Images de page
PDF
ePub

mins publics, des ponts, des lacs, des rivieres, des bar

ques, de tout ce qui fert à la navigation, tant du de- Tribunaux Supédans que du dehors; & enfin celle des tours, qui main- rieurs de la Chine. tiennent la sûreté intérieure. Quatre Tribunaux fubalternes foulagent celui-ci dans fes fonctions. Le premier dreffe les deffins, les plans des ouvrages publics; le fecond a fous fa direction tous les ateliers des différentes villes de l'Empire; le troisieme a sous la fienne les chauffées, les chemins, les ponts, les canaux, les rivieres, &c.; le quatrieme eft chargé de faire entretenir les palais de l'Empereur, cultiver fes jardins, fes vergers, & d'en percevoir le produit.

Tous ces différens Tribunaux inférieurs font mi-partie Chinois & Tartares; & l'un des deux Présidens de chaque Tribunal supérieur est toujours Tartare d'origine.

La jaloufie de l'autorité a fait imaginer des moyens qui contrarient fans ceffe la trop grande influence que chacun de ces Tribunaux fupérieurs pourroit avoir fur telle ou telle branche de l'adminiftration. Nul d'entre eux n'a un pouvoir abfolu dans fon reffort; fes décisions ne peuvent avoir d'effet que par le concours de quelque autre Tribunal, & fouvent de plufieurs. En voici un exemple : Le quatrieme Tribunal, celui de la guerre, a sous fa direction toutes les troupes de l'Empire; mais c'est le fecond Tribunal fupérieur qui préfide à leur payement. C'est du fixieme que dépendent les armes, les tentes, les chariots, les barques, tout ce qui fert aux opérations militaires. Aucune de celles-ci ne peuvent avoir lieu fans le concert de ces trois Tribunaux.

Ils pourroient, nous dira-t-on, se réunir, & même

Mmm

Tribunaux fupérieurs de la Chine.

contre les intérêts du Souverain. Voici, à cet égard, une précaution qui mériteroit d'être imitée.

Chaque Tribunal fuprême a fon Cenfeur. C'est un Officier purement paffif, qui ne décide rien, mais qui obferve tout. Il affifte à toutes les affemblées, en revoit tous les actes, ne fait aucune obfervation au Tribunal fur ce qu'il peut y avoir d'irrégulier, mais en informe fur le champ l'Empereur. Il l'informe également des fautes que les Mandarins commettent, foit dans l'adminiftration publique des affaires de l'Etat, foit dans leur conduite particuliere. Il reprend même quelquefois l'Empereur fur la fienne. Ces Co-tao (c'eft le nom qu'on donne à ces rigides Cenfeurs) font redoutés & respectés de toutes les classes de l'Etat. On ne les déplace jamais que pour les élever à de plus hauts grades. Leur moindre fort eft de refter dans leur emploi; & cette fécurité est la base du courage qu'ils déploient contre les abus.

Leur accufation fuffit pour motiver des recherches qui, pour l'ordinaire, amenent la preuve; alors l'accusé est deftitué de sa place, fût-elle une des plus éminentes. Que devient-il? Un fimple Garde, un Officier du menu peuple, &,

[ocr errors]

peu près, confondu avec lui. Une chose remarquable, c'est que les plaintes des Cenfeurs font renvoyées aux Tribunaux dont elles impliquent certains Membres. Cependant il est rare que les autres donnent le tort aux Cenfeurs; ils craindroient d'être accufés eux-mêmes.

Ce n'est pas tout; ces mêmes Cenfeurs forment en particulier un Tribunal qui a infpection fur tout l'Empire: on le nomme Tou-tché-yven. Il a le droit de faire à l'Empereur toutes les remontrances qu'exige ou l'intérêt du

rieurs de la Chine.

