Saint Jean Chrysostôme, archevêque de Constantinople, docteur [Père de l'Eglise grecque, mort en 407.] ARTICLE Ier. HISTOIRE DE SA VIE. 1. Saint Jean, surnommé Chrysostôme, également illustre par ses écrits et par les persécutions qu'il eut à souffrir, naquit à Antioche 2 vers l'an 347 3, de parents 4 chré- tiens et de noble condition 5. Il était encore enfant lorsque son père, qui se nommait 7 Second, mourut après avoir servi avec dis- tinction dans les armées de Syrie. Le nom de sa sœur, qui était l'aînée, n'est pas connu. Sa mère s'appelait Anthuse. Laissée veuve à l'âge de vingt ans, elle passa le reste de ses jours dans la viduité. Chrysostôme étudia la rhétorique sous Libanius, et la philosophie sous Adragantius. Il n'avait que dix-huit ans posa plusieurs discours publics qui lui acqui- rent de la réputation. Celui qu'il fit en l'hon- neur des empereurs fut surtout admiré. Il l'envoya à Libanius, qui le trouva si beau, qu'on assure qu'en mourant il déclara que nul autre que Jean ne lui aurait succédé dans la chaire de rhétorique, si les chrétiens ne le lui eussent enlevé 10. A l'âge de vingt ans, connaissant la vanité des rhéteurs, il renonça à l'étude de l'éloquence pour s'appliquer uni- quement à celle des divines Ecritures. Il changea même tout son extérieur; simple et modeste dans ses habits, d'un air grave et sérieux, il allait souvent à l'église pour prier. 2. Saint Mélèce, alors évêque d'Antioche 12, informé du changement, de l'excellence du baptême. 8 Pallad., ibid., et Socrat., lib. VI, cap. I. Isidor. Pelus., lib. II, Epist. 42. 10 Sozomen., lib. VIII, cap. II. 11 Pallad., ubi supra, pag. 302; Socrat., lib. VI, jugeant par les dispositions de son cœur et de son esprit de quelle utilité il serait un jour à l'Eglise. Après l'avoir instruit pendant trois ans des vérités de la religion, il lui con- féra le baptême et le fit lecteur. Chrysostôme s'était fait plusieurs amis dans le cours de ses études: Théodore, depuis évêque de Mop- sueste en Cilicie; Maxime, qui le fut de Sé- leucie en Isaurie, et Basile. Celui-ci lui était tellement uni, qu'ils n'avaient rien de caché l'un pour l'autre. Ils avaient souvent délibéré ensemble sur un genre de vie, et enfin ils 1 se déterminèrent pour la vie solitaire. An- thuse, avertie de ce dessein, n'omit rien pour en empêcher l'exécution, et fit consentir son fils à se contenter d'une retraite dans la mai- son maternelle. C'était vers l'an 372. 3. Pendant qu'il était occupé aux jeûnes, aux veilles et à mortifier ses passions, il se répandit 2 un bruit que les évêques, assem- blés à Antioche pour remplir divers siéges vacants, songeaient à le faire évêque, et Ba- sile, son ami. Basile fut en effet nommé à l'évêché de Raphanée en Syrie; mais Chry- sostôme évita l'épiscopat par la fuite 3. Les montagnes voisines d'Antioche furent le lieu de sa retraite. Il y eut pour maître dans la vie spirituelle, un Syrien déjà âgé, qui vi- vait d'une manière très-austère, et il fit sous lui les plus durs exercices de la vie ascétique pendant quatre années entières. Ensuite il s'enferma seul dans une caverne affreuse, qu'il fut obligé de quitter au bout de deux ans, se trouvant épuisé de jeûnes et de mor- 4. De retour à Antioche, saint Mélèce l'or- donna diacre. C'était vers la fin de l'an 380 ou au commencement de 381. Saint Chrysos- tôme était alors âgé de trente-trois ou trente- quatre ans. Il fit les fonctions de diacre pen- dant cinq années, au bout desquelles saint Flavien, qui avait succédé à saint Mélèce, l'ordonna prêtre, le chargeant en même temps du ministère de la prédication. Il s'en acquitta pendant douze ans, instruisant éga- 5. La réputation de sa vertu et de son élo- quence s'étant répandue dans tout l'empire Constantino- romain, Eutrope, premier ministre d'Arcade, le