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le royaume de Juda, leur pouvoir ne s'étendoit pas sur les terres du royaume d'Israël, où il s'est trouvé conservé. On voit donc bien que ce livre, que le souverain pontife fit apporter à Josias, ne peut avoir été autre chose qu'un exemplaire plus correct et plus authentique, fait sous les rois précédens et déposé dans le temple, ou plutôt, sans hésiter, l'original de Moïse, que ce sage législateur avoit «< ordonné » qu'on mît à côté de l'arche en témoignage contre >> tout le peuple (1) ». C'est ce qu'insinuent ces paroles de l'histoire sainte: « Le pontife Helcias trouva dans » le temple le livre de la loi de Dieu par la main de » Moïse (2) ». Et de quelque sorte qu'on entende ces paroles, il est bien certain que rien n'étoit plus capable de réveiller le peuple endormi, et de ranimer son zèle à la lecture de la loi, peut-être alors trop négligée, qu'un original de cette importance laissé dans le sanctuaire par les soins et par l'ordre de Moïse, en témoignage contre les révoltes et les transgressions du peuple, sans qu'il soit besoin de se figurer la chose du monde la plus impossible, c'est-à-dire la loi de Dieu oubliée ou réduite à un exemplaire. Au contraire, on voit clairement que la découverte de ce livre n'apprend rien de nouveau au peuple, et ne fait que l'exciter à prêter une oreille plus attentive à une voix qui lui étoit déjà connue. C'est ce qui fait dire au Roi : « Allez et priez >> le Seigneur pour moi et pour les restes d'Israël » et de Juda, afin que la colère de Dieu ne s'élève » point contre nous au sujet des paroles écrites » dans ce livre, puisqu'il est arrivé de si grands (2) II. Paral. xxxiv. 14.

(1) Deut. XXXI. 26.

>> maux à nous et à nos pères, pour ne les avoir » point observées (1) ».

Après cela, il ne faut plus se donner la peine d'examiner en particulier tout ce qu'ont imaginé les incrédules, les faux savans, les faux critiques, sur la supposition des livres de Moïse. Les mêmes impossibilités qu'on y trouvera en quelque temps que ce soit, par exemple, dans celui d'Esdras, règnent partout. On trouvera toujours également dans le peuple une répugnance invincible à regarder comme ancien ce dont il n'aura jamais en→ tendu parler, et comme venu de Moïse, et déjà connu et établi, ce qui viendra de leur être mis tout nouvellement entre les mains.

Il faut encore se souvenir de ce qu'on ne peut jas mais assez remarquer, des dix tribus séparées. C'est la date la plus remarquable dans l'histoire de la nation, puisque c'est lors qu'il se forma un nouveau royaume, et que celui de David et de Salomon fut divisé en deux. Mais puisque les livres de Moïse sont demeurés dans les deux partis ennemis comme un héritage commun, ils venoient par conséquent des pères communs avant la séparation; par conséquent aussi ils venoient de Salomon, de David, de Samuel qui l'avoit sacré; d'Héli, sous qui Samuel encore enfant avoit appris le culte de Dieu et l'observance de la loi; de cette loi que David célébroit dans ses Psaumes chantés de tout le monde, et Salomon dans ses sentences que tout le peuple avoit entre les mains. De cette sorte, si haut qu'on remonte, on trouve toujours la loi de Moïse établie, célèbre, univer(1) II. Paral. xxxiv. 21.

sellement reconnue, et on ne se peut reposer qu'en Moïse même; comme dans les archives chrétiennes on ne peut se reposer que dans les temps de JésusChrist et des apôtres.

Mais là que trouverons-nous? que trouveronsnous dans ces deux points fixes de Moïse et de Jésus-Christ? sinon, comme nous l'avons déjà vu, des miracles visibles et incontestables, en témoignage de la mission de l'un et de l'autre. D'un côté, les plaies de l'Egypte, le passage de la mer Rouge, la loi donnée sur le mont Sinaï, la terre entr'ouverte, et toutes les autres merveilles dont on disoit à tout le peuple qu'il avoit été lui-même le témoin; et de l'autre, des guérisons sans nombre, des résurrections de morts, et celle de Jésus-Christ même attestée par ceux qui l'avoient vue, et soutenue jusqu'à la mort, c'est-à-dire, tout ce qu'on pouvoit souhaiter pour assurer la vérité d'un fait; puisque Dieu même, je ne craindrai pas de le dire, ne pouvoit rien faire de plus clair pour établir la certitude du fait, que de le réduire au témoignage des sens, ni une épreuve plus forte pour établir la sincérité des témoins, que

celle d'une cruelle mort.

