Images de page
PDF
ePub

"

geffe...... Lorsqu'on veut faire l'éloge des vertus de Yao,

» on nomme d'abord fa religion, comme pour les peinDe la Religion ancienne de la » dre toutes d'un feul trait, & on en finit le tableau Chine. » par louer fa fageffe. Le cœur de cet homme de bien » étoit toujours rempli de la crainte & du refpect avec lefquels il faut fervir le Chang-ti. C'eft en cela que » paroît la haute fageffe dont il étoit éclairé «

[ocr errors]

Le motif qui détermine Yao à rejeter Kong-Kong qu'on lui propofoit pour fucceffeur, c'est que celui-ci ne lui paroît pas pénétré de la crainte du Tien : » KongKong, dit-il, n'eft fage qu'en paroles; fon orgueil menace le Tien «. Confent-il que Pe-kouen soit chargé des travaux pour l'écoulement des eaux? » qu'il » aille, ajoute-t-il, & que la Religion guide ses pas «‹‚—— » Que la Religion guide vos pas, dit-il encore à sa fille, » lorsqu'il la donne en mariage au sage Chun «.

[ocr errors]

Celui-ci, qui fut le fucceffeur de Yao, ne parut pas moins pénétré de crainte & de respect pour le Chang-ti. Son premier foin, dès qu'il fut revêtu de la puissance Impériale, fut de facrifier au fouvérain Maître de l'Univers. Il distribua les emplois, & après avoir recommandé à chacun de ses Officiers de s'acquitter avec vigilance des devoirs de fa place, il finit par leur dire à tous : » Ecou» tez fans ceffe la voix de la Religion; que chaque » moment augmente vos mérites dans ce que vous faites » pour le Tien «. Mais ce qui montre combien la Religion étoit chere au cœur de ce Prince, ce font les paroles qu'il adreffe à Pe-y, en le chargeant du foin de présider au culte & aux cérémonies. Il est rapporté dans le Chou-king qu'il demanda aux Grands : » Y a-t-il quel

[ocr errors]

qu'un qui puiffe préfider avec nous aux trois Li? De la Religion » L'affemblée nomma Pe-y. Soyez Tchi-tfong (*), lui

ancienne de la Chine.

"

"

"

» dit Chun, veillez fur vous-même jour & nuit avec une
religieufe frayeur. O qu'il faut que votre cœur foit
droit, & votre conduite innocente! Pe-y se profterna
la face contre terre, pour
demander
que le Prince
» fît tomber fon choix fur Kouei ou fur Long. Obéissez,
» lui dit le Prince, & foyez pénétré des plus vifs fen-
» timens de la Religion «.

[ocr errors]

"

n

que

Le développement que le Commentaire Impérial donne à ces paroles de Chun, mérite d'être cité : » ...... Jour & » nuit, c'eft-à-dire, d'un foleil à l'autre, en forte fa Religion eût toujours les yeux ouverts fur toutes les actions, » pour que fa droiture & fa pureté n'en reçuffent au» cune atteinte....... Droit, c'est-à-dire, que fon cœur fût dégagé de tout intérêt propre, & exempt de tout dé» faut. Quand la Religion enracine la droiture dans l'in» térieur, elle n'y laisse aucun détour ni retour d'amour» propre alors le cœur eft pur & ferein, la concupif» cence ne le fouille d'aucun défir terreftre, & il peut » entrer en commerce avec l'Esprit...... Celui qui eft » rempli de Religion eft rempli de droiture; & quand » la droiture remplit fon intérieur, il peut préfider an » culte & en régler la pompe....... La droiture du cœur » fait la droiture de l'homme : la vraie droiture vient de » la Religion; dès qu'on manque de Religion, on eft » faux; c'est-là le cœur de l'homme. La pureté est la » continuité de droiture; qui est droit est pur; qui

(*) Celui qui préfide au culte.

De la Religion

» n'eft pas droit eft fouillé. Dès qu'on manque de pureté » & de droiture, il eft bien difficile de fervir l'Efprit. ancienne de la » Voilà pourquoi le texte dit le jour & la nuit, pour Chine. » marquer la non-interruption...... L'Empereur eft à la » tête du culte qu'on rend au Seigneur du ciel & de la » terre. Le Tchi-tfong est fon aide dans ce qui regarde » le culte; mais, à moins que fon cœur ne foit uni au » Seigneur du ciel & de la terre, & uni par la vertu à " la fageffe de l'Esprit, il n'eft pas digne de préfider au » culte «.