proposa pour évêque de Constantinople à la place de Nectaire, mort le 27 de septembre de l'année 397. Son élection se fit d'un con- sentement 7 unanime du clergé et du peuple, et avec l'agrément de l'empereur. Il s'agis- sait de le tirer d'Antioche où il était extrê- mement aimé. Arcade, à la persuasion d'Eu- trope, chargea de cette affaire Astérius, comte d'Orient, dont il connaissait la pru- dence. Astérius, ayant reçu la lettre de l'em- pereur 9, pria saint Chrysostome de venir le trouver, comme pour quelque affaire, dans une église de martyrs, hors d'Antioche, près de la porte Romaine. Là, l'ayant fait monter dans son chariot, il le conduisit en diligence jusqu'à Pagras, où il le remit entre les mains des officiers de l'empereur, qui le menèrent à Constantinople. Arcade y avait 11 fait venir plusieurs évêques, entre autres Théophile d'Alexandrie, voulant rendre l'ordination de saint Jean Chrysostôme des plus solennelles. Théophile, qui avait remarqué sur son visage une grandeur d'âme et une fermeté qu'il 12 ne souffrait point dans ceux qu'il avait à or- donner, s'opposa à son ordination sur divers prétextes; mais Eutrope l'y obligea en lui disant ou qu'il eût à ordonner saint Chrysos- tôme, ou à se justifier des crimes dont on l'avait accusé dans des mémoires 13 présentés aux évêques. Cette ordination 14 se fit le qua- trième des calendes de mars, c'est-à-dire le 6. Les premiers soins de 15 saint Chrysos- tôme furent de régler la vie et les mœurs du sept jours de suite. Ses auditeurs étaient en si grand nombre, que pour leur donner lieu de l'entendre de plus près, il quittait sa place ordinaire et s'asseyait au milieu de l'église, sur la tribune des lecteurs. On ne se lassait point de l'entendre, et souvent on l'interrompait par des acclamations et des battements de mains. Ses discours produisirent de grands fruits dans Constantinople. On vit la ville changer de face 2, la piété refleurir, les courses de chevaux et les autres spectacles abandonnés, les fidèles quitter le cirque et le théâtre pour accourir à l'église aux offices du jour et de la nuit; les païens et les hérétiques se convertirent. Du nombre de ces derniers fut un homme de la secte des macédoniens, qui voulut même obliger sa femme à rentrer comme lui dans le sein de l'Eglise catholique. Il la menaça de la quitter si elle ne participait avec lui aux saints mystères. Elle s'en approcha en effet, mais sans être convertie et dans le dessein de tromper son mari. Après avoir reçu l'eucharistie dans sa main, comme c'était l'usage, elle se baissa comme pour prier, et au lieu de manger ce qu'elle avait reçu, elle mangea un morceau de pain que sa servante, qui était de concert avec elle, lui avait apporté. Son déguisement fut puni sur-le-champ; car elle n'eut pas plutôt mis le morceau de pain dans sa bouche et sous ses dents, qu'il se convertit en pierre. Effrayée d'un événement si miraculeux, et craignant qu'il ne lui arrivât encore pis, elle se hâta de le déclarer à l'évêque, lui montrant la pierre sur laquelle on voyait l'impression de ses dents bien marquée. Elle obtint par ses larmes le pardon de sa faute, et vécut depuis en bonne intelligence avec son mari. Sozomène 3, qui rapporte ce fait, dit que de son temps on voyait encore cette pierre dans le trésor de l'église de Constantinople. Saint Chrysostome eut beaucoup de part à la paix de l'Eglise d'Antioche et à la réconciliation de saint Flavien avec le pape saint Sirice et les Eglises d'Occident et d'Egypte. Il réforma les Eglises de la Thrace, de l'Asie et du Pont; travailla à 5 la conversion des Goths et des Scythes appelés nomades, et maintint autant qu'il fut en lui, les immunités de l'Eglise contre les entre 6 1 Sozomen., lib. VIII, cap. v. • Pallad., ubi supra; Sozomen., ubi supra. 