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1643. jours de son ancien état l'air aisé et galant; et le lord Montaigu semble l'avoir bien peint, lorsqu'aux différentes questions de la reine sur le caractère de 'Italien, il lui répondit: C'est tout l'opposé du cardinal de Richelieu.

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On a soupçonné Anne d'Autriche de n'avoir pas été insensible aux qualités aimables de Mazarin. Cette princesse étoit coquette, à prendre ce terme dans l'acception la plus favorable, c'està-dire, qu'elle aimoit à être louée, et à s'apercevoir qu'on ne la regardoit pas sans intérêt, disposition qui malgré la majesté du trône, l'exposa aux traits malins des courtisans. Pour Mazarin, il se conduisit avec la plus grande circonspection. Loin de s'enorgueillir des bonnes grâces de sa souveraine, il flattoi et caressoit tout le monde et afin de détourner les coups de l'envie, qui a contume d'attaquer les nouveaux favoris, il disoit qu'il ne restoit dans le ministère que jusqu'à ce qu'il eût fait la paix, et qu'après cela il se retireroit à Rome. Cette espèce d'engagement trompa les jaloux. Ils ne prirent pas garde aux progrès que le cardinal faisoit auprès de la reine; et l'évêque de Beauvais, amusé par la confidence lui faisoit la régente, qu'elle ne gardoit le prélat italien que

que

Retour de madame de

de Château

neuf.

Brienne,

t. 2, p. 229.

Mém. de

Mém de la

pour s'instruire des affaires, et qu'elle 1643. le renverroit ensuite, vécut avec lui comme avec un homme dont le crédit passager ne méritoit pas de l'inquiéter. Ce qui devoit décider aux yeux du public de la prépondérance des partis, Chevreuse et c'étoit l'accueil que feroit la reine à la duchesse de Chevreuse et au marquis de Châteauneuf; personnages tout autrement considérables que ceux qui la Chastre, avoient jusqu'alors figuré à la tête des page 340. importans. L'un renfermé dans le châ- Rochefouc., teau d'Angoulême, l'autre errante dans page 14, les Pays-Bas et en Espagne, avoient fait une longue pénitence de s'être attaqués à Richelieu, et de s'être proposé de le rendre le jouet de leurs artifices et de leurs intrigues. Soit que Louis XIII fût entré dans la passion de son ministre, soit qu'il eût reconnu par luimême, dans ces deux personnes, des qualités dangereuses dont il craignoit les influences sur son épouse, il recom manda expressément, dans sa déclaration sur la régence, de ne les jamais rappeler à la Cour. Cette dernière volonté du défunt fut respectée comme les autres. A peine avoit - il les yeux fermés, que les deux exilés demandèrent leur rappel. La reine, qui croyoit qu'ils avoient été persécutés pour elle,

1643.

l'accorda; mais pendant leur voyage, il s'opéra une révolution imprévue dans l'esprit et dans le cœur d'Anne d'Autriche.

Les hommes qui craignoient la capacité du marquis, les femmes qui redoutoient les charmes de la duchesse, se réunirent pour les décrier. Châteauneuf trouva dans la princesse de Condé, que la reine aimoit et estimoit, une ennemie puissante, qui agit directement contre lui. Elle ne pouvoit lui pardonner d'avoir présidé à la condamnation du duc de Montmorenci son frère

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lui qui auroit pu s'en excuser, puisqu'il étoit dans les ordres sacrés, et qui le devoit, parce qu'il avoit été page dans sa maison. On remontra à la régente que ces personnes se flattoient de conduire le royaume ; qu'elles promettoient des grâces, assuroient de leur protection, se vantoient de distribuer seules les emplois et les dignités, et de la gouverner elle-même; que d'ailleurs Anne se trompoit sur la cause de leur ancienne disgrace; que Châteauneuf et la duchesse de Chevreuse n'avoient pas été punis de leur attachement pour elle, mais d'une intrigue galante entre eux. Ces observations parurent plausibles à la régente, et son amour-pro

pre piqué fit taire l'inclination, Sous prétexte de ne vouloir pas contredire ouvertement les dernières volontés de son mari, elle écrivit à Châteauneuf, qui s'en revenoit d'un air triomphant à la Cour, de rester jusqu'à nouvel ordre dans sa maison de Mont-Rouge, près de Paris; et quant à la duchesse de Chevreuse, Anne d'Autriche, après l'avoir reçue publiquement comme une amie, lui dit en particulier, que, pour les mêmes raisons qui l'empêchoient de voir pendant quelque temps Châteauneuf, elle lui conseilloit de se retirer aussi à la campagne. La duchesse trèsétonnée combattit ces raisons, pria, se rabattit à des conditions, et obtint enfin la permission, sinon de rester toujours à la Cour, du moins d'y paroître quelquefois. La régente, en même temps, pour ne pas mécontenter tout-à-fait le parti, donna à l'évêque de Beauvais la nomination de France au cardinalat.

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1643.

fous., p. 20.

On ne sait si ce fut afin de gagner Leurs préla duchesse de Chevreuse, ou afin de tentions, la mettre dans son tort, qne Mazarin La Rochefit auprès d'elle une démarche, sans doute concertée avec la reine. Il alla la voir le lendemain de son arrivée, et après les complimens qui peuvent flatter une femme pleine de prétentions à la

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gloire de l'esprit et à celle de la beauté, il lui offrit son crédit et sa bourse sa bourse, sous le prétexte honnête qu'arrivant d'un long voyage, elle devoit être dénuée d'argent, et que le paiement des assignations sur le trésor royal étant quelquefois lent, elle se trouveroit peut-être embarassée. La duchesse le remercia absolument pour l'argent. Quant aux offres de service, elle les reçut d'un air badin, comme une personne extrêmement piquée de ce qu'on lui faisoit entrevoir qu'elle pouvoit avoir besoin d'être protégée auprès de la reine. Cependant elle promit de mettre la bonne volonté et le pouvoir du cardinal à l'épreuve ; et cette épreuve, elle ne l'imagina pas médiocre.

Pleine de dépit contre la maison de Richelieu, ses alliés et ses amis, elle auroit voulu les ruiner, les anéantir. Elle demanda successivement, mais coup sur coup, qu'on reprît au maréchal de la Meilleraie le gouvernement de Bretagne, dont il avoit été pourvu quand Louis XIII, après l'affaire de Chalais l'ôta au duc de Vendôme. Elle vouloit qu'on le restituât à celuici; qu'on retirat l'amirauté à la maison de Brezé qui la possédoit, et qu'on en gratifiât le duc de Beaufort; enfin

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