il sépare du baptême toute la confirmation et tout ce qui en dépend, en la même manière que font les Latins, etc. (1). Je déclare premièrement que toute cette querelle que me fait ce savant professeur, est de petite et presque de nulle importance: il n'était pas nécessaire qu'il me demandât avec tant d'ardeur et tant de peine ce que je lui eusse facilement et volontiers accordé, en consentant qu'il croie que la confirma-tion était un rite séparé du baptême. CHAPITRE XI. De la pénitence. S'il y en a qui sèment en ce siècle des opinions dangereuses de la pénitence, c'est Clément qui le fait plus qu'aucun (2). Ce siècle a extrêmement obscurci la doctrine de la pénitence; car ses docteurs ne parlent principalement que de la contrition el de la satisfaction, lorsqu'ils traitent de la pénitence (3). Et que la confession privée ou secrète, par laquelle on révélait les fautes et les pé chés de la pensée, fut en usage, il paraît de quelques endroits de saint Cyprien, où il dit expressément : Dans les péchés médiocres ou moindres, qui ne se commettent pas directement contre Dieu, il est nécessaire de venir à la confession; ce qu'il ordonne de faire fréquemment. De ceux donc qui confessaient ainsi ces péchés plus légers, on en étudiait et on en examinait encore la vie, pour connaître s'ils avaient fait une juste et exacte pénitence, comme il appert de saint Cyprien. Il appert encore du même, que c'était l'usage de leur imposer aussi une satisfaction proportionnée à la qualité de leur faute (4). Ce siècle, non plus que les siècles précédents, n'a ni bien défini la pénitence, ni assez clairement expliqué ses parties (5). De la confession des péchés qui se fait au pasteur. Saint Basile : La révélation des péchés est nécessaire, par la même raison qui nous oblige à découvrir les maladies du corps. Comme donc les hommes découvrent les maladies de leur corps, non à tous indifféremment, mais aux experts qui entendent et professent l'art de les guérir, la révélation aussi des péchés se doit faire à ceux qui les savent guérir... Il est nécessaire que la confession des péchés se fasse à ceux à qui a été confiée la disposition des mystères. C'est de cette manière qu'en ont usé les premiers saints qui ont fait pénitence: l'Evangile dit qu'ils confessèrent leurs péchés à saint JeanBaptiste (6). Il n'y a pas de question sur l'absolution privée, car il est évident qu'on la retient dans nos Eglises et qu'on l'approuve et la soutient (1). (5) Ibid. Centurie 3, ch. 4, p. 58, h. Depuis l'an 200 j'squ'en 300. (4) Ibid., ch. 6. p. 89, a. (3) Ibid. Centurie 4, ch. 4, p. 161. e. Depuis l'au 300 jusqu'en 400. (0) Ibid., ch. 1, p. 13. 6, f. La confession secrète que l'on observe aujourd'hui... me plaft merveilleusement; elle est utile et même nécessaire, et loin de vouloir qu'elle ne soit pas, je me réjouis même de ce qu'elle est dans l'Eglise de Jésus-Christ, puisqu'elle est l'unique remède des consciences affligées (2). C'était autrefois l'usage de l'Eglise de ne point recevoir les pécheurs qu'on appelait tombés, qui revenaient à l'Eglise, sans leur imposer quelque peine pour l'exemple; c'est de cette coutume que sont nées les satisfactions (5). Nous disons aussi que souvent les péchés mê mes sont punis en cette vie par des peines temporelles, ainsi que David, Manassé et plusieurs autres pécheurs ont été punis; et nous enseignons que ces peines sont mitigées par les bonnes œuvres et par une pénitence universelle, comme l'enseigne saint Paul : Si nous nous jugions nous-mêmes, nous ne seplus la pénitence mérita que Dieu chanrions pas jugés par le Seigneur ; et que de geât la sentence qu'il avait donnée de perdre Ninive. Nous avons encore ici, si je ne me trompe, le véritable berceau de cette