Images de page
PDF
ePub

Forces militaires

de la Chine, &c.

torche allumée, s'il est nuit: alors les garnisons voisines se portent vers le lieu où le trouble a besoin d'être appaisé ou prévenu.

Les places de guerre, même celles du premier rang, tirent leur principale force de leur fituation, qui, en général, eft bien choifie. Elles ont d'ailleurs un rempart, une muraille de brique, des tours, & un foffé plein d'eau. Telle ville de l'antiquité a foutenu un fiége de dix ans, qui n'avoit pas d'auffi bons moyens de défense; & les vrais moyens d'attaque ont manqué long-temps à tous les voifins de la Chine.

Quant aux frontieres de ce vafte Empire, la Nature elle-même a pris foin de les fortifier dans leur plus grande étendue. La mer borde fix de fes provinces; mais elle eft fi baffe vers les côtes, que nul grand vaiffeau n'en peut approcher. Des montagnes inacceffibles la couvrent à l'occident; le furplus de ce vaste Empire eft défendu par la grande muraille.

Ce prodigieux ouvrage efface tout ce que l'Antiquité nous offre de plus impofant & de plus gigantefque. Les pyramides d'Egypte font bien peu de chofe en comparaifon d'un mur qui couvre trois grandes provinces; qui parcourt cinq cents lieues d'étendue, & dont l'épaiffeur eft telle que fix cavaliers peuvent aifément s'y promener de front. Telle eft cette fameufe muraille, unique, en effet, dans fon efpece. Elle eft flanquée de tours, placées chacune à la diftance de deux traits d'arbalete; ce qui en facilite la garde & la défenfe. Le tiers des hommes robuftes de la Chine fut employé à fa conftruction. Il étoit défendu, fous peine de la vie, de laiffer prife au fer entre l'affiette

de chaque pierre. Cette précaution a contribué à la folidité de cet ouvrage, encore prefque entier aujourd'hui, quoique conftruit il y a deux mille ans. Le premier Empereur de la famille Tfin en conçut le projet, & l'exécuta.

Cette étonnante barriere eft devenue à peu près inutile depuis la réunion des Chinois & des Tartares. Ceux-ci ne l'avoient point forcée. Ils furent appelés dans l'intérieur de la Chine, pour chaffer du trône l'ufurpateur Licong-tse: il fut vaincu, chaffé, & disparut pour toujours; mais le Tartare vainqueur prit fa place.

Ces mêmes Tartares, qui peut-être, comme on l'a div plus haut, ont perdu quelque chofe de leur premiere énergie, font encore, toutefois, la plus folide, la plus brave milice de cet Empire. Tout Tartare né dans la claffe ordinaire, eft enrôlé dès le berceau; tout Tartare en âge de porter les armes, doit être en état d'aller à la guerre au premier fignal, & en état de combattre avec ordre. Les fils de l'Empereur même, & chaque Tartare de condition, jufqu'aux moindres Officiers des banieres, doivent favoir monter à cheval, tirer de l'arc, & connoître au moins les évolutions élémentaires de l'art. Les honneurs prodigués aux Lettres n'empêchent point les Tartares qui habitent la Chine de leur préférer les armes; cet exercice leur femble exclufivement fait pour eux. Ils imitent nos anciens Francs, qui laifferent aux Gaulois fubjugés le foin de cultiver la tetre, & fe réserverent celui de la défendre.

Forces militaires de la Chine, &c..

[ocr errors]

Tribunaux fupé

nieurs de la Chine.

[blocks in formation]

LE premier de tous est le Grand-Confeil de l'Empereur, compofé de tous les Miniftres d'Etat, des premiers Préfidens & Affeffeurs de fix Cours fouveraines dont nous allons parler, & de ceux de trois autres Tribunaux que nous ferons également connoître. Ce Conseil ne s'assemble que dans les cas les plus importans. Il eft remplacé dans tous les autres par le Confeil privé de l'Empereur.

Les fix autres Tribunaux fupérieurs de la Chine résident, comme les précédens, à Pe-king. Leur dénomination générale est Leou-pou. On a donné le nom de Lijpou au premier. C'est lui qui fournit de Mandarins toutes les provinces de l'Empire. Il furveille leur conduite, tient registre de ce qu'ils font de bien & de mal; en instruit l'Empereur, qui punit ou récompense d'après fon rapport. On voit que les fonctions de ce Tribunal font auffi délicates que redoutables : c'est une espece d'inquifition civile, établie par la faine politique.

