par leur approbation et leur autorité (1). L'absolution, dit le cardinal Bellarmin, dissipe les péchés et les fait évanouir, c'està-dire, en un mot, les remet et les pardonne; qui le nie (2)? Pour moi, je nie que les ministres ne reinettent pas vraiment les péchés. Ils les remettent vraiment, s'ils font bien les fonctions de leur charge. Leur absolution n'est nullement téméraire, quoiqu'elle soit énoncée absolument, puisque la foi et la pénitence de celui qu'ils ab solvent leur est connue avec toute la certitude que les hommes en peuvent avoir (3). Si vous l'entendez du pouvoir et du droit, nul ne peut absoudre que celui à qui Dieu a donné ce droit. L'absolution donc de quelque autre n'est point légitime, n'est pas même absolution, puisque celle qui n'est point légitime doit être censée nulle. Ce droit de remettre et de retenir les péchés est conféré, et, pour ainsi le dire, appliqué par les ministres, lorsque, selon le devoir de leur charge, ils annoncent et confèrent de leur bouche la paix et la grâce aux uns, et ôtent aux autres la société et le commerce des fidèles. Jésus-Christ promet que tous les actes de cette sainte et ecclésiastique fonction qu'il leur a donnée pour l'exercer en son nom sur les hommes, ne seront pas moins ratifiés par lui et par son Père, que si le tout avait été proféré de sa bouche sacrée, avait été fait et ordonné par luimême (4). Il faut que les apôtres et les autres pasteurs de l'Eglise, pour s'acquitter de la charge de remettre ou retenir les péchés... connaissent, autant qu'il se peut, la disposition de ceux vers lesquels ils agissent; à savoir s'ils ont la foi et la repentance ou s'ils ne l'ont pas, puisqu'ils sont obligés par l'ordre du souverain de remettre le péché à tous ceux qui ont cette disposition, et de le retenir à tous ceux qui ne l'ont pas, de quelque nature que soient leurs crimes, et quelque grand ou petit qu'en soit le nombre (5). CHAPITRE XII. Du sacrement de l'ordination. Car le vrai sacrement de l'ordre, la vraie ordination, est la vocation à la charge de pasteur (6). Au reste, il Ꭹ a cette différence entre les sacrements qui se donnent dans l'Eglise par le ministère public, et qui, par cette fonction divine, confèrent la grâce aux fidèles, que quelques-uns, comme le baptême, l'ordre, l'eucharistie et l'absolution, sans lesquels l'Eglise ne subsiste point, sont plus augustes Daillé, de la Confession, liv. IV, ch. 40, p. 543, 544. (2) Ibid. liv. 1, ch. 6, p. 32. (3) Ibid., Ce passage est remarquable contre quelques uns des protestants qui se scandalisent mal à propos de ces termes : Et ego te absolvo. 44) Ibid., liv. 1, ch. 7, pag. 38. (5) Daillé, contre Adam et Colliby, p. 1, p. 45. (6) Luther. De la messe privée et de l'onction des prétres, tom. VII, p. 242. et plus importants que les autres qui ont été donnés et institués pour être même les symboles sacrés du soulagement et de la guérison de l'infirmité humaine, mais qui ne sont pas nécessaires comme ces premiers, quoiqu'ils soient très-utiles et nécessaires lorsqu'on les administre et qu'on les reçoit religieusement et dévotement (1). Il est nécessaire que les pasteurs soient ordonnés par les pasteurs (2). Quant à l'imposition des mains pour introduire les vrais prêtres et ministres de l'Eglise en leur état, je ne répugne point qu'on ne la reçoive pour sacrement, car c'est une cérémonie prise de l'Ecriture pour le premier, et puis laquelle n'est point vaine, comme dit saint Paul, mais est un signe de la grâce spirituelle de Dieu (3). De plus, le sacrement de mariage n'appartient qu'aux chrétiens qui savent que le mariage qui se fait et se contracte au nom de Dieu et de Jésus-Christ, est l'union sainte et constante d'un seul homme avec une seule femme, étant confirmée par la bénédiction et la consécration de Jésus-Christ... ce qui ne se trouve point de cette sorte aux mariages des infidèles (5). Ceux qui doutent que le mariage soit un sacrement ou que l'Eglise puisse dispenser ès degrés établis dans le Lévitique... choses, comme chacun voit, de nulle ou de très-petite importance à la piété, etc.