confession secrète tant pratiquée aujourd'hui par les Latins, et dont cette observation de saint Antoine a été une espèce d'ébauche et de commencement (4). Nous ne nions pas que les anciens pères n'aient connu et loué le commerce secret des fidèles avec leurs pasteurs, dans lequel ceuxci, toutes les fois qu'il importe à leur piété, découvrent à nu leurs péchés à ceux-là, comme ils font aux médecins leurs ulcères et conseil et le remède dont ils ont besoin, cherleurs plaies, leur demandent avec ardeur le chent la consolation et l'absolution, et pour l'obtenir de la miséricorde du Seigneur, implorent le secours de leurs prières et de leur ministère (5). Nous accordons que l'usage de la confession qu'on fait au ministre du Seigneur n'est jamais plus utile que lorsque le fidèle se dispose à la participation de la sainte Cène (6). Ainsi les prélats qui vivaient sous le règne de Charles, s'étant appliqués de leur mouvement et par son ordre à établir la discipline de l'Eglise, renouvelèrent la pénitemps, n'était plus en usage parmi les hom tence publique, qui, par la corruption des mes; et pour la pénitence secrète qu'ils voyaient dans l'usage commun... non seulement ils ne la supprimèrent ni ne la réprimèrent point, mais ils la confirmèrent même par leur approbation et leur autorité (1). L'absolution, dit le cardinal Bellarmin, dissipe les péchés et les fait évanouir, c'est à-dire, en un mot, les remet et les pardonne; qui le nie (2)? Pour moi, je nie que les ministres ne reinettent pas vraiment les péchés. Ils les remettent vraiment, s'ils font bien les fonctions de leur charge. Leur absolution n'est nullement téméraire, quoiqu'elle soit énoncée absolument, puisque la foi et la pénitence de celui qu'ils ab.. solvent leur est connue avec toute la certitude que les hommes en peuvent avoir (3). Si vous l'entendez du pouvoir et du droit, nul ne peut absoudre que celui à qui Dieu a donné ce droit. L'absolution donc de quelque autre n'est point légitime, n'est pas même absolution, puisque celle qui n'est point légitime doit être censée nulle. Ce droit de remettre et de retenir les péchés est conféré, et, pour ainsi le dire, appliqué par les ministres, lorsque, selon le devoir de leur charge, ils annoncent et confèrent de leur bouche la paix et la grâce aux uns, et ôtent aux autres la société et le commerce des fidèles. Jésus-Christ promet que tous les actes de cette sainte et ecclésiastique fonction qu'il leur a donnée pour l'exercer en son nom sur les hommes, ne seront pas moins ratifiés par lui et par son Père, que si le tout avait été proféré de sa bouche sacrée, avait été fait et ordonné par luimême (4). Il faut que les apôtres et les autres pasteurs de l'Eglise, pour s'acquitter de la charge de remettre ou retenir les péchés... connaissent, autant qu'il se peut, la disposition de ceux vers lesquels ils agissent; à savoir s'ils ont la foi et la repentance ou s'ils ne l'ont pas, puisqu'ils sont obligés par l'ordre du souverain de remettre le péché à tous ceux qui ont cette disposition, et de le retenir à tous ceux qui ne l'ont pas, de quelque nature que soient leurs crimes, et quelque grand ou petit qu'en soit le nombre (5). CHAPITRE XII. Du sacrement de l'ordination. Car le vrai sacrement de l'ordre, la vraie ordination, est la vocation à la charge de pasteur (6). Au reste, il y a cette différence entre les sacrements qui se donnent dans l'Eglise par le ministère public, et qui, par cette fonction divine, confèrent la grâce aux fidèles, que quelques-uns, comme le baptême, l'ordre, l'eucharistie et l'absolution, sans lesquels l'Eglise ne subsiste point, sont plus augustes (1) Daillé, de la Confession, liv. IV, ch. 40, p. 543, 544. (2) Ibid. liv. 1, ch. 6, p. 32. Ibid., Ce