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dates de ces princes, et le peu d'années dont on pourroit disputer, sur un compte de quatre cent quatre-vingt-dix ans, ne feront jamais une importante question. Mais pourquoi discourir davantage? Dieu a tranché la difficulté, s'il y en avoit, par une décision qui ne souffre aucune réplique. Un événement manifeste nous met au-dessus de tous les raffinemens des chronologistes; et la ruine totale des Juifs, qui a suivi de si près la mort de notre Seigneur, fait entendre aux moins clairvoyans l'accomplissement de la prophétie.

Il ne reste plus qu'à vous en faire remarquer une circonstance. Daniel nous découvre un nouveau mystère. L'oracle de Jacob nous avoit appris que le royaume de Juda devoit cesser à la venue du Messie mais il ne nous disoit pas que sa mort seroit la cause de la chute de ce royaume. Dieu a révélé ce secret important à Daniel, et il lui déclare que la ruine des Juifs sera la suite de la mort du Christ et de leur méconnoissance. Marquez, s'il vous plaît, cet endroit : la suite des événemens vous en fera bientôt un beau commentaire.

CHAPITRE X.

Prophéties de Zacharie et d'Aggée.

Vous voyez ce que Dieu montra au prophète Daniel un peu devant les victoires de Cyrus, et le rétablissement du temple. Du temps qu'il se bâtissoit, il suscita les prophètes Aggée et Zacharie, et incontinent après il envoya Malachie qui devoit fermer les prophéties de l'ancien peuple.

Que

Que n'a pas vu Zacharie? On diroit que le livre des décrets divins ait été ouvert à ce prophète, et qu'il y ait lu toute l'histoire du peuple de Dieu depuis la captivité.

Les persécutions des rois de Syrie, et les guerres qu'ils font à Juda, lui sont découvertes dans toute leur suite (1). Il voit Jérusalem prise et saccagée; un pillage effroyable, et des désordres infinis; le peuple en fuite dans le désert, incertain de sa condition, entre la mort et lavie; à la veille de sa dernière désolation, une nouvelle lumière lui paroître tout à coup. Les ennemis sont vaincus; les idoles sont renversées dans toute la Terre-sainte : on voit la paix et l'abondance dans la ville et dans le pays, et le temple est révéré dans tout l'Orient.

Une circonstance mémorable de ces guerres est révélée au prophète; « Judas même combattra, dit»il

il (2), contre Jérusalem » : c'étoit-à-dire que Jérusalem devoit être trahie par ses enfans, et que parmi ses ennemis il se trouveroit beaucoup de Juifs.

Quelquefois il voit une longue suite de prospérités (3): Juda est rempli de force (4); les royaumes qui l'ont oppressé sont humiliés (5); les voisins qui n'ont cessé de le tourmenter sont punis; quelquesuns sont convertis, et incorporés au peuple de Dieu. Le prophète voit ce peuple comblé des bienfaits divins, parmi lesquels il leur conte le triomphe aussi modeste que glorieux « du roi pauvre, du roi paci

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fique, du roi sauveur, qui entre, monté sur un

» âne, dans sa ville de Jérusalem (6) ».

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(1) Zach. XIV. · (2) Zach. xiv. 14. — (3) Zach. 1x, X. (4) Zach. (5) Ibid. 11. - (6) Zach. IX. 1, 2, 3, 4, 5, 6, 7, 8, 9.

x. 6.

