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atque istum doctrinæ thesaurum accipere merebor, diligenter curabo ne illi typorum elegantia desit.

Preces quas vestra à me modestia requirit, libenter impenderem, si dignus forem qui pro tanto Præsule ad thronum divinæ gratiæ precator accederem. Non tamen omittam toto corde desiderare, ut in serenissimi Discipuli virtutibus optimi Præceptoris merita celebrentur, Antistes illustrissime, etc.

29 Aprilis 1677.

LETTRE XLIX.

AU MARECHAL DE BELLEFONDS.

Sur la nécessité de s'oublier soi-même, l'esprit qu'on prend dans l'Ecriture sainte, et les dispositions de M. le Dauphin.

L'OCCASION est trop favorable pour la laisser passer

sans vous écrire et sans vous demander de vos nouvelles. Je crois que Dieu vous continue ses grâces, et que vous apprenez tous les jours, de plus en plus, à être moins content de vous-même, à mesure que vous le devenez de lui. En vérité, c'est un état désirable, de vouloir s'oublier soi-même à force de se remplir de Dieu. Je trouve qu'on se sent trop, et de beaucoup trop, lors même qu'on tâche le plus de s'appliquer à Dieu. Dévouons-nous à lui en simplicité, soyons pleins de lui: ainsi nos pensées seront des pensées de Dieu; nos discours, des discours de Dieu; toute notre action sortira d'une vertu divine. Il me semble qu'on prend cet esprit

dans l'Ecriture. Dites-moi, je vous prie, comment vous vous trouvez de ce pain de vie. N'y goûtezvous pas la vie éternelle? ne s'y découvre-t-elle pas de plus en plus? ne vous donne-t-elle pas une idée de la vie que nous menerons un jour avec Dieu ? Les patriarches, les prophètes, les apôtres, ne vous paroissent-ils pas, chacun dans son caractère, des hommes admirables, de dignes figures de JésusChrist à venir, ou de dignes imitateurs de JésusChrist venu?

Il y a près d'un an que je n'ai reçu de vos lettres. Ma consolation est que je sais que vous ne m'oubliez pas. Pour moi, je vous offre à Dieu de tout mon cœur au saint autel, et je le prie de vous changer en Jésus-Christ avec le pain qui figure toute l'unité du peuple de Dieu; en sorte qu'il n'y reste plus que la figure extérieure d'un homme mortel. Me voilà quasi à la fin de mon travail. Monseigneur le Dauphin est si grand, qu'il ne peut pas être long-temps sous notre conduite. Il y a bien à souffrir avec un esprit si inappliqué: on n'a nulle consolation sensible; et on marche, comme dit saint Paul (1), en espérance contre l'espérance. Car encore qu'il se commence d'assez bonnes choses, tout est encore si peu affermi, que le moindre effort du monde peut tout renverser. Je voudrois bien voir quelque chose de plus fondé; mais Dieu le fera peutêtre sans nous. Priez Dieu que sur la fin de la course, où il semble qu'il doit arriver quelque changement dans mon état, je sois en effet aussi indifférent que je m'imagine l'être.

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Adieu, Monsieur; aimez-moi toujours. Il me semble que je vois votre prélat de plus en plus satisfait de vous. Quoiqu'il ait été à Paris assez longtemps, il a peu paru ici. Dieu veuille nous faire selon son cœur, et non selon le nôtre; car nous serions trop pervers et trop pleins de petites choses.

A Versailles, ce 6 juillet 1677.

LETTRE L.

A M. LE ROI, ABBÉ DE HAUTE-FONTAINE (1).

Il exhorte cet abbé à ne point publier sa réponse à la lettre que M. de Rancé avoit écrite contre sa Dissertation sur certaines pénitences usitées à la Trappe, qui paroissoieut autoriser le mensonge.

Je ne sais par quel accident il est arrivé que j'aie reçu votre écrit, sur la lettre de M. l'abbé de la

(1) Guillaume le Roi, abbé de Haute-Fontaine, prêtre aussi recommandable par sa piété que par son savoir, avoit des liaisons très-étroites avec le célèbre M. de Rancé, abbé de la Trappe. Quoique pénétré pour sa personne de tous les sentimens dus à son mérite, il ne put s'empêcher de lui témoigner son improbation pour une pratique usitée à la Trappe. On y étoit dans l'usage, sous prétexte d'humilier et de mortifier les religieux, de leur imposer des pénitences, souvent fort rudes, pour des fautes qu'ils n'avoient point commises, et qu'on leur imputoit, sans même qu'il leur fût permis de se justifier. On croyoit leur rendre service el honorer Dieu, en leur attribuant, par une pieuse fiction, des défauts que rien ne manifestoit au dehors. L'abbé de Haute-Fontaine témoigna combien ces sortes de fictions. lui paroissoient contraires à la vérité et à la charité. L'abbé de la Trappe et dom Rigobert, qui prétendoient s'appuyer de l'autorité de saint Jean

Trappe (1), plus tard que vous ne l'aviez ordonné. Il m'a enfin été remis; et j'ai été fort édifié des senti mens d'humilité, de charité et de modestie que Dieu vous a inspirés en cette occasion.

