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L'Ambigu,

OU

VARIÉTÉS LITTÉRAIRES ET POLITIQUES.

RECUEIL PÉRIODIQUE,

Publié les 10, 20 et 30 de chaque Mois,

PAR

M. PELTIER.

VOL. XXV.

Cruelle ambition, dont la noire malice
Conduit tout le monde au trépas,

Et qui feignant d'ouvrir le trône sous nos pas,

Ne nous ouvre qu'un précipice,
Que tu caches d'égarements!

Qu'en d'étranges malheurs tu plonges tes amants!

Que leurs chûtes sont déplorables!

Mais que tu fais périr d'innocents avec eux;

Et que tu fais de misérables,

En faisant un ambitieux!

RACINE, la Thébarde.

A LONDRES:

De l'Imprimerie de P. Da Ponte,
No. 15, Poland Street, Oxford Street,

On souscrit chez M. PELTIER,
No. 7, Duke Street, Portland Place.

Le prix de la Souscription est de Quatre Guinées par An.

1809.

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L'Ambigu,

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VARIÉTÉS LITTÉRAIRES ET POLITIQUES.

No. CCXVII.---Le 10 Avril, 1809.

RÉPONSE

une Nouvelle Attaque de M. l'Evêque de Castabala, (Milner) contre le Clergé Français.

Par L'ABBÉ BLANCHARD.

Monseigneur,

Quoique rien ne dût peut-être nous surprendre de votre part, après ce que nous avons vu, je n'ai pu me défendre d'une sorte d'étonnement, en lisant le passage suivant d'un de vos pamphlets, intitulé: Appel du Dr. Milner aux Catholiques d'Irlande. Vous vous plaignez d'abord avec amertume, et dans un profond sentiment de douleur: " D'être assailli et harassé sans relâche par la bande confédérée des " écrivains Catholiques d'Irlande, qui ne vous montrent pas plus de

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respect et de compassion, à vous Catholique et prélat de leur " église, que les Orangistes eux-mêmes." Vous dénoncez aux Catholiques, à qui votre Appel est adressé, cette ligne dirigée contre un prélat toujours dans la ligne étroite du devoir, de la bienséance et de l'honnêteté. Puis, comme si le nombre des adversaires était seul et par lui-même une preuve de leur injustice, vous ajoutez: "Que vous n'êtes pas plus épargné par les Français, concertés sans "doute avec le clergé Catholique d'Irlande pour accabler par une

"

attaque combinée, un évêque certainement paisible et irrépro"chable."

"Vous allez," dites-vous à ceux dont vous réclamez l'appui et auxquels vous demandez grâce, c'est-à-dire, aux simples fideles à qui

vous dénoncez leur clergé : " Vous allez apprendre au moins à pré "sent, que, d'un autre côté, je suis fracassé, chaque semaine, de " pamphlets, d'essais et de satyres par une secte gallicane désespérée, " qui me menace et m'insulte, parce que je ne veux pas les recon" maître pour Catholiques, tant qu'ils proclament notre vénérable " pontife, l'exemplaire Pie VII, et la grande église universelle en "communion avec lui, comme étant enveloppés dans le schisme et " dans l'hérésie. Je dis que vous saurez cela nécessairement en ce "inoment, parce que le champion de cette secte, l'Abbé Blanchard, " vient d'appeler de mon jugement et de celui de son propre évêque, " à vos prélats, dans un livre de 244 pages, déclarant en même "temps qu'il prendra leur silence pour une approbation de sa "doctrine.""

J'avais d'abord résolu de garder le silence sur cette nouvelle attaque, plus inconcevable que les deux premieres, et parce que vous livrant à toute la vengeance qui vous anime, vous vous y portez encore à de plus grands excès, et parce qu'alors vous n'étiez pas encore convaincu sur tant de chefs essentiels, comme vous l'avez été dans l'Abus sans Exemple de l'Autorité Ecclésiastique *.

