Images de page
PDF
ePub

Tuum itaque ingenium, tuam ubique, Princeps, pietatem amplector; nec publicam tantùm Regum atque Imperatorum, sed privatam etiam tuæ familiæ historiam recolo lubens, ac decora suspicio inclytæ gentis, novâ virtutum tuarum luce conspicuæ. Tu ergo me, Princeps illustrissime, his sæpe muneribus donatum velis; tu meam erga te propensissimam voluntatem æquo animo, ut facis, accipias; meque tibi addictissimum solitâ benignitate ac benevolentiâ complectare. Vale.

In Regiâ San-Germanâ, prid. Kal. Decemb. an. Dom. 1674.

LETTRE XXIX.

AU MARECHAL DE BELlefonds.

Sur la traduction du nouveau Testament, imprimée à Mons; et la Bulle qui la défendoit.

LA bulle (1), dont vous m'avez envoyé copie, a été publiée seulement à Rome. Nous ne nous tenons point obligés en France à de pareilles constitutions, jusqu'à ce qu'elles soient envoyées aux ordinaires, pour être publiées par tous les diocèses; ce qui n'a point été fait dans cette occasion. Ainsi cette bulle n'est pas obligatoire pour nous; et ceux qui savent un peu les maximes en sont d'accord. Néanmoins, si l'on voit que les simples soient scandalisés de nous voir lire cette version, et qu'on ne croie pas pouvoir suffisamment lever ce scandale en expli

(1) Il s'agit du Bref du pape Alexandre VII contre la traduction du Nouveau Testament, imprimée à Mons. ( Edit. de Versailles.)

quant son intention, je conseillerois plutôt de lire la version du père Amelote, approuvée par feu M. de Paris; parce qu'encore qu'elle ne soit ni si agréable, ni peut-être si claire en quelques endroits, on y trouve néanmoins toute la substance du texte sacré; et c'est ce qui soutient l'ame. Je vois avec regret que quelques-uns affectent de lire une certaine version, plus à cause des traducteurs, qu'à cause de Dieu qui parle; et paroissent plus touchés de ce qui vient du génie ou de l'éloquence de l'interprète, que des choses mêmes. J'aime, pour moi, qu'on respecte, qu'on goûte, et qu'on aime, dans les versions les plus simples, la sainte vérité de Dieu.

Si la version de Mons a quelque chose de blâmable, c'est principalement qu'elle affecte trop de politesse, et qu'elle veut faire trouver, dans la traduction, un agrément que le Saint-Esprit a dédaigné dans l'original. Aimons la parole de Dieu pour ellemême; que ce soit la vérité qui nous touche, et non les ornemens dont les hommes éloquens l'auront parée. La traduction de Mons auroit eu quelque chose de plus vénérable et de plus conforme à la gravité de l'original, si on l'avoit faite un peu plus simple, et si les traducteurs eussent moins mêlé leur industrie, et l'élégance naturelle de leur esprit à la parole de Dieu. Je ne crois pas pourtant qu'on puisse dire sans témérité que la lecture en soit défendue, dans les diocèses où les ordinaires n'ont point fait de semblables défenses; et sans la considération que j'ai remarquée du scandale des simples, j'en permettrois la lecture sans difficulté.

A Saint-Germain, ce 1er décembre 1674.

LETTRE XXX.

AU MÊME.

Il lui parle de la manière forte et puissante dont Dieu sait agir pour gagner les cœurs; lui explique en quoi consiste la droiture du cœur, et ce qu'il faut faire pour l'acquérir; se plaint de ce que le maréchal l'avoit soupçonné d'être changé à son égard.

le

Il y a si long-temps que je n'ai eu de vos nouvelles, que je ne puis plus tarder à vous en demander. J'apprends que Dieu vous continue ses miséricordes, et je n'en doute pas car il étend ses bontés jusqu'à l'infini; et il ne vous quittera pas qu'il ne vous ait mis entièrement sous le joug. Sa main est forte et puissante, et il sait bien attérer ceux qu'il entreprend : mais il les soutient en même temps; et enfin il fait si bien, qu'il gagne tout-à-fait les cœurs. Il faut souvent se donner à lui pour prier d'exercer sur nous sa puissance miséricordieuse, et de nous tourner de tant de côtés, qu'à la fin nous nous trouvions ajustés parfaitement à sa vérité, qui est notre règle et qui fait notre droiture. « Ceux qui » sont droits vous aiment », dit l'épouse dans le cantique (1) car ceux qui sont droits aiment la règle, ceux qui sont droits aiment la justice et la vérité; et tout cela c'est Dieu même. Mais pour ajuster avec cette règle, si simple et si droite, notre cœur si étrangement dépravé, que ne faut-il point souffrir, et quels efforts ne faut-il point faire? Il faut aller assurément jusqu'à nous briser, et à ne plus

(1) Cant. 1. 3.

rien laisser en son entier dans nos premières inclinations. C'est le changement de la droite du Trèshaut; c'est ce qu'il a entrepris de faire en vous; c'est ce qu'il achevera si vous êtes fidèle à sa grâce, qui vous a prévenu si abondamment.

Mandez-moi, je vous supplie, si la longue solitude ne vous abat point, et si votre esprit demeure dans la même assiette, et ce que vous faites pour vous soutenir et pour empêcher que l'ennui ne gagne. Une étincelle d'amour de Dieu est capable de soutenir un cœur durant toute l'éternité. Ditesmoi comme vous êtes; et, je vous prie, ne croyez jamais que je change pour vous. J'ai toujours un peu sur le cœur le soupçon que vous en eûtes : et qu'auriez-vous fait qui me fit changer? Quoi, parce que vous êtes moins au monde, et par conséquent plus à Dieu, je serois changé à votre égard! Cela pourroit-il tomber dans l'esprit d'un homme qui sait si bien que les disgrâces du monde sont des grâces du ciel des plus précieuses? Priez pour moi, je vous en supplie: remerciez-le des miséricordes qu'il fait si abondamment à ma sœur Louise de la Miséricorde (1).

A Saint-Germain, ce 19 mars 1675.

(1) Madame de la Vallière; c'étoit le nom de religion qu'elle avoit pris en se faisant Carmélite.

LETTRE XXXI.

A DOM MABILLON, RELIGIEUX BÉNÉDICTIN.

Il lui témoigne la satisfaction qu'il aura de le posséder quelque temps à Saint-Germain-en-Laye.

J'AI une joie extrême de ce que nous pourrons vous tenir ici quelque temps. Je vous supplie de témoigner à vos Pères l'obligation que je leur ai de m'accorder cette grâce. Les Pères des Loges vous recevront avec plaisir : vous y serez très-bien logé, et en état de faire tout ce qui sera nécessaire pour votre santé. Si vous avez besoin de médecins, nous vous en donnerons de très-affectionnés, qui ne vous importuneront pas et qui vous soulageront. Loin de vous fatiguer l'esprit, nous songerons à vous divertir; et votre divertissement fera notre utilité. Venez donc quand il vous plaira; le plus tôt sera le meilleur. Dites à M. de Cordemoy tout ce qui vous sera nécessaire; on y donnera l'ordre qu'il faut. Je suis de tout mon cœur, votre très-humble, etc.

A Saint-Germain, ce 28 mai 1675.

« PrécédentContinuer »