3 Sozomen., lib. VIII, cap. v. Theodoret., lib. V, cap. VIII. prises d'Eutrope et de Gaïnas. Il fut député vers ce dernier, que l'empereur avait déclaré ennemi de l'Etat, pour lui demander le rappel du consul Aurélien; et il y a tout lieu de croire qu'il l'obtint, puisque ce Barbare, qui n'avait que du mépris pour Arcade, témoigna un si grand respect pour saint Chrysostome, qu'ayant appris qu'il venait 7, il alla fort loin au-devant de lui, et que s'en étant approché, il prit la main du saint évêque pour s'en toucher les yeux, et obligea ses enfants de lui embrasser les genoux. Ceci se passait dans le cours de l'année 400. 8 7. Après le mois de septembre de cette même année, quelques évêques qui se trouvaient à Constantinople s'étant assemblés un dimanche afin de communiquer ensemble, Eusèbe, évêque de Valentinople, présenta à saint Chrysostome une requête renfermant sept chefs d'accusation contre Antonin, évêque d'Ephèse le premier, d'avoir fait fondre les vases sacrés de l'église et d'en avoir donné l'argent à garder à son fils; le deuxième, d'avoir employé dans ses étuves des pièces de marbre qu'il avait tirées de l'entrée du baptistère; le troisième, d'avoir élevé dans la salle des colonnes qui avaient été couchées sur le pavé de l'église, en attendant qu'on les mit en œuvre; le quatrième, de tenir à son service un valet qui avait commis un meurtre, sans lui en avoir fait aucune correction; le cinquième, d'avoir vendu à son profit les héritages que Galla, mère de l'empereur Julien, avait laissés à l'Eglise; le sixième, d'avoir eu la compagnie de sa femme, et d'en avoir eu des enfants depuis qu'il s'était séparé d'elle; le septième, de vendre habituellement l'ordination des évêques à proportion du revenu des évêchés. Euzèbe s'offrit à la preuve de toutes ces accusations. Saint Chrysostôme, qui le voyait parler avec chaleur et beaucoup d'animosité, essaya de l'adoucir en lui disant : « Mon frère Eusèbe, comme il arrive souvent que les accusations que l'on fait avec trouble et emportement d'esprit, se trouvent enfin sans fondement et sans preuve, cessez, je vous prie, d'accuser mon frère Antonin. Nous aurons soin, de notre part, de faire cesser tous les sujets de mécontentement que vous pourriez avoir. » Voyant que ces paroles ne faisaient aucune impression sur l'esprit d'Eusèbe, il s'adressa à Paul, évêque d'Héraclée, qui paraissait favorable à Antonin, et le pria de les remettre bien ensemble. Comme l'heure du sacrifice approchait, saint Chrysostôme se leva avec les autres évêques pour le célébrer. Eusèbe, étant entré secrètement dans l'église, présenta devant tout le peuple et devant tous les évêques une autre requête qui renfermait les mêmes chefs d'accusation, demandant instamment justice à saint Chrysostôme, et l'en conjurant par les serments les plus saints et les plus horribles. Le saint évêque reçut ce mémoire, et aussitôt qu'on eut lu l'Ecriture sainte, suivant la coutume, il pria Pansophe, évêque de Pisidie, de dire la messe, ne voulant pas la célébrer, dit Pallade', parce qu'il avait quelque trouble dans l'esprit. Après qu'elle fut finie et que le peuple fut sorti, s'étant assis dans le baptistère avec les autres évêques, il fit venir Eusèbe et lui parla en cette manière : « Il arrive souvent à plusieurs personnes de dire ou d'écrire dans le transport de la tristesse ou de la colère, plusieurs choses qu'ils ne peuvent prouver. Si donc vous connaissez clairement les chefs sur lesquels vous voulez fonder votre accusation, c'est à vous de prendre en cette rencontre le parti que vous trouverez le plus à propos, avant qu'on lise votre mémoire; et comme nous ne vous empêchons pas, si vous persistez dans le dessein de vous rendre accusateur, aussi nous ne voulons pas vous y contraindre malgré vous. Mais quand tout le monde