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les ont été les règles de leur conduite; pour Vous accoutumer à suivre les mêmes routes, à marcher fidèlement dans la loi de Dieu, et enfin à mener une vie digne du renouvellement que vous avez reçu dans le baptême, il est temps de vous expliquer les mystères et les sacrements. C'est ce que nous n'aurions pu faire sans imprudence avant votre régénération; et ç'aurait moins été vous en instruire, que les exposer indiscrètement à la profanation des infidèles. Il arrivera même que la lumière et la grandeur de ces mystères vous frapperont d'un éclat plus vif quand ils vous seront tout d'un coup ouverts, que si vous en aviez déjà quelque connaissance confuse. Soyez donc attentifs, je vous prie, et respirez cette bonne odeur de la vie éternelle que répand en vous la vertu des sacrements; et que nous avons marquée par ce mot ephpheta, qui signifie ouvrez-vous; par lequel en effet on vous a ouvert le cœur et l'esprit, afin que chacun de vous sût ce qu'on lui devait demander et ce qu'il avait à répondre. C'est ce même mystère qui nous est représenté dans saint Marc (Marc, VII, 32), lorsque Jésus-Christ, en touchant de sa salive la langue d'un homme sourd et muet, lui rendit l'usage de la voix ; et, remarquez en passant qu'il voulut que ce fût un homme, parce que autrement il aurait paru quelque indécence dans cette action.

CHAPITRE II.

Après cela, le sanctuaire vous a été ouvert, et vous avez été reçus dans le sacré baptistaire. Remettez-vous dans l'esprit ce qu'on vous a demandé, et souvenez-vous de vos réponses. Vous avez renoncé au diable et à ses œuvres, aux vanités du siècle et à toutes ses délices, et vos paroles sont gravées, non sur des tombeaux de morts, mais dans le livre de vie. Vous avez vu le diacre, le prêtre et le grand-prêtre même; mais ne vous arrêtez pas à la figure extérieure des corps: pénétrez jusqu'à ce qu'il y a de mystérieux et de caché; songez que c'est devant les anges que vous avez parlé; car la bouche du prêtre est le dépôt de la science de Dieu; c'est de lui qu'on doit recevoir l'intelligence de la loi, et par là il est l'ange du Dieu des armées (Malac. II, 7). Vous ne sauriez tromper ni désavouer ce que vous avez promis en sa présence. C'est un ange qui annonce le règne de Jésus-Christ et la vie éternelle. Regardez le par sa fonction et non pas par sa figure; voyez ce qu'il vous donne, considérez l'usage que vous en devez faire, et reconnaissez-en la dignité. Après que vous avez été reçus dans ce lieu, vous avez regardé (comme pour la dernière fois) l'ennemi auquel vous alliez renoncer; et vous vous êtes tournés à l'Orient, parce que celui qui renonce au démon se doit tourner vers Jésus-Christ, et ne le perdre jamais de vue.

CHAPITRE III.

Qu'est-ce que vous avez vu dans ce lieu? De l'eau, il est vrai, mais bien d'autres choses encore. Il y avait des diacres pour le ser