Je voulais vous laisser au moins, dans l'accablement où vous devez nécessairement être, la triste consolation d'avoir impunément fait éclater une haine inutile. Je dis: haine inutile. De purs sarcasmes, sans nul fondement même apparent, ne peuvent en imposer aux lecteurs sensés de nos écrits contre votre Mandement, et contre votre Lettre Pastorale. Mais on m'a fait apercevoir, et j'ai senti tout le danger d'un pareil silence. Quelque dénuées de preuves et même de vraisemblance que soient vos accusations, elles peuvent emprunter, auprès de certains esprits, une sorte de force de l'autorité épiscopale

* M. l'évêque de Castabala croit sans doute avoir fait une pointe bien piquante, lorsqu'il dit en note dans son Appel: "l'Au"teur a très-proprement intitulé sa derniere production: Abus sans "Exemple," comme si l'abus était dans le prêtre et non dans l'évêque. Il a trouvé cette pointe dans le retranchement d'une partie du titre, et ainsi dans une espece de falsification. Elle eût disparu s'il eût rapporté le titre comme il est: Abus sans Exemple de l'Autorité Ecclésiastique, &c.

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dont vous êtes revêtu. Leur énormité même, le ton d'évêque per-. sécuté pris par vous, la hardiesse incompréhensible que vous faites paraître, peuvent y contribuer. On ne croit pas aisément à de pareils écarts de la part d'un prélat, et comme ils sont très-raresy it est assez naturel de s'y laisser tromper, si d'ailleurs on n'est pas averti. Je me suis donc déterminé à vous faire du moins une réponse.succincte, mais précise et formelle, dans l'espoir qu'elle pourra engager à recourir à mes ouvrages où les choses sont plus développées et mises ainsi dans un plus grand jour.

Je n'ai pas été arrêté par le modérantisme d'une classe peu nom breuse de prêtres français, qui se croient fort sages, et ne sont que pusillanimes. Ils craignaient le résultat de cette lutte, lorsqu'ils la virent s'engager, et à présent qu'ils voient ce résultat heureux pour notre cause, sans nul danger pour ma personne, uniquement funeste, comme il était aisé de le prévoir, à l'auteur de ces troubles, ils ne sont pas encore rassurés. Loin de prendre la part qu'ils doivent au triomphe que la vérité vient de remporter, il leur semble encore que le seul moyen de la faire triompher, était de la laisser attaquer sans la défendre. "Nous avons," disent-ils, "les réclamations ca"noniques de nos légitimes évêques. Elles suffisent. Il est inutilé " et même dangereux d'écrire après un pareil témoignage rendu à " la vérité. Si on n'eût pas écrit, la vérité se serait soutenue par " elle-même, et les Français eussent évité ce scandale dans un pays " étranger et protestant."

Je respecte autant et, j'ose le dire, plus qu'eux les réclamations canoniques de nos légitimes évêques auxquelles j'ai consacré mon temps, mes veilles, ma santé, et sacrifié le repos de mes jours. Mais elles ne doivent pas faire tomber la plume de la main des prêtres. Après la condamnation des hérésies, on avait aussi les décrets des conciles. Cependant, " malgré les décisions prononcées dans les " différents temps contre les faux dogmes, les peres ont bien senti " les dangers que courraient les peuples. Aussi, mont-ils cessé de " les prémunir, en parlant en faveur de la vérité contre l'erreur." Lettre 122e. de Bossuet, Tome 15, écrite après la condamnation du livre des Maximes des Saints. Plusieurs des peres qui ont, dans les différents siecles, prémuni les peuples par de savants ouvrages, étaient de simples prêtres, et même quelquefois des laïcs. Nos modérés, prétendus zélés pour la dignité épiscopale, ne s'accordent guere a vec Bossuet. Qu'ils veuillent bien remarquer d'ailleurs que ce grand

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