aura ouï la lecture de votre mémoire et que l'on en aura reçu les informations par écrit, il ne vous sera plus libre d'en demander l'absolution, étant évêque comme vous êtes. » Eusèbe persista: on fit la lecture du mémoire, et sur la remontrance des plus anciens évêques, on commença la procédure par l'examen du septième chef qui regardait les ordinations simoniaques. L'information dura jusqu'à huit heures du soir, sans pouvoir être finie, parce que les témoins cités par Eusèbe n'étaient pas tous présents, et qu'il y en avait dans l'Asie. Saint Chrysostôme, voyant la difficulté de cette affaire, se détermina à aller lui-même sur les lieux pour ouïr ces témoins. Antonin, qui se sentait coupable, obtint par la médiation d'un des premiers officiers de la cour, des ordres 1 Pallad., Vita Chrysost., cap. XIII. qui défendaient à saint Chrysostome de sortir de Constantinople, et on lui écrivit d'autre part pour le détourner du voyage d'Asie, à cause de l'émotion que causait dans cette ville la crainte de Gaïnas. Quoique le saint évêque remarquât dans tout ce procédé les fuites et les artifices d'Antonin, il suspendit son voyage, et de l'avis des évêques, il prit le parti d'en envoyer trois sur les lieux pour entendre les témoins. Mais avant qu'ils fussent arrivés à Hypèpe, ville d'Asie où les parties et les témoins devaient se rendre, Eusèbe, gagné par argent, s'était raccommodé avec Antonin. Celui-ci mourut même avant la décision de son procès. L'affaire n'en demeura pas là; ceux qu'il avait ordonnés pour de l'argent vivaient encore. Saint Chrysostôme, pressé par quelques évêques et par tout le clergé d'Ephèse, se rendit en cette ville, et y tint un concile avec les évêques de Lydie, d'Asie et de Carie au nombre de soixante-dix. Comme ils étaient assemblés, Eusèbe, accusateur d'Antonin, se présenta, persistant dans son accusation contre les six évêques qu'il prétendait avoir acheté de lui l'épiscopat. On fit entrer les témoins, qui marquèrent en détail les espèces de présents que ces six évêques avaient donnés. Eux-mêmes, pressés par les remords de leur conscience, avouèrent les crimes qu'on leur reprochait, s'excusant sur la coutume et sur ce qu'ils n'avaient eu d'autre intention que de se garantir du service de l'empereur. << Maintenant donc, ajoutaient-ils, si cela ne se peut selon les règles, nous vous prions de nous laisser comme auparavant dans le service de l'Eglise. Mais si vous jugez que cela ne se puisse pas, nous vous supplions de commander aux héritiers d'Antonin de nous rendre ce que nous lui avons donné. Car il y en a d'entre nous qui ont donné l'or de leurs femmes et les meubles de leurs maisons. >> Saint Chrysostome se chargea d'obtenir de l'empereur qu'il ne leur serait fait aucune peine, et pria les Pères du concile d'ordonner aux héritiers d'Antonin de rendre l'argent que les six évêques avaient donné. Ensuite le concile déposa ces prélats simoniaques, leur permettant par grâce de communier de la main du prêtre dans l'enceinte de l'autel. C'était en 401, car le procès dura deux ans. 8. Cependant Sévérien de Gabales 2, à qui 2 Sozom., lib. VIII, cap. x; Socrat., lib. VI, cap. XI. Diffe Gales, en Chrysaint Chrysostome avait, en partant, confié Seren de le soin de l'Eglise de Constantinople, faisait servir la prédication de l'Evangile à son ambition particulière, et tâchait de gagner les esprits dans le dessein d'usurper ce siége. Un prêtre de cette Eglise, nommé Sérapion, très-fidèle à saint Chrysostôme, lui donna avis de ce qui se passait. Le saint évêque sut par sa présence dissiper tous les artifices de Sévérien. Aussitôt après son retour à Constantinople, qui eut lieu au mois d'avril de l'an 401, après environ trois mois d'absence, il fit un discours à la louange de son peuple, disant qu'il les trouvait