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David l'a vu de loin, et l'a chanté dans ses Psaumes avec une magnificence que rien n'égalera jamais. Souvent il ne pensoit qu'à célébrer la gloire de Salomon son fils; et tout d'un coup ravi hors de luimême, et transporté bien loin au-delà, il a vu celui qui est plus que Salomon en gloire aussi bien qu'en sagesse (1). Le, Messie lui a paru assis sur un trône plus durable que le soleil et que la lune. Il a vu à ses pieds toutes les nations vaincues, et ensemble bénites en lui (2), conformément à la promesse faite à Abraham. Il a élevé sa vue plus haut encore: il l'a vu dans les lumières des saints, et devant l'aurore, sortant éternellement du sein de son père, pontife éternel et sans successeur, ne succédant aussi à personne, créé extraordinairement, non selon l'ordre d'Aaron, mais selon l'ordre de Melchisedech, ordre nouveau, que la loi ne connoissoit pas. Il l'a vu assis à la droite de Dieu, regardant du plus haut des cieux ses ennemis abattus. Il est étonné d'un si grand spectacle; et ravi de la gloire de son fils, il l'appelle son Seigneur (3).

Il l'a vu Dieu, que Dieu avoit oint pour le faire régner sur toute la terre par sa douceur, par sa vérité, et par sa justice (4). Il a assisté en esprit au conseil de Dieu, et a ouï de la propre bouche du Père éternel cette parole qu'il adresse à son Fils unique : Je t'ai engendré aujourd'hui; à laquelle Dieu joint la promesse d'un empire perpétuel, « qui » s'étendra sur tous les Gentils, et n'aura point d'au» tres bornes que celles du monde (5). Les peuples (1) Matth. v1. 29. x11. 42. — (2) Psal. Lxxi. 5, 11, 17. (3) Ps. CIX. (4) Psal. XLIV. 3, 4, 5, 6, 7, 8. (5) Psal. 11. 7

8.

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» frémissent en vain les rois et les princes font » des complots inutiles. Le Seigneur se rit du haut » des cieux (1) » de leurs projets insensés, et établit malgré eux l'empire de son Christ. Il l'établit sur eux-mêmes, et il faut qu'ils soient les premiers sujets de ce Christ dont ils vouloient secouer le joug (2). Et encore que le règne de ce grand Messie soit souvent prédit dans les Ecritures sous des idées magnifiques, Dieu n'a point caché à David les ignominies de ce béni fruit de ses entrailles. Cette instruction étoit nécessaire au peuple de Dieu. Si ce peuple encore infirme avoit besoin d'être attiré par des promesses temporelles, il ne falloit pourtant pas lui laisser regarder les grandeurs humaines comme sa souveraine félicité, et comme son unique récompense: c'est pourquoi Dieu montre de loin ce Messie tant promis et tant désiré, le modèle de la perfection, et l'objet de ses complaisances, abîmé dans la douleur. La croix paroît à David comme le trône véritable de ce nouveau roi. Il voit ses mains et ses pieds percés, tous ses os marqués sur sa peau (3) par tout le poids de son corps violemment suspendu, ses habits partagés, sa robe jetée au sort, sa langue abreuvée de fiel et de vinaigre, ses ennemis frémissant autour de lui, et s'assouvissant de son sang (4). Mais il voit en même temps les glorieuses suites de ses humiliations tous les peuples de la terre se ressouvenir de leur Dieu oublié depuis tant de siècles; les pauvres venir les premiers à la table du Messie, et ensuite les riches et les puissans ; (1) Psal. 11. 1, 2, 4, 9. · (3) Ps. xxi. 17, 18, 19, - (4) Ps. LXVIII. 22. Ps. xxI. 8, 13, 14, 17, 21, 22.

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. (2) Ibid. 10, etc.—

tous l'adorer et le bénir; lui présidant dans la grande et nombreuse église, c'est-à-dire, dans l'assemblée des nations converties, et y annonçant à ses frères le nom de Dieu (1) et ses vérités éternelles. David, qui a vu ces choses, a reconnu, en les voyant, que le royaume de son fils n'étoit pas de ce monde. Il ne s'en étonne pas, car il sait que le monde passe; et un prince toujours si humble sur le trône voyoit bien qu'un trône n'étoit pas un bien où se dussent terminer ses espérances.