vice du pontife, qui faisait des prières et des consécrations. Or, avant toutes choses, l'A pôtre nous avertit de ne nous point arrêtez aux choses visibles (II Cor., IV, 18), mais d'aller jusqu'à celles que nous ne voyons point, parce que les première ne durent qu'un temps et que les invisibles sont éternelles. Et comme il dit ailleurs : Les grandeurs invisibles de Dieu, sa puisance éternelleet sa divinité se font connaitre par ses ouvrages (visibles), depuis la création du monde (Rom., I, 10). D'où vient aussi que Notre-Seigneur disait aux Juifs: Si vous ne me croyez pas, croyez du moins à mes œuvres (Jean, X, 38). Croyez donc pareillement que Dieu est présent à ce mystère. Pouvez-vous croire qu'il y opère sans y être présent? et n'est-il pas certain que son opération suppose sa présence? Remarquez au reste combien ce mystère est ancien, puisque nous en avons une figure dès l'origine même du monde : Au commencement, quand Dieu créa le ciel et la terre, l'Esprit était porté sur les eaux (Gen., I, 2). Mais y était-il sans y rien faire? non sans doute, il y faisait quelque chose. Sa présence est donc marquée en ce qu'il était porté dessus, et pour ce qu'il y faisait, apprenez-le du prophète: Les cieux ont été affermis par les paroles du Seigneur, et tout ce qu'ils ont leur vient du souffle de sa bouche (Ps. XXXII, 6). Vous voyez l'un et l'autre appuyé du témoignage d'un prophète. David nous assure de l'action, et Moïse de la présence. En voulez-vous encore une autre marque? Toute chair était corrompue par le péché; et mon Esprit, dit le Seigneur, ne demeu rera plus parmi les hommes, car ils ne sont que chair (Gen., VI, 3, 11). Par où Dieu nous apprend qu'il détourne son esprit et sa grâce de tous ceux qui tombent en de grands péchés, en suivant la cupidité de la chair. C'est pourquoi voulant réparer cette corruption universelle par le déluge, il fit retirer dans l'arche le juste Noé. Ce patriarche, sur la fin du déluge, lâcha le corbeau qui ne retourna plus, et ensuite la colombe qui revint avec une branche d'olivier. Vous voyez là de l'eau, du bois, une colombe, et vous pouvez bien penser que tout cela n'est pas sans mystère. Cette eau ne représente autre chose que le baptême, où la chair doit être lavée et nettoyée de tout péché. C'est là que sont noyés et ensevelis tous les vices. Ce bois est la croix de Notre-Seigneur, sur laquelle il a expiré pour nous. La colombe marque le SaintEsprit qui s'est montré sous cette figure. comme on voit dans le Nouveau Testament; c'est lui qui met la paix dans votre âme et la tranquillité dans votre cœur. Et le corbeau est l'image du péché, qui s'en va pour ne re venir jamais, tant que vous conserverez le caractère de la justice. Nous avons encore un autre témoignage dans saint Paul: Nos pères, dit-il, ont tous été sous la nuée, ils ont tous passé la mer (Rouge), ils ont tous été baptisés sous Moise, dans la nuée et dans la mer (I Cor., X, 1). Et c'est enfin ce que dit Moïse même dans son Cantique: Vous avez envoyé votre Esprit, et la mer les a engloutis (Exode, XV.

ment.) Qu'est-ce que cette jeune captive, si-
non cette nouvelle assemblée de Gentils, qui
forme l'Eglise du Seigneur? Elle gémissait
autrefois sous la captivité du péché, n'ayant
pas encore reçu la liberté de la grâce. Mais
depuis que ce peuple infidèle, inspiré par
cette même grâce, a quitté ses vanités pour
croire les oracles des prophètes, dont il avait
douté si longtemps, et qu'il a mis leurs in-
structions en pratique, il s'est incontinent vu
délivré de tous ses vices. Ce lépreux a douté
quelque temps avant sa guérison. Mais pour
vous, qui avez l'avantage d'être déjà guéris,
vous n'avez plus lieu de douter.

CHAPITRE IV.