Je reconnois avec vous qu'on ne peut vous condamner sans avoir vu la Dissertation, qui a donné lieu à la lettre; et ceux qui ne l'ont pas vue, n'ayant Climaque, répondirent qu'ils regardoient cette pratique « comme » un point capital, pour faire acquérir aux religieux la perfection » de leur état (*) ». M. le Roi leur allégua contre ce sentiment beaucoup de raisons, qu'ils le prièrent de mettre par écrit. Il le fit dans un ouvrage qu'il intitula : Lettre à un abbé régulier, ou Dissertation sur le sujet des humiliations, et autres pratiques de religion. Cette Dissertation, quoique très-solide et très-sage, déplut à l'abbé de la Trappe, qui s'imagina que l'auteur accusoit lui et son monastère d'aimer les mensonges et les équivoques. Rien n'étoit cependant plus éloigné de la pensée de M. le Roi, qui n'attribuoit qu'à un zèle indiscret ou peu réfléchi la conduite qu'il blàmoit. La dispute s'échauffa. M. de Rancé entreprit de réfuter l'écrit de M. le Roi par une longue lettre qu'il adressa à M. ViaJart, évêque de Chalons, dans laquelle il laissa échapper beaucoup de traits de vivacité contre l'auteur de la Dissertation. L'évêque de Châlons communiqua sa lettre à M. l'abbé de Haute-Fontaine, qui se borna à y faire des apostilles, après quoi il la renvoya au prélat. Cette affaire n'auroit pas eu d'autres suites, si l'abbé de la Trappe n'avoit donné des copies de sa lettre : elle devint bientôt publique par l'impression, quoiqu'à l'insu et contre la volonté de l'auteur, qui le déclara ainsi à M. le Roi, dans une lettre du 14 avril 677. L'abbé de Haute-Fontaine se sentit alors pressé de faire imprimer sa Dissertation. Néanmoins la crainte de préjudicier à la réputation du respectable réformateur le retint ; et avant de prendre aucun parti, il voulut consulter ses amis les plus sages et les plus éclairés. Bossuet fut de ce nombre. Ce prélat lui conseilla de ne point répondre à l'abbé de la Trappe.

(1) Il s'agit d'un éclaircissement donné par M. le Roi, sur la lettre de M. l'abbé de la Trappe contre sa Dissertation.

(*) Lettre de M. le Roi à M. Nicole, du 14 septembre 1673.

aucune raison de vous blâmer, doivent présumer pour votre innocence.

Sans juger ce qu'il y a ici de personnel, il y a sujet de louer Dieu de ce que vous et M. l'abbé êtes d'accord dans le fond; puisqu'il convient que les corrections fondées sur le mensonge, n'ont point de lieu parmi les Chrétiens; et que vous avouez aussi qu'on ne peut avec raison, rejeter celles qui se fondent sur des fautes présumées par quelque appa

rence.

Ainsi la vérité ne souffre point dans votre contestation; et il me semble aussi, Monsieur, jusqu'ici que la charité n'y est point blessée.

Si M. l'abbé de la Trappe vous a imputé, comme vous le dites, un sentiment que vous n'avez pas (1); vous-même vous ne croyez pas qu'il l'ait fait dans le dessein de vous nuire; et tout au plus, il se pourroit faire qu'il auroit mal pris votre pensée; erreur qui, après tout, est fort excusable.

Les paroles fortes et rudes dont il se sert dans sa lettre, ne tombent donc pas sur vous; mais sur une opinion que vous jugez fausse et dangereuse aussi bien que lui.

Quant à l'impression, vous croyez sur sa parole qu'il n'y a point eu de part; et je puis vous assurer que l'affaire s'est engagée par des conjonctures dont il n'a pas été le maître.

J'avois vu sa lettre manuscrite, parce qu'elle

(1) L'abbé de la Trappe disoit que l'opinion de M. le Roi tendoit à ruiner les pratiques de pénitence, usitées dans les plus saints monastères; et pour me servir de son expression, alloit à ravager la Thébaïde.

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