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mente en proportion du rang & des richeffes des deux Mariages des i conjoints; il diminue dans la même proportion.

nois.

On a vu, dans le chapitre des Loix civiles, qu'un Chinois ne pouvoit avoir qu'une femme légitime, & pouvoit, en même temps, acheter plufieurs concubines. Les anciens peuples n'établirent cet usage qu'en faveur de la population. C'est auffi le motif dont fe fert tout Chinois qui affecte de garder quelques ménagemens avec sa femme. Il lui fait fur-tout entendre que, s'il prend des concubines, c'est dans la vûe de lui procurer un plus grand nombre de femmes pour la servir.

Elles font en effet fes fervantes plutôt que fes rivales en autorité. La fienne s'étend fur elles comme fur les fimples domestiques de la maison. Les enfans qu'elles font font même fuppofés lui appartenir, être les fiens; mais auffi ils partagent avec les fiens les fiens propres la fucceffion paternelle. Vient-elle à mourir? ils font obligés de porter fon deuil durant trois ans, de s'abfenter des examens, de quitter leurs charges, leurs emplois. Ils peuvent s'en dispenser à l'égard de leur propre mere; mais il est rare qu'ils s'en dispensent.

D'autres maris, curieux de fe procurer un enfant mâle, que leur femme légitime n'a pu leur donner, prennent par ce feul motif une concubine, & la congédient auffitôt que cet objet eft rempli : ils lui rendent la liberté d'époufer qui elle voudra; le plus fouvent même ils lui procurent un mari.

Un mari, devenu veuf, éleve quelquefois fa concubine favorite au rang de fa femme légitime. Il n'eft plus

obligé, comme la premiere fois, d'examiner si le rang de

nois.

celle qu'il épouse se rapproche du fien; il fe difpenfe Mariages des Chi auffi des formalités préliminaires dont nous avons parlé.

Ces concubines font prefque toutes tirées des villes d'Yang - tcheou & de Sou- tcheou. Elles y font élevées dans l'art de se rendre agréables dans tous les exercices qui diftinguent les filles de qualité, le chant, le jeu des inftrumens, &c. La plupart ont été achetées ailleurs, pour être enfuite revendues. C'est la branche de commerce qui distingue ces deux villes.

Difons tout; le droit que s'arrogent de fimples particuliers d'avoir une concubine, eft fimplement toléré par l'usage, & non autorifé par la Loi. Elle n'accorde ce privilége qu'à l'Empereur, aux Princes du Sang & aux Mandarins. Elle n'accorde même qu'à l'Empereur feul le droit d'avoir plufieurs concubines.

Il est rare qu'une veuve, d'un état au deffus du commun, passe à de fecondes noces, lorfqu'elle a des enfans. D'autres portent bien plus loin la délicateffe: n'euffentelles été que fimplement promises, c'en eft affez pour les faire renoncer à tout engagement, fi celui qu'elles devoient épouser eft mort dans cet intervalle. Les veuves, nées dans la claffe ordinaire, & qui ont des enfans, ufent communément de la liberté qu'elles ont de prendre un autre mari. Les plus pauvres n'ont point celle du choix, on les vend au profit des parens du défunt.

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Auffi-tôt que le marché est conclu, arrive une chaise porteur, conduite par nombre de gens affidés. On enferme la veuve dans cette chaife, & on la porte à fon nouveau mari.

nois.

Les Maîtres font, en général, très-empreffés à marier Mariages des Chi- leurs efclaves, quoi qu'en dife l'Auteur des Recherches Philofophiques fur les Egyptiens & les Chinois, qui ofe, bien mal à propos, affirmer le contraire. Ils ont même de fortes raifons pour encourager ces mariages; les enfans qui en résultent leur appartiennent; c'est une nouvelle propriété qu'ils acquierent; c'est auffi un nouveau lien qui leur attache de plus en plus le pere & la mere de ces en

fans.

