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Juzem eats

E

que Dieu découvrirait la croix qui l'avait porté. On porta donc les trois croix chez cette dame, et saint Macaire y étant entré avec l'impératrice et les peuples qui étaient présents, demanda à Dieu les genoux en terre qu'il voulût opérer la guérison de cette dame par l'attouchement de la croix qui avait servi à la rédemption de tout le monde. Ensuite il fit toucher les deux premières croix à la malade, qui n'en ressentit aucun effet. Mais, après avoir touché la troisième, elle se leva aussitôt entièrement guérie, et plus forte qu'elle n'avait jamais été, courant par toute la maison, et louant la puissance de Dieu. Sainte Hélène, ayant trouvé par cet indice miraculeux le trésor qu'elle avait cherché, bâtit au même lieu un temple magnifique. Elle porta à Constantin, son fils, les clous qui avaient servi à attacher le Sauveur à la croix ; et ce prince en employa un à faire un frein pour le cheval qu'il montait, et un autre à son casque de guerre. Quant au bois de la croix, sainte Hélène en porta aussi une partie à son fils, et ayant enfermé le reste dans une boîte d'argent, elle le laissa sur les lieux, pour être exposé à la vénération des fidèles. Rufin ajoute qu'étant à Jérusalem, et ayant invité toutes les vierges sacrées à venir manger chez elle, elle ne voulut point les faire servir par d'autres, mais que se mettant elle-même en habits de servante, elle leur donna à laver, leur apporta les viandes sur la table, elle voulut leur présenter à boire, se tenant heureuse d'être la servante des servantes de JésusChrist, elle qui était la reine du monde et la mère de l'empereur.

6. Rufin a été regardé 1 comme un des ri de plus habiles de son siècle, très-instruit dans de ses les sciences divines et humaines. Il fut consulté 2 sur diverses difficultés que les doctes mêmes n'osaient entreprendre de résoudre. Il avait de l'éloquence, et écrivait avec assez de pureté. Son style, quoique serré, n'a rien de dur ni d'embarrassé. Il est égal partout. Ses traductions rendent bien le sens de l'auteur. Mais il n'est pas toujours digne de foi dans les faits qu'il rapporte de lui-même; et

1 Si ille has, quæ merito te permovent, de annorum sive regnorum non congruente calculo, hiantis historiæ causas non ediderit; qui et scholasticis et salutaribus litteris græce juxta ac latine dives est, vereor ne apud alium in his regionibus frustra requiramus. Paulin., Epist. 28, pag. 178.

2 Ibid. et Epist. 40, ut in fine,

on l'a accusé d'avoir écrit son Histoire sur des monuments peu authentiques. La liberté qu'il s'est donnée de retrancher un grand nombre d'endroits de l'Histoire d'Eusèbe, et d'y ajouter diverses choses, lui ont attiré des reproches de presque tous les savants. Il ne manque à ses raisonnements ni force, ni justesse; et quoiqu'il fût d'un caractère d'esprit doux et modéré, il ne laissait pas de pousser vivement ses adversaires, et de faire paraître du feu dans la dispute. On croit que c'est de Rufin que parle saint Paulin, lorsqu'il dit3 qu'il avait appris quelques particularités du pélican d'un de ses intimes amis, homme saint et très-docte, et qui s'était instruit de beaucoup de choses, non-seulement dans les livres, mais aussi dans les divers pays où il avait voyagé. Ces particularités sont, que le pélican est un oiseau qui fait sa demeure en Egypte, aux environs du Nil, dans des lieux déserts, et qu'il s'y nourrit de serpents, après les avoir défaits dans le combat. Les traductions qu'il a faites d'Origène se trouvent ordinairement dans les éditions des œuvres de ce père. Son Histoire a été aussi souvent imprimée à la suite de celle d'Eusèbe de Césarée, qu'il avait traduite du grec en latin. Il y en a une d'Anvers en 1548 [et de Rome de 1740-41, 1 vol. in-4o, par Cacciari qui a revu les manuscrits et a donné avec son édition une dissertation sur la vie de Rufin, sa profession de foi et sa traduction d'Eusèbe]. On trouve sa lettre au pape Anastase dans les éditions des œuvres de saint Jérôme, et dans les Epitres décrétales du père Coustant, à Paris, en 1721. On trouve encore dans diverses éditions de saint Jérôme des invectives de Rufin contre ce Père, la traduction qu'il fit de l'Apologie de saint Pamphile, et le petit écrit qu'il composa pour montrer qu'on avait corrompu les œuvres d'Origène. On y lit aussi son Explication du Symbole des Apôtres. Les explications qu'il donna des bénédictions de Jacob à ses enfants, ont été imprimées avec celles qu'il a faites du Symbole, et avec quelques ouvrages qui portent son nom, à Paris, en 1580. [La meilleure édition des œuvres de Rufin est

