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si l'excommunication eût été valide, dans l'espérance que son disciple, dont il ne vouloit que le salut, se laisseroit toucher par l'exemple de sa soumission. L'événement répondit à ses désirs.

La dernière année de sa vie il fut affligé d'une maladie très-cruelle; il la souffrit avec une patience héroïque, et une entière résignation à la volonté divine. Une personne touchée de sa situation- lui ayant conseillé de s'adresser au ciel, afin d'obtenir quelque adoucissement à ses maux: « Non, non, » répondit le saint, une telle prière marqueroit de >> l'impatience, et me raviroit ma couronne. » Quand il vit qu'il touchoit à son dernier moment, il ranima ses forces pour donner encore quelques avis à ses frères; il leur prédit ensuite plusieurs choses qui arrivèrent effectivement après sa mort. Enfin il s'endormit dans le Seigneur l'an de Jesus-Christ 529, et le 105.o de son âge. Pierre, patriarche de Jérusalem, assista à ses funérailles avec les habitans de toute la contrée, et il se fit plusieurs miracles durant la cérémonie. Le corps du saint fut enterré dans sa première cellule, appelée la caverne des mages (d). Un comte du palais qui marchoit contre les Perses à la tête de l'armée de l'empire, demanda, comme une faveur, le cilice que Théodose portoit durant sa vie, ce qui lui fut accordé. Il se crut toujours redevable à cette précieuse relique de la victoire qu'il remporta sur les ennemis. La fête de saint Théodose est marquée au 11 Janvier dans tous es calendriers grecs et latins.

L'exemple des Nazaréens et des Esséniens parmi les Juifs, et celui de tant d'hommes parmi les Chrétiens, lesquels se sont sanctifiés dans la retraite, prouvent évidemment que Dieu appelle plusieurs de ses élus à la vie contemplative. Saint Grégoire le Grand pense même qu'il est des ames si suceptibles de mauvaises impressions, qu'elles n'ont, pour (d) Parce qu'on croyoit dans le pays que les mages y avoien logé lorsqu'ils vinrent adorer Jesus-Christ.

se sauver, d'autre voie que celle de la solitude. Cette vérité doit fournir une ample matière de réflexions à tous ceux qu'une triste expérience a convaincus de leur foiblesse, et qui ne se sentent point assez. forts pour vaincre les charmes de ce monde corrupteur. Ils doivent imiter la conduite d'un guerrier prudent et habile qui, par une sage retraite, évite les occasions de combattre contre un ennemi trop puissant. L'obligation d'embrasser la vie solitaire regarde encore tous ceux qu'une vocation particulière destine à cet état. Qu'on prenne garde toutefois de se déterminer par des motifs étrangers au salut, tels que seroient l'amour du repos, et la fuite de cette gêne que l'on éprouve quelquefois dans le service du prochain. Il faut donc, avant de quitter le siècle, consultér la volonté du ciel, sonder tous les replis de son cœur et mesurer ses forces. Si, après toutes ces précautions, on ne trouve en soi qu'un ardent désir d'éviter les écueils contre lesquels on a si souvent fait naufrage, d'expier ses fautes par les pratiques austères de la pénitence, et de se sanctifier par les exercices de la contemplation, alors on ne doit plus balancer, c'est Dieu qui parle. Il ne reste plus qu'à lui demander la grâce de sortir victorieux de tous les dangers qui se rencontreront (car il n'est point d'état qui n'ait les siens), et de persévérer dans ses premières dispositions: grâce si nécessaire, que, sans elle, on se perdra infailliblement dans la solitude la plus retirée. Il faut encore avoir soin de s'entretenir dans cet esprit de ferveur qui est l'ame de la religion, et sans lequel toutes nos oeuvres sont mortes, et n'ont aucun prix aux yeux de Dieu. C'est par-là que les vrais solitaires ont opéré leur salut; c'est par-là que le peuvent opérer tous ceux qui embrasseront le même genre de vie.

S. HYGIN, PAPE ET MARTYR.

SAINT HYGIN monta l'an 139 sur la chaire de S. Pierre, vacante par le martyre de S. Thélesphore. L'église jouissoit alors de quelque tranquillité, ce qui étoit une suite du règne pacifique de l'empereur Antonin le Pieux. Nous trouvons, il est vrai, plusieurs martyrs du temps même de ce prince; mais la plupart des cruautés que l'on exerçoit alors contre les Chrétiens, doivent être rejetées sur la fureur d'un peuple superstitieux, ou sur l'inhumanité de quelques magistrats particuliers. En effet, Antonin, quoique ennemi des Chrétiens, ne consentit que rarement aux procédés de rigueur ; il les défendit même par des lettres qu'il écrivit aux gouverneurs d'Asie, d'Athènes, de Thessalonique et de Larissée (1).