passage est remarquable contre quelques-uns des protestants qui se scandalisent mal à propos de ces termes: Et ego te absolvo. (4) Ibid., liv. 1, ch. 7, pag. 38. (5) Daillé, contre Adam et colliby, p. 1, p. 45. (6) Luther. De la messe privée et de l'onction des prétres, tom VII, p. 242. et plus importants que les autres qui ont été donnés et institués pour être même les symboles sacrés du soulagement et de la guérison de l'infirmité humaine, mais qui ne sont pas nécessaires comme ces premiers, quoiqu'ils soient très-utiles et nécessaires lorsqu'on les administre et qu'on les reçoit religieusement et dévotement (1). Il est nécessaire que les pasteurs soient ordonnés par les pasteurs (2). Quant à l'imposition des mains pour introduire les vrais prêtres et ministres de l'Eglise en leur état, je ne répugne point qu'on ne la reçoive pour sacrement, car c'est une cérémonie prise de l'Ecriture pour le premier, et puis laquelle n'est point vaine, comme dit saint Paul, mais est un signe de la grâce spirituelle de Dieu (3). CHAPITRE XIII. Du sacrement du mariage. Le mariage s'appelle sacrement, car il est le type d'une chose très-noble et très-sainte, c'est-à-dire de l'union de la nature divine avec la nature humaine en Jésus-Christ (4). C'est pourquoi que les personnes mariées considèrent et respectent la dignité de ce sa crement. De plus, le sacrement de mariage n'appartient qu'aux chrétiens qui savent que le mariage qui se fait et se contracte au nom de Dieu et de Jésus-Christ, est l'union sainte et constante d'un seul homme avec une seule femme, étant confirmée par la bénédiction et la consécration de Jésus-Christ... ce qui ne se trouve point de cette sorte aux mariages des infidèles (5). Ceux qui doutent que le mariage soit un sacrement ou que l'Église puisse dispenser ès degrés établis dans le Lévitique... choses, comme chacun voit, de nulle ou de très-petite importance à la piété, etc. (6). CHAPITRE XIV. La foi est une certaine assurance qu'un chacun vrai chrétien doit avoir que Dieu le Père l'aime à cause de Jésus-Christ (3). Au 10. article, ils s'échauffent contre la vaine confiance des hérétiques, voire selon leur dire. Or cette confiance est que nous tenons pour une chose conclue que nos péchés nous sont pardonnés, et nous reposons en cette certitude (4). Le diable n'a nulle plus griève tentation pour ébranler les fidèles que quand, les inquiétant du doute de leur élection, il les sollicite de la chercher hors de la voie (5). Mais quelqu'un dira qu'il nous faut soucier de ce qui nous peut avenir, que notre imbécillité nous admoneste d'être en sollicitude... Finalement, l'expérience nous montre que la foi et la vocation n'est guère, sinon que la persévérance soit conjointe, laquelle n'est pas donnée à tous je réponds que Christ nous a délivrés de cette perplexité; car il n'y a doute que ces promesses n'appartiennent au temps futur. Qu'est-ce que nous a voulu ici apprendre Christ, sinon de nous acertainer que nous aurons salut éternel, puisque nous avons une fois été faits siens (6)? La foi donc justifiante et la confiance ou l'assurance sont une même chose, ou certainement ne sont que peu différentes entre elles. Car la foi justifiante est un acquiescement certain et indubitable aux promesses de Dieu pour recevoir la rémission des péchés et la justice, et obtenir de Dieu la vie éternelle par et à cause de Jésus-Christ, son Fiis, excité et produit en nous par l'inspiration du Saint-Esprit. Et qu'est-ce que la confiance? C'est une très-certaine persuasion de la vérité des promesses de Dieu, par laquelle nous ne doutons point que nous n'obtenions tout ce qu'il nous a absolument promis par sa grâce; car se confier, c'est la même chose que croire fermement