Ce Tribunal fupérieur eft encore subdivisé en quatre autres qui lui font fubordonnés. Le premier est chargé de choifir ceux qui, par leur fcience, leurs talens, leurs bonnes mœurs, font capables de pofféder telle ou telle charge dans l'Empire. Le fecond infpecte la conduite des Mandarins. Le troifieme fcelle tous les actes juridiques, donne aux différens Mandarins les fceaux relatifs à leurs dignités, à leurs emplois, & vérifie les sceaux des dépêches

rieurs de la Chine.

qu'on adreffe à la Cour. Le quatrieme enfin eft chargé d'examiner le mérite des Grands de l'Empire, tant Princes du Tribunaux fupé-Sang Impérial, qu'autres perfonnes décorées de titres purement honorifiques. Le fecret principal du Gouvernement Chinois eft que tout foit surveillé, bien connu, justement apprécié.

a

&

Hou-pou eft le nom de la feconde Cour fouveraine, & Hou-pou fignifie Grand Tréforier. Ce Tribunal, en effet, la furintendance de toutes les finances de l'Etat. Il eft le gardien, le confervateur des tréfors & des domaines de l'Empereur; il tient registre de ses revenus & de fa dépenfe; expédie les ordres pour le payement des pensions & des appointemens attachés à telle ou telle place, & pour les livraisons de riz, de pieces de foie, d'argent, qui se diftribuent tant aux grands Seigneurs qu'à tous les Mandarins de l'Empire. La fonte & la police des monnoies, les magasins publics, les douanes, tous les droits à percevoir font foumis à son inspection; & enfin il tient un rôle exact de toutes les familles qui compofent ce vaste Empire. Ces détails effraient l'imagination: auffi cette Cour a-t-elle, pour la feconder, quatorze Cours fubalternes, répandues dans les différentes provinces de la Chine.

La troifieme Cour fouveraine eft celle des Rits. On la nomme Li-pou. Li fignifie Rit, & Pou Tribunal. On fait que les Rits forment en partie la base du Gouvernement Chinois. Ce Tribunal veille à les maintenir & à les faire observer; il a auffi l'inspection des Sciences & des Arts. L'Empereur le confulte fur les graces qu'il veut répandre, fur les distinctions qu'il veut accorder. C'est lui qui veille

rieurs de la Chine.

à l'entretien des temples, qui regle tout dans les facriTribunaux fupé- fices que l'Empereur offre chaque année, & même dans les repas qu'il donne, foit aux étrangers, foit à ses sujets. C'est encore le Tribunal des Rits qui reçoit, loge, traite & congédie les Ambaffadeurs : c'est lui enfin qui veille à la tranquillité des différentes Religions tolérées dans l'Empire. Il a quatre Tribunaux fubalternes pour le feconder.

1

Le Tribunal des armes (Ping-pou) forme la quatrieme Cour fouveraine. Son reffort embraffe toute la milice de l'Empire, toutes les fortereffes, tous les arfenaux, tous les magafins d'armes, toutes les munitions de guerre & de bouche; la fabrique de toutes les armes, tant offenfives que défenfives; l'examen & le choix des Officiers de tout grade; &, on l'a déjà dit, ce Tribunal des armes n'a pour Membres que des Mandarins de Lettres.

Les quatre Tribunaux qui dépendent de celui-ci font auffi compofés uniquement de Lettrés. Il eft bon de dire une fois que ces Tribunaux fubalternes ont beaucoup de rapport avec les Bureaux de nos Ministres.

Le cinquieme Tribunal supérieur est le Siége criminel, ou, fi l'on veut, la Tournelle générale de l'Empire : elle fe nomme Hong-pou. Quatorze autres Tribunaux la fecondent dans fes fonctions; mais ils ne font que fubalternes.

On a donné le nom de Cong-pou (qui veut dire Tribunal des ouvrages publics) à la fixieme & derniere Cour fouveraine. Elle est chargée de l'entretien des palais de l'Empereur, des Princes, des Vice-Rois, de ceux où s'affemblent les Tribunaux; des temples, des tombeaux des Souverains, & de tout ce qui s'appelle monument public. Elle a, de plus, l'intendance des rues, des che

mins

« PrécédentContinuer »