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» d'atteindre l'un d'eux qui s'étoit écarté des autres en

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fuyant, & on le crut perdu, lorsque les chiens qu'on Tartarie Chinoife

» avoit lâchés en grand nombre après le tigre, & qui le » fuivoient de près, l'obligerent à fe tourner de leur » côté. Ce mouvement donna le loifir au Cavalier de » gagner le fommet de la montagne, & de mettre fa » vie en sûreté.

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Cependant le tigre retourna au petit pas vers le lieu » où il s'étoit d'abord couché. L'Empereur lui tira trois ou » quatre coups dont il fut bleffé, mais légérement; il » n'en marcha pas même plus vîte, & il revint tranquil»lement fe recoucher dans les mêmes brouffailles où il » étoit auparavant. Il fallut recommencer à faire rouler » des pierres vers cet endroit, & à tirer plufieurs coups » au hafard. Fatigué enfin de ces attaques, le tigre se » leva tout d'un coup, & prit brufquement fa course vers » le lieu où étoit l'Empereur. Sa Majefté prit fon arc & » des fleches, dans le deffein de le tirer s'il s'avançoit » affez près; mais étant arrivé au bas de la montagne, » il tourna d'un autre côté, & alla fe recacher dans le » même bouquet de bois d'où il étoit forti. L'Empereur » traversa promptement cette vallée, & fuivit le tigre de » fi près, que le voyant à découvert, il lui tira deux » coups de fufil, qui acheverent de le tuer. Tous les » Courtisans allerent auffi-tôt voir le tigre, & faire par-là » leur cour à l'Empereur «.

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Les Etrangers ne voient qu'avec surprise la hardiesse & l'intrépidité que témoignent les chevaux Tartares à la rencontre de ces tigres. Ce n'eft pas que ces chevaux ne paroiffent effrayés au premier afpect de ces animaux terribles; mais

occidentale.

occdientale.

ils s'accoutument infenfiblement à les voir & à les entendre, Tartarie Chinoife & leurs maîtres prennent un foin particulier de les former à cette forte de chaffe. Les Tartares font, en général, très-habiles dans l'art d'élever & d'exercer les chevaux; auffi en ont-ils de toute efpece & de toute couleur. Ils ont une adresse finguliere pour les prendre, lorfqu'ils font sauvages, avec le noeud coulant d'une corde qu'ils leur jettent; bientôt ils les apprivoifent, & les dressent à tous leurs ufages. Ils favent les endurcir au froid, à la fatigue, les exercer à l'abstinence; souvent même à Pe-king on les laiffe fans nourriture jusqu'au foir. Ils connoiffent leurs maladies, & l'efpece de remede qui convient à chacune d'elles. Les chevaux Tartares font d'une taille médiocre, & ne peuvent être comparés à ceux d'Europe pour la grace & la beauté; mais ils font vigoureux, capables de fatigues & de longues courfes, & accoutumés à vivre de peu.

Les Pao peuvent être regardés comme des léopards, à cause de leurs peaux blanchâtres, femées de petites taches rouges & noires. Ils ont la tête & les yeux du tigre; mais ils n'en ont ni la haute ftature, ni le cri.

Les cerfs se sont prodigieusement multipliés dans les bois & les déferts de la Tartarie; ils en renferment un grand nombre d'efpeces qui different entre elles, soit par la couleur du poil, foit par leur grandeur, foit foit par la ftructure de leur bois. La chaffe, connue fous le nom de Tchao-lou, ou chaffe d'appel du cerf, eft très-agréable. Quelques Tartares s'affublent de têtieres de cerfs trèsressemblantes, fe placent dans des brouffailles, & imitent le cri dont ces animaux fe fervent pour appeler la biche.

occdientale.

