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gens de guerre à la Chine. Encore un mot fur cet objet, relativement à l'Administration. Elle n'a rien négligé ni Adminiftration pour entretenir l'émulation parmi eux, ni pour les maintenir dans le respect dû aux Loix civiles. Ce dernier point lui a complétement réussi; les gens de guerre, dans cet Empire, font plus paisibles, plus dociles que les fimples citoyens : exemple qui n'est point rare en Europe.

Le plus grand nombre des familles Tartares font logées foit dans des cafernes immenfes, conftruites près des fauxbourgs de Pe-king, foit dans les campagnes. Chaque famille de fimple foldat y occupe un appartement complet & féparé. Elles renferment pour les Officiers, des maisons proportionnées à leur grade; elles renferment auffi des écoles publiques, où la jeuneffe Tartare reçoit une bonne éducation. Ces casernes font d'une extrême utilité pour le maintien de la police.

Ce font les Tartares qui rempliffent le plus grand nombre des emplois militaires; précaution fage pour maintenir leur conquête, indépendamment de ce que l'inftinct Tartare eft plus belliqueux que l'instinct Chinois. Une campagne de guerre eft comptée pour deux années de service. On tient une note exacte de toutes les actions de valeur, de courage, ou qui font preuve d'une intelligence fupérieure. Elles fervent à l'avancement de ceux qui les ont faites, s'ils y furvivent; s'ils ont péri en combattant, les récompenfes qu'ils méritoient reAluent fur leurs veuves, leurs fils, & leurs freres. Ni le pere d'une nombreuse famille, ni les fils uniques, ni le fils d'une veuve âgée, ne font forcés d'aller à la guerre,

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Adminiftration militaire.

à moins que l'Etat ne foit en grand danger, ou que le
cas ne foit des plus urgens. Le Gouvernement fait des
avances d'argent à quiconque entre en campagne; il lui
donne auffi double paye, une pour lui,
lui, l'autre pour fa
famille, & elle en jouit jufqu'à son retour.

Nul genre de service rendu à l'Etat n'est ni méconnu,
ni oublié ; les fervices militaires moins que tous les au-
tres. Mais comme la guerre ne peut pas durer toujours,
l'estime qu'on fait des gens de guerre semble cesser à
l'instant qu'ils ceffent d'être en face de l'ennemi. C'est
auffi dans ces momens de crife que le Gouvernement
prodigue les diftinctions, les récompenfes, les honneurs
de toute espece. Il étend ses regards jusque sur la derniere
claffe militaire, jufque fur le dernier individu de cette
claffe. Qu'un fimple cavalier, un fimple foldat périffe
dans une bataille, on envoie à fa famille ou fa cheve-
lure, ou fon arc, ou fon fabre, &c. pour être enterré à la
place du cadavre dans la sépulture de fa famille. On y joint
un éloge proportionné à ce qu'il a fait, pour
a fait, pour être gravé
fur la tombe qui renferme fes dépouilles. Les Officiers
morts font encore traités avec plus de distinction. On fait
transporter chez eux, ou leur armure complette, ou leurs
cendres, ou leurs offemens, ou leur cadavre entier. C'est
leur grade, ou la maniere dont ils se font distingués, qui
fert de regle dans cette occurrence. On accorde aux uns
des honneurs pour leur tombeau; on en fait ériger à
d'autres. C'est souvent à mille, à quinze cents lieues qu'on
fait tranfporter ainfi le corps d'un Officier, ou la cheve-
lure d'un fimple foldat. Celui-ci, comme l'autre, est

nommé

nommé dans les Gazettes; fon nom passe ainfi fous les

militaire.

yeux du Public, & de là dans l'Histoire générale de Administration l'Empire.

La récompense est prompte pour ceux qui ont fait leur devoir; la punition ne l'est pas moins pour ceux qui né-, gligent de le remplir. Mais, encore une fois, la dégradation, la deftitution abfolue d'un Officier fupérieur ne peut nuire à l'avancement de fon fils. Ce dernier, interrogé par l'Empereur même fur fa famille, répondra froidement: Mon pere fut dégradé pour s'être mal conduit dans telle affaire; mon aïeul fut décollé pour avoir commis telle ou telle faute; & cet aveu ne porte aucun préjudicè à celui qui le fait. Il peut même, à force de fervices, réhabiLiter un jour leur mémoire.

