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herbes potageres de la Chine.

Comme les racines & les légumes forment la principale Fruits, légumes, nourriture du peuple, ils n'omettent ni foins ni travail pour s'en procurer de bons. Outre les efpeces communes à l'Europe, ils en ont une très - grande quantité d'autres qui nous font inconnues. L'une des plus fingulieres est une forte d'oignons qui ne vient point de graine comme les nôtres. Vers la fin de la faifon, on voit fortir de la pointe des feuilles de petits filamens, au milieu defquels fe forme un oignon blanc, pareil à celui qui germe dans la terre. Ce petit oignon pouffe peu à peu des feuilles femblables à celles qui le foutiennent, & ces nouvelles feuilles portent à leur tour un troifieme oignon fur leur pointe; de maniere cependant que les feuilles & l'oignon décroissent toujours à mesure qu'ils s'éloignent de la terre. On croiroit voir un ouvrage de l'art, tant il y a d'ordre & de proportion dans les différens étages qui partagent cette plante.

Les femences des choux cabus, l'ofeille, la rue, & quelques autres légumes qu'on a transportés des Indes à la Chine, y meurent ou dégénerent au bout de deux ou trois ans. Les Chinois ont cependant de vrais choux, mais ils ne pomment point: ils ont auffi le perfil depuis long-temps; mais il n'a ni la beauté, ni la faveur du nôtre.

Parmi les herbes potageres qui nous manquent, & que nous pourrions envier aux Chinois, eft celle qu'ils nomment Pe-tfai. Ce légume eft excellent & d'un très-grand ufage. Ses feuilles lui donnent quelque reffemblance avec la laitue-romaine; mais il en differe par la fleur, par la femence, par le goût & par la hauteur. Le meilleur

Pe-tfai croît dans les provinces feptentrionales, où l'on

a foin de le laiffer attendrir par les premieres gelées Fruits, légumes,

blanches. La quantité qu'on en feme, & la confommation qu'on en fait, font presque incroyables. Pendant les mois d'Octobre & de Novembre, les neuf portes de Pe-king font embarraffées de chariots chargés de ce légume, & qui défilent depuis le matin jufqu'au foleil couchant. Les Chinois font des provifions de Pe-tfai pour l'hiver; ils le falent ou le font confire, & le mêlent avec le riz, dont il rehauffe le goût.

Le Pi-tfi, ou la châtaigne d'eau.

ON a ofé avancer en Europe, que les Chinois laiffent une partie de leurs terres fans culture: on ignoroit fans doute qu'ils cultivent le fond même des eaux, & quele fol des lacs, des étangs, des ruisseaux, leur fournit des moissons qui nous font encore inconnues. Leur induftrieuse activité leur fait trouver des ressources dans un grand nombre de plantes aquatiques, dont plufieurs, telles que le Pi-tfi & le Lien-hoa, font les délices des meilleures tables chinoifes. Le Gouvernement, pour donner au peuple l'exemple de cette culture, a foin d'en faire planter dans les étangs, dans les nappes d'eau & autres especes de communes qui appartiennent à l'Etat. L'Empereur lui-même en fait garnir les pieces d'eau qui ornent les jardins, & prefque tous les foffés de fon palais en font remplis. Les fleurs & la verdure de ces plantes utiles couvrent auffi prefque entiérement les deux immenses nappes d'eau qu'on trouve au centre de Pe-king, & qui

herbes potageres de

la Chine.

herbes potageres de la Chine.

ne font féparées que par un feul pont où tout le monde Fruits, légumes, paffe, & d'où l'on peut confidérer les magnifiques jardins du palais de l'Empereur. Le Pi-tfi, ou la véritable châtaigne d'eau, ne croît que dans les provinces méridionales de la Chine: elle dépérit à Pe-king. Ses feuilles font longues comme des joncs, mais creufes & formées en tuyau comme celles des ciboules. Ce que cette plante a d'extraordinaire, c'eft que fon fruit fe trouve dans une enveloppe que forme fa racine, & y eft renfermé comme la châtaigne dans fa coque épineufe; on rompt cette coque, & l'on détache le fruit fans endommager la plante. Cette châtaigne d'eau est très-faine & d'un goût très-délicat : on la donne à mâcher aux malades pour leur rafraîchir la bouche.