(6). CHAPITRE XIV. Du sacrement de l'extrême-onction. Concile de Châlons-sur-Saône : Selon l'enseignement de l'apôtre saint Jacques et les décrets des saints pères aussi, qui y sont conformes, il faut que les prêtres oignent les malades de l'huile que l'évêque a bénie. (Jac. V, 14). Et conséquemment il ne faut pas faire peu d'état de cette médecine, qui guèril les infirmités de l'âme et du corps (7). (1) Melanchthon, Actes de Ratisbonne, art. 11, du sacremeni de l'ordre, qui fut approuvé des protestants soms contradictions, tom. IV, p. 713. (2) Melanchthon, Disputationes, tom. IV, p. 505, ex Ep. Pauli Tit. et 1. Tim. (3) Calv. Institut. en français, liv. IV, ch. 19, § 28. (4) Luther, art. 13, du mariage, tom. 1, p. 91. (5) Melanchthon, Acles de Ratisbonne, art. 16, du sacremeni de mariage, approuvé des protestants sans contradic tion, tom. IV, p. 716. (6) Daillé, pol., p. 53. (7) Les Centuriateurs de Magdebourg, ch. 6, p. 204. D. L'an 700 jusqu'en 800. Remarquez qu'il n'est pas question de prouver l'antiquité de l'extrême-onction, car on convient qu'elle étant du temps des apôtres; mais il faut prouver qu'elle a continué dans l'Eglise jusqu'à nous. Ce que les centuriateurs reconnaissent dans ce passage. 7 Je confesse bien que les disciples de JésusChrist ont usé de l'extrême-onction comme d'un sacrement (car je ne suis pas du sentiment de ceux qui croient que ce fût un médicament) (1). Premièrement posé que l'extrême-onction soit plus ancienne que le schisme des grecs et des latins, il ne s'ensuit pourtant pas de là que ce sacrement ait été ou institué de Jésus-Christ, o' pratiqué par l'Eglise des quatre premiers siècles (2). SECTION IX. Art. VI, pag. 67. La foi est une assurance certaine, etc. Preuve de ce qui est dit en cet endroit, que le principe de nos frères séparés porte la certitude du salut plus loin que le nôtre, qu'il confond la foi et l'espérance, que leurs derniers auteurs en paraissent embarrassés. La foi est une certaine assurance qu'un chacun vrai chrétien doit avoir que Dieu le Père l'aime à cause de Jésus-Christ (3). Au 10. article, ils s'échauffent contre la vaine confiance des hérétiques, voire selon leur dire. Or cette confiance est que nous tenons pour une chose conclue que nos péchés nous sont pardonnés, et nous reposons en cette certitude (4). Le diable n'a nulle plus griève tentation pour ébranler les fidèles que quand, les inquiétant du doute de leur élection, il les sollicite de la chercher hors de la voie (5). Mais quelqu'un dira qu'il nous faut soucier de ce qui nous peut avenir, que notre imbécillité nous admoneste d'être en sollicitude... Finalement, l'expérience nous montre que la foi et la vocation n'est guère, sinon que la persévérance soit conjointe, laquelle n'est pas donnée à tous je réponds que Christ nous a délivrés de cette perplexité; car il n'y a doute que ces promesses n'appartiennent au temps futur. Qu'est-ce que nous a voulu ici apprendre Christ, sinon de nous acertainer que nous aurons salut éternel, puisque nous avons une fois été faits siens (6)? La foi donc justifiante et la confiance ou (1) Calvin, Commentaires sur l'Epitre de S. Jacques, ch. V, 14. C'est pourtant la seule réponse que font au passage de S. Jacques la plupart des protestants de France qui fout profession de suivre Calvin. (2) Daillé, de l'Extrême-Onction, ch. 21, p. 147. (5) Catéchisme vulgaire, fait par Théodore de Bèze, qui se vend à Quevilly, par Pierre la Mote. (4) Calvin, dans les actes du concile de Trente, avec le remède contre le poison. Opuscules, p. 949. (5) Calvin, Institution en français, liv. III, ch. 24, § 4. (6) Ibid., § 6. l'assurance sont une même chose, ou certainement ne sont que peu différentes entre elles. Car la foi justifiante est un acquiescement certain et indubitable aux promesses de Dieu pour recevoir la rémission des péchés et la justice, et obtenir de Dieu