CHAPITRE XI V.

Suite des précédens. Adminiftration de la Famille
Impériale.

L'ADMINISTRATEUR d'un Empire immense, & qui se
pique de le bien gouverner, qui semble même attentif
à furveiller chaque famille, ne néglige pas non plus de
régir la fienne. Il a déjà été question, dans cet Ouvrage,
des Princes du Sang de la Chine. On peut s'être fait en
Europe, & fur leur existence, & fur leur état, & fur leur
crédit, & fur leur influence dans l'Administration, une
idée bien contraire à leur fituation réelle. Tout consiste
pour eux dans quelques priviléges de fimple représentation,

Adminiftration de la Famille Impériale.

Administration de la Famille Impériale.

& dans celui de n'être jugés que par leurs Pairs. Ils ne
même compter
fur la diftinction donnent
que
peuvent pas
les richeffes ou les premieres places. Tout, dans cet Empire
méthodique, eft foumis à l'examen : la feule ceinture jaune
eft dévolue à ces Princes par droit de naissance.

Elle ne l'eft cependant qu'à ceux qui defcendent en droite ligne du Fondateur de la Dynastie régnante. Les noms de leurs enfans, foit filles, foit garçons, l'année, le mois, le jour de leur naiffance, font infcrits fur le grand Livre jaune, effentiellement destiné à cet usage. La ceinture jaune-orangé eft la marque distinctive des Princes collatéraux. Les noms de leurs enfans font infcrits fur le Livre rouge. L'Empereur feul détermine le furnom des Princes de la branche régnante. Les autres n'en peuvent prendre aucun qui ait une relation trop directe, foit avec les noms Mongoults, foit avec les noms Chinois.

Lorfque les Princes & Princeffes de cette derniere claffe ont atteint l'âge de quinze ans, on présente un placet à l'Empereur pour obtenir de lui la permission de les marier. Les Princes de la ligne directe peuvent s'épargner cette démarche; mais s'ils vouloient s'allier à des Princes Mongoults ou Kal-kas, ils ne le pourroient fans la permiffion de l'Empereur.

Le rang des fils de l'Empereur même, excepté de celui qui lui fuccede, diminue d'un degré à chaque génération. A la feptieme, l'aîné de ces branches n'est plus que fimple ceinture jaune; les autres fe trouvent jetés dans la claffe des fimples citoyens.

Une Principauté héréditaire passe, avec tous ses droits,

d'un aîné, fils d'une femme légitime, à un autre aîné: cette regle a lieu pour chaque génération, à moins que le poffeffeur ne se rende coupable de quelque délit. Alors l'Empereur choisit pour le remplacer, ou quelqu'un de ses cadets, ou quelqu'un de fes coufins, mais toujours pris dans la même branche. On ne pourroit la dépouiller d'une Principauté héréditaire, sans faire le procès à tous ceux qui la compofent.

La feule autorité héréditaire des autres Princes n'exifte que dans les Bannieres Tartares. Là, ils occupent d'emblée un rang qu'ils tiennent de leur naissance. Du reste, ils font foumis, dans des temps marqués, à des examens militaires; élevés ou abaiffés, felon qu'ils montrent plus ou moins d'intelligence & de lumieres. Les fils de l'Empereur & des Princes fes fils fubiffent les mêmes épreuves. La feule chofe qui les diftingue à cet égard, c'est qu'ils ont, en particulier, leurs écoles, leurs Maîtres, leurs examens littéraires & militaires. C'est d'après ces examens, dont on tient registre, qu'ils font élevés plus tôt ou plus tard à des grades plus ou moins importans.

La famille Impériale a des titres, des grades qui lui font particuliers; mais l'âge & la maniere de les obtenir, foit par héritage, foit par faveur, foit à titre de récompenfe, tout a été prévu par la Loi. Elle prefcrit également ce qui concerne les cadets des Princes de différens ordres; le rang, les titres & les droits que les filles de l'Empereur, des Princes fes enfans, & des Princes titrés donnent à leurs époux; & enfin les prérogatives, les distinctions, les droits honorifiques, les revenus fur l'Etat accordés à chaque ordre des Princes titrés : elle femble

Administration de la Famille Impériale.

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