Nous avons & nous négligeons dans quelques provinces de France une espece de châtaigne aquatique, que les Latins ont nommée Tribulus. Les Miffionnaires pensent que cette plante pourroit être celle que les Chinois appellent Lin-kio, & dont ils tirent un très-grand parti. Si cette identité étoit conftatée, il feroit facile d'en étendre par-tout la culture, qui offriroit une ressource nouvelle dans les temps de difette. 1°. Cette autre châtaigne d'eau, le Lin-kio, eft un fruit rafraîchiffant & agréable en été. Lorsqu'il eft verd, on le vend à Peking, dans les marchés, comme les noisettes en Europe: 2o. féché & réduit en farine, il donne une très-bonne bouillie, fur-tout lorsqu'on y joint un peu de farine de froment on peut même en mêler un tiers dans la farine dont on fait le pain: 3o. cuit au four, confit au fucre ou au miel, il devient une nourriture faine & agréable :

4°. il fournit encore un aliment convenable pour les oies, les cannes, & autres oiseaux de baffe-cour.

Fruits, légumes, herbes potageres de

La culture du Lin-kio n'exige aucun foin : cette plante la Chine. se reproduit d'elle-même dans tous les lieux où elle existe. Quand on veut la femer dans un étang, dans un ruiffeau, on en jette la graine, à la fin de l'automne, dans la partie de l'étang où l'eau eft peu profonde: il faut choisir un endroit où l'eau foit claire & le rivage tourné au midi; plus le Lin-kio reçoit de chaleur, plus il est fain, favoureux, & plus il donne de fruits.

ARTICLE VL

Arbres, arbriffeaux, plantes de la Chine.

LA vafte étendue de la Chine renferme presque toutes

les efpeces d'arbres qui nous font connues : je ne décrirai Arbres, arbrifque ceux qui lui font propres, ou du moins étrangers

à nos climats occidentaux.

Arbre au fuif

PARMI ces arbres extraordinaires, on doit diftinguer celui qui porte le fuif: il eft de la hauteur de nos cerifiers; les branches en font tortues, les feuilles taillées. en cœur, d'un rouge vif & éclatant; l'écorce en est unie, le tronc court, la tête arrondie & chargée. Son fruit eft contenu dans une écorce, partagée en trois. portions de sphere, qui s'ouvrent quand il est mûr, & découvrent trois grains blancs de la groffeur d'une petite noifette. C'est la chair dont ces trois noyaux font re

feaux, plantes de

la Chine

vêtus, qui a toutes les qualités du fuif: la couleur, l'odeur Arbres, arbrif la confistance en font exactement les mêmes. Les Chifeaux, plantes de nois la fondent & en fabriquent des chandelles, en y la Chine. mêlant feulement un peu d'huile de lin, pour en rendre la pâte plus molle & plus douce. S'ils avoient l'art de purifier cette substance, comme nous purifions le fuif en Europe, leurs chandelles ne feroient point inférieures aux nôtres; mais ils négligent de prendre cette précaution: auffi l'odeur en eft-elle plus forte, la fumée plus épaiffe, & la lumiere beaucoup moins éclatante.

Arbre à la cire.

LES Chinois recueillent encore fur certains arbres une cire d'une qualité fort fupérieure à celle que donnent les abeilles. Ils la nomment Pe-la ou cire blanche, parce qu'elle eft telle de fa nature. Cette cire eft produite par de petits infectes qui la déposent sur deux fortes d'arbres, les feuls propres à les nourrir. La premiere efpece tient de la nature du buiffon, & croît dans les terreins fecs & arides, Les Chinois l'appellent Kan-la-chu, arbre fec qui porte de la cire. L'autre espece donne un arbre plus grand & plus beau, & qui ne se plaît que dans les lieux humides; on le nomme Choui-la-chu, ou arbre aquatique qui porte de la cire.

Le Kan-la-chu, étant de la nature des buiffons, fe propage aifément. On peut en tapiffer des murailles jufqu'à la hauteur de dix pieds, ou en former des haies dans la campagne; il supporte également le froid & le chaud, & réuffit fans culture, même dans le fol le plus ingrat.

Les petits infectes qui travaillent le Pe-la ne fe trou

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