Images de page
PDF
ePub

tôt Alagabale son fils, ou du moins réputé pour tel, quoique le nom d'Antonin lui eût donné d'abord le cœur des soldats et la victoire sur Macrin, devint aussitôt après, par ses infamies, l'horreur du genre humain, et sè perdit luimême. Alexandre Sévère, fils de Mamée, son parent et son successeur, vécut trop peu pour le bien du monde. Il se plaignoit d'avoir plus de peine à contenir ses soldats, qu'à vaincre ses ennemis. Sa mère, qui le gouvernoit, fut cause de sa perte, comme elle l'avoit été de sa gloire. Sous lui Artaxerxe, Persien, tua son maître Artaban, dernier roi des Parthes, et rétablit l'empire des Perses en Orient.

En ces temps, l'Eglise encore naissante remplissoit toute la terre (1); et non-seulement l'Orient, où elle avoit commencé, c'est-à-dire la Palestine, la Syrie, l'Egypte, l'Asie mineure, et la Grèce; mais encore dans l'Occident, outre l'Italie, les diverses nations des Gaules, toutes les provinces d'Espagne, l'Afrique, la Germanie, la GrandeBretagne dans les endroits impénétrables aux armes romaines; et encore hors de l'Empire, l'Arménie, la Perse, les Indes, les peuples les plus barbares, les Sarmates, les Daces, les Scythes, les Maures, les Gétuliens, et jusqu'aux îles les plus inconnues. Le sang de ses martyrs la rendoit féconde. Sous Trajan, saint Ignace, évêque d'Antioche, fut exposé aux bêtes farouches. MarcAurèle, malheureusement prévenu des calomnies dont on chargeoit le christianisme, fit mourir (1) Tertull. adv. Jud. c. 7. Apolog. c. 37.

de J. C.

222

233

235

107

de J. C. 163

167

177

202

174

saint Justin le Philosophe, et l'Apologiste de la religion chrétienne. Saint Polycarpe, évêque de Smyrne, disciple de saint Jean, à l'âge de quatrevingts ans, fut condamné au feu sous le même prince. Les saints martyrs de Lyon et de Vienne endurèrent des supplices inouis, à l'exemple de saint Photin (*) leur évêque, âgé de quatre-vingtdix ans. L'église Gallicane remplit tout l'univers de sa gloire. Saint Irénée, disciple de saint Polycarpe, et successeur de saint Photin, imita son prédécesseur, et mourut martyr sous Sévère, avec un grand nombre de fidèles de son église. Quelquefois la persécution se ralentissoit. Dans une extrême disette d'eau, que Marc-Aurèle souffrit en Germanie, une légion chrétienne obtint une pluie capable d'étancher la soif de son armée, et accompagnée de coups de foudre qui épouvantèrent ses ennemis. Le nom de Foudroyante fut donné ou confirmé à la légion par ce miracle. L'Empereur en fut touché, et écrivit au sénat en faveur des Chrétiens. A la fin, ses devins lui persuadèrent d'attribuer à ses dieux et à ses prières un miracle que les Païens ne s'avisoient pas seulement de souhaiter. D'autres causes suspendoient ou adoucissoient quelquefois la persécution pour un peu de temps: mais la superstition, vice que Marc-Aurèle ne put éviter, la haine publique, et les calomnies qu'on imposoit aux Chrétiens, prévaloient bientôt. La fureur des Païens se rallumoit, et tout l'Empire ruisseloit du sang des martyrs. La doctrine accompagnoit

(*) Ou Pothin.

les souffrances. Sous Sévère, et un peu après; Tertullien, prêtre de Carthage, éclaira l'Eglise par ses écrits, la défendit par un admirable Apologétique, et la quitta enfin aveuglé par une orgueilleuse sévérité, et séduit par les visions du faux prophète Montanus. A peu près dans le même temps, le saint prêtre Clément Alexandrin déterra les antiquités du paganisme, pour le confondre. Origène, fils du saint martyr Léonide, se rendit célèbre par toute l'Eglise dès sa première jeunesse, et enseigna de grandes vérités, qu'il mêloit de beaucoup d'erreurs. Le philosophe Ammonius fit servir à la religion la philosophie platonicienne, et s'attira le respect même des Païens. Cependant les Valentiniens, les Gnostiques, et d'autres sectes impies, combattoient l'Evangile par de fausses traditions: saint Irénée leur oppose la tradition et l'autorité des églises apostoliques, surtout de celle de Rome fondée par les apôtres saint Pierre et saint Paul, et la principale de toutes (1). Tertullien fait la même chose (2). L'Eglise n'est ébranlée ni par les hérésies, ni par les schismes, ni par la chute de ses docteurs les plus illustres. La sainteté de ses mœurs est si éclatante, qu'elle lui attire les louanges de ses

ennemis.