3 Accepi enim a quodam sancto doctissimo vero et carissimo mihi, qui non solum legendo, sed etiam peregrinando multa cognovit, pelicanum avem esse in Ægypto, vel illis juxta partibus usitatam proximus Nilo flumini desertis oberrare, serpentibus vesci in quos dimicando prævaluerit. Paulin., Epist. 40, pag. 247.

celle de Vallarsi, publiée à Vérone en 1745, 1 vol. in-fol. Elle contient les ouvrages composés par Rufin, avec un appendice qui renferme les œuvres apocryphes. Le second volume, qui devait renfermer les traductions faites par Rufin, n'a point paru. M. Migne a

reproduit l'édition de Vallarsi, avec une notice d'après Schoeneman, Bibliotheca Patrum, Historia litteraria. Cette notice donne des détails assez longs sur les différentes éditions de notre auteur].

Pallade embrasse la vie

en 86.

Hist. Laus. in prolog.

CHAPITRE IV.

Pallade, évêque d'Hélénople en Bythinie, et confesseur.

[Vers l'an 431.]

1. Pallade, surnommé quelquefois d'Hélésolitaire dans nople, pour le distinguer de quelques autres Palestine, du même nom, qui ont vécu dans les quatrième et cinquième siècles, naquit vers l'an 367. Il aima la vertu dès sa jeunesse, et embrassa la vie solitaire, n'étant âgé que d'environ vingt ans, c'est-à-dire, en 386. Il passa les deux années suivantes dans la Palestine, Cap. CVL. partie avec l'abbé Elpide de Cappadoce, qui

LXXVIII.

menait une vie très-austère dans les cavernes des Amorrhéens vers Jéricho; partie cx et cx1. avec les saints anachorètes Gaddade et Elie, qui demeuraient auprès du Jourdain et de la mer Morte; partie avec Posidoine, à Bethleem, au-delà du Pastoral, que l'on croit être le lieu où l'ange était apparu aux pasteurs. Il semble que ce fut en cette occasion que Pallade fit connaissance avec Mélanie, l'aïeule, qui demeurait depuis plusieurs anv. nées à Jérusalem avec Rufin. Les éloges qu'il donne à celui-ci donnent aussi lieu de juger qu'il le connut alors particulièrement.

CXVIII.

Il vient à

2. En 388, il vint pour la première fois à Alexandrie, Alexandrie, où il s'adressa au célèbre IsiCap. 1. dore, prêtre et hospitalier de cette Eglise,

en 338.

II.

pour le prier de le conduire dans la vie religieuse et solitaire. Celui-ci reconnaissant que Pallade dans la fleur de son âge avait moins besoin d'instructions et de discours, que de travail pour dompter sa chair, le mena environ à deux lieues de la ville dans un désert, où il le mit sous la conduite d'un solitaire, nommé Dorothée, qui depuis environ soixante ans menait dans une caverne une 1. vie très-austère. Pallade, étant tombé dans une maladie violente, qui l'obligea de se retirer, ne put achever les trois ans qu'Isidore lui avait dit de passer avec Dorothée. Il parcourut ensuite divers monastères qui étaient

autour d'Alexandrie, et y conversa avec plu- cap. T sieurs saints personnages, entre autres avec Didyme. Invité à faire la prière chez lui, Pallade refusa, mais Didyme l'engagea à obéir par l'exemple de saint Antoine.

