de citer, qu'en effet Tychique accompagna S. Paul dans son voyage de Corinthe à Jérusalem. Le S. Apôtre s'en servait pour l'envoi de ses lettres : ce fut lui qui porta aux Colossiens et aux Ephésiens les épîtres de S. Paul. Mais son emploi ne se bornait pas à cela; il était encore chargé de la part du S. Apôtre de s'informer de l'état des églises, de lui en faire des rapports et de consoler les cœurs des fidèles. C'est cela sans doute pour S. Paul le nomme son cher frère, un fidèle ministre du Seigneur et son compagnon dans le service de Dieu et du prochain (2).

que

Saint Paul avait résolu de l'envoyer dans l'île de Crète ou de Candie, et de lui confier le soin de l'Eglise, parce que d'autres besoins le forcèrent de rappeler Tite auprès de lui (3); mais nous ignorons s'il exécuta son dessein, car nous lisons dans un autre endroit de l'Écriture, qu'il l'envoya à Ephèse (4), pour y diriger les fidèles en l'absence de Timothée, qu'il avait prié de venir le trouver à Rome.

Voilà tout ce que nous savons d'authentique sur saint

(1) Actes des Apôt. XX, 4.

(2) Colos. V, 7, 8. Éphes. VI, 21, 22.

(3) Tite III, 12.

(4) Timoth. IV, 12.

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