Les affaires de l'Empire se brouilloient d'une terrible manière. Après la mort d'Alexandre, le tyran Maximin, qui l'avoit tué, se rendit le maître quoique de race gothique. Le sénat lui opposa

(1) Iren. adv. Hær. lib. 111, cap. 1, 2, 3. (2) De Præsc. adv.

Hær. c. 36.

de J. C.

215

235

de J. C.

quatre empereurs, qui périrent tous en moins de 236, 237 deux ans. Parmi eux étoient les deux Gordien

238

212

244

245

249

251

254

257

258

256

père et fils, chéris du peuple romain. Le jeune Gordien leur fils, quoique dans une extrême jeunesse, montra une sagesse consommée, défendit à peine contre les Perses l'Empire affoibli par tant de divisions. Il avoit repris sur eux beaucoup de places importantes. Mais Philippe, Arabe, tua un si bon prince; et de peur d'être accablé par deux empereurs, que le sénat élut l'un après l'autre, il fit une paix honteuse avec Sapor roi de Perse. C'est le premier des Romains qui ait abandonné par traité quelques terres de l'Empire. On dit qu'il embrassa la religion chrétienne dans un temps où tout-à-coup il parut meilleur, et il est vrai qu'il fut favorable aux Chrétiens. En haine de cet empereur, Déce, qui le tua, renouvela la persécution avec plus de violence que jamais (1). L'Eglise s'étendit de tous côtés, principalement dans les Gaules (2), et l'Empire perdit bientôt Déce, qui le défendoit vigoureusement. Gallus et Volusien passèrent bien vite: Emilien ne fit que paroître la souveraine puissance fut donnée à Valérien, et ce vénérable vieillard y monta par toutes les dignités. Il ne fut cruel qu'aux Chrétiens. Sous lui le pape saint Etienne, et saint Cyprien évêque de Carthage, malgré toutes leurs disputes qui n'avoient point rompu la communion, reçurent tous deux la même couronne. L'erreur de saint Cyprien, qui rejetoit

:

(1) Euseb. Hist. eccl. lib. vi, c. 39. — (2) Greg. Tur. Hist. Franc. lib. 1, c. 28.

de J. C.

257

259

le baptême donné par les hérétiques, ne nuisit ni à lui ni à l'Eglise. La tradition du saint Siége se soutint, par sa propre force, contre les spécieux raisonnemens et contre l'autorité d'un si grand homme, encore que d'autres grands hommes défendissent la même doctrine. Une autre dispute fit plus de mal. Sabellius confondit ensemble les trois Personnes divines, et ne connut en Dieu qu'une seule personne sous trois noms. Cette nouveauté étonna l'Eglise ; et saint Denis, évêque d'Alexandrie, découvrit au pape saint Sixte II les erreurs de cet hérésiarque (1). Ce saint Pape suivit de près au martyre saint Etienne son prédécesseur : il eut la tête tranchée, et laissa un plus grand combat à soutenir à son diacre saint Laurent. C'est alors qu'on voit commencer l'inondation des Barbares. Les Bourguignons et d'autres 258,259,260 peuples Germains, les Goths autrefois appelés les Gétes, et d'autres peuples qui habitoient vers le Pont-Euxin et au-delà du Danube, entrèrent dans l'Europe: l'Orient fut envahi par les Scythes asiatiques et par les Perses. Ceux-ci défirent Valérien, qu'ils prirent ensuite par une infidélité; et après lui avoir laissé achever sa vie dans un pénible esclavage, ils l'écorchèrent, pour faire servir sa peau déchirée de monument à leur victoire. Gallien son fils et son collègue acheva de tout perdre par sa mollesse. Trente tyrans partagèrent l'Empire. Odénat roi de Palmyre, ville ancienne, dont Salomon est le fondateur, fut le plus illustre de tous: ilsauva les provinces d'Orient

(1) Euseb. Hist. eccl. lib. v11, c. 6.

261

204

« PrécédentContinuer »