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trie,

Cap. v

Cap

et XLI

3. Au bout de trois ans, Pallade ayant n traversé en un jour et demi le lac de Marie, vint à la montagne de Nitrie, où il demeura pendant un an entier avec les solitaires qu'il y trouva. De Nitrie, il passa la même année, c'est-à-dire, en 390 ou 391 au plus tard, dans la solitude intérieure des Cellules où il demeura neuf ans. Il y trouva saint Macaire d'Alexandrie, qui en était prêtre, apprit de lui beaucoup de choses, et fut témoin de quelques-uns de ses miracles. Pendant son séjour dans le désert des Cellules, il eut pour conducteur Evagre de Pont, et pour compagnon un nommé Albin, diacre, avec lequel il avait ce semble lié une amitié particulière. Ils firent ensemble le voyage de Sceté, où en seize lieues de chemin ils ne prirent que deux fois de la nourriture, et ne burent que trois fois de l'eau. Pallade fit encore une autre fois, mais seul, le voyage de Sceté, où il passa quinze jours avec les solitaires, qui avaient vieilli dans ce désert. Comme le motif de ce voyage était de se délivrer d'une peine d'esprit, il en fit ouverture à un saint vieillard qui le consola, l'encouragea à combattre contre le démon, et l'instruisit de la manière dont il devait se conduire dans cette guerre. Dans la visite qu'il rendit à saint Jean de Lycople, en 394, ce saint lui prédit qu'il serait un jour évêque, et que dans cette charge il aurait à essuyer beaucoup de travaux et d'afflictions; mais que s'il voulait les éviter, il devait rester dans la solitude, où personne ne pourrait l'ordonner évêque. Ce

ΣΕΙΣ

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Laus,

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fut vers le même temps qu'il visita les tentes et les cavernes où étaient les serviteurs de Dieu, et qu'il rendit aussi visite à saint Crone, prêtre, à Jacques-le-Boiteux, disciple de saint Antoine, et à plusieurs autres illustres solitaires de l'Egypte, de la Libye, de la Thébaïde, jusqu'à Tabène, de la Mésopotamie et de la Syrie, faisant des trente et soixante journées à pied, et souffrant avec joie les fatigues d'un si long chemin, pour voir quelquefois un seul homme de Dieu, et acquérir par ses instructions ou par ses prières quelque bien qu'il n'avait pas. Il avoue néanmoins que la longueur du chemin l'avait empêché d'aller visiter Etienne de Libye, qui avait été connu de saint Antoine, et qui demeurait depuis soixante ans entre la Maréote et la Libye Marmarique.

4. Il était encore dans le désert lorsqu'il se trouva attaqué d'un mal de rate et d'esto. mac. Mais après avoir combattu quelque temps son incommodité, voyant qu'elle dégénérait en hydropisie, il s'en alla à Alexandrie. Pendant qu'il y était, il assista à la mort d'Evagre et de Didyme. D'Alexandrie

il

passa en Palestine, de l'avis des médecins, qui jugèrent que l'air plus pur et plus subtil s'accommoderait davantage avec son tempérament. Il n'y resta pas longtemps, et alla de là en Bithynie.

5. Le temps avait alors effacé de sa mémoire la prédiction que lui avait faite saint. Jean de Lycople; mais elle ne laissa pas d'avoir son effet. Durant son séjour en Bithynie, il fut appelé à l'honneur de la dignité épiscopale. Il ne veut point décider si ce fut par le jugement et le choix des hommes, ou par l'ordre favorable de la Providence divine; mais il avoue avec humilité que cette dignité était beaucoup au-dessus de ses forces et de son mérite. On ne sait pas au juste le temps de son ordination; mais on ne peut la mettre, au plus tard, que dans le commencement de l'an 400, puisqu'il assista au concile de Constantinople, tenu au mois de mai de la même année, où Antonin d'Ephèse fut accusé de simonie. Pallade fut du nombre des évêques que saint Chysostòme avait, avant la tenue de ce concile, envoyés en Asie, pour vérifier les chefs d'accusation formés contre Antonin; et l'hiver suivant il accompagna saint Chrysostome dans le voyage qu'il fit à Ephèse pour la même affaire. Il parait par-là qu'il y avait entre ces deux évêques une grande union. Comme Héléno

ple, dont Pallade était évêque, n'était pas éloignée de Constantinople, il eut occasion de connaître particulièrement la vertu de sainte Olympiade, et il fut même chargé de Cap. CXLIV. sa part de grandes sommes d'argent pour les distribuer aux pauvres.

Il est accusé en 403.

Rome.

