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la place de la vérité, et la fait voir personnellement résidente au milieu de nous; à lui, dis-je, étoit réservé de nous montrer toute vérité, c'est-à-dire celle des mystères, celle des vertus, et celle des récompenses que Dieu a destinées à ceux qu'il aime.

C'étoit de telles grandeurs que les Juifs devoient chercher en leur Messie. Il n'y a rien de si grand que de porter en soi-même, et de découvrir aux hommes, la vérité toute entière, qui les nourrit, qui les dirige, et qui épure leurs yeux jusqu'à les rendre capables de voir Dieu.

Dans le temps que la vérité devoit être montrée aux hommes avec cette plénitude, il étoit aussi ordonné qu'elle seroit annoncée par toute la terre, et dans tous les temps. Dieu n'a donné à Moïse qu'un seul peuple, et un temps déterminé tous les siècles, et tous les peuples du monde sont donnés à Jésus-Christ : il a ses élus partout, et son Eglise répandue dans tout l'univers ne cessera jamais e les enfanter. «< Allez, dit-il (1), enseignez toutes >> les nations, les baptisant au nom du Père, et du » Fils, et du Saint-Esprit, et leur apprenant à garder tout ce que je vous ai commandé : et voilà » je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin des » siècles ».

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CHAPITRE XX.

La descente du Saint-Esprit : l'établissement de l'Eglise : les jugemens de Dieu sur les Juifs et sur les Gentils.

Pour répandre dans tous les lieux et dans tous les siècles de si hautes vérités, et pour y mettre en vi(1) Matt. xxvIII, 19, 20.

gueur, au milieu de la corruption, des pratiques si épurées, il falloit une vertu plus qu'humaine. C'est pourquoi Jésus-Christ promet d'envoyer le SaintEsprit pour fortifier ses apôtres, et animer éternellement le corps de l'Eglise.

Cette force du Saint-Esprit, pour se déclarer davantage, devoit paroître dans l'infirmité. Je vous enverrai, dit Jésus-Christ à ses apôtres (1), ce que mon Père a promis, c'est-à-dire le Saint-Esprit en attendant, tenez-vous en repos dans Jérusalem; n'entreprenez rien jusqu'à ce que vous soyez revêtus de la force d'en haut.

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Pour se conformer à cet ordre ils demeurent enfermés quarante jours le Saint-Esprit descend au temps arrêté; les langues de feu tombées sur les disciples de Jésus-Christ marquent l'efficace de leur parole; la prédication commence; les apôtres rendent témoignage à Jésus-Christ; ils sont prêts à tout souffrir pour soutenir qu'ils l'ont vu ressuscité. Les miracles suivent leurs paroles; en deux prédications de saint Pierre huit mille Juifs se convertissent, et pleurant leur erreur ils sont lavés dans le sang qu'ils avoient versé.

Ainsi l'Eglise est fondée dans Jérusalem, et parmi les Juifs, malgré l'incrédulité du gros de la nation. Les disciples de Jésus-Christ font voir au monde une charité, une force, et une douceur qu'aucune société n'avoit jamais eue. La persécution s'élève; la foi s'augmente; les enfans de Dieu apprennent de plus en plus à ne désirer que le ciel; les Juifs, par leur malice obstinée, attirent la vengeance de Dieu, (1) Luc. xxiv. 49.

et avancent les maux extrêmes dont ils étoient menacés; leur état et leurs affaires empirent. Pendant que Dieu continue à en séparer un grand nombre qu'il range parmi ses élus, saint Pierre est envoyé pour baptiser Corneille, centurion romain. Il apprend premièrement par une céleste vision, et après par expérience, que les Gentils sont appelés à la connoissance de Dieu. Jésus-Christ, qui les vouloit convertir, parle d'en haut à saint Paul, qui en devoit être le docteur; et, par un miracle inoui jusqu'alors, en un instant, de persécuteur il le fait nonseulement défenseur, mais encore zélé prédicateur de la foi il lui découvre le secret profond de la vocation des Gentils par la réprobation des Juifs ingrats, qui se rendent de plus en plus indignes de l'Evangile. Saint Paul tend les mains aux Gentils : il traite avec une force merveilleuse ces importantes questions (1), « Si le Christ devoit souffrir, et s'il » étoit le premier qui devoit annoncer la vérité au » Peuple et aux Gentils, après être ressuscité des » morts >> il prouve l'affirmative par Moïse et par les prophètes, et appelle les idolâtres à la connoissance de Dieu, au nom de Jésus-Christ ressuscité. Ils se convertissent en foule : saint Paul fait voir que leur vocation est un effet de la grâce, qui ne distingue plus ni Juifs ni Gentils. La fureur et la jalousie transporte les Juifs; ils font des complots terribles contre saint Paul, outrés principalement de ce qu'il prêche les Gentils, et les amène au vrai Dieu : ils le livrent enfin aux Romains, comme ils leur avoient