Mais après qu'en remontant des deux côtés, je veux dire du côté des Juifs et de celui des Chrétiens, on a trouvé une origine si certainement miraculeuse et divine, il restoit encore, pour achever l'ouvrage, de faire voir la liaison de deux institutions si manifestement venues de Dieu. Car il faut qu'il y ait un rapport entre ses œuvres, que tout soit d'un même dessein, et que la loi chrétienne, qui se trouve la dernière, se trouve attachée à l'autre. C'est aussi ce

qui ne peut être nié. On ne doute pas que les Juifs n'aient attendu et n'attendent encore un Christ; et les prédictions dont ils sont les porteurs ne permettent pas de douter que ce Christ promis aux Juifs ne soit celui que nous croyons.

CHAPITRE XXX.

Les prédictions réduites à trois faits palpables : parabole du Fils de Dieu qui en établit la liaison.

Er à cause que la discussion des prédictions particulières, quoiqu'en soi pleine de lumière, dépend de beaucoup de faits que tout le monde ne peut pas suivre également, Dieu en a choisi quelques-uns qu'il a rendus sensibles aux plus ignorans. Ces faits illustres, ces faits éclatans dont tout l'univers est témoin, sont les faits que j'ai tâché jusques ici de vous faire suivre ; c'est-à-dire, la désolation du peuple Juif et la conversion des Gentils arrivées. ensemble, et toutes deux précisément dans le même temps que l'Evangile a été prêché, et que Jésus-Christ

a paru.

Ces trois choses, unies dans l'ordre des temps, l'étoient encore beaucoup davantage dans l'ordre des conseils de Dieu. Vous les avez vues marcher ensemble dans les anciennes prophéties: mais JésusChrist, fidèle interprète des prophéties et des volontés de son Père, nous a encore mieux expliqué cette liaison dans son Evangile. Il le fait dans la parabole de la vigne (1), si familière aux prophètes. Le père de famille avoit planté cette vigne, c'est-à(1) Matth. XXI. 33 et seq.

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dire la religion véritable fondée sur son alliance; et l'avoit donnée à cultiver à des ouvriers, c'està-dire aux Juifs. Pour en recueillir les fruits, il envoie à diverses fois ses serviteurs, qui sont les pro- . phètes. Ces ouvriers infidèles les font mourir. Sa bonté le porte à leur envoyer son propre fils. Ils le traitent encore plus mal que les serviteurs. A la fin, il leur ôte sa vigne, et la donne à d'autres ouvriers : il leur ôte la grâce de son alliance pour la donner aux Gentils.

Ces trois choses devoient donc concourir ensemble, l'envoi du Fils de Dieu, la réprobation des Juifs, et la vocation des Gentils. Il ne faut plus de commentaire à la parabole que l'événement a interprétée.

Vous avez vu que les Juifs avouent que le royaume de Juda et l'état de leur république a commencé à tomber dans les temps d'Hérode, et lorsque JésusChrist est venu au monde. Mais si les altérations qu'ils faisoient à la loi de Dieu leur ont attiré une diminution si visible de leur puissance, leur dernière désolation, qui dure encore, devoit être la punition d'un plus grand crime.

Ce crime est visiblement leur méconnoissance envers leur Messie, qui venoit les instruire et les affranchir. C'est aussi depuis ce temps qu'un joug de fer est sur leur tête; et ils en seroient accablés, si Dieu ne les réservoit à servir un jour ce Messie qu'ils ont crucifié.

Voilà donc déjà un fait avéré et public; c'est la ruine totale de l'état du peuple Juif dans le temps de Jésus-Christ. La conversion des Gentils, qui de

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