Prince, ou celui du Public. Son inspection s'étend fur tous les hommes publics de robe & d'épée; fur tous les ordres Tribunaux Supéde citoyens; ils font, moralement pariant, placés entre le Prince & les Mandarins; entre ceux-ci & le peuple; entre le peuple & les familles ; entre les familles & les particuliers; & ils joignent communément à l'importance de leurs fonctions, une probité incorruptible, un courage que rien ne peut abattre. Le Monarque peut, à toute rigueur, leur ôter la vie; mais plufieurs ont fouffert la mort plutôt que de trahir la vérité, que de tolérer un abus. Il ne fuffit point alors d'en frapper un, il faut les frapper tous: le dernier qu'on épargneroit n'en fuivroit pas moins la trace de tous les autres. Les Annales d'aucune autre Nation n'offrent d'exemple d'un pareil Tribunal; & il feroit néceffaire chez toutes, fans exception.

part

Il ne faut pas toutefois préfumer que les priviléges d'un Cenfeur lui donnent le droit de manquer au Souverain, ni d'inftruire le Public des observations qu'il ofe lui faire : il feroit puni de mort, s'il en faifoit feulement à un de fes Collegues. Il feroit puni de mort, s'il lui échappoit dans ses représentations un seul terme qui s'éloignât de la modération & du refpect. L'Empereur lui-même voudroit en vain lui faire grace, la Nation en corps demanderoit fon fupplice. Elle fe croit outragée quand on offense le pere commun; & elle fent, avec raison, que ces licences répétées pourroient le faire déroger luimême à ce beau titre.

Voici encore un autre Tribunal qui n'existe nommément qu'à la Chine: c'est celui des Princes; les Princes feuls le compofent. Quelques Mandarins ordinaires en font

les Officiers fubalternes, dressent les actes de procédure,

Tribunaux fupé- & les autres écrits qui développent la queftion agitée. On vieurs de la Chine. infcrit, dans les registres de ce Tribunal, tous les enfans de la famille Impériale, à mesure, qu'ils naiffent. Les dignités, les titres dont l'Empereur les décore y font consignés. Ce Tribunal eft leur unique Juge; & en matiere d'accufation, il les abfout ou les punit, à fa volonté.

On nous reprocheroit d'oublier un Tribunal.non moins particulier à la Chine que les deux précédens, mais plus connu ailleurs que l'un & l'autre; le Tribunal de l'Hiftoire, autrement Han-lin-yven. Il est compofé des plus beaux génies de l'Empire, de fes hommes de Lettres les plus profonds. Ils ont fubi, avant que d'y être admis, un examen rigoureux. C'est à eux qu'eft confiée l'éducation de l'héritier du trône, & la rédaction de l'Hiftoire générale de l'Empire. Cette derniere fonction les fait redouter de l'Empereur lui-même. Ils ont prouvé qu'il pouvoit les opprimer plutôt que les féduire. Ce n'eft pas tout, l'oppreffion ou les tentatives de féduction seroient, malgré lui, confignées dans l'Histoire.

C'eft, le plus fouvent, de ce Corps qu'on tire les Calao, ou Mandarins de la premiere claffe, & les Préfidens des Tribunaux fuprêmes..

CHAPITRE VI.

Loix Civiles.

ELLES font prefque toutes renfermées dans la morale Loix Civiles. des Livres Canoniques. La piété filiale en est la base,

comme elle est celle du Gouvernement. Quelques Ordonnances des Empereurs, & fur-tout les Rits, qu'on a fu métamorphofer en ufages, forment le refte du Code. En un mot, la Jurifprudence Chinoise offre le fond du meilleur Livre de morale.

Voici ce que tout Mandarin Gouverneur, foit de province, foit de ville, eft obligé d'enseigner deux fois par mois au Peuple qui s'eft rassemblé autour de lui. Une Loi expresse indique les matieres qui doivent entrer dans ces fortes de difcours. On enfeigne la Jurifprudence à la Chine comme on enseigne ailleurs les mysteres, les principes, les regles du culte.

ARTICLE PREMIER. On pratiquera avec un grand foin les devoirs que prescrivent la piété filiale, & la déférence que le cadet doit à fon frere aîné. C'est le feul moyen de favoir apprécier les obligations effentielles que la Nature impose à tous les hommes.

ART. II. On confervera toujours un fouvenir refpectueux des ancêtres de fa famille; il en réfultera pour elle une paix, une union constante.

ART. III. Que l'union regne dans les villages; c'est le moyen d'en bannir les querelles & les procès.

(Nota). On trouve ici un pléonasme d'idées; car, fi l'union regne dans un village, il n'y aura sûrement ni querelles ni procès.

ART. IV. Que la profeffion des Laboureurs & de ceux qui cultivent les vers à foie, jouiffe de l'eftime publique;,

Loix Civiles.

« PrécédentContinuer »