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Cet édifice reçut un nom différent & une forme nouvelle fous chacune des trois premieres dynasties. Les Hia ciens des Chinois. Sacrifices anl'appelerent Ché-ché, maison des générations & des fiecles, ou, comme l'interprete le P. Amyot, temple en l'honneur de celui qui a fait les fiecles & les générations. Son enceinte renfermoit cinq falles féparées, destinées à divers usages. Ces falles n'avoient ni peintures ni ornemens; on n'y voyoit que les quatre murailles nues, percées de fenêtres pour recevoir le jour. L'efcalier de la principale entrée étoit composé de neuf marches ou degrés.

Les Chang nommerent le temple Tchoung-ou, ou Temple renouvelé. Il servit aux mêmes usages; mais il étoit plus riche & plus orné. Les cinq falles particulieres étoient foutenues par des colonnes, & furmontées par d'autres colonnes qui portoient un fecond toit.

Ce même temple, fous la dynastie de Tcheou, reçut le nom de Ming-tang, le Temple de la lumiere. Les Empereurs de cette famille crurent rappeler le culte à fa pureté primitive, en imitant plus strictement que leurs prédéceffeurs la fimplicité des Anciens. Ils n'ornerent leur temple ni de colonnes ni de toits élégamment conftruits. Les cinq falles n'y furent féparées que par de fimples murailles; l'une d'elles étoit celle où l'on offroit; dans les quatre autres étoient renfermées les différentes chofes néceffaires pour les facrifices. On entroit dans ce ruftique édifice par quatre portes, lefquelles étoient couvertes d'une mouffe fine, qui représentoit les branchages dont on formoit l'enceinte de l'ancien Kiao. Cette mouffe fine couronnoit également l'arête des toits. Autour de l'enceinte régnoit un canal qu'on avoit creufé, & qu'on rempliffoit d'eau pour le

Sacrifices an

temps où l'on devoit offrir les facrifices. A ce temple ciens des Chinois. principal, les Tcheou en ajouterent un fecond, qu'ils nommerent Thing-miao, c'est-à-dire, Temple de la propreté. Celui-ci ne fervoit qu'aux purifications & aux cérémonies faites en l'honneur des Ancêtres; le premier étoit confacré tout entier au culte du Chang-ti.

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Pe-king renferme aujourd'hui deux temples principaux, le Tien-tan & le Ti-tan. C'eft dans la conftruction de ces édifices que les Chinois ont déployé toute l'élégance & toute la pompe de leur architecture. Ces deux temples font également dédiés au Chang-ti, mais fous deux titres différens dans l'un, c'eft l'Esprit éternel qu'on adore; dans l'autre, c'est l'Esprit créateur & confervateur du Monde. Les cérémonies qui accompagnent les facrifices modernes, font plus multipliées. Rien n'égale la magnificence & l'éclat qui environnent l'Empereur, lorfqu'il s'acquitte de cette auguste fonction. Lui seul, en qualité de Pere & de Chef commun de la grande famille, a le droit d'offrir le facrifice au Chang-ti : c'est au nom de tout fon peuple qu'il prie & qu'il facrifie. Quelque temps avant le jour fixé pour cette importante cérémonie, le Monarque, les Grands de fa Cour, les Mandarins, & tous ceux que leurs charges mettent dans le cas d'y affifter, s'y préparent par la folitude, le jeûne & la continence. Pendant ce temps, l'Empereur ne donne point d'audience, & les Tribunaux sufpendent l'expédition des affaires. Les Mandarins du Tribunal des crimes, tout homme qui a été noté, ne peuvent remplir aucune fonction dans ces grandes cérémonies. Les mariages, les funérailles, les réjouiffances, les feftins, & toute fête quelconque, font défendus. Le jour de ces

facrifices

facrifices folennels eft celui où l'Empereur paroît dans tout l'appareil de fa puissance & de fa grandeur. Une foule innombrable forme fon cortége; une multitude de Princes, de Seigneurs, de Grands, d'Officiers, l'environnent: sa marche vers le Tien-tan ressemble à un véritable triomphe. Tout ce qui paroît dans ce temple annonce la même magnificence du Souverain : les vafes & tous les uftenfiles qui fervent aux facrifices, font d'or, & ne peuvent être employés à un autre usage; les inftrumens même de mufique ont des proportions plus fortes, & font les plus grands de tous ceux qui exiftent; on ne s'en fert point ailleurs. Si jamais l'Empereur ne paroît plus grand que lorsqu'il marche au Tien-tan, jamais auffi on ne le voit plus abaiffé, plus éclipfé, que quand il offre le facrifice. A la maniere dont il se profterne, se traîne à terre, parle de lui-même au Chang-ti en fe fervant des expreffions les plus humbles, on s'apperçoit bientôt que toute cette pompe qu'il emploie n'eft que pour rendre plus fenfible l'infinie distance qui fépare l'homme de l'Etre Suprême.