BOSSUET. XXXV,

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Après avoir raconté les prospérités, il reprend dès l'origine toute la suite des maux (1). Il voit tout d'un coup le feu dans le temple; tout le pays ruiné avec la ville capitale ; des meurtres, des violences, un roi qui les autorise. Dieu a pitié de son peuple abandonné : il s'en rend lui-même le pasteur; et sa protection le soutient. A la fin il s'allume des guerres civiles, et les affaires vont en décadence. Le temps de ce changement est désigné par un caractère certain, et trois pasteurs, c'est-à-dire, selon le style ancien, trois princes dégradés en un même mois en marquent le commencement. Les paroles du prophète sont précises: J'ai retranché, dit-il (2), trois pasteurs, c'est-à-dire trois princes, en un seul mois, et mon cœur s'est resserré envers eux (envers mon peuple) parce qu'aussi ils ont varié envers moi, et ne sont pas demeurés fermes dans mes préceptes; et j'ai dit: Je ne serai plus votre pasteur; je ne vous gouvernerai plus, (avec cette application particulière que vous aviez toujours éprouvée : ) je vous abandonnerai à vous-mêmes, à votre malheureuse destinée, à l'esprit de division qui se mettra parmi vous, sans prendre dorénavant aucun soin de détourner les maux qui vous menacent. Ainsi ce qui doit mourir ira à la mort; ce qui doit être retranché sera retranché, et chacun dévorera la chair de son prochain. Voilà quel devoit être à la fin le sort des Juifs justement abandonnés de Dieu; et voilà en termes précis le commencement de la décadence à la chute de ces trois princes. La suite nous fera voir

(1) Zach. XI. . (2) Zach. xi. 8.

que l'accomplissement de la prophétie n'a pas été moins manifeste.

Au milieu de tant de malheurs, prédits si clairement par Zacharie, paroît encore un plus grand malheur. Un peu après ces divisions, et dans les temps de la décadence, Dieu est acheté trente deniers par son peuple ingrat; et le prophète voit tout, jusques au champ du potier ou du sculpteur auquel cet argent est employé (1). De là suivent d'extrêmes désordres parmi les pasteurs du peuple ; enfin ils sont aveuglés, et leur puissance est détruite (2).

Que dirai-je de la merveilleuse vision de Zacharie, qui voit le pasteur frappé et les brebis dispersées (3)? Que dirai-je du regard que jette le peuple sur son Dieu qu'il a percé, et des larmes que lui fait verser une mort plus lamentable que celle d'un fils unique (4), et que celle de Josias? Zacharie a vu toutes ces choses: mais ce qu'il a vu de plus grand, « c'est le Seigneur envoyé par le Seigneur pour habiter dans Jérusalem, d'où il appelle les Gentils pour les agréger à son peuple, » et demeurer au milieu d'eux (5) ».

Aggée dit moins de choses; mais ce qu'il dit est surprenant. Pendant qu'on bâtit le second temple, et que les vieillards qui avoient vu le premier fondent en larmes en comparant la pauvreté de ce dernier édifice avec la magnificence de l'autre (6); le prophète, qui voit plus loin, publie la gloire du

(3) Zach. XI. 12, 13. (2) Ibid. 15, 16, 17. (3) Zach. XIII. 7. (5) Zach. 11. 8, 9, 10, 11.(6) 1. Esd.

(4) Zach. XII. 10. —

III. 12.

second temple, et le préfère au premier (1). Il explique d'où viendra la gloire de cette nouvelle maison; c'est que le Désiré des Gentils arrivera : ce Messie promis depuis deux mille ans, et dès l'origine du monde, comme le Sauveur des Gentils, paroîtra dans ce nouveau temple. La paix y sera établie; tout l'univers ému rendra témoignage à la venue de son Rédempteur; il n'y a plus qu'un peu de temps à l'attendre, et les temps destinés à cette attente sont dans leur dernier période.

CHAPITRE XI.

La prophétie de Malachie, qui est le dernier des prophètes; et l'achèvement du second temple.

ENFIN le temple s'achève; les victimes y sont immolées; mais les Juifs avares y offrent des hosties défectueuses. Malachie, qui les en reprend, est élevé à une plus haute considération; et à l'occasion des offrandes immondes des Juifs, il voit l'offrande toujours pure et jamais souillée qui sera présentée à Dieu, non plus seulement comme autrefois dans le temple de Jérusalem, mais depuis le soleil levant jusqu'au couchant; non plus par les Juifs, mais par les Gentils, parmi lesquels il prédit que le nom de Dieu sera grand (2).

Il voit aussi, comme Aggée, la gloire du second temple et le Messie qui l'honore de sa présence : mais il voit en même temps que le Messie est le Dieu à qui ce temple est dédié. « J'envoie mon ange, dit » le Seigneur (3), pour me préparer les voies, et

(1) Agg. 11. 7, 8, 9, 10. -- (2) Mal. 1. 11. - (3) Mal. 111. I.

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