et espérer sans aucun doute de recevoir de quelqu'un ce qu'il vous a promis, ou être assuré des choses promises à cause de la vérité du prometteur (1). Mais si par la confiance ou l'assurance on entend la persuasion d'avoir le pardon de ses péchés, passés ou futurs, commis ou à commettre, je dis que la foi peut être sans cette assurance (2). La foi est une certaine et forte persuasion que tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu est véritable, et une ferme assurance que, selon les promesses de l'Evangile, si nous croyons en Jésus-Christ, nous ne périrons point, mais nous aurons la vie éternelle (3). Il faut distinguer la confiance en deux espèces, ou pour mieux dire, en deux actes. Par le premier acte de confiance on regarde Dieu comme l'auteur du salut des humains... Le second acte de confiance est celui par lequel on ne regarde pas Dieu simplement d'un œil d'espérance, comme celui qui nous a effectivement sauvés et nous peut sauver; mais avec un sentiment de jouissance comme celui qui nous a pardonné nos péchés. La première confiance est nécessaire à l'homme pour le mettre en état de grâce... Mais pour l'autre acte de confiance, par lequel on regarde Dieu comme celui qui nous a déjà effectivement et actuellement délivrés, il n'est pas de la même nécessité de l'avoir au souverain degré pour être en état de grâce. Cette parfaite et achevée confiance est plutôt de la perfection du vrai fidèle, que de son essence. Un homme, sans avoir cette parfaite assurance de son salut, peut bien être vrai fidèle, mais non parfait fidèle (4). (1) Zanchius, tom. IV, ch. 12, tit. de Fiducia. (2) Wittichius, professeur de Leyde, Theologie pacifique, ch. 11, § 139, p. 109. (3) Catéchisme qu'on dit être de M. Juricu, et qui se vend à Metz, par Antoine Rousselet. (4) M. Jurieu, Apologie pour la morale des Réform:ca liv. ill, ch. 1, p. 360. PREUVES DE CE QUI A ÉTÉ DIT TOUCHANT L'EUCHARISTIE, SOIT DANS LE TRAITÉ GÉNÉRAL, SOIT DANS LA RELATION LATINE. OXXOO CHAPITRE I. De l'opposition des luthériens aux calvinistes sur le sujet de l'eucharistie, et de leur haine irréconciliable pour tous ceux qu'ils nomment sacramentaires. Je ne veux ni ne puis nier, que si Carlostad ou quelque autre eût pu me persuader il y a cinq ans qu'il n'y a que du pain et du vin dans le sacrement de l'eucharistie, il ne m'eût rendu un grand office; car je me tuais à discuter cette matière par les soins pénibles que j'y apportais. Je tendis tous mes nerfs, et fis tous mes efforts pour me tirer d'embarras, comprenant fort bien que je pourrais par ce moyen principalement incommoder le papat. J'avais encore deux hommes qui m'écrivaient sur cette question avec plus d'habileté et de finesse que n'a fait Carlostad, et sans tordre les paroles, comme lui, par leur propre caprice. Mais enfin je me vois pris, sans qu'il me reste aucun moyen d'échapper car les paroles de l'Evangile sont trop claires et trop fortes pour pouvoir être facilement ébranlées, et moins encore renversées par des expressions et des gloses convaincues de vertige et d'entêtement. Si aujourd'hui même quelqu'un pouvait me faire croire par un passage formel de l'Ecriture qu'il n'y a que du pain et du vin dans le sacrement, il ne faudrait pas s'emporter autant qu'on fait contre moi: car, hélas! autant que je puis me connaître moi-même et ma faiblesse d'Adam, je n'ai que trop de penchant pour cette opinion (1). C'est certainement une chose digne d'admiration, que nul des pères, dont le nombre est infini, n'ait parlé du sacrement de l'eucharistie, comme les sacramentaires : car il n'y en a pas un qui se soit énoncé en ces termes : C'est du pain et du vin seule ment; ou : Le corps et le sang de Jésus-Christ n'y sont point présents. En vérité