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» fi ces Efprits avoient le pouvoir qu'on leur attribue,

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pourquoi n'ont-ils pu fauver leur temple? S'ils font Sede des Tao-fé. » dans l'impuissance de fe garantir eux-mêmes, comment

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» pourront-ils nous protéger? Les phénomenes qui nous frappent font des avertissemens de changer de conduite. » La lumiere du Soleil, qui paroît diminuer, les bruits qu'on entend dans les airs, les tremblemens de terre, » ne font pas de vains pronoftics. Notre zele pour la » gloire & les intérêts de Votre Majesté ne nous permet » pas de garder le filence à la vue de tant de prodiges, capables de le réveiller s'il étoit affoupi «. L'Empereur applaudit au zele de fes Miniftres, & ne réforma ni sa conduite, ni fes opinions.

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Les Tao-ffé actuels facrifient à l'Esprit qu'ils invoquent trois fortes de victimes; un cochon, une volaille & un poiffon. Les cérémonies dont ils font usage dans leurs fortiléges, varient felon l'imagination & l'adreffe de l'impofteur qui les opere. Ceux-ci enfoncent un pieu en terre; ceux-là tracent fur le papier des caracteres bizarres, & accompagnent chaque trait de leur pinceau de grimaces & de cris horribles; d'autres font un tintamarre affreux de chaudrons & de petits tambours : tantôt ils réuffiffent, tantôt il ne résulte rien de tout ce fracas.

Un grand nombre de ces Tao-sse font à la Chine le métier de Devins. Quoiqu'ils n'aient jamais vu celui qui vient les confulter, ils l'appellent d'abord par fon nom, lui font le détail de toute fa famille, lui difent comment sa maison eft fituée, combien il a d'enfans, leurs noms, leur âge, & vingt autres particularités qu'ils ont l'adreffe de favoir d'ailleurs. Quelques-uns de ces Devins, après leurs

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invocations mystérieuses, font paroître en l'air la figure Seite des Tao-fé. du Chef de leur Secte, ou celles de leurs Divinités. D'autres ordonnent à leur pinceau d'écrire de lui-même ; & le pinceau, fans qu'on y touche, trace auffi-tôt fur le papier ou fur le fable la réponse aux demandes & aux confultations qui ont été faites. Tantôt ils font paroître fuccellivement, fur la surface d'un baffin plein d'eau, toutes les perfonnes d'une maison; ils Y font remarquer, comme dans un tableau magique, les révolutions qui doivent arriver dans l'Empire, & les dignités futures auxquelles feront élevés ceux qui embrasseront leur Secte.

Le Chef des Tao-fé & les fucceffeurs font décorés par le Gouvernement de la dignité de Grands-Mandarins, & résident dans un bourg de la Province de Kiang-fi, où ils habitent un riche palais. La confiance superstitieuse des peuples y entretient un grand concours; on s'y rend de toutes les Provinces : les uns y viennent pour folliciter des remedes à leurs maux, les autres pour pénétrer dans l'avenir & faire confulter les forts fur leurs futures deftinées. Le Tien-fé diftribue à tous des billets remplis de caracteres magiques, & ils s'en retournent fatisfaits, fans regretter ni la fatigue ni les dépenfes, qui font la fuite de ce pieux pélerinage.

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CETTE autre Secte, plus pernicieuse encore & beaucoup

ou Fo.

plus répandue à la Chine que la précédente, est originaire Sette du Dieu Fot de l'Inde. Les Docteurs Tao-sse avoient promis au Prince de Tchou, frere de l'Empereur Ming-ti, de la dynastie des Han, de le faire entrer en communication avec les Efprits. Ce Prince crédule & fuperftitieux ayant entendu parler d'un Esprit célebre dans l'Inde, nommé Foé, ne ceffa de folliciter fon frere jufqu'à ce qu'il l'eût engagé à envoyer une ambassade vers cette Divinité étrangere. L'Officier chargé de cette commiffion partit accompagné de dix-fept autres perfonnes, & dirigea fa route vers les Indes. Lorfqu'il y fut arrivé, il n'y rencontra que deux Cha-men, ou Religieux de Fo, qu'il emmena à la Chine. Il rassembla en même temps plufieurs images du Dieu Fo ou Boudha, peintes fur une toile fine des Indes, avec quarante-deux Chapitres des Livres Canoniques des Indiens, qu'il mit, ainsi que les images, fur un cheval blanc. Cette ambassade rentra dans la ville Impériale la huitieme année du regne de Ming-ti, & la foixante-cinquieme de l'Ere chrétienne. Tous les Hiftoriens conviennent que c'est à cette époque que le culte & les dogmes de Foe furent introduits pour la premiere fois à la Chine, où ils firent bientôt les plus rapides progrès.