Quand je vous ai dit qu'il ne fallait pass'arrêter seulement à l'objet de nos sens, c'est afin que vous ne veniez pas dire: Estce donc là ce grand mystère que l'oreille n'a point oui, que les yeux n'ont point vu, et qui n'est point monté au cœur de l'homme (I Cor., XXIX). Je ne vois que de l'eau comme celle que je voyais tous les jours; comment me nettoiera-t-elle plutôt que tant d'autres fois que je m'y suis lavé sans rien voir de pareil? C'est de cela même que vous devez apprendre que l'eau ne peut rien sans le secours de l'esprit. Car, comme vous avez lu dans S. Jean, il y a trois témoins dans le baptême qui n'en sont qu'un, l'eau, le sang et l'esprit (I Jean, V, 8); et si vous ôtez un des trois, ce n'est plus le sacrement du baptême; car qu'est-ce que de l'eau sans le sang de JésusChrist, sinon un élément tout simple sans aucune vertu de grâce? De même aussi sans l'eau il n'y a plus de régénération, puisque si l'on ne reçoit une nouvelle naissance de l'eau et de l'esprit, on n'entrera jamais dans de notre le sang pour le royaume de Dieu. Et Sauveur, le catéchumène marque assez qu'il y croit, quand il fait le signe de la croix. Mais il ne saurait recevoir la grace et la rémission de ses péchés, s'il n'est baptisé au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit. Sous la loi de Moïse, le Syrien se lava sept fois; mais sous celle de la grâce vous avez été baptisés au nom de la Trinité. Vous avez confessé le Père, le Fils et le Saint-Esprit. N'oubliez pas ce que vous avez fait en cette occasion, et suivez l'ordre des choses qui s'y sont passées. Vous y êtes morts au monde, et ressuscités. pour Dieu; et ayant été comme ensevelis dans cette eau, vous y avez acquis une nouvelle naissance pour la vie éternelle. Vous donc voyez que ce n'est pas une eau stérile, sans effet et sans vertu. Aussi savez-vous. que quand l'ange du Seigneur descendait à certain temps dans la piscine, et qu'il en troublait l'eau ( Jean, V, 2); le premier qui entrait dedans après qu'elle avait été troublée, ne manquait point de guérir, quelque maladie qu'il pût avoir. Cette piscine était à Jérusalem, et il ne s'y guérissait qu'un malade par an. Mais cette guérison n'arrivait jamais que l'ange ne fût descendu; et alors l'eau commençait à se mouvoir pour le faire connaître à ceux, qui ne l'auraient pas cru sans ce signe. Il leur fallait des prodiges, et

PREUVES POUR LE TRAITÉ DE L'EUCHARISTIE.