il n'est pas croyable, ni même possible, qu'en touchant et retouchant tant de fois cette matière, il ne leur soit échappé quelquefois, ou pour le moins une fois, de dire ces paroles : C'est du pain pur; ou Le corps de Jésus-Christ n'y est point présent corporellement; ou d'autres termes semblables: d'autant plus qu'il importe extrêmement que les hommes ne soient pas séduits en chose semblable. Cependant tous les pères en parlent aussi précisément, que si nul d'eux ne doutait que le corps et le sang de Jésus-Christ n'y soient présents. En effet de tant de pères et de tant d'écrits qu'ils nous ont laissés, quelques-uns, ou du (1) Luther, Lettres à ses très-chers en Jésus-Christ, amis et.ch étiens de strasbourg. moins un seul, eût pu exprimer l'opinion négative; mais tous unanimement et constamment prononcent d'une voix l'affirmative. Nos sacramentaires au contraire, avec tous leurs efforts, ne font bruit que de la négative. Pour dire donc tout en un mot, OEcolampade n'a puisé son opinion ni dans l'Ecriture, ni dans les pères (1). Nous soutenons clairement que, comme les paroles le disent, le corps et le sang de Jésus-Christ sont présents, lorsqu'il dit : Prenez, mangez, ceci est mon corps... Mais nos adversaires soutiennent clairement que le seul pain et le seul vin sont présents, et non pas le corps et le sang de Jésus-Christ. S'ils se trompent en croyant et en enseignant cela, il est certain qu'ils blasphèment contre Dieu, accusent de mensonge le Saint-Esprit, trahissent Jésus-Christ et séduisent tout le monde. Il faut, de nécessité, que le diable soutienne contre Dieu l'une ou l'autre de ces deux opinions; il n'y a point de milieu (2). Mais vous le dites. Et qui autre que le diable vous pourrait donner cette licence de mettre en pièces l'Ecriture? En effet, je ne crois pas qu'aucun autre la donnât que le diable, qui en a fait présent à Zuingle et à OEcolampade. Qui jamais, je vous en prie, a lu dans l'Ecriture que (le corps) soit la même chose que (le signe du corps), et que ce mot (est) soit la même chose que (signifie)? Voire même quelle langue dans tout le mon de s'est-elle ainsi jamais énoncée? En vérité, pour moi je n'en connais point d'autre raison, sinon que le diable dans les transports de son orgueil excessif et de sa malice oisive, veut se jouer de nous par le ministère de ces gens fanatiques dans cette question épineuse, lorsqu'il proteste d'acquiescer au tétémoignage et au jugement de l'Ecriture, et que cependant il met auparavant l'Ecriture à l'écart, et la transforme en son sens (3). Sans nul doute l'esprit variant des sacramentaires n'est autre que le diable (4). A peine ai-je jamais lu une hérésie plus horrible que celle des sacramentaires (5). Si les suermeriens, les zuingliens et leurs semblables déjà condamnés me louent ou me blâment, c'est comme si les Juifs, les Turcs, le pape, et tous les diables me louaient ou me blâmaient (6). (1) Luther, Défenses des paroles de la Cène, tom. II p. 391, de l'édition de Wittemberg. (2) Ibid., p. 382. (3) Ibid., p. 381. (4) Ibid, p. 411. (3) Ibid., p. 380. (6) Luther en sa petite Confession, rapportée par Hosp nien, 2 part. de l'Histoire des sacramentaires, p. 187. Et de fait aucuns aiment mieux avec leur grande honte découvrir leur ignorance que de décliner tant peu que ce soil de leur erreur; je ne parle point des papistes dont la doctrine est plus supportable, ou pour le moins mieux colorée mais il y en a qui sont transportés de telle ardeur, qu'ils n'ont honte de dire, qu'à cause de l'union des deux natures, partout où est la divinité de JésusChrist, sa chair y est aussi bien (3). Pour certain, à prendre les mots en leur simple significatiou, cela ne peut consister, sinon que le pain devienne le