6. Dans le conciliabule du Chêne, tenu contre saint Chrysostôme, en 403, par Théo- Se retire à phile d'Alexandrie, Pallade fut accusé avec quelques autres d'origénisme. Il ne paraît pas néanmoins qu'on l'en ait convaincu, ni qu'on ait rien conclu contre lui dans cette assemblée; mais saint Chrysostome ayant été banni l'année suivante, Pallade se retira à Rome pour se dérober à la fureur des magistrats animés contre les défenseurs de ce saint évêque. Il y fut fort bien reçu par Pinien, et les autres de cette famille. Ce fut sans doute dans ce voyage qu'il visita les personnes de piété qui vivaient alors dans la Campanie, et dans les provinces voisines de Rome.

7. En 406, il se joignit aux députés que l'empereur Honorius et le pape Innocent envoyèrent à Arcade, pour demander le rétablissement de saint Chrysostôme, et un concile général à Thessalonique; mais on l'enferma avec eux dans le château d'Athyre, en Thrace, d'où il fut relégué à Syène, aux extrémités de l'Egypte. Pallade eut beaucoup à souffrir dans cette occasion, et il fut contraint de demeurer onze mois caché dans une petite chambre obscure. L'état de tribulation où il se trouva, le fit ressouvenir de la prédiction de saint Jean de Lycople.

Cap. cxxI. In prolog., hist. Laus.

Il souffre pour la causo

de saint Chry406.

sostome,

en

Hist. Laus., cap. XLII.

8. Il témoigne dans son Histoire Lausiaque Cap. XCVI. qu'il avait demeuré quatre ans à Antinople, dans la Thébaïde; mais il n'est pas aisé d'en fixer le commencement. Tout ce qu'on peut dire, c'est que son séjour en cette ville précéda le temps auquel il écrivit cette histoire, qui fut en 420. Il visita tous les monastères des environs d'Antinople. Ils étaient composés d'environ douze cents moines, qui vi- XCVI. vaient tous du travail de leurs mains, et dont quelques-uns n'avaient point d'autrere traite que des cavernes. Il y avait aussi près de cette CXXXVII. ville douze monastères de filles, dont les uns étaient fermés à clef, et les autres ne l'étaient que par la charité qui les unissait ensemble. Pallade entra dans celui qui avait pour supérieure Amatalide, qui avait déjà passé quatre-vingts ans dans les exercices de piété. Les filles de ce monastère allaient à l'église de la ville, recevoir la communion, excepté une nommée Taor, qui, étant d'une

CXXXVIII.

beauté singulière, ne voulait point sortir de la maison de peur d'attirer sur elle quelques regards moins modestes. Depuis trente ans qu'elle était dans la maison, elle ne s'était couverte que de haillons, et n'avait cessé de Cap. cxxxix. travailler et de se mortifier. Pallade raconte qu'une vierge recluse, qui en ce temps-là demeurait aussi dans le voisinage d'Antinople, étant près de mourir, avait dit à sa mère de donner un Commentaire de Clément d'Alexandrie sur Amos à l'évêque banni, et de la recommander à ses prières. On croit que cet évêque banni est Pallade même.

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Pallade est fait évêque

417.

9. La suite de sa narration nous apprend qu'il passa depuis trois années sur la montagne des Oliviers près de Jérusalem, avec Innocent, prêtre de ce lieu; et ce fut apparemment en ce temps-là, c'est-à-dire après 413, qu'il conduisit de Jérusalem en Egypte la vierge Salvie, sœur de Rufin. Il y a aussi tout lieu de croire qu'il demeura quelque temps à Césarée, en Palestine, et qu'il y fut témoin oculaire de ce qu'il raconte d'un jeune lecteur, nommé Eustathe. Il fit encore un voyage à Ancyre, en Galatie, où il vit le comte Sévérien et Bosphérie, sa femme, dont il a décrit les vertus. Il vit dans la même ville diverses autres personnes de piété, et plus de deux milles vierges recommandables par leur humilité, leur chasteté et leur dou

ceur.

10. Les troubles que la déposition de saint d'Aspone, en Chrysostôme avait occasionnés, ayant cessé vers l'an 417, les évêques qui avaient été chassés de leurs siéges, y rentrèrent. Mais il paraît que celui de l'Eglise d'Hélénople s'étant trouvé rempli, Pallade consentit volontiers pour ne point troubler la paix qu'on venait de donner à l'Eglise, à continuer de travailler à son salut comme un simple particulier, jusqu'à ce qu'il se présentât quelqu'autre église vacante. En effet, nous apprenons de Socrate, qu'il fut transféré de l'évêché d'Hélénople à celui d'Aspone dans la première Galatie. On ne sait point le temps de sa mort. Mais ou il ne vivait plus en 431, ou il n'était plus évêque d'Aspone,

