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quel seul se feroient les fêtes, les sacrifices, et tout le service public. En attendant ce lieu désiré, durant que le peuple erroit dans le désert, Moïse construisit le Tabernacle, temple portatif, où les enfans d'Israël présentoient leurs vœux au Dieu qui avoit fait le ciel et la terre, et qui ne dédaignoit pas de voyager, pour ainsi dire, avec eux, et de les conduire.

Sur ce principe de religion, sur ce fondement sacré étoit bâtie toute la loi; loi sainte, juste, bienfaisante, honnête, sage, prévoyante et simple, qui lipit la société des hommes entre eux par la sainte société de l'homme avec Dieu.

A ces saintes institutions, il ajouta des cérémonies majestueuses, des fêtes qui rappeloient la mémoire des miracles par lesquels le peuple d'Israël avoit été délivré; et, ce qu'aucun autre législateur n'avoit osé faire, des assurances précises que tout leur réussiroit tant qu'ils vivroient soumis à la loi, au lieu que leur désobéissance seroit suivie d'une manifeste et inévitable vengeance (1). Il falloit être assuré de Dieu pour donner ce fondement à ses lois; et l'événement a justifié que Moïse n'avoit pas parlé de lui-même.

Quant à ce grand nombre d'observances dont il a chargé les Hébreux, encore que maintenant elles nous paroissent superflues, elles étoient alors nécessaires pour séparer le peuple de Dieu des autres peuples, et servoient comme de barrière à l'idolâtrie, de peur qu'elle n'entraînât ce peuple choisi

avec tous les autres.

(1) Deut. XXVII, XXVIII, etc.

Pour maintenir la religion et toutes les traditions du peuple de Dieu, parmi les douze tribus une tribu est choisie à laquelle Dieu donne en partage, avec les dixmes et les oblations, le soin des choses sacrées. Lévi et ses enfans sont eux-mêmes consacrés à Dieu comme la dixme de tout le peuple. Dans Lévi, Aaron est choisi pour être souverain pontife, et le sacerdoce est rendu héréditaire dans sa famille.

Ainsi les autels ont leurs ministres; la loi a ses défenseurs particuliers; et la suite du peuple de Dieu est justifiée par la succession de ses pontifes, qui va sans interruption depuis Aaron le premier de tous.

Mais ce qu'il y avoit de plus beau dans cette loi, c'est qu'elle préparoit la voie à une loi plus auguste, moins chargée de cérémonies, et plus féconde en

vertus.

Moïse, pour tenir le peuple dans l'attente de cette loi, leur confirme la venue de ce grand prophète qui devoit sortir d'Abraham, d'Isaac, et de Jacob. « Dieu, dit-il (1), vous suscitera du milieu » de votre nation et du nombre de vos frères, un » prophète semblable à moi : écoutez-le ». Ce prophète semblable à Moïse, législateur comme lui, qui peut-il être, sinon le Messie, dont la doctrine devoit un jour régler et sanctifier tout l'univers?

Le Christ devoit être le premier qui formeroit un peuple nouveau, et à qui il dit aussi : « Je vous >> donne un nouveau commandement (2) » » ; et encore: << Si vous m'aimez, gardez mes commandemens (3) » ; et encore plus expressément : « Il a été dit aux an

(1) Deut. XVIII. 15, 18. — (2) Joan. xIII. 34.

· (3) Ibid. xiv. 15.

;

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>> ciens : Vous ne tuerez pas; et moi je vous dis (1) » ; et le reste, de même style et de même force.

Le voilà donc ce nouveau prophète, semblable à Moïse, et auteur d'une loi nouvelle, dont Moïse dit aussi en nous annonçant sa venue: « Ecoutez-le (2) » : et c'est pour accomplir cette promesse, que Dieu envoyant son Fils fait lui-même retentir d'en-haut comme un tonnerre cette voix divine : « Celui-ci est >> mon Fils bien-aimé, dans lequel j'ai mis ma complaisance : écoutez-le (3) ».