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(1) Act. XXVI. 23.

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livré Jésus-Christ. Tout l'Empire s'émeut contre l'Eglise naissante; et Néron, persécuteur de tout le genre humain, fut le premier persécuteur des fidèles. Ce tyran fait mourir saint Pierre et saint Paul. Rome est consacrée par leur sang; et le martyre de saint Pierre, prince des apôtres, établit dans la capitale de l'Empire le siége principal de la religion. Cependant le temps approchoit où la vengeance divine devoit éclater sur les Juifs impénitens : le désordre se met parmi eux; un faux zèle les aveugle, et les rend odieux à tous les hommes; leurs faux prophètes les enchantent par les promesses d'un règne imaginaire. Séduits par leurs tromperies, ils ne peuvent plus souffrir aucun empire légitime, et ne donnent aucunes bornes à leurs attentats. Dieu les livre au sens réprouvé. Ils se révoltent contre les Romains qui les accablent; Tite même, qui les ruine, reconnoît qu'il ne fait que prêter sa main à Dieu irrité contre eux (1). Adrien achève de les exterminer. Ils périssent avec toutes les marques de la vengeance divine chassés de leur terre, et esclaves par tout l'univers, ils n'ont plus ni temple, ni autel, ni sacrifice, ni pays; et on ne voit en Juda aucune forme de peuple.

Dieu cependant avoit pourvu à l'éternité de son culte : les Gentils ouvrent les yeux, et s'unissent en esprit aux Juifs convertis. Ils entrent par ce moyen dans la race d'Abraham, et devenus ses enfans par la foi, ils héritent des promesses qui lui avoient été

(1) Philost. Vit. Apoll. Tyan. lib. vi, c. 29. Joseph. de Bello Jud. lib. vii, cap. 16, al. lib. v1, c. 8.

faites. Un nouveau peuple se forme, et le nouveau sacrifice, tant célébré par les prophètes, commence à s'offrir par toute la terre.

Ainsi fut accompli de point en point l'ancien oracle de Jacob: Juda est multiplié dès le commencement plus que tous ses frères; et ayant toujours conservé une certaine prééminence, il reçoit enfin la royauté comme héréditaire. Dans la suite, le peuple de Dieu est réduit à sa seule race; et renfermé dans sa tribu, il prend son nom. En Juda se continue ce grand peuple promis à Abraham, à Isaac et à Jacob; en lui se perpétuent les autres promesses, le culte de Dieu, le temple, les sacrifices, la possession de la Terre-promise, qui ne s'appelle plus que la Judée. Malgré leurs divers états, les Juifs demeurent toujours en corps de peuple réglé et de royaume, usant de ses lois. On y voit naître toujours ou des rois, ou des magistrats et des juges, jusqu'à ce que le Messie vienne il vient, et le royaume de Juda peu à peu tombe en ruine. Il est détruit tout-à-fait, et le peuple Juif est chassé sans espérance de la terre de ses pères. Le Messie devient l'attente des nations, et il règne sur un nouveau peuple.

Mais, pour garder la succession et la continuité, il falloit que ce nouveau peuple fût enté, pour ainsi dire, sur le premier, et comme dit saint Paul (1), << l'olivier sauvage sur le franc olivier, afin de participer à sa bonne sève ». Aussi est-il arrivé que l'Eglise, établie premièrement parmi les Juifs, a reçu enfin les Gentils, pour faire avec eux un même arbre,

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(1) Rom. XI. 17.

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