Les femmes Chinoifes, même les plus qualifiées, ne fortent presque jamais de leur appartement. Il est situé dans le lieu le plus retiré de la maison; & leur fociété la plus ordinaire eft celle de leurs domestiques. Le Livre des Rites exige qu'il y ait deux appartemens dans chaque maison, l'un extérieur pour le mari, l'autre intérieur pour la femme. Un mur ou une forte cloifon doit les féparer, & la porte en doit être gardée foigneusement. Le mari n'entrera point dans l'appartement intérieur, & la femme n'en fortira point fans quelque bonne raison. Une femme, ajoute ce Livre, n'est point maîtreffe d'ellemême; elle n'a rien en fa disposition; elle n'a d'ordre à donner que dans l'enceinte de fon appartement; c'est là que réside toute fon autorité. Il paroîtra fans doute un peu extraordinaire que le même Livre des Rites place le babil d'une femme au nombre des caufes qui peuvent la faire répudier.

Mais elle n'eft plus répudiable, pour aucun motif, fi elle a perdu ses parens depuis fon mariage, ou si elle a porté le deuil triennal pour la mort du pere ou de la mere de fon mari,

CHAPITRE

CHAPITRE II.

Education des enfans.

LE Livre des Rites veut que cette éducation commence

à l'instant même où l'enfant vient de naître. On fent bien
qu'elle eft purement phyfique. Ce Livre tolere les nour-
rices; mais il impofe aux meres de grandes précautions
pour
les choifir. Une nourrice doit être modefte dans
fon extérieur & dans fes manieres, vertueuse dans fa
conduite; parlant peu, & ne mentant jamais; douce
par caractere; affable envers ses égaux; refpectueuse en-
vers fes fupérieurs. C'eft beaucoup exiger, dira-t-on ; &
de telles nourrices doivent être rares: mais l'éducation &
les mœurs des Chinoifes rendent ce choix moins embar-
raffant qu'on ne pourroit le préfumer ailleurs.

Ailleurs auffi ces maximes, débitées avec confiance & un certain enthousiasme, pourroient paroître des vérités auffi neuves qu'utiles. Elles font utiles, à coup sûr; mais elles ne feroient point neuves.

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On fevre un enfant auffi-tôt qu'il peut porter la main à fa bouche, & on lui apprend à fe fervir de la main droite. A fix ans, fi c'est un mâle, on lui enseigne les nombres les plus communs & le nom des parties les

plus considérables du Monde. On le fépare d'avec ses
foeurs lorfqu'il a sept ans, & on ne lui permet plus ni
de manger avec elles, ni même de s'affeoir en leur pré-
fence.

A huit ans, on le forme aux regles de la politeffe;
Kkkk

Education des enfans.

Education des

enfans.

on lui apprend ce qu'il doit faire lorsqu'il entre dans une maifon, lorfqu'il en fort, & qu'il fe trouve avec des perfonnes d'un âge mûr, ou plus avancé. Le Calendrier devient fon étude à neuf ans. A dix, on l'envoie aux écoles publiques. Le Maître lui enseigne à lire, à écrire & à compter. Il apprend la mufique depuis treize ans jusqu'à quinze, & tout ce qu'il chante confifte dans des préceptes moraux. Il fut un temps où toutes les leçons étoient en vers & fe chantoient. Par-là, elles entroient plus agréablement dans l'efprit des éleves: c'étoit en même temps une espece de jeu propre à leur âge. L'étude eft devenue aujourd'hui plus pénible; & c'eft ce que regrette Tchu-i, un des plus célebres Docteurs de la Chine. Il femble au premier coup-d'œil, dit-il, que cet expédient n'étoit rien; cependant ce rien avoit de grandes fuites. Nous avons changé de méthode : les chofes en vont-elles mieux ?

Parvenu à quinze ans, l'éleve fe livre aux exercices du corps; on lui apprend à tirer de l'arc & à monter à cheval. Il reçoit à vingt ans, s'il en eft jugé digne, le premier bonnet; alors il lui eft permis de porter des habits de foie & des fourrures; jufque-là il n'avoit eu le droit d'endoffer que des habits de coton.

Les Chinois ont encore un autre moyen pour aider l'intelligence des enfans. Ils ont choisi quelques centaines de caracteres qui expriment les objets les plus communs, ceux du moins qu'on a le plus fouvent fous les yeux tels que l'homme, quelques animaux domestiques, les plantes ufuelles, les uftenfiles les plus ordinaires, les inftrumens les plus connus ; une maison, le

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