La cérémonie dans laquelle l'Empereur ouvre & laboure chaque année la terre de fes propres mains, est une des plus anciennes de la Chine : il ne faut pas croire qu'elle foit une inftitution purement politique pour encourager l'Agriculture. Sous ce feul rapport, elle honoreroit le Législateur; mais il eft certain que cette cérémonie du labourage a toujours été regardée & pratiquée à la Chine comme un acte de Religion. On lit expreffément dans le Li-ky, l'un des anciens Livres canoniques » C'est pour le Tfi (facrifice au Ciel) que l'Empereur laboure lui-même dans le Kiao du fud; c'est

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Sacrifices anciens des Chinois.

Sacrifices anciens des Chinois.

pour lui offrir les grains qu'on en recueille. C'est aussi " pour le Tfi que l'Impératrice & les Princeffes élevent » des vers à foie dans le Kiao du nord; c'est pour en » faire les habits des facrifices.... Si l'Empereur & les » Princes labourent la terre; fi l'Impératrice & les Prin» ceffes élevent des vers à foie, c'est par le respect dont » ils font pénétrés pour l'Esprit qui regne fur l'Univers ; » c'est pour l'honorer felon la grande & ancienne doc» trine «. Il est aifé de voir, par plufieurs autres monumens historiques, que la cérémonie du labourage a été, dès fon origine, une inftitution purement religieuse, & qu'elle a toujours appartenu au culte. L'Empereur, même encore aujourd'hui, s'y prépare, comme nous l'avons déjà dit, par trois jours de jeûne; il la commence par un facrifice folennel, & le blé qu'on recueille du champ qu'il a enfemencé, est respectueusement déposé dans un grenier sacré, & réservé pour les grands facrifices au Chang-ti.

LAO-KIUN

CHAPITRE 111.

Secte des Tao-fé.

AO-KIUN ou Lao-tfé fut le Fondateur de cette Secte. Seite des Tao-ffé. Ce Philofophe naquit l'an 603 avant notre Ere, vers la fin de la dynastie des Tcheou. Son pere n'étoit qu'un pauvre paysan, qui, depuis l'enfance, fervoit en qualité de manœuvre dans une maifon opulente. Il étoit parvenu à l'âge de foixante-dix ans, fans avoir encore fait choix d'une épouse; il s'unit enfin à une paysanne âgée de quarante

ans. Les grandes destinées du Philosophe furent préfagées

par les circonstances merveilleuses qui accompagnerent, Seite des Tao-fé. dit-on, sa naissance Sa mere, fe trouvant un jour dans un lieu écarté, conçut tout à coup par la feule impreffion de la vertu vivifiante du Ciel & de la Terre. Elle porta fon fruit pendant quatre-vingts ans. Mais le Maître que servoit cette femme, ennuyé d'une groffeffe auffi longue, la chaffa de sa maison, & la réduifit à errer long-temps dans la campagne. Enfin elle accoucha, fous un prunier, d'un fils dont les cheveux & les fourcils étoient tout blancs. Elle lui donna d'abord le nom de l'arbre fous lequel il étoit né; s'étant apperçue enfuite qu'il avoit les lobes des oreilles fort alongés, elle en forma fon fur& l'appela Prunier-l'oreille, Ly-eul. Mais le peuple, frappé de fes cheveux blancs, le nomma l'Enfant-vieillard, Lao-tfé.

nom,

On ne raconte rien de fon enfance; mais lorsqu'il eut atteint un certain âge, il eut la direction de la bibliotheque d'un Empereur des Tcheou, qui lui conféra dans la fuite un petit Mandarinat. Son premier emploi, qui le fixoit au milieu des livres, lui infpira un goût vif pour l'étude; il s'y livra, & acquit une connoiffance profonde de l'Hiftoire & des Rits anciens. Il mourut à Ou dans un âge très-avancé. Le principal Ouvrage qu'il ait laiffé à ses Difciples, eft le livre Tao-te, qui eft un Recueil de cinq mille Sentences.

La Morale de ce Philosophe a de grands rapports avec celle que prêchoit Epicure. Elle fe réduit à écarter tout désir véhément, à réprimer toutes les paffions vives, capables d'altérer la paix & la tranquillité de l'ame. Selon C ccc ij

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