Le démon, jaloux du calme qui régnoit dans l'église, entreprit de le troubler. L'instrument dont il se servit fut Cerdon, qui cachoit toute la cruauté d'un loup sous la douceur apparente d'un agneau. Cet hérésiarque quitta la Syrie, et prit la route de Rome, où il arriva vers le commencement du pontificat d'Hygin. Il se mit aussitôt à enseigner de monstrueuses erreurs, que Marcion adopta dans la suite, et répandit avec plus de succès (a). Le saint Pape, à la vigilance duquel rien n'échappoit, découvrit ce monstre, et le sépara de la communion des fidèles. Cerdon feignit d'être repentant de ses fautes rétracta ses impiétés, et fut reçu dans le sein de

(1) Voyez Eusèbe, Hist. l. 4, c. 26.

l'un

(a) Cerdon enseignoit qu'il y avoit deux Dieux, rigoureux et sévère, qui étoit l'auteur de l'ancien Testament, l'autre bon et miséricordieux, duquel venoit le nouveau Testament. Le second avoit envoyé J. C. son fils pour délivrer les hommes de la tyrannie du premier Dieu. A cette impiété, il en ajoutoit une seconde. Selon lui, Jesus-Christ n'étoit pas né réellement de la vierge Marie, et il ne s'étois revêtu de la chair qu'en apparence.

l'église ; mais comme sa pénitence n'avoit point été sincère, il continua de dogmatiser, observant seulement de le faire en secret. Hygin, qui en fut instruit, l'excommunia une seconde fois (2).

Dans le même temps parut un autre hérésiarque, nommé Valentin : c'étoit un philosophe platonicien enivré de sa vaine science. Piqué de ce qu'on ne l'avoit pas fait évêque (3), il se mit à renouveler plusieurs impiétés de Simon le Magicien, auxquelles il joignit, d'étranges absurdités de son invention (b). Il publia d'abord ses erreurs à Alexandrie, d'où il vint à Rome quelque temps après. Le pape Hygin, informé de son extravagante doctrine, résolut d'en arrêter le cours ; mais il employa la voie de la douceur, dans l'espérance de ramener Valentin, et de le gagner ainsi à Jesus-Christ. Ce fut là le motif qui le détermina à ne point faire usage à son égard de l'excommunication : c'étoit mal connoître cet hérésiarque. Jamais il ne voulut se rétracter; et S. Pie, successeur immédiat de saint Hygin, fut obligé de le chasser de l'église la première année de son pontificat.

Saint Hygin mourut l'an 142, après avoir siégé près de quatre ans. Plusieurs anciens calendriers et le martyrologe romain, lui donnent le titre de martyr, ce qui peut être fondé sur les différentes persécutions qu'il eut à essuyer, et sur les périls auxquels sa place l'exposoit dans ces temps orageux.

Voyez Tillemont, t. II, p. 252; Orsi, t. I; Berti, t. II, Chron.

S. SALVE (a), ÉVÊQUE D'AMIENS. SALVE OU SAUVE mena dans sa jeunesse une vie assez mondaine; mais Dieu l'ayant touché, il distribua ses biens aux pauvres, et se retira dans un monas

(2) Saint Epiph. hær. 41. Iræn. 1. 3, c. 4. Euseb. etc. (3) Tertul. 7. contra Valent. c. 4.

(b) Par exemple, les trente æons ou siècles, qu'il disoit être des divinités inférieures. Il débitoit les plus grandes. extravagances sur ces æons, ainsi que sur leur origine. (a) En latin Salvius.

tère qu'il fit bâtir sous l'invocation de la sainte Vierge et de S. Pierre. Après y avoir passé plusieurs années dans l'exercice de la prière et dans les austérités de la pénitence, il suivit le zèle qui le pressoit, et se mit à prêcher la parole de Dieu, afin d'arracher les pécheurs à leurs désordres. Le succès de ses discours fut si prodigieux, qu'on l'éleva sur le siége d'Amiens, pour remplacer S. Honoré, mort dans le septième siècle. Il justifia par sa conduite le choix qu'on avoit fait de lui. On le vit toujours s'acquitter des fonctions épiscopales avec un zèle et une piété dignes d'un successeur des apôtres. Il mourut le 28 Octobre.

Quelques siècles après, le corps de saint Salve fut transféré de la cathédrale d'Amiens à Montreuilsur-Mer dans la Basse-Picardie, où il est encore aujourd'hui vénéré avec une grande dévotion. La cathédrale de Cantorbéry possédoit une portion des reliques du même saint ayant la ruine des monastères d'Angleterre (b). Le martyrologe romain marque le nom de saint Salve au onzième jour de Janvier, qui paroît avoir été celui de la translation de ses reliques. Sa fête étoit encore autrefois célébrée le 28 Octobre dans plusieurs églises de France et d'Angleterre (c).

Voyez dans Bollandus la vie de saint Salve, écrite par un auteur anonyme qui n'est pas très-ancien, et le Gallia Christiana nova, t. X. p. 1154.

Le martyrologe romain honore encore en ce jour un saint Salve ou Salvius, martyr d'Afrique. Saint Augustin a fait un sermon sur sa fête.

S. EGWIN, ÉVÊQUE DE WORCESTER. SAINT EGWIN étoit issu du sang des rois de Mercie :

il eut le bonheur de se consacrer au service de Dieu

(b) C'est ce que nous apprenons d'un ancien catalogue des reliques qui étoient dans la cathédrale de Cantorbéry. Dart l'a donné dans son histoire de cette église.

(c) Il ne faut pas confondre S. Salve d'Amiens avec S. Salve, évêque d'Albi. Ce dernier, connu encore sous les noms de Salvi et de Sauge, vivoit dans le sixième siècle. Nous apprenons de S. Grégoire de Tours, que c'étoit un prélat d'une sainteté extraordinaire. Voyez sa vie sous le 10 Septembre.

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