Les mâles, qui croient leur femelle arrivée ou fur le point d'arriver, ne tardent pas à s'approcher eux-mêmes. Ils Tartarie Chinoife s'arrêtent d'abord à quelque distance, & confiderent avec inquiétude l'endroit où ils découvrent des têtes de cerfs: s'ils commencent à labourer la terre avec leur bois, on peut être sûr qu'ils vont s'approcher; en effet, ils fe précipitent un moment après à travers les brouffailles qui couvrent prefque entiérement les Chaffeurs : mais ceux-ci leur épargnent une partie du chemin, en les immolant à de fufils.

coups

Le Tael-pi eft un animal auffi petit qu'une hermine; on fait de fa fourrure, des manteaux propres à garantir de la pluie & du froid. Cette efpece de rats eft trèscommune dans quelques cantons des Kalkas. Les Tael-pi fe tiennent fous la terre, où ils se creusent une fuite de petites tanieres, en nombre égal à celui des mâles qui se trouvent dans leur troupe. L'un d'entre eux est toujours au dehors, pour faire le guet; mais il fuit, se précipite fous terre, auffi - tôt qu'on approche ou qu'il découvre quelqu'un. Les Tael-pi n'en deviennent pas moins la proie des Chaffeurs : dès que ceux-ci ont reconnu le lieu qu'ils habitent, ils l'entourent, & ouvrent la terre dans deux ou trois endroits; ils y jettent de la paille allumée, pour effrayer ces petits animaux, qui, fortant en foule de leurs retraites fouterraines, se laiffent prendre avec facilité & en grand nombre. Ces peaux se vendent à vil prix dans le pays, & même à Pe-king.

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Autres Peuples foumis à la domination Chinoife.

Aux Peuples précédens on doit ajouter encore, comme Autres peuples fujets de l'Empire, les Si-fans, la nation des Lo-los, les nation Chinoife. Montagnards Miao-ffe, & les Indiens de la partie occi

foumis à la domi

dentale de Formofe.

Les Si-fans.

LES Si-fans, ou Tou-fans, habitent au couchant de la Chine & des provinces de Chen-fi & de Se-tchuen. Leur pays n'eft qu'une fuite de montagnes, renfermées entre les fleuves Hoang-ho au nord, Ya-long à l'occident, & le Yang tfe-kiang à l'orient, entre le 30° & le 35° degrés de latitude.

Les Si-fans fe divisent en deux fortes de Peuples: les Chinois appellent les uns Si-fans noirs, & les autres Sifans jaunes; noms qu'ils leur donnent par allufion à la couleur de leurs tentes. Les noirs font les plus groffiers & les plus miférables. Ils habitent par pelotons, & font gouvernés par de petits Chefs qui relevent d'un plus grand. Les Si-fans jaunes font foumis à des familles, dont l'aîné fe fait Lama, & prend l'habit jaune. Ces Lamas-Princes, qui commandent dans leurs quartiers refpectifs, ont le pouvoir de juger les procès & de punir les coupables. Leur gouvernement n'eft point onéreux pourvu qu'on leur rende certains honneurs, & qu'on paye exactement les droits du Dieu Fo, qui fe réduisent à peu de chose, ils ne molestent point leurs fujets. La plupart de ces Si-fans

logent dans des tentes; mais quelques-uns ont des maisons conftruites de terre, & même en briques. Leurs habitations

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Autres Peuples

foumis à la domi

ne font point réunies; ils ne forment tout au plus que nation. Chinoise... de petits hameaux de fix à sept familles. Ils nourriffent un grand nombre de troupeaux, & ne manquent point des chofes néceffaires à la vie. Leur principal commerce est celui de la rhubarbe, qui croît en abondance dans leur pays. Leurs chevaux font petits, mais bien taillés, vifs & robuftes.van. I la

Ces Peuples font d'un naturel fier & indépendant, & ne reconnoiffent qu'avec peine la domination Chinoise à laquelle ils font foumis. Lorfqu'ils font cités par les Mandarins, il est très-rare qu'ils fe rendent à leurs ordres. Mais le Gouvernement diffimule par politique, & tâche de contenir ces indociles fujets par la douceur & la modération dont il use à leur égard. II feroit d'ailleurs difficile d'employer les voies de rigueur, pour les foumettre à une obéiffance exacte: leurs montagnes affreuses, dont la cime est toujours couverte de neige, même au mois de Juillet, font des retraites inacceffibles, où l'on ne parviendroit pas à les forcer.

Les ufages de ces Montagnards different totalement de ceux des Chinois. C'eft, par exemple, un acte de politeffe parmi eux, de préfenter un mouchoir blanc, de toile ou de taffetas, lorsqu'ils abordent quelque perfonne qu'ils veulent honorer. Toute leur religion fe réduit au culte de Fo, pour lequel ils ont un fingulier attachement; leur fuperftitieufe vénération s'étend jufque für fes Miniftres, auxquels ils ont cru devoir déférer la fuprême puiffance & le gouvernement de la nation.

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