Images de page
PDF
ePub

La quatrieme, celle des Mandarins de l'avant-garde du corps de bataille. Son nom eft Tehong-fou.

La cinquieme, celle des Mandarins de l'avant-garde. On l'appelle Tfien-fou.

Ces cinq Tribunaux font encore fubordonnés au Tribunal fuprême de la guerre, qui réfide auffi à Pe-king. Le nom de celui-ci est Jong-tching-fou. Il a pour Chef un des plus grands Seigneurs de l'Empire, qui étend fon autorité fur tous les Officiers & foldats de l'armée. Rien ne reffemble mieux à nos anciens Connétables. Comme eux, il pourroit fe rendre formidable au Souverain même; mais la politique Chinoise a prévenu cet inconvénient. Ce Chef a pour affeffeur un Mandarin de Lettres, pourvu du titre & des fonctions de Surintendant des armes. Il doit auffi prendre l'avis de deux Infpecteurs nommés par le Monarque. Ce n'eft pas tout: tout: lorfque ces quatre personnes fe trouvent d'accord fur un point, ce qu'elles ont réfolu eft encore foumis à la révifion de la quatrieme Cour fouveraine & purement civile, ap. pelée Ping-pou. On pourra s'étonner qu'un Tribunal civil foit chargé de prononcer fur des objets purement militaires. Telle eft la jaloufie du pouvoir le Ping-pou a dans fon reffort toute la milice de l'Empire.

Le premier des Mandarins de guerre eft Général né; fon pouvoir en campagne équivaut à celui de nos Généraux en chef. Il a fous lui un certain nombre de Mandarins, qui rempliffent les fonctions de Lieutenans-Généraux : d'autres Mandarins rempliffent l'emploi de Colonel; d'autres celui de Capitaine; d'autres enfin celui de Lieu-tenant. & de Sous-Lieutenant.

Mandarins

d'armes.

Mandarins d'armes,

On compte entre dix-huit à vingt mille Mandarins de

guerre. Leur nombre est par conféquent fupérieur à celui

des Mandarins lettrés ; mais la confidération dont ces derniers jouiffent, les fait regarder comme le premier Corps de l'Etat. Encouragement pour les Lettres; découragement pour les armes. Leur foibleffe valut aux Tartares la conquête de la Chine; & les Tartares n'ont rien changé à cette double branche de la conftitution Chinoise.

Forces militaires

de la Chine, &c.

CHAPITRE IV.

Forces militaires de la Chine. Difcipline de fes troupes. Leurs différentes fortes d'armes. Fortifications de différente espece.

LE nombre des troupes de cet Empire excede sept cent

mille hommes. Ce nombre nous rappelle ce qu'on a dit des armées de Ninus, de Sémiramis; & plus tard, des forces de Xerxès & de Darius. Il doit moins nous étonner à la Chine, vu l'étendue de cet Empire, & fon extrême population. Mais ce qu'on n'a point dit des anciennes ar mées d'Affyrie, on peut le dire des troupes Chinoifes: rien de mieux vêtu, de mieux payé, ajoutons même de mieux armé, relativement à leur maniere de combattre. Du refte, on y remarque bien moins de difcipline que dans les troupes modernes de l'Europe, &, fans contredit, moins de

courage.

Elles ont eu d'ailleurs peu d'occafions de l'exercer depuis la derniere invafion des Tartares. Ceux-ci, comme

le

le remarque le P. Duhalde, ne font plus ce qu'ils étoient
d'abord. L'éducation nationale y contribue. On ne met
fous les
yeux des jeunes gens que des Livres de Morale;
on ne leur parle que de Loix & de Politique. On montre
par-tout peu d'égards pour l'état militaire; ceux qui l'em-
brassent ne le font guere que par l'impuiffance de pouvoir
prendre tout autre parti. Il leur manque le point capital qui
mene aux grands progrès dans tous les

genres, l'émulation.
La paye du foldat Chinois ou Tartare est de cinq sous
d'argent fin, & d'une mesure de riz par jour. Quelques-uns
ont double paye. Celle du cavalier eft de cinq fous plus
forte que
celle du fantaffin ordinaire. L'Empereur fournit
le cheval, & le cavalier reçoit par jour deux mesures
de petites féves pour le nourrir. Ce qu'on nomme en
France le décompte, fe fait à la Chine tous les trois
mois; paffé ce terme, il n'est jamais rien dû aux troupes.