On n'a pas une connoiffance certaine du lieu de la

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ou Fo.

naissance de ce prétendu Dieu. Ses Sectateurs rapportent Secte du Dieu Foé qu'il naquit dans un des Royaumes de l'Inde, voifins de la ligne, & que fon pere étoit Roi. Ils disent que fa mere, appelée Mo-yé, le mit au monde par le côté gauche, & qu'elle mourut peu de temps après lui avoir donné le jour; que lorfqu'elle conçut, elle s'imagina, pendant fon fommeil, avoir avalé un éléphant, & que ce rêve bizarre est l'origine de la vénération particuliere que les Rois Indiens ont toujours témoignée pour l'éléphant blanc. Dès que cet enfant extraordinaire fut né, ajoutent-ils, il eut assez de force pour fe tenir debout; il fit fept pas, & montrant d'une main le Ciel & de l'autre la Terre, il s'écria : Dans le Ciel & fur la Terre, il n'y a que moi qui mérite d'étre honoré.

A l'âge de dix-fept ans, il époufa trois femmes ; d'une d'elles il eut un fils que les Chinois appellent Mo-heou-lo. A dix-neuf ans, il abandonna fa maison, fes femmes, fon fils, & tous les foins de la terre, pour se retirer dans une vaste solitude, fuivi de quatre Philosophes, à la conduite defquels il fe foumit. A trente ans, il fe fentit tout à coup pénétré de la Divinité, & fut métamorphofé en Fo ou Pagode, felon l'expreffion Indienne. Devenu Dieu, il ne fongea plus qu'à établir fa doctrine, & à prouver fa misfion céleste par des prodiges. Le nombre de fes Disciples fut prodigieux, & ils eurent bientôt infesté de ses erreurs toutes les parties de l'Inde & de la Haute-Afie. Ces Prêtres, attachés au culte de Fo, font appelés Talapoins par les Siamois, Lamas par les Tartares, Ho-chang à la Chine, Bonzes au Japon c'eft fous ce dernier nom que les Européens les défignent.

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ou Fo.

Une des principales erreurs répandues par Fo, eft le dogme de la Métempsycose, dont il paroît être l'inven- Secte du Dieu Foé teur. Comme il vivoit cinq cents ans avant Pythagore, & qu'on fait que le Philofophe Grec a parcouru l'Egypte & plusieurs parties de l'Inde, il n'est guere permis de douter qu'il n'ait emprunté ce dogme de quelques Difciples du Philofophe Indien. Cette doctrine de la tranfmigration des ames eft l'origine de cette multitude d'Idoles, révérées dans tous les lieux où s'est établi le culte de Fo. Les quadrupedes, les oiseaux, les reptiles, & les plus vils animaux, eurent des temples, & devinrent des objets de vénération publique, parce que le Dieu, dans fes renaiffances & ses métamorphofes, avoit pu habiter dans les individus de toutes ces efpeces.

Achevons de rapporter ce que les Bonzes racontent de leur prétendu Dieu. Il avoit atteint la foixante-dix-neuvieme année de fon âge, lorsqu'il s'apperçut, par le dépériffement de ses forces, que fa divinité d'emprunt ne l'empêcheroit pas de payer le tribut à la Nature, comme les autres hommes. Il ne voulut point quitter ses Disciples fans leur révéler le fecret & toutes les profondeurs cachées de fa doctrine. Les ayant fait assembler, il leur déclara, que jufqu'à ce moment il avoit toujours cru ne devoir fe fervir que de paraboles dans fes difcours; que depuis quarante ans il leur avoit déguisé la vérité fous des expreffions figurées & métaphoriques; mais qu'étant sur le point de difparoître à leurs yeux, il vouloit leur manifester ses vrais fentimens, & leur révéler enfin le mystere de fa fageffe. Apprenez donc, leur dit-il, qu'il n'y a point d'autre principe de toutes chofes que le vuide & le néant;

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