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10). Tellement que le passage de la mer
Rouge, où l'Hébreu se sauve pendant que l'E-
gyptien périt, nous fait voir dès ce temps-là
une figure du baptême. Car n'est-ce pas ce
qui arrive dans ce sacrement, où le péché
meurt et l'erreur est détruite, et où l'inno-
cence et la piété rencontrent leur asile? Nos
pères marchaient sous la nuée, mais une nuée
salutaire qui modérait la chaleur des pas-
sions. C'est cette heureuse et favorable nuée
qui défend et met à couvert ceux dont le
Saint-Esprit s'est rendu le maître; et ce fut
ce Saint-Esprit qui survint dans la sainte
Vierge, et la vertu du Très-Haut, qui la cou-
vrit de son ombre quand elle devint mère de
notre Sauveur. Ce même mystère est encore
figuré par un miracle de Moïse, mais où le
Saint-Esprit n'assiste qu'en figure et non se-
lon la vérité, puisque, comme dit l'Ecriture:
La loi a été donnée par Moïse, mais c'est par
Jésus-Christ que la grâce et la vérité nous ont
été données (Jean, I, 17). Les eaux de la fon-
taine de Mara étaient si amères qu'on ne
pouvait en boire, Moïse y jette un morceau
de bois, et cette amertume se change en
douceur (Exode, XV, 23); c'est-à-dire que
l'eau ne fera rien pour notre salut, si elle
n'est jointe à la vertu de la croix de Jésus-
Christ: mais dès lors qu'elle est sanctifiée par
le mystère de la croix, elle devient propre à
l'usage du baptême et du calice du salut. De
même donc que Moïse jeta du bois dans cette
source amère, ainsi le prêtre bénit ces fonts
sacrés par la vertu de la croix de notre Sau-
veur, et leur donne la douceur de la grâce.
Ne vous en rapportez donc pas seulement à
vos yeux : ce qui se voit le mieux est ce qui
ne se voit point; car l'objet de vos sens n'est
qu'une chose temporelle; et ce qui ne peut
être aperçu que par l'esprit, se voit éternel-
lement. Apprenez-le encore de ce qui est écrit
dans l'histoire des rois. Naaman était un ri-
che seigneur de Syrie infecté d'une lèpre in-
curable (IV Rois, V, 1). Une jeune captive
d'entre les Juifs l'avertit qu'il y avait en Sa-
marie un prophète qui le guérirait assuré-
ment; et lui, s'étant pourvu d'argent en
abondance et de tout ce qui était nécessaire
pour son voyage, s'en alla aussitôt trouver le
roi d'Israël. Le roi qui se vit demander une
chose à quoi le pouvoir des rois ne s'étend
point, ne prit cela que pour un prétexte de
lui faire la guerre; mais Elisée lui manda
qu'il ne fallait que lui envoyer cet homme, et
qu'on verrait bientôt qu'il y avait un Dieu
en Israël. Et quand Naaman fut arrivé, il ne
lui ordonna autre chose que de se baigner
sept fois dans le Jourdain. Celui-ci qui s'é-
tait baigné plusieurs fois dans les eaux de
son pays, qu'il croyait beaucoup meilleures
que celles du Jourdain, et qui n'en avait vu
aucun effet, ne conçut que du mépris et du
dépit contre le prophète; et il ne pensait qu'à
håter son retour, lorsque se laissant vaincre
aux prières de ses gens, il voulut éprouver
ce remède, et guérit en effet parfaitement;
mais il connut en même temps que c'était
bien moins un effet de l'eau que d'une grâce.
(Suivons maintenant l'allégorie de cet événe-

[graphic]

5). Si je ne suis pas belle par la condition de
l'humanité, je le suis du moins par un effet
de la grâce. Si j'ai la noirceur des pécheurs,
j'ai la beauté de la foi et des sacrements.
C'est à la vue de ces habits, que les filles de
Jérusalem s'écrient tout étonnées. : Qui est
donc celle-ci que nous voyons revenir si blan-
che? elle était toute noire; où a-t-elle pris
cette nouvelle blancheur? Les anges mêmes
ont été surpris voyant ressusciter Jésus-
Christ; et ces puissances célestes ne pou-
vaient comprendre que la chair pût être
ainsi élevée dans les cieux. Qui est, disaient-
ils, ce roi de gloire ? Et quand on leur répli
quait: Ouvrez les portes à votre prince, ou-
vrez-vous, portes éternelles, et laissez entrer
ce Roi de gloire (Ps. XXIII, 8 et 10), ils
doutaient encore, et demandaient: Qui est-il
donc, ce Roi de gloire (Ps. LXIII, 1)? C'est
dans le même doute qu'Isaïe fait dire à ces
esprits célestes : Qui est celui qui vient d'E-
dom, avec ses habits rouges de la teinture de
Bosor, et de qui la robe est si éclatante? Et
Jésus-Christ lui-même qui, comme en lit
dans Zacharie, s'était caché sous de pauvres
habits, en faveur de son Eglise; lorsqu'il la
voit briller dans la blancheur et la propreté
des siens, ou qu'il voit une âme qui vient
d'être purifiée et renouvelée par le baptême :
Que vous êtes belle, dit-il à l'une et à l'autre,
que vous êtes belle, mon épouse! vous avez les
yeux comme une colombe (Cant., IV, 1!! II
compare ses yeux à ceux des colombes,
parce que c'est sous la figure d'une colombe
que le Saint-Esprit est descendu du ciel. Et
plus bas : Vos dents ont la blancheur de ces
chèvres qui sortent du lavoir, nouvellement
tondues, chacune suivie de deux petits, et
parmi lesquelles il ne s'en trouve point de slé-
riles. Vos lèvres sont comme un ruban d'écar-
late (Cant., IV, 2; et VI, 5). Ce ne sont pas
là de petites louanges. La comparaison des
chèvres est tout à fait juste, en ce que nous
voyons qu'elles paissent sans danger sur les
collines et en des lieux escarpés, et que
quand on les tond, on les décharge des su-
perfluités qui les incommodent. Car l'Eglise
contient ainsi en soi un grand nombre de
différentes vertus pour le salut des âmes. Il
y en a qui servent à nettoyer par le baptême
ce qui leur est comme un poids qui les charge,
c'est-à-dire les péchés d'autres sont comme
un canal pour porter à Jésus-Christ les mé-
rites de la foi et des bonnes œuvres. Hy en a
qui représentent les souffrances de Notre-
Seigneur. Et tout cela donne à l'Eglise une si
grande beauté, que c'est sur quoi le Verbe,
son époux, lui dit : Vous êtes toute belle, ma
bien-aimée, et il n'y a rien à redire en vous,
puisqu'il ne vous reste pas la moindre tache.
Venez du Liban, mon épouse, venez du Liban ;
vous passerez et repasserez dès que vous aurez
reçu la foi (Cant., IV, 7 et 8). C'est-à-dire
qu'en renonçant au siècle, elle a quitté le
monde pour passer à Jésus-Christ. Que vous
êtes belle, dit-il encore, que vous êtes char-
mante, et qu'il est doux de vous aimer ! Votre
taille ressemble au palmier, vos mamelles à des
grains de raisin (Čant., VII, 6). A quoi l'E-