corps de Christ. Les papistes avaient meilleure couleur, par le moyen de leur transsubstantiation, de s'exempter de cette nécessité de prendre d'ailleurs exposition des mots. Mais celui qui conteste que le pain et le corps sont diverses choses, comment pourra-t-il faire qu'il n'y ait quelque figure en ces mots : Ceci est mon corps? Et puis quand le calice est appelé sang, n'ont-ils pas une réponse toute faite, que ce qui contient, est pris pour la chose contenue (4)? Sitôt qu'on a commencé à découvrir cette erreur tant lourde et grossière, que Christ était au pain, Satan se réveillant a tout brouillé, afin que la vérité ne vint en lumière (5). Nous reprenons les luthériens de ce qu'ils parlent et croient plus grossièrement que les papistes, touchant la présence réelle (6). Je ne dis rien ici que ce que les catholiques ont accoutumé d'alléguer. Jésus-Christ a dit: Ceci est mon corps. Donc il est nécessaire que ce soit le corps même de JésusChrist. Si donc il faut prendre pour un verbe substantif ou proprement ce mot (est) on ne saurait s'empêcher de reprocher une audace et une insigne témérité à l'opinion des luthériens, qui, posant que le pain y est en effet, nient absolument la transsubstantiation, par laquelle les catholiques disent que la substance du pain est changée en la substance de la chair de Jésus-Christ. Or voici la raison de notre proposition... Si donc il faut prendre pour un verbe substantif le mot (est) comme les luthériens le soutiennent fortement, il est impossible que la substance du pain ne soit convertie en la substance même de la chair de Jésus-Christ. Ce qui était donc auparavant du pain ne l'est plus; et l'opinion des luthériens, qui disent que la sub→ stance du pain demeurant sans être changée, on mange néanmoins substantiellement la chair de Jésus-Christ sous le pain, est plus trompeuse que celle des catholiques (1). Nous disons aussi que les papistes après avoir entendu sans figure ces paroles, Ceci est mon corps, croient avec plus de raison que la divinité suit le corps par concomitance que vous autres luthériens, qui niant les paroles de la concomitance en retenez néanmoins le sens (2). Le dogme de la consubstantiation est plus éloigné que celui de la transsubstantiation des paroles de Jésus-Christ, soit qu'on en considère la lettre ou le sens (3). Nous avons toujours argumenté, quant à nous, que si Christ est au pain, c'est donc sous le pain qu'il le faut adorer (4). Il ne peut nier qu'il ne faille adorer Christ au pain ou sous le pain: car certes en quelque lieu qu'il soit, il ne sera pas licite de le frauder de son honneur et service. Qu'y a-t-il de plus étrange que de le mettre au pain et ne l'adorer pas là (5) ? Car si Jésus-Christ est dans le sacrement, pourquoi ne pèchent point ceux qui ne l'y adorent pas (6)? Jésus-Christ n'est nulle part, qu'il ne faille l'y adorer: car partout où Dieu est, il faut l'y adorer. L'élévation du sacrement de l'Eucharistie, l'adoration, le transport qui s'en fait aux processions et sa réservé sont les compagnes et les suites inséparables du pain transélémenté au corps réel et substantiel de JésusChrist (7). Nous sommes obligés d'obéir sans exception à ce qui nous est ordonné de Dieu par un commandement général sans en attendre un particulier, parce qu'il y aurait lui-même mis l'exception comme il nous commande en général de faire du bien à notre prochain et d'honorer nos magistrats; et si quelqu'un laissait périr son prochain et ne voulait pas honorer son magistrat quand il le rencontre dans son chemin ou dans un temple, sous prétexte que Dieu ne lui a point recommandé ces devoirs en tels lieux et en telles rencontres; il n'y a point d'homme bien sensé qui trouvât ce discours raisonnable (8). |