la vie éternelle par et à cause de Jésus-Christ, son Fils, excité et produit en nous par l'inspiration du Saint-Esprit. Et qu'est-ce que la confiance? C'est une très-certaine persuasion de la vérité des promesses de Dieu, par laquelle nous ne doutons point que nous n'obtenions tout ce qu'il nous a absolument promis par sa grâce; car se confier, c'est la même chose que croire fermement et espérer sans aucun doute de recevoir de quelqu'un ce qu'il vous a promis, ou être assuré des choses promises à cause de la vérité du prometteur (1). Mais si par la confiance ou l'assurance on entend la persuasion d'avoir le pardon de ses péchés, passés ou futurs, commis ou à commettre, je dis que la foi peut être sans cette assurance (2). La foi est une certaine et forte persuasion que tout ce qui est contenu dans la parole de Dieu est véritable, et une ferme assurance que, selon les promesses de l'Evangile, si nous croyons en Jésus-Christ, nous ne périrons point, mais nous aurons la vie éternelle (3). Il faut distinguer la confiance en deux espèces, ou pour mieux dire, en deux actes. Par le premier acte de confiance on regarde Dieu comme l'auteur du salut des humains... Le second acte de confiance est celui par lequel on ne regarde pas Dieu simplement d'un œil d'espérance, comme celui qui nous a effectivement sauvés et nous peut sauver; mais avec un sentiment de jouissance comme celui qui nous a pardonné nos péchés. La première confiance est nécessaire à l'homme pour le mettre en état de grâce... Mais pour l'autre acte de confiance, par lequel on regarde Dieu comme celui qui nous a déjà effectivement et actuellement délivrés, il n'est pas de la même nécessité de l'avoir au souverain degré pour être en état de grâce. Cette parfaite et achevée confiance est plutôt de la perfection du vrai fidèle, que de son essence. Un homme, sans avoir cette parfaite assurance de son salut, peut bien être vrai fidèle, mais non parfait fidèle (4). (1) Zanchius, tom. IV, ch. 12, tit. de Fiducia. (2) Wittichius, professeur de Leyde, Theologie pacifique, ch. 11, § 139, p. 109. (3) Catéchisme qu'on dit être de M. Jurieu, et qui se vend à Metz, par Antoine Rousselet. (4) M. Jurieu, Apologie pour la morale des Réform:ca liv. ill, ch. 1, p. 360. C'est assez pour moi qui suis le plus malbeureux de tous les hommes, de cette unique béatitude du Psalmiste: Heureux est l'homme qui n'est point entré au conseil des sacramentaires, qui ne s'est point arrêté au chemin des zuingliens, et qui ne s'est point assis dans la chaire des zurigiens (1). Car qui oserait rendre en latin ces paroles prodigieuses? Les zuingliens out un cœur méchant, endiablé, perdiablé et transdiablé (2). CHAPITRE II. De l'opposition des calvinistes aux luthériens; qu'ils disent que l'opinion de Luther est une erreur plus grossière que celle de l'Eglise romaine. Et de fait aucuns aiment mieux avec leur grande honte découvrir leur ignorance que de décliner tant peu que ce soit de leur erreur; je ne parle point des papistes dont la doctrine est plus supportable, ou pour le moins mieux colorée mais il y en a qui sont transportés de telle ardeur, qu'ils n'ont honte de dire, qu'à cause de l'union des deux natures, partout où est la divinité de JésusChrist, sa chair y est aussi bien (3). Pour certain, à prendre les mots en leur simple significatiou, cela ne peut consister, sinon que le pain devienne le corps de Christ. Les papistes avaient meilleure couleur, par le moyen de leur transsubstantiation, de s'exempter de cette nécessité de prendre d'ailleurs exposition des mots. Mais celui qui conteste que le pain et le corps sont diverses choses, comment pourra-t-il faire qu'il n'y ait quelque figure en ces mots : Ceci est mon corps? Et puis quand le calice est appelé sang, n'ont-ils pas une réponse toute faite, que ce qui contient, est pris pour la chose contenue (4)? Sitôt qu'on a commencé à découvrir cette erreur tant lourde et grossière, que Christ était au pain, Satan se réveillant