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c'est là le siége de la sagesse; et l'huile en coule sur la barbe, pour marquer la jeunesse et le renouvellement; et sur la barbe d'Aaron en effet, puisque vous êtes le peuple choisi, l'ordre des prêtres, et la nation sainte et précieuse car l'onction spirituelle de la grâce nous rend tous participants du sacerdoce et du royaume de Dieu. Vous êtes sortis de l'eau ; que cela vous remette en mémoire ce qu'on a lu de l'Evangile, que Notre-Seigneur Jésus lavait les pieds de ses disciples, et que quand il vint à Simon Pierre, celui-ci s'écria: Quoi! Seigneur, vous me laveriez les pieds (Jean, XIII, 6)? Comme il ne voyait pas à quoi tendait ce mystère, il refusait le service de son maître, ne pouvant comprendre qu'une telle humiliation dans le maître ne la modestie du serviteur. Mais blessât pas quand Jésus-Christ lui eut répondu : Si je ne vous lave, vous n'avez rien à espérer avec moi. Ah! Seigneur, dit-il, non seulement les pieds, mais aussi les mains et la tête. Sur quoi Jésus lui répliqua Celui qui est une fois lavé, n'a plus besoin que de se laver les pieds, et il est pur dans tout le reste. Pierre était donc pur, inais il avait encore besoin de se laver la plante des pieds, parce qu'il avait hérité du péché du premier père qui fut supplanté par le serpent, lorsqu'à sa persuasion il désobéit à son Créateur. Il fallait donc laver la plante des pieds pour effacer ce péché héréditaire ; mais pour ceux que nous faisons nous-mêmes, ils nous sont remis par le baptême. Vous devez encore connaître par là, que le mystère même consiste dans la bassesse du service. Car, ajoute Jésus-Christ, si je vous ai lavé les pieds, moi qui suis votre Seigneur et votre maitre; à plus forte raison devez-vous les laver les uns aux autres. Et en effet, si l'auteur même de notre salut nous a voulu racheter par le mérite de son obéissance, que ne doivent point faire de pauvres serviteurs comme nous, pour donner des marques de notre obéissance et de notre humilité?

CHAPITRE VII.