Les meilleurs foldats de cet Empire se tirent de ses trois Provinces feptentrionales. Ceux que fourniffent les autres Provinces n'en fortent presque jamais ; ils vivent dans leur famille, & mangent paisiblement leur paye avec elle. Rarement ils ont besoin de fe fouvenir qu'ils font foldats, finon pour arrêter une fédition qui commence, accompagner le Mandarin Gouverneur, ou paffer une revue de parade.

C'est dans ces revues qu'on visite leurs armes. Celles du cavalier, tant offenfives que défenfives, confiftent en un cafque, une cuiraffe, une lance, & un large sabre. Le fantaffin eft armé d'une pique, d'un fabre, & les uns d'un fufil, les autres d'un arc & d'un carquois. Si quelqu'une de ces armes fe trouve en mauvais état, fi l'on y remarque tant foit peu de rouille, cette négligence est

Forces militaires

de la Chine, &c.

à l'instant même punie par trente ou quarante coups de Forces militaires bâton, fi le coupable eft Chinois; ou d'un pareil nombre de coups de fouet, s'il eft Tartare.

de la Chine, &c.

La marche de ces troupes eft pour l'ordinaire affez tumultueufe; mais elles ne manquent ni d'intelligence, ni d'activité dans leurs évolutions. Les cavaliers forment des escadrons, s'entre-choquent, fe mêlent, fe rallient fans peine au fon du cor & des trompettes. Les foldats Chinois, en général, manient bien le fabre, & tirent de l'arc avec beaucoup d'adreffe.

Nous avons indiqué les différens Chefs de ces troupes dans l'article précédent; il faut y joindre vingt-quatre Capitaines Généraux, & autant de Mestres de Camp, créés par les Tartares. Ce font des efpeces de furveillans qu'ils donnent aux Commandans Chinois.

Venons à l'artillerie. Si fon usage est fort ancien à la Chine, comme il y a quelque fujet de le croire, il sem-. bloit au moins totalement perdu au commencement du fiecle dernier. On voyoit encore aux portes de Nan-king trois ou quatre bombardes; mais il n'exiftoit pas un feul Chinois capable d'en tirer parti. Lorsqu'en 1621 la ville de Macao fit présent à l'Empereur de trois pieces de canon, il fallut lui envoyer auffi trois hommes pour

les mettre en œuvre.

On fentit alors que l'artillerie pouvoit être employée utilement contre les Tartares, qui s'étoient déjà préfentés au pied de la grande muraille, & que les trois pieces de canon, envoyées de Macao, avoient difperfés en peu d'inftans. Ils menaçoient de revenir. Les Mandarins de guerre furent d'avis que l'artillerie étoit la meil

de la Chine, &c.

leure arme qu'on pût employer contre ces Barbares. Mais comment fe la procurer? A peine les Chinois favoient- Forces militaires ils pointer & tirer le canon: il y a loin de là à la fonte des canons. Ce fut le P. Adam Schaal, Miffionnaire Jéfuite, qui leur rendit cet important fervice. Quelque temps après, le P. Verbiest, autre Jésuite Miffionnaire, entreprit, par ordre de l'Empereur, une nouvelle fonte, & porta l'artillerie Chinoife jufqu'au nombre de 320 pieces. Le même Religieux leur avoit indiqué la maniere de fortifier les places, de conftruire des forteresses nouvelles, d'élever d'autres édifices dans les regles de notre architecture moderne. Les Jéfuites ne fe contentoient point d'envoyer à la Chine des Miffionnaires zélés; il falloit encore que le zele fût réuni aux talens. Cette fage précaution les conduifit au centre d'un Empire jufqu'alors inacceffible à tout Etranger.

On compte à la Chine plus de deux mille places d'armes, divifées en fix claffes différentes : favoir, fix cents de la premiere, plus de cinq cents de la feconde, trois cents & plus de la troisieme, à peu près pareil nombre de la quatrieme, cent cinquante de la cinquieme, & trois cents de la derniere. On peut joindre à ce nombre environ trois mille tours ou châteaux répandus dans toute l'étendue de l'Empire, & tous munis d'une garnison. Ces châteaux ont un double objet; de contrarier les incursions de l'ennemi, & de prévenir les diffentions ou la révolte parmi les fujets. On y monte une garde perpétuelle; & à la premiere apparence de défordre, la plus voifine sentinelle en donne le signal du haut de la tour. Ce fignal confifte à arborer un étendard, fi c'est le jour, & une

« PrécédentContinuer »