وو

[ocr errors]
[ocr errors]

Yu fut auffi religieux que l'Empereur Chun, auquel il fuccéda. » Le grand Yu, dit le Chou-king, remplit » les quatre mers des rayons de fa fageffe; il fut un vé» ritable adorateur du Chang-ti. O qu'il faut veiller » avec soin sur soi-même, disoit-il à l'Empereur Chun! Que cette vigilance doit être vivifiée par la Religion » pour conferver la paix du cœur, pour le tenir fans " ceffe dans les bornes du devoir, pour ne s'égarer jamais dans les fentiers perdus de l'oifiveté, pour ne se » fouiller jamais par des plaifirs coupables, pour nommer » aux emplois fans acception de perfonnes, fufpendre » fes réfolutions dans les chofes douteufes, ne rien dé» cider qu'avec une pleine connoiffance, préférer le bien » de l'Etat aux vains applaudiffemens de la multitude, » & ne facrifier jamais le peuple à fes paffions!-For»tifiez & épurez votre vertu, lui difoit Kao-yao; que » vos projets foient dictés par la fageffe, & vos réfolu» tions approuvées par les Sages. — Mais, lui dit Yu, » comment pouvoir y réuffir?- Penfez à l'Eternité (*),

(*) Sée-yong.

» lui répondit Kao-yao, fi vous voulez cultiver votre De la Religion ame & l'orner fans ceffe de nouvelles vertus.

ancienne de la Chine.

D

D

[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]
[ocr errors]

qu'il eft dangereux d'entraîner ses sujets par fon exemple » dans les précipices de la molleffe & de la volupté ! Veillez, Seigneur, & veillez fans ceffe; craignez, & craignez sans cesse. Ce qui finit avec le jour, ce qui » ne dure pas jufqu'au lendemain, a des fuites qui at»teignent jufqu'aux fiecles les plus reculés. Ne rendez » pas inutiles les foins de vos Mandarins, ils font plus » les Officiers du Tien que les vôtres. C'est le Tien qui » a chargé les hommes du joug des Loix ; c'est le Tien qui » a établi les distinctions du rang & des conditions. Les "Loix font un tréfor fans prix, les diftinctions font » une fource de biens; mais ce n'eft qu'autant qu'on eft fidele, & que la crainte du péché, l'amour de la Religion & l'efprit de concorde pouffent tout le monde » vers le bien. La vertu eft tendrement chérie du Tien: » qu'elle jouiffe des diftinctions marquées pour chaque Le Tien a le crime en horreur; que les cinq » fupplices le punissent selon fa griéveté. Appliquez-vous, Seigneur, appliquez-vous fans relâche aux foins du gou» vernement. Le Tien eft fageffe & vérité; mais c'est » avec les yeux des peuples qu'il regarde les Princes. Le » Tien eft terrible dans fes vengeances; mais c'est par » les mains du peuple qu'il punit les Princes. Ce qui eft » le plus bas touche ainfi ce qui est le plus élevé. Que » la Religion vous guide, & vous pofféderez la terre. » Ne perdez jamais de vue le vrai but du gouverne» ment. Ce n'est ni par les fineffes d'une vaine politique, » ni par les coups d'autorité qu'on regne : c'est par la

›› rang.

[ocr errors]

justice. Vous ne ferez fecondé par vos Officiers qu'au

De la Religion

» tant que vous ferez appliqué vous-même aux affaires; ancienne de la » vos foins décideront de vos fuccès. Montrez-vous digne Chine. » du choix du Chang-ti, & le Tien, à fon tour, fou» tiendra fon choix par fes faveurs ".

Il étoit néceffaire de rapporter ces textes anciens, qu'il eût été facile de multiplier, pour faire connoître quelle a été la doctrine religieufe des fiecles de Yao de Chun, & de Yu. On voit que ces monumens de la haute antiquité retracent la foi patriarcale, & que les hommages des premiers Chinois ne s'adreffoient qu'à un Dieu fuprême, Etre intelligent, libre, tout - puissant„ vengeur & rémunérateur.

Nous ne hafardons que comme de fimples conjectures les obfervations fuivantes. Parmi les anciens caracteres Chinois, que le temps a épargnés, on trouve celui-ci A. Selon le Dictionnaire de Kang-hi, ce caractere fignifie union. Selon le Choue-ouen, ce Livre d'un fi grand poids à la Chine, A est trois unis en un; il dérive des caracteres Jou (entrer, pénétrer) & Ye (un); d'où il conclut que ▲ veut dire trois, unis, pénétrés, fondus en un.. Le Lieou-chou-tfing-hoen, qui eft une explication favante & raisonnée des plus anciens caracteres, s'exprime ainsi : "A fignifie union intime, harmonie, le premier bien » de l'homme, du ciel & de la terre; c'eft l'union des "trois Tfai (Tfai fignifie principe, puiffance, habi» leté); car unis, ils dirigent ensemble, créent & nour» riffent. L'image (trois unis en une feule figure) n'eft: » pas fi obfcure en elle-même ; cependant il eft difficile: » d'en raisonner fans fe tromper; il n'eft pas aifé d'en parler «

[ocr errors]
« PrécédentContinuer »