1 Socrat., lib. VII, cap. XXXV.

2 Concil., tom. III, pag. 150.

8 Cum tricesimum et tertium annum agerem in conversatione cum fratribus et vita solitaria, vigesimum autem episcopatus, totius autem vitæ meæ quinquagesimum tertium, necessarium existimavi spiritalis utilitatis gratia tibi cupienti in scriptis narrare quæ a sanctis Patribus recte et ex virtute gesta sunt, tam masculis quam fœminis, quos et ipse vidi, et de quibus

puisque dans les souscriptions du concile d'Ephèse en 431 2, il y a un nommé Eusèbe, évêque d'Aspone. Pallade est néanmoins nommé communément évêque d'Hélénople, et il est ainsi qualifié à la tête de l'Histoire Lausiaque, parce qu'apparemment il était encore évêque de cette ville l'an 419 ou 420, auquel il écrivit cette histoire.

Pallade, S

sinque. [E

a enes.]

11. Elle est intitulée Lausiaque du nom de Ecrita de Lausus, préfet de la chambre de l'empereure I Théodose-le-Jeune, à qui elle est adressée. tions Pallade a mis à la tête de cette histoire trois espèces de préface, dont la deuxième est une lettre à ce préfet. Il témoigne dans la première, qu'il écrivait l'histoire des solitaires, la trente-troisième année depuis qu'il était solitaire, la vingtième de son épiscopat, et la cinquante- troisième de son âge; et il proteste 3 qu'il y rapportera seulement ce qu'il a vu lui-même, ou appris des auteurs originaux. La simplicité qui règne dans tout son ouvrage est une féconde preuve de sa sincérité. Comme il n'avait en vue que d'édifier ses lecteurs, et que de leur être utile, il ne s'est point embarrassé de polir son style, et il les prie de ne point rejeter ce qu'il rapporte, à cause de la bassesse de son langage: on n'apprend point, dit-il, dans l'école de Dieu à parler avec politesse et avec art, mais à soumettre son esprit aux lumières de la vérité pour s'en remplir. Pallade fait profession dans cette histoire, de rapporter la vie des saintes femmes, aussi bien que celle des hommes; et il y mêle aussi quelques exemples de ceux que l'orgueil et la négligence avaient fait déchoir de leur première ferveur. Socrate fait mention de cet ouvrage, 4 et Sozomène en transcrit beaucoup d'endroits sans le citer. Saint Dorothée 5 en rapporte un passage mot à mot, sous le nom de la Vie d'Evagre, et il est aussi cité par saint Jean de Damas 6. L'histoire de Pallade est distribuée en cent cinquante-un chapitres; le cent seizième, le cent cinquantième chapitre, et une partie du neuvième et du quarante-sixième qui manquaient dans l'édition de Fronton-le-Duc à Paris, en 1624, ont été

audivi ab animis fidelissimis cum quibus versatus sum in Egypti solitudine et in Libya et Thebaide, et Syene sub quibus sunt etiam qui dicuntur Tabennesiota; deinde in Mesopotamia, Palestina, et Syria, et in partibus Occidentis et Roma et in Campania, et in iis quæ sunt circa eas partibus. Pallad., in præfat. Socrat., lib. IV, cap. XXIII.

Doroth., lib. II, tom. XI Bibliot. Patrum, p. 766. 6 Damascen., de lis qui in fide dormierunt.