tels qu'il les avait laissés, tandis que les Israélites avaient commis de grands péchés en l'absence de Moïse, qui ne s'était absenté que quarante jours. Il les loua de ce qu'ils avaient résisté courageusement aux ariens, et les compara à une femme de probité qui repousse fortement les adultères, et à des chiens fidèles qui gardent le troupeau en l'absence du pasteur. Sévérien sortit de Constantinople et se retira à Chalcédoine. L'impératrice Eudoxie le fit revenir et le réconcilia avec saint Chrysostôme. Ce Saint parla de cette réconciliation dans un de ses discours, qu'il fit exprès pour engager son peuple à l'approuver; et Sévérien monta lui-même en chaire le lendemain, pour déclarer qu'il venait à bras ouverts et avec une grande étendue de cœur pour offrir des sacrifices au Dieu de paix. read de Gmon-Fre 9. Sur la fin de la même année, ou au commencement de la suivante, les solitaires nommés les Grands-Frères, chassés de l'Egypte et persécutés par Théophile d'Alexandrie, sous prétexte d'origénisme, vinrent 2 à Constantinople prier saint Chrysostome de leur ménager la liberté de retourner dans leur solitude. Le saint évêque, touché jusqu'aux larmes de voir à ses pieds cinquante vieillards vénérables par leurs cheveux blancs et par leur extérieur mortifié, se chargea de cette affaire; et en attendant la réussite, il leur donna un lieu où ils pussent loger et quelques aumônes pour se nourrir; mais il ne voulut point les admettre à sa communion jusqu'à ce qu'il en eût écrit à Théophile. Celui-ci reçut mal la lettre de saint Chrysostôme. Les solitaires, fatigués de se voir per 4 sécutés, accusèrent par écrit Théophile devant saint Chrysostome 3, s'offrant d'anathématiser toute mauvaise doctrine. Ce Saint en donna avis à Théophile, le priant en même temps de lui marquer ce qu'il conviendrait de faire en cette occasion. Théophile ne répondit à cette politesse que par des vivacités et des hauteurs, ce qui obligea saint Chrysostôme à abandonner l'affaire et à se contenter d'exhorter les deux parties à la paix. Les Grands-Frères n'en demeurèrent pas là; ils présentèrent à l'empereur un mémoire contenant leurs plaintes contre Théophile, qui eut ordre de comparaître devant saint Chrysostome pour être jugé. Après beaucoup de 5 délais, il vint à Constantinople un jeudi à midi, au commencement de l'automne de l'an 402. Il y arriva accompagné d'un grand nombre d'évêques, tous de sa faction, quoiqu'il eût été mandé seul. Saint Chrysostome lui avait préparé 6 un logement et à ceux de sa suite; mais il aima mieux loger hors de la ville, dans une des maisons de l'empereur appelée Placidienne. Il ne voulut pas même voir saint Chrysostome, ni lui donner aucune marque de communion 7. Comme les GrandsFrères pressaient vivement le jugement de leur affaire, l'empereur ordonna à saint Chrysostôme d'aller entendre Théophile sur les violences, les meurtres et autres chefs dont on l'accusait. Le Saint s'en défendit par considération pour Théophile et en même temps par respect pour les canons, qui défendent de juger les causes des évêques hors de leur province. Théophile pensait bien différemment. Pendant trois semaines qu'il logea hors de la ville, il mit tout en œuvre pour chasser saint Chrysostôme de Constantinople, et même pour lui faire perdre la vie. A Théophile se joignirent des évêques d'Asie 10 déposés par saint Chrysostôme; quelques autres mécontents de lui, comme Acace de Bérée 11, Sévérien de Gabales, Antiochus de Ptolémaïde, deux ou trois des plus puissants de la cour, gagnés par argent; quelques-uns du clergé de Constantinople, qui souffraient avec peine qu'on y rétablit le bon ordre; trois veuves que le saint évêque avait reprises de leur luxe, et l'impératrice Eudoxie, choquée d'un discours qu'il 12 avait fait contre le |