a tout brouillé, afin que la vérité ne vînt en lumière (5). Nous reprenons les luthériens de ce qu'ils parlent et croient plus grossièrement que les papistes, touchant la présence réelle (6). Je ne dis rien ici que ce que les catholiques ont accoutumé d'alléguer. Jésus-Christ a dit: Ceci est mon corps. Donc il est nécessaire que ce soit le corps même de JésusChrist. Si donc il faut prendre pour un verbe substantif ou proprement ce mot (est) on ne saurait s'empêcher de reprocher une audace et une insigne témérité à l'opinion des luthériens, qui, posant que le pain y est en effet, nient absolument la transsubstantiation, par laquelle les catholiques disent que la substance du pain est changée en la substance de (1) Luther, de l'Apologie de ceux de Zurich au ministre de l'Eglise de Brême. Hospinien, 2′ part. de l'Histoire sacramentaire, p. 199. (2) Hospiaien, 2 part. de l'Histoire sacramentaire, p. 187. Luther, en sa Petite Confession. (5) Calvin, institution en français, liv. IV, ch. 17, § 30. (4) Calvin, Opuscules, seconde défense contre Westphul., p. 1520. (5) Ibid., p. 1551. (6) Ibid., p. 829. la chair de Jésus-Christ. Or voici la raison de notre proposition... Si donc il faut prendre pour un verbe substantif le mot (est) comme les luthériens le soutiennent fortement, il est impossible que la substance du pain ne soit convertie en la substance même de la chair de Jésus-Christ. Ce qui était donc auparavant du pain ne l'est plus; et l'opinion des luthériens, qui disent que la sub→ stance du pain demeurant sans être changée, on mange néanmoins substantiellement la chair de Jésus-Christ sous le pain, est plus trompeuse que celle des catholiques (1). Nous disons aussi que les papistes après avoir entendu sans figure ces paroles, Ceci est mon corps, croient avec plus de raison que la divinité suit le corps par concomitance que vous autres luthériens, qui niant les paroles de la concomitance en retenez néanmoins le sens (2). Le dogme de la consubstantiation est plus éloigné que celui de la transsubstantiation des paroles de Jésus-Christ, soit qu'on en considère la lettre ou le sens (3). Nous avons toujours argumenté, quant à nous, que si Christ est au pain, c'est donc sous le pain qu'il le faut adorer (4). Il ne peut nier qu'il ne faille adorer Christ au pain ou sous le pain: car certes en quelque lieu qu'il soit, il ne sera pas licite de le frauder de son honneur et service. Qu'y a-t-il de plus étrange que de le mettre au pain et ne l'adorer pas là (5) ? Car si Jésus-Christ est dans le sacrement, pourquoi ne pèchent point ceux qui ne l'y adorent pas (6)? Jésus-Christ n'est nulle part, qu'il ne faille l'y adorer: car partout où Dieu est, il faut l'y adorer. L'élévation du sacrement de l'Eucharistie, l'adoration, le transport qui s'en fait aux processions et sa réserve sont les compagnes et les suites inséparables du pain transélémenté au corps réel et substantiel de JésusChrist (7). Nous sommes obligés d'obéir sans exception à ce qui nous est ordonné de Dieu par un commandement général sans en attendre un particulier, parce qu'il y aurait lui-même mis l'exception comme il nous commande en général de faire du bien à notre prochain et d'honorer nos magistrats; et si quelqu'un laissait périr son prochain et ne voulait pas honorer son magistrat quand il le rencontre dans son chemin ou dans un temple, sous prétexte que Dieu ne lui a point recommandé ces devoirs en tels lieux ef en telles rencontres; il n'y a point d'homme bien sensé qui trouvât ce discours raisonnable (8). (1) Zuingle, de la cène, tom. II, p. 275. (2) Ibid., p. 346. (3) Hospinien, Préface de la seconde partie de l'Histoira sacramentaire. (4) Calvin contre Heshusius, Opuscules, p. 1706. (5) Hid., p. 1749. (6) Zuingle, Exposition de l'Eucharistie à Luther. (7) Hospinien, en sa préface de la seconde partie de P'Histoire sacramentuare. (8) Ursin, calviniste, professeur en théologie à Heilek berg, in confirm. Doctr. de Sacram., p. 431, 455, 456. |