suppléés sur deux manuscrits de la bibliothèque de M. Colbert, par M. Cotelier, dans le troisième tome des Monuments de l'Eglise grecque, à Paris, en 1686. Il y a même quelques chapitres plus amples dans l'édition de M. Cotelier que dans les précédentes, et on dit que l'Histoire Lausiaque est plus grande du double dans certains manuscrits que dans les imprimés. Cette histoire n'a d'abord été imprimée qu'en latin. On en trouve une édition à Paris, en 1504, chez Jean Petit, sous le titre de Paradis d'Héraclide, d'où elle est passée dans le troisième tome des Vies de Lipoman, à Venise, en 1554, in-4°. Elle est sous le même titre dans l'appendice des Vies des Pères, par Rosweyde, à Anvers, en 1615, in-folio, page 705, et distribuée en cinquantehuit chapitres. L'Histoire Lausiaque fut encore imprimée à Cologne, en 1547, dans le Prototique de l'ancienne Eglise, par Thieri Loher. Mais elle n'y est divisée qu'en vingt chapitres. Elle en a trente-trois dans l'édition de Rosweyde, à Anvers, en 1615, in-folio; à Lyon, en 1617, et encore à Anvers, en 1628. L'édition de Gentien Hervet, à Paris, en 1555 et 1570, in-40, contient cent cinquanteun chapitres. Elle fut réimprimée avec les scholies de Laurent la Barre, dans son Histoire chrétienne, en 1583, et dans les Bibliothèques des Pères, par Margarin de la Bigne, en 1589 et 1610, tome VII, et dans le huitième livre des Vies des Pères, par Rosweyde. Meursius en donna le grec en 1616, in-4o, à Leyde. C'est sur cette édition que Frontonle-Duc fit imprimer en grec et en latin de la traduction de Gentien Hervet, l'Histoire Lausiaque, dans le second tome de son supplément à la Bibliothèque des Pères, à Paris, en 1624, après en avoir corrigé le texte grec sur divers manuscrits de la bibliothèque du roi, où cette histoire est même plus ample que dans ceux dont Meursius s'était servi. L'édition de Fronton-le-Duc a été réimprimée avec ses notes dans le treizième tome de la Bibliothèque des Pères, à Paris, en 1644 et 1654. [L'édition la plus complète parut à Florence, 1746, in-folio, tome VIII des œuvres de Meursius, par les soins de Lami. J. Floss a annoté, d'après un manuscrit grec de Vienne, soixante-sept chapitres de l'Histoire Lausiaque, qu'il regarde comme authentiques, Epitres de Macaire d'Egypte, Cologne, 1850. L'édition de J.Floss est reproduite au tome XXXIV de la Patrologie grecque]. On en trouve divers endroits dans les Vies des

Pères, données en français en 1653, par M. d'Andilly.

Ce qu'on lit depuis le quarante-troisième chapitre, jusqu'au soixante-seizième, se trouve presque mot à mot dans l'histoire que Rufin a faite des solitaires; ce qui a donné lieu à quelques-uns de croire que Rufin avait traduit en latin une partie de l'Histoire Lausiaque, et à d'autres que Pallade avait mêlé l'histoire de Rufin avec la sienne. Mais ni l'un ni l'autre ne paraissent vrais. Rufin, qui était mort avant 420, n'a pu traduire en latin une histoire qui n'a été commencée qu'en cette année-là. Il y a d'ailleurs, dans les vingt-deux chapitres dont nous venons de parler, des choses qui sont personnelles à Pallade; en sorte qu'on ne peut dire qu'il les ait transportées de l'histoire de Rufin dans la sienne; par exemple, il dit dans le quarantetroisième chapitre, qu'il était avec Saint Jean de Lycople, lorsque ce saint vit par esprit de prophétie qu'on apportait à Alexandrie les nouvelles de la victoire de Théodose contre Eugène. Il y a donc apparence que les Vies des Pères, écrites par Rufin, sur les Mémoires de Pétrone, ce qu'on établira ailleurs, ayant été traduites en grec, comme on le voit par divers manuscrits, il s'est trouvé des copistes qui, voyant qu'elles traitaient un même sujet, n'ont fait qu'un corps de son histoire et de celle de Pallade. Cela se confirme par une ancienne traduction de Pallade, imprimée dans Rosweyde, à Anvers, en 1615, où toutes les additions, tirées de Rufin, ne se trouvent point. Le Paradis d'Héraclide, imprimé aussi par Rosweyde, est, si l'on en excepte l'ordre des chapitres, la même chose que l'histoire de Pallade, et il y a même des manuscrits où il porte le nom de Pallade, et non d'Héraclide. De plus, l'auteur dit expressément qu'il avait été fait évêque dans la Bithynie ; ce qui convient à Pallade, et non à Héraclide qui fut évêque d'Ephèse.

12. Lausus, qui engagea Pallade à écrire cette histoire, était un homme excellent en toutes choses, d'un esprit éclairé par la science, dont les mœurs étaient réglées par un esprit de paix et de modération, le cœur animé par la piété, et l'âme embrasée de l'amour divin. Il communiquait libéralement aux pauvres ce dont ils avaient besoin; et au lieu de travailler à augmenter ses richesses, il les diminuait avec plaisir en les

1 Append. ad Vit. Patr., pag. 960.

Qui était Lausus?

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