Après tout cela, on vous a donné des ha-
bits blancs pour montrer que vous êtes net-
toyés des ordures du péché et revêtus de la
pureté et de l'innocence, selon ce que dit le
prophète: Vous m'arroserez avec l'hyssope, et
je
serai pur; vous me laverez, et je deviendrai
blanc comme la neige (Ps. L, 9). Il semble, en
effet, qu'il se fasse deux manières de purifi-
cation dans celui qui reçoit le baptême: l'une
selon ia loi, comme lorsque Moïse, avec une
poignée d'hyssope, répandait du sang de
I'oiseau sacrifié (Lév., XIV, 6); l'autre selon
l'Evangile, où nous voyons que Jésus-Christ
parut en des habits blancs comme la neige,
quand il fit voir les glorieuses marques de sa
résurrection. Car celui de qui les péchés sont
remis, devient plus blanc que la neige, selon
ces paroles d'Isaïe: Quand vos péchés seraient
de la couleur des Ethiopiens, je les rendrai
blancs comme la neige (Is., I, 18). C'est après
s'être revêtue de pareils habits au baptême,
que l'Eglise dit dans le Cantique Je suis
#2 oire, mais belle, filles de Jérusalem (Cant., I,

glise répond: Ne vous verrai-je point, mon frère, quand ma mère vous allaitera, afin que je vous embrasse et que je ne sois plus exposée au mépris de personne. Je vous prendrai par la main, je vous mènerai à la maison de ma mère, je vous ferai entrer jusques dans sa chambre (Cant., VIII, 1). Voyez comment, toate transportée des charmes de la grâce, elle ne cherche plus qu'à pénétrer dans les mystères les plus secrets et se consacre entièrement à son époux, et comme elle tâche toujours d'accroître l'ardeur qu'il a pour elle, en exhortant même les filles de Jérusalem d'y contribuer de leurs secours. Ce sont les âmes des fidèles, en faveur desquelles elle souhaite d'enflammer de plus en plus les chastes désirs de son époux. Aussi le Seigneur Jésus, touché de cette grande ardeur de leur charité, de leurs beautés et de leurs grâces, après que leurs taches ont été effacées par le baptême, leur dit à son tour: Mettez-moi comme une enseigne sur votre cœur (Cant., VIII, 6), pour faire voir votre foi dans toute la plénitude de ce mystère. Mettez-moi comme une enseigne à votre bras, afin qu'on y voie éclater vos bonnes œuvres et qu'elles portent le caractère de celui qui vous a faites à son image (Cant., VIII, 7). Toute l'eau du monde n'éteindra pas le feu de votre charité, il n'est point de persécution qui puisse l'affaiblir; les plus grandes eaux ne l'amortiront pas, les fleuves ne l'étoufferont jamais. Et pourquoi ? C'est que vous avez reçu la marque du Saint-Esprit, l'esprit de sagesse et d'intelligence, l'esprit de conseil et de force, l'esprit de science et de piété, l'esprit d'une crainte salutaire du Seigneur (Ps. XI, 2). Conservez précieusement ce trésor. Dieu le Père vous a inarqués de son sceau, et Notre-Seigneur Jésus-Christ vous l'a confirmé en vous mettant les armes du Saint-Esprit dans le cœur, comme parle l'Apôtre (II Cor., V, 5).

CHAPITRE VIII.

Notre troupe de nouveaux baptisés, se trouvant embellie d'ornements si riches et si précieux, marche hardiment vers l'autel de Jésus-Christ, en disant : Je m'approcherai de l'autel de Dieu, du Dieu qui remplit ma jeunesse de délices (Ps. XXIV, 4). Et parce qu'elle s'est dépouillée de ses anciennes erreurs et qu'elle se voit renouvelée et rajeunie comme un aigle, elle se hâte avec une sainte impatience de participer à ce divin banquet, et s'écrie en voyant l'autel préparé : Seigneur, vous m'avez préparé une table (Ps. CII, 5). Et c'est ainsi que David la fait parler : Le Seigneur a soin de ma nourriture, rien ne saurait me manquer (Ps. XXII, 5); il m'a mis dans des pâturages abondants, il m'a élevé le long d'une eau rafraichissante(1). Et plus bas: Quand je marcherais dans l'obscurité de la mort, je ne craindrai aucun mal, puisque vous êtes avec moi, et que votre bâton et votre houlette