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C'étoit le même prophète et le même Christ que Moïse avoit figuré dans le serpent d'airain qu'il érigea dans le désert. La morsure de l'ancien serpent, qui avoit répandu dans tout le genre humain le venin dont nous périssons tous, devoit être guérie en le regardant, c'est-à-dire en croyant en lui, comme il l'explique lui-même. Mais pourquoi rappeler ici le serpent d'airain seulement? Toute la loi de Moïse, tous ses sacrifices, le souverain pontife qu'il établit avec tant de mystérieuses cérémonies, son entrée dans le sanctuaire, en un mot, tous les sacrés rits de la religion judaïque, où tout étoit purifié par le sang, l'agneau même qu'on immoloit à la solennité principale, c'est-à-dire à celle de Pâque, en mémoire de la délivrance du peuple; tout cela ne signifioit autre chose que le Christ sauveur par son sang de tout le peuple de Dieu.

Jusqu'à ce qu'il fût venu, Moïse devoit être lu dans toutes les assemblées comme l'unique législateur. Aussi voyons-nous, jusqu'à sa venue, que le

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peuple, dans tous les temps et dans toutes les difficultés, ne se fonde que sur Moïse. Comme Rome révéroit les lois de Romulus, de Numa, et des douze Tables; comme Athènes recouroit à celles de Solon; comme Lacédémone conservoit et respectoit celles de Lycurgue: le peuple Hébreu alléguoit sans cesse celles de Moïse. Au reste, le législateur y avoit si bien réglé toutes choses, que jamais on n'a eu besoin d'y rien changer. C'est pourquoi le corps du droit judaïque n'est pas un recueil de diverses lois faites dans des temps et dans des occasions différentes. Moïse, éclairé de l'esprit de Dieu, avoit tout prévu. On ne voit point d'ordonnances ni de David, ni de Salomon, ni de Josaphat, ou d'Ezéchias, quoique tous très-zélés pour la justice. Les bons princes n'avoient qu'à faire observer la loi de Moïse, et sc contentoient d'en recommander l'observance à leurs successeurs (1). Y ajouter ou en retrancher un seul article (2), étoit un attentat que le peuple eût regardé avec horreur. On avoit besoin de la loi à chaque moment, pour régler non-seulement les fêtes, les sacrifices, les cérémonies, mais encore toutes les autres actions publiques et particulières, les jugemens, les contrats, les mariages, les successions, les funérailles, la forme même des habits, et en général tout ce qui regarde les mœurs. Il n'y avoit point d'autre livre où on étudiât les préceptes de la bonne vie. Il falloit le feuilleter et le méditer nuit et jour, en recueillir des sentences, les avoir toujours devant les yeux. C'étoit là que les enfans apprenoient à lire. La seule règle d'éducation qui étoit () III. Reg. 11, etc. - (2) Deut. IV. 2. XII. 32, etc.

ans,

:

donnée à leurs parens, étoit de leur apprendre, de leur inculquer, de leur faire observer cette sainte loi, qui seule pouvoit les rendre sages dès l'enfance. Ainsi elle devoit être entre les mains de tout le monde. Outre la lecture assidue que chacun en devoit faire en particulier, on en faisoit tous les sept dans l'année solennelle de la rémission et du repos, une lecture publique, et comme une nouvelle publication, à la fête des Tabernacles (1), où tout le peuple étoit assemblé durant huit jours. Moïse fit déposer auprès de l'Arche, l'original de la loi (2) mais de peur que dans la suite des temps elle ne fût altérée par la malice ou par la négligence des hommes; outre les copies qui couroient parmi le peuple, on en faisoit des exemplaires authentiques, qui, soigneusement revus et gardés par les prêtres et les lévites, tenoient lieu d'originaux. Les rois (car Moïse avoit bien prévu que ce peuple voudroit enfin avoir des rois comme tous les autres) les rois, dis-je, étoient obligés, par une loi expresse du Deuteronome (3), à recevoir des mains des prêtres un de ces exemplaires si religieusement corrigés, afin qu'ils le transcrivissent, et le lussent toute leur vie. Les exemplaires ainsi revus par autorité publique étoient en singulière vénération à tout le peuple on les regardoit comme sortis immédiatement des mains de Moïse, aussi purs et aussi entiers que Dieu les lui avoit dictés. Un ancien volume de cette sévère et religieuse correction ayant été trouvé dans la maison du Seigneur, sous le

(1) Deut. XXXI. 10. II. Esd. vIII. 17, 18. (3) Deut. XVII. 18.

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- (2) Deut. XXXI. 26.

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