Les autres prophètes n'ont pas moins vu le mystère du Messie. Il n'y a rien de grand ni de glorieux qu'ils n'aient dit de son règne. L'un voit Béthléem, la plus petite ville de Juda, illustrée par sa naissance; et en même temps élevé plus haut, il voit une autre naissance par laquelle il sort de toute éternité du sein de son Père (2): l'autre voit la virginité de sa mère; un Emmanuel, un Dieu avec nous (3) sortir de ce sein virginal, et un enfant admirable qu'il appelle Dieu (4). Celui-ci le voit entrer dans son temple (5) : cet autre le voit glorieux dans son tombeau où la mort a été vaincue (6). En publiant ses magnificences, ils ne taisent pas ses opprobres. Ils l'ont vu vendu; ils ont su le nombre et l'emploi des trente pièces d'argent dont il a été acheté (7). En même temps qu'ils l'ont vu grand et élevé (8), ils l'ont vu méprisé et méconnoissable au milieu des hommes; l'étonnement du monde, autant par sa bassesse que par sa grandeur; le dernier des

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(1) Ps. XXI. 26, 27, et seq. (2) Mich. v. 2. (3) Is. vii. 14. (6) Is X1. 10. LIII. 9. (7) Zach.

– (4) Id. 1x. 6. (5) Mal. 11. I. —

XI. 12, 13. (8) IS. LII. 13.

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hommes; l'homme de douleurs chargé de tous nos péchés; bienfaisant, et méconnu; défiguré par ses plaies, et par-là guérissant les nôtres ; traité comme un criminel; mené au supplice avec des méchans, et se livrant, comme un agneau innocent, paisiblement à la mort; une longue postérité naître de lui (1) par ce moyen, et la vengeance déployée sur son peuple incrédule. Afin que rien ne manquât à la prophétie, ils ont compté les années jusqu'à sa venue (2); et à moins que de s'aveugler, il n'y a plus moyen de le méconnoître.

Non seulement les prophètes voyoient JésusChrist, mais encore ils en étoient la figure, et représentoient ses mystères, principalement celui de la croix. Presque tous ils ont souffert persécution pour la justice, ét nous ont figuré dans leurs souffrances l'innocence et la vérité persécutée en notre Seigneur. On voit Elie et Elisée toujours menacés. Combien de fois Isaïe a-t-il été la risée du peuple et des rois, qui à la fin, comme porte la tradition constante des Juifs, l'ont immolé à leur fureur? Zacharie fils de Joïada est lapidé : Ezechiel paroît toujours dans l'affliction les maux de Jérémie sont continuels et inexplicables: Daniel se voit deux fois au milieu des lions. Tous ont été contredits et maltraités; et tous nous ont fait voir, par leur exemple, que si l'infirmité de l'ancien peuple demandoit en général d'être soutenue par des bénédictions temporelles, néanmoins les forts d'Israël, et les hommes d'une sainteté extraordinaire étoient nourris dès-lors du pain d'affliction, et buvoient par avance, pour

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se sanctifier, dans le calice préparé au Fils de Dieu; calice d'autant plus rempli d'amertume, que la personne de Jésus-Christ étoit plus sainte.

Mais ce que les prophètes ont vu le plus clairement, et ce qu'ils ont aussi déclaré dans les termes les plus magnifiques, c'est la bénédiction répandue sur les Gentils par le Messie. Ce rejeton de Jessé et de David a paru au saint prophète Isaïe, comme un signe donné de Dieu aux peuples et aux Gentils, afin qu'ils l'invoquent (1). L'homme de douleur, dont les plaies devoient faire notre guérison, étoit choisi pour laver les Gentils par une sainte aspersion, qu'on reconnoît dans son sang ́et dans le baptême. Les rois saisis de respect en sa présence n'osent ouvrir la bouche devant lui. Ceux qui n'ont jamais ouï parler de lui, le voient; et ceux à qui il étoit inconnu sont appelés pour le contempler (2). C'est le témoin donné aux peuples; c'est le chef et le précepteur des Gentils. Sous lui un peuple inconnu se joindra au peuple de Dieu, et les Gentils y accourront de tous côtés (3). C'est le juste de Sion, qui s'élevera comme une lumière; c'est son sauveur, qui sera allumé comme un flambeau. Les Gentils verront ce juste, et tous les rois connoîtront cet homme tant célébré dans les prophéties de Sion (4).

Le voici mieux décrit encore, et avec un caractère particulier. Un homme d'une douceur admirable, singulièrement choisi de Dieu, et l'objet de ses complaisances, déclare aux Gentils leur jugement: les les attendent sa loi. C'est ainsi que lės (1) IS. XI. 10. (2) Id. L. 13, 14, 15. LIII. (3) Id. Lv. 4, 5.

(4) Id. LXII. 1, 2,

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