(1) S. Ambroise explique le même) saume que S. Crille de Jerusalem a expliqué dans ses catéchèses pour la communion.

me mettent en assurance. Vous m'avez fait as seoir à votre table à la vue de mes persécuteurs, et vous avez répandu des parfums sur ma téte. Oh qu'il y a de douceur et de plaisir dans le breuvage dont vous m'enivrez! Examinons maintenant ce que c'est que cet autel, afin que ceux, qui ne s'attachent qu'aux choses visibles, ne nous viennent point dire : Quoi ! Dieu a fait pleuvoir aux Juifs de la manne et des cailles dans le désert; et c'est ici tout ce qu'il a réservé pour son Eglise bien-aimée; c'est de ceci qu'il est dit, que l'œil n'a jamais vu, que l'oreille n'a point entendu, et que l'esprit de l'homme ne s'est jamais imaginé ce que Dieu a préparé à ceux qui l'aiment (I Cor., II, 9). C'est afin de prévenir de pareilles pensées, que nous allons tâcher de faire voir qu'il n'y a point de comparaison pour l'antiquité entre les sacrements de la Synagogue, et ceux de l'Eglise; et que la manne n'approche pas de l'excellence de ceux-ci. Que les nôtres soient plus anciens, il n'en faut point d'autres preuves que la lecture qu'on vient de faire de la Genèse. La Synagogue n'a tiré son origine que de la loi de Moïse. Mais Abraham était longtemps avant lui. Cet Abraham, retournant victorieux de la bataille, après avoir arraché son neveu des mains de ses ennemis, trouva Melchisédech qui vint audevant de lui, au sacrifice duquel il participa avec beaucoup de respect et de vénération (Gen., XIV, 18). Ce ne fut pas Abraham qui fit le sacrifice, mais ce Melchisédech qu'on nous représente comme un homme sans père et sans mère, sans commencement et sans fin; comme l'image du Fils de Dieu, de qui le sacerdoce est éternel, et qui est le roi de justice et le roi de paix. Le reconnaissez-vous à ces marques? Un homme peut-il être le roi de justice? à peine y en a-t-il même de juste. Un homme peut-il être le roi de paix, si les hommes peuvent à peine souffrir la paix? C'est sans doute celui qui n'a point de mère selon la Divinité, parce qu'il est engendré du Père céleste, et n'est qu'une même substance avec lui; celui qui n'a point de père selon la chair, parce qu'il est né d'une vierge. Il n'a ni fin ni commencement, parce qu'il est lui-même le premier et le dernier, le principe et la fin de toutes choses. Ne regardez donc pas comme un fruit de la terre le sacrement que vous avez reçu, mais comme un présent du ciel, et qui vous est offert par celui-là même qui bénit Abraham, le père de tous les fidèles, dont la vie et la sainteté vous paraissent si merveilleuses; et reconnaissez par là que nos sacrements sont plus anciens que ceux de la Synagogue. Voyons présentement de combien ils les surpassent en dignité. B est certain que c'était une grande merveille que cette pluie de manne el cette nourriture divine que les pères recevaient tous les jours du ciel. Et c'est ce qui l'a fait nommer par David, le pain des anges (Ps. LXXVII, 291. Mais avec tout cela, ceux qui out mangé ce pain des anges, ont tous péri dans le désert, au lieu que ce que vous venez de prendre est le pain de vie, qui est descendu du ciel pour vous donner une vie éternelle. Et quiconque

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